Le passé des Roms et le travail de mémoire : « nous existons, respectez notre humanité »
08 avril 2024
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« Vous devez raconter cette histoire. Rendez-la vivante, rendez-la réelle », affirme Elisa Costa. « Travailler et contribuer à l’élaboration de la Carte de la mémoire des Roms dans les Amériques est une façon pour nous de dire : nous existons, respectez notre humanité. »
Elisa Costa est la présidente de l’association internationale Mayle Sara Kali, une organisation de la société civile qui se consacre à la promotion de l’histoire et des droits humains du peuple rom du Brésil. Elle a pris la parole lors de la Journée internationale des Roms, à l’occasion de laquelle une coalition de partenaires a lancé le projet de la Carte de la mémoire des Roms dans les Amériques.
Coordonnée par le HCDH, la Carte de la mémoire des Roms dans les Amériques est une initiative participative qui a pour but de reconnaître et mettre à l’honneur les sites de mémoire de la communauté rom dans les Amériques, des États-Unis à l’Argentine. Ce projet s’appuie sur des efforts visant à renforcer les droits et l’intégration des Roms, à faire progresser la mémoire publique du peuple et de l’histoire roms et à lutter contre l’antitsiganisme, la forme spécifique de racisme à laquelle sont confrontés les Roms.
Aline Miklos fait partie de la communauté rom du Brésil. Cette fonctionnaire du HCDH a également été coordinatrice de projet pour la Carte de la mémoire des Roms dans les Amériques. Selon elle, cette initiative a pour objectif de faire progresser la reconnaissance des violations passées des droits humains des Roms et leur impact actuel dans les Amériques. Elle estime que ce travail de mémoire est crucial pour lutter contre l’antitsiganisme.
On a tenté à plusieurs reprises d’effacer la mémoire du peuple rom au cours de l’histoire », déclare-t-elle. « Notre mémoire fait partie de notre identité, de notre vision du monde, de notre existence. Nous devons pouvoir exercer notre droit à la mémoire. Nous avons aussi le droit de connaître la vérité sur toutes les persécutions et les violations des droits humains dont le peuple rom a souffert dans le passé. Nous pourrons ainsi exiger un avenir plus juste et plus équitable pour tous », affirme-t-elle.
Cette première version de la carte comprend des sites et des informations sur 29 lieux de mémoire à travers Amériques, dont l’ancien quartier rom de Maspeth dans le Queens, à New York, qui a été démoli entre 1938 et 1939, et la tombe d’une Rom hongroise dans le cimetière général de Quetzaltenango, au Guatemala, qui compte chaque année des milliers de visiteurs en raison des mythes qui l’entourent. Cette carte est disponible en anglais, espagnol et portugais.
Selon Claude Cahn, spécialiste des droits humains au sein du HCDH ayant également travaillé sur cette initiative, le travail de mémoire joue un rôle important dans la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition.
Les Roms et les communautés apparentées souffrent depuis longtemps d’un racisme et d’une marginalisation profondément enracinés dans le monde entier. Des violations des droits humains des Roms sont signalées dans presque tous les domaines de la vie : l’éducation, la santé, le logement, le travail, l’accès aux services et d’autres aspects. Les quelques recherches existantes montrent que les Roms ont été victimes de discrimination depuis leur arrivée dans les Amériques dès le début du XVIe siècle et que le racisme se poursuit encore aujourd’hui.
Pour les défenseurs des droits humains des Roms dans les Amériques, la promotion des données et la collecte de témoignages et d’archives documentaires sur les violations des droits humains constituent un premier pas vers la reconstitution de la vérité et l’appel à la justice.
« On ne peut pas lutter contre l’oubli, la négligence, l’ignorance, l’antitsiganisme et la romaphobie du jour au lendemain », fait remarquer Elisa Costa.
La Carte de la mémoire des Roms dans les Amériques est disponible sur les sites Web du Center for Global Engagement de l’Université Gonzaga (version anglaise), de l’Institut des sciences anthropologiques de l’Université de Buenos Aires (version espagnole) et de l’Associação International Mayle Sara Kali (version portugaise).
Un nouvel appel à contributions a été lancé le 8 avril dans le but de recevoir des ressources permettant l’élaboration d’une nouvelle version de la carte. L’échéance a été fixée au 15 juin 2024. Deux organes d’évaluation indépendants, composés de défenseurs des droits humains des Roms des Amériques et d’institutions universitaires, examineront les informations transmises.
Pour de plus amples informations concernant les efforts du HCDH concernant les droits des Roms, nous vous invitons à consulter notre page Web consacrée à l’inclusion des Roms.