« Nos voix sont entendues »
30 septembre 2022
« Quand j’étais enfant, je croyais que l’ONU était une sorte de planète inaccessible », explique Cristhian González Gómez. « Mais maintenant que je travaille avec elle, les peuples autochtones de mon pays prennent part aux négociations, et nos voix sont entendues. »
Cristhian González Gómez est un dirigeant autochtone originaire du territoire Boruca, au sud du Costa Rica. Il travaille avec l’ONU depuis 2018, principalement dans le domaine de la protection et la promotion des droits des peuples autochtones.
Il existe huit communautés autochtones au Costa Rica. Elles comptent environ 114 000 personnes, soit 2,4 % de la population. Malgré la reconnaissance juridique du droit des peuples autochtones à leurs terres et territoires, ces derniers ne bénéficient dans la pratique que d’une protection limitée pour exercer leurs droits. Certaines communautés autochtones font également l’objet d’attaques en raison de conflits concernant leurs terres et plusieurs dirigeants autochtones ont reçu des menaces dans le sud du pays.
Dans un contexte marqué par la reprise des terres et l’intensification des conflits, les menaces proférées à l’encontre des dirigeants des peuples autochtones et des défenseurs de leurs droits sont constantes et généralisées. C’est à la suite des meurtres brutaux et choquants de Sergio Rojas en 2019 et Jherry Rivera en 2020, deux éminents défenseurs des droits des peuples autochtones, que M. González Gómez a décidé de poursuivre son combat.
« La plupart des dirigeants autochtones, les femmes et les enfants en particulier, ont à un moment donné été effrayés et inquiets face à ces menaces », explique-t-il. « Pourtant, nous n’avons pas le choix, nous devons nous relever et avancer. »
Protéger les droits des peuples autochtones
Une initiative du bureau régional du HCDH pour l’Amérique centrale – en partenariat avec le bureau du coordinateur résident et d’autres organismes des Nations Unies – vise à donner la priorité aux droits des peuples autochtones. Elle propose une stratégie de prévention globale, qui analyse les risques auxquels sont confrontés les peuples autochtones, et s’inscrit dans le cadre de l’initiative Surge du HCDH, qui a été lancée en 2019 pour lutter contre les inégalités et promouvoir les droits économiques, sociaux et culturels.
Cette initiative, qui porte principalement sur l’accès à la terre dans quatre territoires du sud du pays touchés par ces problèmes, rassemble des dirigeants autochtones, dont des femmes, et des autorités locales et nationales.
« Cela permet d’établir un dialogue entre les peuples autochtones, dont les dirigeantes autochtones, et l’État », explique Ana Maria Upegui Cuartas, conseillère pour les droits de l’homme du HCDH. « Nous avons abordé les questions relatives aux droits des peuples autochtones avec les plus hautes instances du pays, dont le pouvoir judiciaire, mis en œuvre le projet relatif à l’EPU, et soutenu le pouvoir judiciaire dans la cocréation de la politique institutionnelle en matière d’accès à la justice pour les peuples autochtones, fondée sur les normes internationales des droits de l’homme. »
Cette question retient également l’attention de la Commission interaméricaine des droits de l’homme, affirme-t-elle, en raison des mesures de précaution prises en 2015 pour protéger les peuples terraba et salitre. Cela a permis de mettre en avant les droits des peuples autochtones, non seulement au Costa Rica, mais aussi dans toute la région des Amériques.
Pour M. González Gómez, les répercussions de cette initiative ont été considérables. Les peuples et communautés autochtones sont enfin entendus, et les organismes des Nations Unies et le Gouvernement apportent des changements positifs pour répondre à leurs besoins.
En décembre 2019, le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones des Nations Unies, Francisco Cali Tzay, s’est rendu dans le pays pour évaluer la situation et apporter des conseils quant aux principales questions et préoccupations à ce sujet.
« L’établissement des responsabilités s’améliore », indique-t-il. « Les responsables gouvernementaux écoutent nos recommandations et déploient des efforts plus concertés pour visiter nos communautés. L’espace de parole s’est ouvert et nous profitons de ces visites pour revendiquer nos droits. »
Si Cristhian González Gómez se réjouit des progrès accomplis dans le cadre de l’initiative, il reconnaît qu’il reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour permettre aux peuples autochtones du Costa Rica d’atteindre l’égalité.
Des mesures en faveur de l’égalité
Le Gouvernement doit poursuivre son dialogue avec les peuples autochtones, explique-t-il, et continuer à placer les droits des peuples autochtones au cœur de l’action politique et des changements législatifs. Il encourage également le recrutement de personnes autochtones dans les institutions nationales et internationales, afin de garantir une participation significative et concrète des peuples autochtones aux décisions qui les concernent.
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Les jeunes autochtones ont hérité de la force et de l’espoir qu’avaient nos grands-parents. Nous devons continuer à protéger nos droits et ne pas abandonner alors que le combat se poursuit.
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Il est aussi important de mieux mettre en avant le rôle des jeunes et des femmes.
« Nous serons en bien meilleure posture lorsque les jeunes auront le sentiment de disposer des outils nécessaires pour défendre leurs propres droits et ceux de leurs communautés », indique M. González Gómez. « Les femmes autochtones ont également besoin d’un espace spécifique pour exprimer leurs besoins et leurs inquiétudes, et pour faire entendre leur voix dans la sphère politique. »
« C’est ainsi que j’envisage un avenir empreint d’égalité. »