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Déclarations Multiple Mechanisms FR

Événement parallèle sur le Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne

Vers une obligation de rendre des comptes pour les crimes commis en Syrie

02 Mars 2017

34ème session du Conseil des droits de l’homme

Allocution de Zeid Ra’ad Al Hussein, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme

2 mars 2017

Excellences,

L’adoption de la Résolution 71/248 de l’Assemblée générale au mois de décembre constitue un événement très important en vue de parvenir à une obligation de rendre des comptes en Syrie. Il est évident que l’absence d’obligation en la matière aux niveaux national et international a incité la Commission à commettre de graves violations et abus des droits de l’homme, ainsi que des violations répétées du droit international humanitaire.

Appelé à plusieurs reprises à déférer la situation en Syrie à la Cour pénale internationale, les initiatives du Conseil de sécurité à cet égard ont été vaines.  La Résolution 71/248 marque un pas décisif dans la bonne direction et je tiens à rendre un hommage sincère au travail de rédaction mené par le Qatar et le Liechtenstein eu égard à cette résolution.  Je salue en particulier la vision et le leadership de mon grand ami l’Ambassadeur Wenaweser et de son homologue du Qatar à New York, l’Ambassadeur Al-Thani.

Des violations flagrantes et systématiques des droits de l’homme se poursuivent en Syrie depuis 2011.  Mon Bureau et la Commission d’enquête internationale indépendante sur la Syrie, créée le 22 août 2011 par le Conseil des droits de l’homme, ont régulièrement documenté et rendu compte au sujet de la nature des violations des droits de l’homme et des abus perpétrés en Syrie, ainsi que de l’ampleur des crimes commis par le gouvernement, par des groupes armés anti-gouvernementaux et des organisations terroristes, en particulier l’EI.

Le meurtre, la torture et les traitements inhumains et dégradants, y compris le viol et les autres formes de violence sexuelle, sont monnaie courante de tous les côtés.  La population civile, les hôpitaux, le personnel médical, les écoles et les infrastructures éducatives ont été pris pour cibles, causant d’innombrables pertes humaines et de grandes souffrances. Des villes et des villages ont été assiégés, laissant un grand nombre de personnes mourir de faim.  Les organisations humanitaires se sont vues refusé tout accès.  De tels actes peuvent constituer des violations du droit international, et certains même des crimes internationaux.

La Commission d’enquête en Syrie a également signalé des crimes commis par l’EI contre les Yézidis en Syrie. Les femmes et les filles yézidies ont été et continuent d’être réduites à l’esclavage sexuel, vendues sur des marchés et exposées à d’autres formes d’exploitation, et les enfants sont arrachés de force à leur famille, aux croyances et aux pratiques de leur communauté, dans un effort visant à effacer l’identité yézidie. Les jeunes garçons sont placés auprès de combattants de l’EI, endoctrinés et forcés à commettre des crimes, y compris assassiner des membres de leur propre famille.

Ces atrocités sont alimentées par l’impunité, qui exacerbe aussi les souffrances endurées par les victimes tout au long de leur vie.

La mise en place d’un mécanisme international, impartial et indépendant, chargé d’aider à enquêter et poursuivre les auteurs de crimes internationaux commis en Syrie, marque une étape particulièrement importante dans les efforts visant à instaurer une obligation de rendre des comptes. Le Mécanisme permettra de recueillir, consolider, conserver et analyser les éléments de preuve, et de préparer des dossiers sur les suspects, afin de faciliter et d’accélérer la procédure pénale de manière équitable et indépendante à l’échelle nationale, régionale ou internationale, en vertu du droit international.

En informant de la mise sous surveillance des personnes soupçonnées de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide, le Mécanisme pourra, selon moi, dissuader la Commission de toute infraction, et même permettre une certaine reconnaissance en faveur des millions de victimes.

Le mandat et le fonctionnement du Mécanisme sont parfaitement distincts de la Commission d’enquête internationale indépendante sur la Syrie. La Commission devrait continuer de recueillir des renseignements directement, de rendre compte des tendances générales des violations et de formuler des recommandations, notamment à l’endroit des États membres. Son travail est visible et rendu public.

En revanche, le Mécanisme s’appuiera essentiellement sur les informations recueillies par d’autres intervenants – notamment la Commission – et ne devrait pas rendre compte publiquement au sujet de son travail de fond. De toute évidence, ces deux entités sont complémentaires.

Des mesures importantes sont prises afin de rendre opérationnel le Mécanisme. Nous travaillons actuellement sur le processus de sélection de la personne nommée à la tête du mécanisme; les diverses fonctions de direction devraient être pourvues très rapidement, dans l’attente de l’approbation du CCQAB concernant la création des deux postes de haut-niveau. Le Secrétaire général m’a également demandé de nommer une première équipe chargée du démarrage.  Son plan de déploiement est prêt et l’équipe en question sera bientôt en mesure de commencer à travailler.

Le SG a préparé un courrier invitant l’ensemble des États membres à fournir un appui financier en faveur du Mécanisme. Cet aspect est déterminant. 

L’AG a décidé que le Mécanisme serait, tout du moins dans un premier temps, financé exclusivement par des contributions volontaires. Certes nous espérons qu’elle reviendra sur cette décision dans les plus brefs délais, mais il est absolument urgent, pour le moment, d’obtenir suffisamment de fonds pour permettre au Mécanisme de démarrer ses travaux.

Les fonds requis dans l’immédiat se montent à 4 à 6 millions de dollars des États-Unis. Nous œuvrons encore à l’élaboration d’un budget précis, mais les besoins de fonctionnement annuels devraient avoisiner les 13 millions de dollars.

Du fait du caractère incertain du financement volontaire, et avant de pouvoir mettre en place le Mécanisme, planifier sa croissance progressive et nommer l’équipe de direction et son secrétariat, nous avons besoin d’une évaluation globale précise des contributions potentielles ainsi que d’un échéancier annonçant ces dernières – tant pour la période de démarrage immédiat que sur un plus long terme.

Jusqu’à présent, le Mécanisme a reçu 1,2 millions de dollars de la part des Pays-Bas et du Liechtenstein, et un montant supplémentaire de 2,7 millions de dollars en promesses orales de la part d’Andorre, de l’Australie, de la Belgique, du Danemark, de la Hongrie, du Luxembourg, du Qatar et de la Suisse.

Nous sommes très reconnaissants de ce soutien, mais nous n’avons pas encore atteint nos objectifs de financement immédiat, y compris en ce qui a trait aux besoins initiaux du Mécanisme. Nous comptons sur votre appui afin de mettre en œuvre la Résolution 71/248 et établir le Mécanisme, afin que justice soit rendue dans le contexte des crimes horribles qui ont été commis en Syrie, et qui se poursuivent encore aujourd’hui.

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