« L’impunité endémique » affecte la liberté de manifester
18 juillet 2023
« Des centaines de militants et de manifestants ont été détenus arbitrairement, torturés, soumis à des violences sexuelles et fondées sur le genre, victimes de disparition forcée ou tués », a déclaré Clément Nyaletsossi Voule, Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association. « Les victimes obtiennent rarement justice, tandis que les auteurs de ces actes échappent à toute poursuite et sont autorisés à continuer librement de réprimer ces droits. »
Dans son dernier rapport adressé au Conseil des droits de l’homme, M. Voule a souligné la répression accrue et les graves violations des droits de l’homme contre des manifestants et des militants dans le monde entier, et a appelé à des mesures urgentes et solides en matière de responsabilité pour rompre le cycle.
Selon M. Voule, les victimes de violations des droits de l’homme n’ont pas obtenu justice, tandis que les auteurs de ces violations ont bénéficié d’une certaine impunité pour leurs crimes, ce qui a contribué à la répétition et à l’escalade de ces violations.
« L’impunité endémique pour les violations graves des droits de l’homme a engendré des cycles de répression. Nous constatons régulièrement que lorsque l’espace civique est menacé, l’autoritarisme et les conflits s’ensuivent », a-t-il déclaré.
Dans son rapport, M. Voule a révélé que des centaines de personnes ont subi des blessures et des handicaps qui ont changé leur vie à la suite de l’utilisation abusive ou impropre d’« armes à létalité réduite » lors de manifestations, et que les victimes ont souvent été confrontées à des obstacles pour obtenir réparation. Elles ont notamment été confrontées à l’absence généralisée de volonté politique de la part des États de faire en sorte que les auteurs d’abus répondent de leurs actes, à une politique de déni et d’utilisation abusive de lois ambiguës et restrictives pour justifier un recours excessif à la force, à des actes visant à punir, criminaliser et détenir les victimes, et au fait que certains États n’ont pas respecté leur obligation de rendre des comptes et se sont soustraits à leurs responsabilités en sapant l’indépendance des systèmes nationaux de justice pénale.
M. Voule a souligné que les États devraient se concentrer sur les enquêtes, les poursuites et les condamnations plutôt que de s’en prendre aux activistes et aux manifestants. « Garantir le principe de responsabilité face aux violations commises contre des personnes exerçant leur droit à la liberté de réunion pacifique et d’association fait partie intégrante du devoir des États de respecter, de protéger et de permettre l’exercice de ces droits », a-t-il déclaré.
L’expert a en outre exhorté les États à adopter une approche globale, centrée sur les victimes et sensible aux questions de genre en matière de responsabilité, indiquant qu’il leur incombe de répondre aux besoins des victimes, d’accorder des réparations et de veiller à ce que les violations des droits de l’homme ne se reproduisent pas, tout en précisant que les réparations ne devraient pas être utilisées pour échapper à la responsabilité, mais devraient compléter les poursuites judiciaires.
M. Voule a également demandé que le rôle central des victimes, des survivants, de leurs représentants et de la société civile soit reconnu et garanti par la conception et la mise en œuvre de processus de responsabilité nationaux et internationaux.
Tout en reconnaissant le rôle primordial des États dans l’établissement des responsabilités des auteurs de violations, l’expert a également appelé la communauté internationale, en particulier le Conseil des droits de l’homme, à intervenir lorsque les États ne garantissent pas le principe de responsabilité pour les victimes de violations graves des droits à la liberté de réunion pacifique et d’association.
« La communauté internationale doit soutenir les efforts en matière d’établissement des responsabilités, notamment en mandatant des commissions d’enquête internationales pour préparer et soumettre les dossiers sur des auteurs présumés à des mécanismes de justice nationaux et internationaux », a-t-il déclaré. « Les États doivent faire pleinement usage de la compétence universelle dans de tels cas. »