La participation des peuples autochtones aux travaux de l’ONU est essentielle pour faire progresser leurs droits
24 septembre 2024
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Les droits des peuples autochtones ont beaucoup progressé, notamment en ce qui concerne la reconnaissance de leur droit à l’autodétermination. Toutefois, les experts signalent qu’il existe encore des obstacles à une véritable égalité en matière de participation.
« Nous devons être vigilants et être en mesure de faire entendre notre voix au plus haut niveau de l’ONU pour nous assurer que nos droits sont protégés et que les peuples autochtones peuvent survivre dans la durée », a déclaré Kenneth Atsenhaienton Deer, journaliste primé, éducateur et militant des droits des peuples autochtones connu dans le monde entier.
Kenneth Atsenhaienton Deer est membre du clan de l’Ours de Kanienʼkehá꞉ka, la nation Mohawk, dans le territoire de Kahnawake. La nation Mohawk est l’une des six nations de la Confédération iroquoise ou Haudenosaunee. Le nom haudenosaunee « Atsenhaienton » signifie « le feu brûle encore ».
Kenneth Atsenhaienton Deer et d’autres militants autochtones participeront au dialogue interactif organisé avec le Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones et le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones à l’occasion de la 57e session du Conseil des droits de l’homme à Genève.
L’un des principaux obstacles à surmonter pour garantir la pleine participation des peuples autochtones aux activités de l’ONU est de déterminer qui est autorisé à participer. Les règles actuelles des Nations Unies stipulent que seuls les États Membres et les ONG dotées d’un statut consultatif peuvent interagir avec les Nations Unies. Les interactions comprennent l’envoi de questions, la participation à des sessions, voire l’organisation de manifestations parallèles.
« Il est donc très difficile pour les peuples autochtones de jouer un rôle dans ce domaine, car nous ne sommes pas des ONG », a expliqué M. Deer.
L’expression « peuples autochtones » ne fait l’objet d’aucune définition faisant autorité en droit international. De nombreux territoires étaient habités par des peuples autochtones avant l’arrivée d’autres personnes. Ces peuples ont bien souvent conservé leurs caractéristiques culturelles et politiques jusqu’à ce jour, notamment des structures politiques et juridiques autonomes.
Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) a récemment publié un rapport faisant le point sur la participation des peuples autochtones aux travaux de l’Organisation des Nations Unies, qui présente les procédures existantes permettant de promouvoir la participation des derniers, ainsi que les lacunes et bonnes pratiques dans ce domaine.
« Ce rapport recommande que le Conseil des droits de l’homme et d’autres organismes des Nations Unies créent des structures pour soutenir la participation des peuples autochtones sans nécessiter le "statut consultatif auprès du Conseil économique et social" », a indiqué Hernán Vales, chef de la Section des peuples autochtones et des minorités du HCDH.
M. Vales a souligné que la voix des peuples autochtones est essentielle pour faire progresser leurs droits humains et leur participation au processus décisionnel international.
« L’inclusion des peuples autochtones permet à ces derniers de défendre leurs droits, d’influencer les politiques qui les concernent et de contribuer à rendre les États responsables du respect des normes internationales en matière de droits humains », a-t-il déclaré.
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Il est important de veiller à ce que les États, les gouvernements et les entreprises respectent le droit international des droits de l’homme, ou de simplement leur rappeler qu’il existe et que nous avons des droits.
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Kenneth Atsenhaienton Deer, militant pour les droits des peuples autochtones
Certaines mesures ont été prises pour garantir la participation des peuples autochtones. Pour la première fois dans l’histoire du Conseil des droits de l’homme, les peuples autochtones pourront participer sans avoir besoin d’être organisés en tant qu’ONG.
Devenir des peuples
Comme l’a expliqué Kenneth Atsenhaienton Deer, dans les années 1970, les peuples autochtones se demandaient quels étaient leurs droits dans le nouveau cadre international des droits de l’homme. Parmi leurs préoccupations figuraient la protection de leurs langues et de leurs territoires, ainsi que le droit à l’autodétermination.
« Si l’on regarde la manière dont les instruments relatifs aux droits de l’homme ont été rédigés, conçus et mis en œuvre, on s’aperçoit qu’ils n’ont pas tenu compte des peuples autochtones », a énoncé M. Deer.
Par exemple, l’article 1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques stipule que « tous les peuples ont le droit de disposer d’eux-mêmes » et donc de déterminer librement leur statut politique et d’assurer librement leur développement économique, social et culturel. Cependant, les autochtones n’étaient pas considérés comme des « peuples ».
« [À l’ONU], nous avons été informés que le droit international ne s’appliquait pas à nous, ce qui était tout simplement stupéfiant », a expliqué M. Deer. « [On nous a] dit que nous étions des populations, des communautés, des tribus et que les Nations Unies ne nous reconnaissaient pas comme des "peuples" ayant le droit à l’autodétermination. »
« Les auteurs du cadre original des droits humains n’ont pas pris en compte le statut, les droits et le rôle distincts des peuples autochtones, ni notre contexte culturel spécifique », a ajouté Dalee Sambo Dorough, Inupiaq de l’Alaska, chercheuse principale et conseillère spéciale sur les peuples autochtones de l’Arctique à l’Université de l’Alaska à Anchorage.
Dalee Sambo Dorough est membre du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones et ancienne présidente de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones. Elle a également contribué à la rédaction de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones.
Pour elle, ce cadre original des droits humains reposait sur une vision du monde venant d’Europe occidentale, empreinte de notions de supériorité culturelle et raciale, et entachée par le colonialisme qui l’accompagnait.
« Les droits humains imprègnent tout. Nous sommes tous des êtres humains Dans le cas des peuples autochtones, les droits humains sont liés à nos liens collectifs, notamment le droit à l’autodétermination et nos droits aux terres, aux territoires et aux ressources », a-t-elle déclaré.
En 2007, l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones a permis de mieux prendre en compte le contexte culturel distinct des peuples autochtones. La Déclaration affirme leur droit à l’autodétermination, conformément au droit international et au cadre international des droits humains.
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Toutes les luttes, toutes les victoires et tous les progrès réalisés par les peuples autochtones ont contribué à alléger le fardeau de la prochaine génération.
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Dalee Sambo Dorough, membre du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones
Pour Dalee Sambo Dorough, si le cadre et les outils relatifs aux droits humains sont enfin en place, il reste un défi crucial à relever.
« Comment exercer ces droits fondamentaux importants ? Les États Membres des Nations Unies et tous les autres, même notre propre peuple, doivent comprendre ce que signifie l’exercice et la jouissance du droit à l’autodétermination au sein et en dehors de nos propres communautés », a-t-elle déclaré.
En outre, les États Membres n’ont pas tous mis en œuvre la Déclaration. Selon Kenneth Atsenhaienton Deer, cela est dû entre autres au fait de vouloir conserver le contrôle territorial, à la volonté d’avoir un accès illimité aux ressources naturelles et au racisme qui persiste à l’égard des peuples autochtones et hérité de la colonisation.
Le rapport contient plusieurs recommandations à l’intention des États Membres afin d’accroître la participation, notamment à travers la mise en place d’un mécanisme d’accréditation pour la participation des peuples autochtones aux Nations Unies, l’augmentation du financement de leur participation aux Nations Unies, la prévention de toute forme d’intimidation et de représailles, et l’amélioration des procédures de visa.
« Pour surmonter les difficultés, il faut créer un espace intellectuel et politique qui permette aux peuples autochtones d’entrer et de réfléchir à la manière dont nos droits, nos droits humains collectifs, doivent être pris en compte par tous les systèmes », a déclaré Dalee Sambo Dorough.