Les préjugés fondés sur le genre lors des litiges concernant la garde d’enfants mettent en danger les femmes et les enfants
30 juin 2023
« Dans le contexte des affaires de garde d’enfants, il existe une violence multidimensionnelle qui n’est pas encore entrée dans la conscience collective de la communauté internationale ; elle est commise principalement contre un groupe de femmes, à savoir les mères, dont les préoccupations ne sont peut-être pas abordées aussi souvent qu’elles le devraient par ce Conseil », a déclaré Reem Alsalem, experte des Nations Unies sur la violence à l’égard des femmes.
Dans son dernier rapport présenté au Conseil des droits de l’homme, Reem Alsalem met en évidence les préjugés fondés sur le genre profondément ancrés et qui s’insinuent dans les systèmes de justice familiale du monde entier, provoquant d’immenses souffrances et une grande violence pour les femmes et les enfants. Les femmes autochtones, les migrantes et les femmes handicapées sont particulièrement exposées à ce type de violence, a souligné l’experte.
Lors du Conseil, Mme Alsalem a dénoncé la tendance alarmante des tribunaux des affaires familiales à ne pas tenir compte des antécédents de violence et de mauvais traitements au sein de la famille dans les affaires de garde d’enfants, en particulier lorsque les mères ou les enfants formulent des allégations plausibles de telles violences, notamment un contrôle coercitif et des violences physiques ou sexuelles. Elle a souligné que ces pratiques sont répandues et inacceptables, et a appelé à prendre des mesures urgentes.
En outre, les décisions relatives à la garde d’enfants qui sont prises en faveur d’un parent invoquant l’aliénation sans prendre en compte de manière adéquate le point de vue de l’enfant perpétuent les préjudices et mettent l’enfant en danger.
« L’omniprésence des préjugés négatifs fondés sur le genre n’est pas une surprise. Il y a quelques semaines, le PNUD a publié le dernier Indice des normes sociales de genre, qui montre que près de 9 hommes et femmes sur 10 ont des préjugés à l’égard des femmes », a déclaré l’experte.
Reem Alsalem a condamné l’utilisation et l’intégration du concept d’« aliénation parentale » et des « pseudo-concepts » connexes dans les systèmes juridiques du monde entier, même s’ils ne sont pas officiellement reconnus par la loi et par les évaluateurs chargés de rendre compte de l’intérêt supérieur de l’enfant devant les tribunaux des affaires familiales.
Dans son rapport, Mme Alsalem formule plusieurs recommandations aux États et autres parties prenantes pour lutter contre les principaux préjugés et protéger le bien-être des femmes et des enfants. Elle recommande notamment d’améliorer leur accès à la justice, d’abandonner l’utilisation de cadres et de concepts misogynes non confirmés et non fondés, d’améliorer la collecte de données pertinentes, et de revoir la Convention de La Haye sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants afin de pouvoir traiter les cas de femmes et d’enfants qui fuient des situations de violence pour leur sécurité dans le cadre d’un litige concernant la garde d’enfants.
Elle appelle également la communauté internationale à reconnaître les dimensions des droits humains de la violence multidimensionnelle subie par de nombreuses mères et de nombreux enfants dans les systèmes de justice familiale.
Lors de l’établissement des modalités de garde et des droits de visite, a-t-elle souligné, la protection des femmes et des enfants contre la violence, une approche centrée sur la victime et l’intérêt supérieur de l’enfant doivent prévaloir sur tous les autres critères.
Les conclusions de l’experte soulignent le besoin urgent d’adopter des réformes globales des systèmes de justice familiale dans le monde entier afin de garantir des décisions justes et équitables, de protéger les survivants de la violence domestique et de donner la priorité au bien-être des enfants. Ses recommandations constituent un guide essentiel pour les États et les autres parties prenantes afin de rectifier les injustices systémiques dans les procédures des tribunaux des affaires familiales.
« J’exhorte les États à agir s’ils veulent protéger non seulement les individus, mais aussi les familles de préjudices durables, même si ces familles ne correspondent pas à l’image d’une structure familiale idéale dans laquelle un enfant est en contact avec ses deux parents, et indépendamment de l’intérêt supérieur de l’enfant ou d’autres considérations », a-t-elle déclaré.