Communiqués de presse Haut-Commissariat aux droits de l’homme
Libye : un rapport du HCDH décrit les violations des droits des migrants dans le cadre des programmes d’« aide au retour »
11 octobre 2022
GENÈVE (le 11 octobre 2022) – Selon un rapport du HCDH publié aujourd’hui, les violations des droits de l’homme généralisées et systématiques dont sont victimes les migrants en Libye sont aggravées par l’absence de voies d’accès à la protection à l’intérieur et à l’extérieur du pays, les migrants étant alors souvent contraints d’accepter une « aide au retour » vers leur pays d’origine dans des conditions qui ne sont parfois pas conformes aux lois et normes internationales relatives aux droits de l’homme.
« Les migrants sont fréquemment contraints d’accepter une aide au retour pour échapper à des conditions de détention abusives, des menaces de torture, des mauvais traitements, des violences sexuelles, des disparitions forcées, des extorsions, et d’autres violations des droits de l’homme et atteintes à ces derniers », indique le rapport. « Collectivement, ces conditions ont créé un environnement coercitif qui est souvent incompatible avec le libre choix. »
Les aides au retour sont en principe volontaires. Cependant, le rapport constate qu’en réalité, de nombreux migrants en Libye ne sont pas en mesure de prendre une décision de retour véritablement volontaire conformément au droit international des droits de l’homme et aux normes existant en la matière, notamment selon le principe de consentement préalable, libre et éclairé. Nombre d’entre eux constatent qu’ils n’ont d’autre choix que de retourner dans les mêmes circonstances qui les ont poussés à quitter leur pays en premier lieu.
« Tout migrant renvoyé dans un pays qui connaît des situations défavorables et des facteurs structurels qui obligent la population à quitter son pays d’origine, notamment des violations des droits de l’homme et des atteintes à ces derniers, les effets néfastes des changements climatiques et de la dégradation de l’environnement, les conflits armés, les persécutions, ou plusieurs de ces raisons, peut se retrouver dans une situation encore plus vulnérable qu’auparavant », alerte le rapport.
Les personnes rentrées au pays doivent également faire face à des charges personnelles, financières et psychosociales supplémentaires, notamment en raison des graves traumatismes qu’ils ont subis en Libye. En l’absence de solutions durables à ces problèmes, les migrants pourraient être amenés à migrer à nouveau dans des conditions encore plus précaires.
Le rapport contient le témoignage de quelques-uns des 65 immigrants interrogés par le HCDH qui ont été récemment renvoyés en Gambie.
« Ils m’ont amené dans une prison. Mais même à ce moment-là, je ne pensais pas retourner en Gambie. Puis ils sont entrés dans la prison avec un bâton et battaient les gens comme des animaux. Parfois, ils prenaient de l’argent et des vêtements. Ils m’ont cassé les dents. Alors, j’ai accepté de repartir », a expliqué un migrant.
« Je n’ai pas pu demander à être protégé en Libye ou ailleurs. On m’a seulement proposé de rentrer », a déclaré une autre personne interrogée.
Depuis 2015, plus de 60 000 migrants en Libye ont été rapatriés dans différents pays d’origine à travers l’Afrique et l’Asie grâce à des programmes d’« aide au retour », dont au moins 3 300 Gambiens qui sont rentrés de Libye depuis 2017.
Pour la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme par intérim Nada Al-Nashif, « la Libye et les États impliqués devraient prendre immédiatement des mesures pour faire à face à cette situation inacceptable et révoltante. Les autorités libyennes devraient mettre fin sur le champ à toutes les violations et atteintes aux droits des migrants. D’autres États ont également une responsabilité à cet égard : ils doivent prendre les devants et offrir davantage de protection aux migrants piégés en Libye en multipliant les voies d’admission sûres et régulières sur leur territoire. »
« Cette situation désespérée exige que toutes les parties concernées veillent à ce qu’aucun migrant ne soit contraint d’accepter une aide au retour vers une situation dangereuse ou insoutenable dans son pays d’origine », a ajouté Mme Al-Nashif.
FIN
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