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Communiqués de presse Conseil des droits de l’homme

Le Conseil des droits de l'homme se penche sur la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée

17 Mars 2014

MATIN

17 mars 2014

Il examine le rapport de la Commission d'enquête chargée de la question

Le Conseil des droits de l'homme s'est penché ce matin sur la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée en examinant le rapport de la Commission d'enquête internationale sur ce pays, dont le Président, M. Michael Kirby, a présenté le rapport.

M. Kirby a déclaré que la Commission d'enquête avait constaté des violations graves, systématiques et généralisées des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée, ainsi qu'un ensemble de crimes contre l'humanité, commis notamment dans des prisons politiques et des camps de détention. Ces crimes sont la conséquence de politiques décidées au plus haut niveau de l'État, dont l'impunité, la nature, l'ampleur et la durée révèlent un État totalitaire qui n'a pas d'égal dans le monde, a dit M. Kirby. Dans ces circonstances, il a appelé la communauté internationale à agir face à ce «fléau honteux» et face au refus de coopération des autorités. Pour le Président de la Commission d'enquête, «il faut remédier au fléau des violations des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée comme on a combattu le nazisme, le régime d'apartheid et les Khmers rouges».

La délégation de la République populaire démocratique de Corée a fermement condamné et rejeté ce qu'elle a qualifié de «rapport litigieux» présenté par une commission d'enquête fabriquée par des forces hostiles, qui ne cite comme témoignages que des mensonges et des inventions. Elle a relevé que ce document est présenté au moment même où des forces hostiles opèrent des manœuvres militaires dans la péninsule de Corée.

Dans le débat interactif qui a suivi, la majorité des délégations a déploré et condamné le manque de coopération des autorités de la République populaire démocratique de Corée. Devant ce refus de coopération, elles ont estimé qu'il fallait renforcer la pression sur ce pays, notamment en renvoyant la situation dans ce pays à la Cour pénale internationale ou en créant un mécanisme de suivi des recommandations de la Commission d'enquête. Mais pour l'heure, l'urgence consiste à ouvrir un accès humanitaire et à fermer les camps de prisonniers politiques.

Un autre groupe de délégations ont en revanche exprimé son opposition aux mandats par pays en raison de la politisation et de la manipulation qui, selon elles, y sont souvent à l'œuvre. Pour ces pays, le seul mécanisme pertinent des Nations Unies en matière d'examen des droits de l'homme dans tous les pays est l'Examen périodique universel, auquel par ailleurs la République populaire démocratique de Corée prend part. Plutôt que d'exercer des pressions, il faudrait donc au contraire entretenir un dialogue avec les autorités.

Les délégations suivantes ont pris part au débat interactif: Albanie, Argentine, Australie, Belarus, Botswana, Chili, Chine, Cuba, Espagne, Estonie, États-Unis, Ex-République yougoslave de Macédoine, France, Irlande, Japon, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, Mexique, Monténégro, Myanmar, Norvège, Canada, Nouvelle-Zélande, Pologne, Portugal, République arabe syrienne, République de Corée, République démocratique populaire Lao, République islamique d'Iran, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Slovaquie, Suisse, Thaïlande, Union européenne, Union européenne, Uruguay, Venezuela, Viet Nam, Zimbabwe. Plusieurs organisations non gouvernementales sont également intervenues*. Human Rights Watch, Service international pour les droits de l'homme, Jubilee Campaign, United Nations Watch, Amnesty Internationalet la Commission internationale de juristes et People for Successful Corean Reunification.

Le Conseil examinera cet après-midi la situation des droits de l'homme en République islamique d'Iran dans le cadre d'un débat interactif avec le Rapporteur spécial chargé de la situation des droits de l'homme dans ce pays. Il se penchera en fin de journée sur la situation au Myanmar.

Examen de la situation en République populaire démocratique de Corée

Présentation du rapport de la Commission d'enquête

M. MICHAEL KIRBY, Président de la Commission d'enquête sur la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée, a déclaré que la Commission d'enquête avait constaté des violations des droits de l'homme graves, systématiques et généralisées en République populaire démocratique de Corée, ainsi qu'un ensemble troublant de crimes contre l'humanité. Ces crimes sont commis contre des personnes détenues dans des camps pénitentiaires, notamment des prisons politiques, contre des populations affamées, contre ceux qui tentent de fuir le pays, y compris ceux qui sont refoulés de Chine.

Ces crimes sont la conséquence de politiques décidées au plus haut niveau de l'État, a poursuivi le Président de la Commission. Ils ont été commis et continuent d'être commis car les conditions favorisant l'impunité restent en place dans le pays. La nature, l'ampleur et la durée des atrocités révèlent un État totalitaire qui n'a pas d'égal dans le monde. La communauté internationale doit agir maintenant face à ce «fléau honteux» qui perdure, a-t-il plaidé.

M. Kirby a déploré que la République populaire démocratique de Corée ait estimé que la Commission constitue «une magouille politique», un pantin qui politise les droits de l'homme pour ternir l'image du pays et augmenter la pression pour que son système social s'effondre. La Commission a travaillé objectivement et invite à prendre connaissance des nombreux témoignages de torture et de violences sexuelles, de persécutions et de déplacements forcés, de morts par famine, entre autres. La liberté de pensée et la liberté de conscience sont des droits que l'on considère comme acquis à travers le monde, mais qui sont inexistants en République populaire démocratique de Corée. Tous les efforts de dialogue et de coopération de la Commission ont été rejetés par les autorités, a encore regretté M. Kirby, de même que les demandes de la Commission pour que le gouvernement réponde aux désirs de la population et mette un terme aux violations massives des droits de l'homme.

Le Président de la Commission a de nouveau appelé le Gouvernement à démontrer sa bonne foi en libérant les prisonniers politiques et en permettant aux observateurs indépendants de vérifier qu'aucun détenu ne souffre de mauvais traitements. M. Kirby a en outre appelé tous les pays, y compris la Chine, à respecter le principe du non-refoulement et à ne pas renvoyer des personnes vers la République populaire démocratique de Corée. Enfin, le Président a noté que la Commission a achevé son travail en respectant des délais courts et sans le budget nécessaire.

En conclusion, le Président de la Commission a souligné que son rapport informe le monde au sujet de la situation en République populaire démocratique de Corée. «Il faut remédier au fléau des violations des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée comme on a combattu le nazisme, le régime d'apartheid et les Khmers rouges», a-t-il conclu.

Le rapport de la Commission d'enquête sur les droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée (A/HRC/25/63) présente les principales conclusions et recommandations de la Commission créée par la résolution 22/13 du Conseil des droits de l'homme du 21 mars 2013. La Commission d'enquête rappelle la non-coopération du Gouvernement à son égard, qui ne l'a jamais autorisée à entrer sur son territoire, et explique comment elle a travaillé, notamment dans le cadre d'audiences publiques transparentes.

Dans ses conclusions, la Commission fait état de «violations systématiques, généralisées et flagrantes des droits de l'homme» commises par la République populaire démocratique de Corée, ses institutions et ses représentants, qui constituent «dans bien des cas, des crimes contre l'humanité». Ces violations, «loin d'être de simples dérives de l'État, sont des composantes essentielles d'un système politique» qui révèle «un État unique en son genre dans le monde contemporain», qui «présente en de nombreux points les caractéristiques d'un État totalitaire». La Commission fait d'état «d'immenses rouages politiques et sécuritaires» qui utilisent stratégiquement la surveillance, la contrainte, la peur et la répression pour empêcher l'expression de toute contestation, elle mentionne des exécutions publiques et des disparitions forcées, ainsi que, au plan international, l'enlèvement et la disparition forcée de personnes d'autres pays, pratiques «uniques par leur intensité, leur dimension et leur nature». Face aux changements rapides du monde qui entoure ce pays, «ses autorités se livrent à des violations flagrantes des droits de l'homme de façon à réprimer les influences subversives de l'étranger», tout en empêchant par la violence leurs ressortissants de quitter le pays. La Commission cite «des détentions arbitraires, des exécutions sommaires, des avortements forcés et d'autres formes de violence sexuelle». Les auteurs de ces crimes contre l'humanité bénéficient de l'impunité.

La Commission constate par ailleurs que «le fait que la République populaire démocratique de Corée, en tant qu'État Membre de l'Organisation des Nations Unies, mette en œuvre, depuis des décennies, des politiques donnant lieu à des crimes qui heurtent la conscience humaine, met en doute l'adéquation de la réponse apportée par la communauté internationale». Elle invite la communauté internationale à «assumer la responsabilité qui lui incombe de protéger le peuple de la République populaire démocratique de Corée des crimes contre l'humanité, le gouvernement de Pyongyang ayant manifestement échoué dans ce domaine». Cette responsabilité doit notamment être prise à la lumière du rôle qu'a joué la communauté internationale − et plus particulièrement les grandes puissances − dans la division de la péninsule coréenne, et parce que les problèmes hérités de la guerre de Corée persistent.

La Commission présente de nombreuses recommandations, y compris pour de «profondes réformes politiques et institutionnelles», ce qui inclut entre autres une réforme profonde de l'appareil de sécurité, la reconnaissance de violations des droits de l'homme, le démantèlement des camps de prisonniers politiques et leur libération, l'abolition et la criminalisation de la torture, la suppression des discriminations et des poursuites contre les principaux auteurs des exactions les plus graves.

La Commission adresse également des recommandations aux États et à la communauté internationale. Elle souhaite notamment que le Conseil de sécurité des Nations Unies saisisse la Cour pénale internationale de la situation en République populaire démocratique de Corée et adopte des sanctions ciblées contre ceux qui semblent porter la plus grande part de responsabilité dans les crimes contre l'humanité. En revanche, «au vu de la détresse sociale et économique dans laquelle est plongée la population», la Commission n'est pas favorable aux sanctions imposées par le Conseil de sécurité, ou adoptées sur un plan bilatéral, qui visent la population ou l'économie en général. La Commission préconise également la mise en place par le Haut-Commissaire aux droits de l'homme, appuyé par le Conseil, une «structure permettant de contribuer à l'établissement des responsabilités liées aux violations des droits de l'homme», qui devrait avoir une présence sur le terrain.

Selon une note du Secrétariat (A/HRC/25/62), le rapport annuel du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans la République populaire démocratique de Corée sera présenté au Conseil à sa session de juin 2014 et inclura le suivi de la question et l'évolution de la situation.
Pays concerné

La République populaire démocratique de Corée a fermement condamné et rejeté ce «rapport litigieux». Personne n'ignore que cette commission d'enquête a été fabriquée par des forces hostiles, en particulier les États-Unis, pour détruire le modèle socialiste de la République populaire démocratique de Corée, a accusé la délégation. Pour elle, les témoignages contenus dans ce rapport ne sont que des mensonges et des inventions qui ne sauraient convaincre qui que ce soit. L'Histoire montre que de tels rapports, rédigés sur la base de mensonges, ont servi de prétexte à des guerres agressives au Moyen-Orient et dans les Balkans. Ce document est présenté au moment même où des forces hostiles opèrent des manœuvres militaires dans la péninsule de Corée, a encore souligné la délégation. Par conséquent, le rapport soulève de sérieux doutes et ne devrait pas circuler comme document officiel des Nations Unies.

La République populaire démocratique de Corée a également déclaré que si des enquêtes devaient avoir lieu, elles devraient cibler les États-Unis et leurs alliés qui violent massivement les droits de l'homme, tuent des civils innocents, infligent d'innombrables souffrances de par le monde avec leurs invasions passées et présentes. En ce qui concerne la République populaire démocratique de Corée, elle n'a jamais reconnu le mandat de cette commission en raison notamment de ses motivations politiques et elle continuera à défendre son système socialiste qui garantit à tous les individus des droits en droit et dans la pratique. Les États-Unis et les autres forces hostiles devraient cesser leur campagne contre la République populaire démocratique de Corée et se pencher sur leurs propres violations des droits de l'homme.

Débat interactif

L'Union européenne a regretté que la République populaire démocratique de Corée n'ait pas coopéré avec la Commission d'enquête, dont le rapport fait état de violations des droits de l'homme que l'on peut comparer à des crimes contre l'humanité. La France a qualifié d'inacceptable le refus opposé au Rapporteur spécial d'accéder au territoire de la Corée du Nord. La Slovénie, regrettant également que la Commission n'ait pas eu accès au pays, s'est félicitée de l'«imagination méthodologique» dont elle a fait preuve pour recueillir des informations sous forme de témoignages lors d'auditions publiques. Le Luxembourg a appelé les autorités nord-coréennes à ouvrir leurs frontières et permettre un accès humanitaire et à la communauté internationale. Cette coopération devrait voir le jour dans un avenir proche ont espéré les délégations du Mexique et de l'Uruguay. La Roumanie a souligné que les commissions d'enquête sont des outils légitimes à la disposition de la communauté internationale pour évaluer la situation des droits de l'homme dans des pays spécifiques, avant de regretter l'absence de coopération. La Slovaquie a elle aussi fait part de sa profonde déception face à l'absence de coopération des autorités nord-coréennes avec la Commission. Elle salue ses conclusions et recommandations et souligne la nécessité de fournir un suivi approprié à ce travail. La Slovaquie est en outre favorable à la prorogation du mandat du Rapporteur spécial.

Le Botswana s'est dit consterné par les allégations d'exécutions d'opposants politiques sans procès, parfois en public. Il a appelé Pyongyang à coopérer avec la Commission d'enquête en lui permettant d'accéder à son territoire. Pour l'Australie, ce rapport rappelle à tous les gouvernements que les violations des droits de l'homme engendrent des enquêtes internationales. L'Australie s'est particulièrement inquiétée de la pénurie alimentaire généralisée et des conditions sanitaires dans les camps de prisonniers. La France a exhorté la République populaire démocratique de Corée à «fermer immédiatement les camps de prisonniers politiques au sein desquels sont commis les pires atrocités», exprimant sa conviction que ces crimes ne resteraient pas impunis et que les responsables devront en rendre compte devant la justice pénale internationale et devant le peuple nord-coréen.

Pour l'Albanie, ce gouvernement n'acceptera jamais de coopérer et le seul moyen de l'y contraindre est de référer de la situation à la Cour pénale internationale. De nombreux autres États, en particulier deux de l'Union européenne, mais aussi la Norvège ou le Canada, ont appuyé la recommandation présentée par la Commission d'enquête selon laquelle la situation en République populaire démocratique de Corée devrait être renvoyée à la Cour pénale internationale. La Lituanie s'est associée à l'appel lancé à l'Assemblée générale visant à soumettre le rapport de la Commission d'enquête au Conseil de sécurité afin qu'il l'examine et envisage des actions appropriées. La Suisse, qui soutient les recommandations de l'enquête, s'est demandé de quels outils la communauté internationale doit se munir pour assurer le suivi des recommandations.

La République tchèque s'est dite inquiète de l'impunité dont jouissent les auteurs de violations des droits de l'homme et du fait que celles-ci soient orchestrées au plus haut niveau de l'État. Les auteurs de crimes contre l'humanité doivent être poursuivis et les prisonniers politiques libérés, a-t-elle plaidé. L'Estonie a appelé la République populaire démocratique de Corée à reconnaître les violations des droits de l'homme dénoncées dans le rapport de la Commission. La Pologne a demandé à la communauté internationale de prendre toutes les mesures nécessaires pour établir les responsabilités, avant d'appeler les autorités de République populaire démocratique de Corée de mettre un terme à toutes les violations des droits de l'homme. Le Liechtenstein s'est dit préoccupé par la nature systématique des crimes commis. Ces délégations ont en outre appelé tous les États à respecter le principe de non-refoulement et à s'abstenir de refouler des Nord-Coréens vers la République populaire démocratique de Corée, où, selon la France, ils risquent de subir, comme le souligne ce rapport, «les pires formes de tortures et de violations de leurs droits fondamentaux.»

Plusieurs délégations ont souligné la gravité inédite des accusations portées. La Nouvelle-Zélande, qui a constaté que la situation en République populaire démocratique de Corée n'était comparable à aucune autre, presse ce pays d'agir de manière urgente en s'inspirant des recommandations de la Commission. C'est elle en effet qui a la responsabilité première des réformes profondes qui sont exigées pour protéger ses citoyens. La Norvège a estimé qu'il existe des motifs raisonnables de croire les témoignages faisant état de violations des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée. Elle a rappelé que le pays est partie à plusieurs traités internationaux relatifs aux droits de l'homme. Ainsi, des obligations internationales s'imposent aux autorités nord-coréennes dans ce domaine. L'Irlande, qui a évoqué un rapport faisant «froid dans le dos», sans doute le pire jamais produit par une instance de l'ONU et qui s'adresse à un État qui, véritablement - et fort heureusement - n'a aucun équivalent dans le monde. «Nous ne pouvons pas dire que nous ne savons pas», a lancé le représentant du Portugal qui a souligné que le rapport confirmait la nature épouvantable des violations des droits de l'homme qui se produisent en République populaire démocratique de Corée. Il a appelé les autorités à réaliser tous ses engagements, en particulier tous les instruments internationaux auxquels il est partie, l'Examen périodique universel devant le Conseil des droits de l'homme offrant une excellente occasion à cet égard.

L'Argentine a fait part de son inquiétude face aux allégations de crime contre l'humanité et a dit l'importance de coupler l'amélioration de la situation des droits de l'homme avec le renforcement du dialogue intercoréen. Quant à l'assistance humanitaire, elle ne doit pas se faire sur des bases politiques et être accordée en fonction des besoins. Le Chili a exprimé sa consternation face à des violations systématiques et généralisées des droits de l'homme, ajoutant que les Nations Unies doivent garantir que les responsables de crimes atroces rendent des comptes et soient jugés. Des mécanismes doivent être mis sur pied pour superviser la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée. L'Espagne a demandé quelles mesures pouvaient être adoptées par les États individuellement, dans le cadre des relations bilatérales avec la République populaire démocratique de Corée, afin de réduire les violations des droits de l'homme dont souffre la population.

De nombreuses délégations ont plaidé pour des pressions supplémentaires. Ainsi, les États-Unis ont appelé le Haut-Commissariat à mettre sur pied un mécanisme pour faire la lumière sur les violations des droits de l'homme et appuyer le Rapporteur spécial chargé de la situation dans ce pays. Pour les États-Unis, la République populaire démocratique de Corée a le choix entre aborder la question des droits de l'homme dans le pays ou affronter un isolement. L'Ex-République yougoslave de Macédoine a également appuyé un mécanisme de suivi des recommandations de la Commission d'enquête. Pour le Monténégro, la création d'un mécanisme permanent est même impérative. Toutes les allégations de crimes commis exigent en effet une réponse de la communauté internationale, a ajouté le Royaume-Uni, qui a parallèlement appelé les autorités à agir de leur côté en reconnaissant ces allégations, en fermant les camps politiques et en acceptant une visite de la Haut-Commissaire. La Thaïlande a pour sa part souhaité savoir comment fonctionnerait un tel mécanisme si l'accès sur le territoire lui était également refusé. En ce qui concerne le Japon en tout cas, le rapport de la Commission ne doit pas rester lettre morte. C'est pour empêcher cela que sa délégation présentera une résolution sur la République populaire démocratique de Corée.

La République de Corée s'est félicitée des résultats de l'enquête de la Commission, jugeant qu'elle s'était acquittée de son mandat de façon efficace et transparente. Les informations détaillées dans le rapport de la Commission fournissent des preuves indéniables de la situation déplorable des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée. La République de Corée appelle la République populaire démocratique de Corée à entreprendre des réformes. Ce rapport constitue un tournant dans les efforts de la communauté internationale pour promouvoir et protéger des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée. La communauté internationale doit prendre des mesures pour assurer le respect des droits de l'homme dans ce pays et faire cesser les persécutions.

Certaines délégations ont fait part de leurs réserves s'agissant du processus visant la République populaire démocratique de Corée. La Chine a déclaré que les débats au sein du Conseil sur la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée devraient être organisés sur la base de la coopération constructive. La création de la Commission d'enquête contrevient aux principes directeurs du Conseil. L'impossibilité pour la Commission d'établir un dialogue constructif avec les autorités du pays pose la question de la crédibilité de son enquête. À l'heure actuelle, la communauté internationale devrait œuvrer en faveur de la paix et de la stabilité de la péninsule coréenne. Les accusations de la Commission relatives à la Chine ne sont pas fondées, a affirmé la délégation, qui a souligné que la Chine avait coopéré avec la Commission. Cuba a exprimé son opposition à l'adoption de résolutions visant des pays en particulier, fondées sur des motifs politiques et non sur la situation des droits de l'homme. Le rapport de la Commission est un exemple clair de la politisation dont fait l'objet le Conseil. Seule une coopération active du pays concerné permet une approche constructive en matière de droits de l'homme. L'Examen périodique universel constitue le mécanisme approprié pour évaluer la situation des droits de l'homme de tous les pays, estime Cuba, qui souligne qu'il faut encourager un débat constructif et sans politisation au sein du Conseil.

La République arabe syrienne a condamné le recours à des mécanismes sélectifs et de critères à géométrie variable avec pour objectif d'entacher la réputation de certains pays. Dans le même temps, les violations commises sous d'autres cieux sont ignorées. Les droits de l'homme ne doivent pas servir des objectifs politiques qui ne sont en rien liés aux droits de l'homme. Le Bélarus a lui aussi réaffirmé sa position en vertu de laquelle il n'accepte par les résolutions ciblant un pays en particulier. C'est là un type de mandat «improductif» qui pèse sur le budget de l'ONU sans permettre en rien de protéger les droits de l'homme. Le Zimbabwe a rappelé son opposition à tout mandat de pays, en raison de leur politisation et manipulation par des délégations, ayant d'autres vues. Pour le Zimbabwe, seul l'Examen périodique universel est l'outil pertinent pour examiner la situation des droits de l'homme dans les pays. Le Myanmar a lui réaffirmé son opposition de principe aux mandats visant des pays spécifiques, estimant que le Conseil devait être guidé par les principes d'universalité, d'impartialité, d'objectivité et de non-sélectivité pour la politisation. Le Venezuela a déclaré que le rapport de la Commission confirme les conséquences graves des résolutions visant des pays spécifiques. Le caractère biaisé et interventionniste de la Commission et son degré élevé de politisation va à l'encontre des principes de dialogue et de coopération, ce qui mènera à son échec. Le Conseil doit associer l'État concerné de façon constructive pour participer à l'amélioration de la situation des droits de l'homme et il faut mettre un terme aux mandats visant des pays, a-t-il conclu.

Dans le même sens, la République démocratique populaire Lao a rappelé que la République populaire démocratique de Corée avait toujours participé à l'Examen périodique universel; il faut l'aider en ce sens. La République islamique d'Iran a également fait part de sa conviction selon laquelle la promotion et la protection des droits de l'homme devait reposer sur des principes de coopération et de dialogue authentique, en visant à renforcer la capacité des États membres à se plier à leurs obligations et engagements. Elle est opposée à la politisation des questions liées aux droits de l'homme, y compris les problèmes particuliers de pays spécifiques en matière de droits de l'homme. Le Conseil doit s'adresser au pays concerné de façon constructive et contribuer ainsi à l'amélioration de la situation des droits de l'homme sur le terrain, ainsi qu'à la paix et la stabilité dans la région.

Le Viet Nam a estimé pour sa part que la priorité absolue devrait être accordée désormais aux questions humanitaires: réalisation du droit à l'alimentation, à l'éducation et à la santé, ainsi que la question des enlèvements. Si le but est important, la manière l'est tout autant, et seul un dialogue authentique et une démarche constructive peuvent permettre de progresser. Le Viet Nam appelle toutes les parties concernées à collaborer en faisant preuve de bonne volonté et de respect afin de faciliter la recherche actuelle de solutions adaptées aux questions d'intérêt mutuel dans le pays et dans la péninsule coréenne dans son ensemble.

Organisations non gouvernementales

Human Rights Watch a souligné combien il était rare que le Conseil soit confronté à un rapport de cette nature, les atrocités qui y sont rapportées constituant un défi redoutable aux idéaux fondateurs des Nations Unies. Comment le monde peut-il rester indifférent face aux témoignages tels que celui de ce garçon affamé, né dans le Camp 14, et qui a dû assister à l'exécution publique de sa mère et de son frère, a demandé HRW. Le Conseil de sécurité ne peut continuer d'agir, selon lui, comme si la menace nucléaire était la seule question à laquelle l'ONU était confrontée s'agissant de la République populaire démocratique de Corée. Le Service international pour les droits de l'homme a donné la parole à ce ressortissant nord-coréen né dans le camp 14 et qui a dû assister, aux côtés de son père, a-t-il précisé, à l'exécution de sa mère et de son frère. Selon lui, des milliers de personnes ont été exécutées, d'autres attendent la mort dans les camps. Les Coréens du Nord doivent pouvoir jouir eux aussi de la liberté, le plus grand bien de l'homme et le Conseil doit porter assistance au peuple nord-coréen, a-t-il conclu.

Amnesty International, quant à elle, a engagé la Chine et d'autres États à ne pas renvoyer de force les personnes trouvant refuge sur son territoire. Depuis trop longtemps, la communauté internationale, le Conseil de sécurité en particulier, n'ont pas porté une attention suffisante à l'énormité des violations des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée, en se focalisant sur une conception étroite de la paix et sécurité en lien avec ce pays. L'organisation non gouvernementale a appelé le Conseil à engager tous les organes de l'ONU à mettre en œuvre les recommandations de la Commission entrant dans leur mandat. Elle demande au Secrétaire général de transmettre le rapport au Conseil de sécurité. Jubilee Campaign a rappelé pour sa part que la communauté internationale avait la responsabilité de protéger. Elle a appelé le Conseil à tout ce qui était en son pouvoir, au moins en approuvant les recommandations de la Commission et en prorogeant son mandat. United Nations Watch a exhorté les Nations Unies à agir de toute urgence en adoptant les mesures recommandées dans le rapport. En outre, le Conseil augmenter et élargir l'enquête avec les procédures thématiques spéciales. Ainsi, par exemple, le rapport examine en profondeur les violations graves et généralisées sur le droit à l'alimentation, plusieurs centaines de personnes au minimum ayant été victimes de la famine.

La Commission internationale des juristes considère que le mécanisme de commission d'enquête constitue un outil indispensable du Conseil et que celui-ci devrait s'en servir davantage, notamment s'agissant de la situation à Sri Lanka. Elle se félicite de la méthode innovante adoptée par la Commission sur la Corée du Nord. L'ONG a souhaité savoir quelles mesures pourraient être prises, par les États concernés et l'ONU, pour assurer une protection optimale des témoins sans affecter le travail des Commission d'enquête. Enfin, People for Successful Corean Reunification, dont le représentant s'est présenté comme un transfuge nord-coréen, a constaté que le nombre d'exécutions avait augmenté depuis l'accès au pouvoir de Kim Jong-un en 2011. Selon lui, la population lutte constamment pour sa survie en raison de politiques étatiques, la faim et la malnutrition étant généralisées. «On dit, en Corée du Nord, que «le ciel ne peut être caché par la paume de la main». Je crois que l'ampleur des violations nord-coréennes des droits de l'homme ne peuvent plus être cachées de la vue», a-t-il dit. Il a appelé la communauté internationale à agir sur la question de l'amélioration des droits de l'homme dans son pays.

Observations et conclusions

M. KIRBY a observé que la République populaire démocratique de Corée avait, dans son refus de coopérer, méprisé le Conseil des droits de l'homme et les membres de la commission d'enquête. Pas un mot sur les allégations de crimes n'a été exprimé par la délégation, a déploré le Président de la Commission. Il a réitéré que cette dernière avait travaillé en toute impartialité et indépendance. La République populaire démocratique de Corée ne parle que de «pays hostiles» et ne dit rien sur ce qu'on lui reproche, a-t-il constaté, soulignant que la présentation de ce rapport offrait au pays mis en cause la possibilité de s'expliquer.

Le Président de la Commission a encore estimé que l'urgence capitale aujourd'hui était de fermer les camps de prisonniers, ajoutant que les témoignages dont dispose la commission sont disponibles et publics, afin que chacun puisse se faire une opinion. Répondant à la Chine, M. Kirby lui a rappelé qu'elle est partie à des instruments internationaux interdisant le refoulement de réfugiés dans un pays où ils risquent leur vie. Répondant à d'autres délégations, il a estimé que la gravité de cette question mérite d'être inscrite à l'ordre du jour du Conseil de sécurité, car elle relève de sa responsabilité, en vertu de la Charte des Nations Unies. M. Kirby a également indiqué que la Commission n'est pas favorable à des sanctions économiques contre la République populaire démocratique de Corée car elle affecterait négativement les populations déjà très durement touchées.

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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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