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Communiqués de presse Haut-Commissariat aux droits de l’homme

Nicaragua : un rapport de l’ONU souligne la persistance des violations des droits humains et la détérioration des espaces civiques et démocratiques

03 septembre 2024

Des Nicaraguayens réfugiés au Costa Rica en raison de la crise sociopolitique dans leur pays participent à une manifestation devant l’Ambassade du Nicaragua à San José, au Costa Rica, le 22 décembre 2018. © EPA-EFE/JEFFREY ARGUEDAS
© EPA-EFE/JEFFREY ARGUEDAS

GENÈVE – La situation des droits humains au Nicaragua s’est gravement détériorée depuis l’année dernière, avec l’augmentation des détentions arbitraires, des actes d’intimidation ciblant les opposants, des mauvais traitements en détention et des attaques contre les peuples autochtones, selon un rapport publié aujourd’hui par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH).

« La persécution des opposants au Gouvernement ou de ceux qui sont perçus comme des voix dissidentes s’est progressivement étendue et intensifiée », peut-on y lire.

« Les autorités continuent de persécuter non seulement les personnes qui expriment des opinions dissidentes, mais aussi toute personne ou organisation qui opère de manière indépendante ou n’est pas directement sous leur contrôle. Cela inclut les défenseurs des droits humains, les médias indépendants, les organisations non gouvernementales et toutes les autres entités qui prônent un changement social ou politique sans contrôle du Gouvernement. »

Les autorités ont également proposé la semaine dernière un projet de loi permettant de poursuivre des personnes à l’étranger pour des délits présumés, notamment le blanchiment d’argent, le terrorisme et son financement, ainsi que la cybercriminalité, ce qui suscite de nouvelles inquiétudes quant à l’utilisation de lois larges pour exercer des pressions supplémentaires et intimider les citoyens et les étrangers exilés pour avoir exercé de manière légitime leur droit à la liberté d’expression et d’autres droits.

Le rapport s’appuie sur 120 entretiens menés principalement avec des victimes et des témoins de violations des droits humains, sur des réunions tenues avec des représentants de la société civile et de la communauté internationale, ainsi que sur l’analyse de documents du Gouvernement et d’ONG. Il couvre une période de 12 mois à partir du 15 juin 2023 et fournit des descriptions détaillées de cas de détention arbitraire, d’au moins deux disparitions forcées attestées, ainsi que de violations des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion.

Le rapport note que 131 opposants présumés étaient en détention arbitraire en mai 2024, ce qui représente une forte augmentation par rapport aux 54 détenus en juin de l’année dernière, selon des rapports de la société civile. Dix autres arrestations arbitraires ont eu lieu en juin et juillet 2024.

Les autorités ont arrêté un homme de 70 ans dans la ville de Matagalpa en octobre 2023 pour avoir critiqué le Gouvernement lors de conversations informelles. Il fut détenu dans un lieu tenu secret pendant un mois, avant d’être condamné à sept ans de prison pour trafic d’armes, dans le cadre d’une procédure ne permettant pas un procès équitable, indique le rapport.

Ce dernier révèle également qu’un universitaire a disparu le 20 novembre 2023, date à laquelle il a été arrêté dans la capitale Managua à la suite d’une publication sur les médias sociaux dans laquelle il critiquait le Gouvernement.

Le rapport fait par ailleurs état de 12 cas de torture et de mauvais traitements en détention. Sept détenus ont notamment déclaré avoir été victimes de viols, de violences sexuelles et de décharges électriques. Trois d’entre eux ont déclaré avoir subi un serrage des testicules, tandis que tous présentaient des signes de stress post-traumatique, selon le rapport.

Le HCDH a également continué de recevoir des rapports faisant état de violences commises contre les peuples autochtones et les personnes d’ascendance africaine dans les régions autonomes de la côte caraïbe. Au moins deux meurtres ont notamment été commis par des colons n’appartenant pas à ces communautés et cherchant à contrôler leurs terres. « Les meurtres et autres attaques violentes, y compris les violences fondées sur le genre, l’incendie délibéré de maisons et l’appropriation illégale de terres et de biens autochtones ont été perpétrés dans un contexte d’impunité généralisée », stipule le rapport.

Selon ce dernier, les libertés religieuses au Nicaragua continuent de faire l’objet de restrictions excessives. Au moins 27 prêtres et séminaristes catholiques ont été arrêtés arbitrairement entre octobre 2023 et janvier 2024. Un groupe de 31 membres du clergé a été expulsé du pays après avoir été détenu durant diverses périodes.

Les autorités ont également révoqué le statut juridique de nombreuses organisations religieuses, dans le cadre d’une tendance plus large d’annulation arbitraire du statut juridique des ONG. Au cours de la période couverte par le rapport, plus de 300 organisations, y compris celles qui défendent les droits des femmes, ont vu leur statut révoqué. En août 2024, 1 700 organisations supplémentaires ont été fermées, ce qui représente la plus grande atteinte portée à la société civile, amenant le nombre total d’organisations dissoutes à plus de 5 000 depuis 2018.

Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme Volker Türk a souligné que « la crise multiple qui affecte le Nicaragua depuis 2018 exige un changement de cap urgent de la part du Gouvernement ».

« Il est navrant de constater que l’espace civique continue d’être gravement réduit au Nicaragua et que l’exercice des droits civils et politiques fondamentaux devient de plus en plus difficile », a-t-il déclaré. « Les élections de 2026 offrent une nouvelle chance. Il est essentiel que le droit à la participation politique soit pleinement respecté pour que le peuple nicaraguayen puisse décider librement et en toute sécurité de l’avenir de son pays. »

M. Türk a exhorté le Gouvernement à libérer immédiatement toutes les personnes détenues arbitrairement, et à garantir des procès équitables et une procédure régulière pour les accusés, ainsi qu’un retour volontaire et en toute sécurité pour les exilés. Il a également appelé à mettre fin aux actes de torture et aux mauvais traitements, à demander des comptes aux auteurs de ces actes, à cesser toute forme de persécution et à rétablir le statut juridique des organisations de la société civile et des partis d’opposition.

Le rapport complet est disponible en anglais et en espagnol.

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