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Communiqués de presse Organe subsidiaire de la Commission des droits de l’homme

LA SOUS-COMMISSION ACHEVE SON DEBAT SUR L'ADMINISTRATION DE LA JUSTICE, L'ETAT DE DROIT ET LA DEMOCRATIE

11 août 2004



11 août 2004


La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a achevé, cet après-midi, son débat consacré à l'administration de la justice, à l'état de droit et à la démocratie. Elle a entendu dans ce cadre les déclarations de dix organisations non gouvernementales ainsi que de deux pays et de certains de ses membres.

Parmi les questions abordées, figurent celles ayant trait à l'administration de la justice dans le contexte des crimes de violence sexuelle; à la situation des femmes en prison; à l'administration de la justice dans certains pays où, par exemple, la loi martiale a été proclamée; aux harcèlements dont font l'objet les journalistes à travers le monde notamment.

Les représentants de l'Iraq et de la Tunisie ont pris la parole, ainsi que les organisations non gouvernementales suivantes : Foundation for Aboriginal and Islander Research Action; Asia-Japan Women's Resource Center; United Nations Watch; Asian Forum for Human Rights and Development; Fédération syndicale mondiale; European Union of Public Relations; Mouvement international de la jeunesse et des étudiants pour les Nations Unies (au nom également de la Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples et de la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté); Union mondiale pour le judaïsme libéral; Mouvement International ATD Quart Monde; et l'Institut international de la paix. La Côte d'Ivoire a exercé le droit de réponse.

Mme Lalaina Rakotoarisoa et Florizelle O'Connor sont intervenues pour réagir aux commentaires suscités par la présentation de leurs rapports respectifs qui portaient, respectivement, sur la difficulté d'établir la preuve des violences sexuelles et sur les femmes en prison.

MM. Lee A.Casey et Miguel Alfonso Martínez sont également intervenus au cours de la séance.

La Sous-Commission se prononcera, demain, sur des projets de résolution et de décision dont elle reste saisie au titre de diverses questions inscrites à son ordre du jour.

Fin du débat sur l'administration de la justice, l'État de droit et la démocratie

M. LES MALEZER (Foundation for Aboriginal and Islander Research Action) a notamment relevé qu'en décembre 2000 a été organisée une conférence sur la résolution des conflits, la construction de la paix, le développement durable et les peuples autochtones, qui a abouti à la Déclaration de Manille. Cette Déclaration, a précisé le représentant, établit une Commission internationale indépendante des peuples autochtones pour la médiation et la résolution des conflits les opposant aux États. Il s'est dit impatient de pouvoir constater les succès enregistrés par cette instance dans la conciliation des litiges entre États et représentants de peuples autochtones.

MME HIROKO HATAE (Asia-Japan Women's Resource Center) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur les difficultés que rencontrent les victimes de violence sexuelle devant les tribunaux japonais, comme l'atteste le rapport de la Fédération des associations du barreau du Japon. L'un des problèmes principaux à cet égard découle du fait qu'il n'existe aucune exigence de connaissance spécialisée de la question des crimes sexuels pour les personnes qui assument des tâches judiciaires. En outre, quasiment aucune mesure spéciale n'a été prise pour permettre aux victimes de crimes à caractère sexuel de parler librement de leurs expériences, du fait notamment que seuls 3,8% des agents de police et 7% des procureurs sont des femmes.

M. HILLEL NEUER (United Nations Watch) a déclaré que la liberté de l'information est au cœur de la démocratie. La bonne nouvelle, a affirmé le représentant, est que dans un grand nombre de démocraties naissantes, le nombre de médias a explosé. Toutefois, dans un trop grand nombre de pays, les journalistes continuent de se heurter à la censure, de subir des menaces et parfois des attaques. De tels faits constituent autant de défis à la démocratie et à l'état de droit, a-t-il estimé. Le représentant a dénoncé les restrictions à la liberté de la presse au Zimbabwe, les intimidations subies par les journalistes à Cuba, les cas de torture de journalistes par les forces de police au Pakistan, au Népal, et au Myanmar. Aussi, le représentant a émis l'espoir que la nouvelle Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Mme Louise Arbour, agira en vue du respect par tous les États de la liberté de la presse.

La représentante de Asian Forum for Human Rights and Development a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la manière dont, depuis le mois de janvier de cette année, est administrée la justice dans la partie essentiellement musulmane du sud de la Thaïlande, où la loi martiale a été imposée, limitant l'accès de la population aux droits constitutionnels. Depuis le début de l'année, les forces armées thaïlandaises ont causé la disparition et la mort de plus de 200 personnes alors que les insurgés semblent avoir provoqué la mort d'environ 140 personnes. Selon des témoins oculaires, des personnes auraient même été exécutées après s'être rendues aux autorités, a affirmé la représentante. La Thaïlande doit abroger la loi martiale dans le sud du pays et les responsables de disparitions forcées et d'actes de torture doivent être traduits en justice, a conclu la représentante.

M. REFAQAT ALI KHAN (Fédération syndicale mondiale) a notamment attiré l'attention de la Sous-Commission sur le fait que les prisons des États-Unis sont peuplées en majorité de jeunes hommes noirs, arrêtés pour usage ou trafic de stupéfiants. Le représentant a affirmé qu'une personne appartenant à la population blanche impliquée dans de telles affaires est laissée en liberté alors que les Afro-américains, qui sont touchés par le sous-emploi, se voient appliquer des peines de prison de manière systématique. M. LUIS NARVAEZ a pour sa part attiré l'attention de la Sous-Commission sur la campagne de déstabilisation menée contre le Président Hugo Chávez au Venezuela. Il a lancé un appel aux États-Unis afin qu'ils cessent de financer ces opérations de déstabilisation.

M. ANJALI GANDHI (European Union of Public Relations) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la situation des femmes placées en détention, qui sont particulièrement vulnérables. Du fait de leur emprisonnement, certaines femmes sont totalement abandonnées par leurs familles. Certaines arrivent enceintes en prison et ont alors besoin d'un traitement spécial, en particulier du point de vue nutritionnel, a souligné la représentante. Elle a ajouté que la pire chose qui puisse arriver aux femmes détenues est de voir leur vulnérabilité exploitée. La représentante a fait état d'informations selon lesquelles 7000 femmes et enfants seraient détenus dans 75 prisons au Pakistan.

M. JAN LÖNN (Mouvement international de la jeunesse et des étudiants pour les Nations Unies, au nom également de la Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples et de la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté) a rappelé qu'au cours des dernières décennies, l'ONU a apporté son soutien à la consolidation de la démocratie dans de nombreux pays et à l'exercice du droit à l'autodétermination de certains peuples. Le représentant a souligné que l'acte typique qui accompagne l'exercice du droit à l'autodétermination est l'organisation d'élections démocratiques. Le représentant a souligné que l'organisation d'élections au mépris des principes établis en la matière ne peut conduire à la paix et à la réconciliation mais fait courir le risque d'un prolongement des conflits et de la guerre civile.

M. DAVID LITTMAN (Union mondiale pour le judaïsme libéral) a rappelé qu'il y a près de dix ans, douze jeunes juifs iraniens ont disparu alors qu'ils se dirigeaient vers le frontière irano-pakistanaise «dans le but d'immigrer à l'Ouest». L'an dernier, un membre du Majlis, le parlement iranien, a révélé à des journalistes iraniens qu'il avait connaissance de dix personnes appartenant à une minorité non musulmane qui étaient détenues depuis longtemps dans des prisons iraniennes. Personne ne sait où sont ces personnes. Le plus grand secret entoure leur emprisonnement. Aussi, la Sous-Commission devrait-elle exhorter le Gouvernement iranien de mettre un terme au long silence concernant les douze juifs disparus et détenus au secret en Iran depuis plus d'une décennie.

M. XAVIER VERZAT (Mouvement International ATD Quart Monde) a souhaité que la Sous-Commission, dans ses travaux et études concernant l'administration de la justice, prête systématiquement une attention particulière à la situation des plus pauvres, aux secteurs les plus défavorisés de la population, et adopte à chaque fois des recommandations appropriées pour que l'accès à la justice devienne effectif, y compris pour les plus exclus. Le représentant a suggéré à la Sous-Commission de se pencher à cette fin sur les principes énoncés par le Comité des ministres du Conseil de l'Europe qui invite notamment les États à entreprendre des démarches spécifiques en faveur des personnes identifiées comme ne faisant pas usage de leurs droits.

M. SHRI PRAKASH (Institut international de la paix) a dénoncé la situation qui prévaut au Pakistan, où les pouvoirs extraordinaires accumulés par le Président Pervez Musharraf, qui est également chef des armées, ont marqué un virement vers une autocratie toujours plus prononcée. La main-mise des forces armées sur toutes les sphères de la société continue de s'étendre dans le pays, a ajouté le représentant. Il a par ailleurs souligné que la situation des détenus dans les prisons pakistanaises est déplorable. Il a plaidé pour que des élections libres et justes aient lieu au Pakistan.

M. LEE A. CASEY, expert de la Sous-Commission, a répondu aux propos tenus hier par certains représentants d'organisations non gouvernementales concernant la non-ratification par les États-Unis du Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Il a rappelé qu'il est du droit souverain de chaque État d'adhérer ou non à un instrument international. Il s'est inscrit en faux contre l'idée que, ce faisant, son pays favorise l'impunité.

M. OSAMA MAHMOUD (Iraq) a souligné qu'après avoir retrouvé sa souveraineté, le Gouvernement iraquien a acquis une autorité exécutive. Désormais, tout citoyen peut exprimer son opinion et former un parti politique, a-t-il notamment fait valoir. La nouvelle législation nationale prévoit en outre l'indépendance des pouvoirs judiciaires et exécutifs, a poursuivi le représentant. Il a demandé à chacun d'appuyer les efforts de l'Iraq afin que le pays, qui a longtemps souffert de la dictature, connaisse la paix et la sécurité.

M. HABIB MANSOUR (Tunisie) a souligné les efforts déployés par son pays pour garantir la consécration de l'État de droit et la pérennité des institutions, ainsi que le fonctionnement et l'administration de la justice en toute indépendance. La dernière réforme de la constitution tunisienne traduit de la manière la plus adéquate la consécration de ces choix fondamentaux, tout en fournissant les garanties nécessaires pour assurer leur pérennité. Aussi, le représentant s'est-il dit étonné d'avoir pu relever au cours de la présente session de la Sous-Commission des informations et des attitudes concernant son pays qui n'avaient leur raison d'être.

MME LALAINA RAKOTOARISOA, experte de la Sous-Commission, a remercié ses collègues ainsi que les nombreuses organisations non gouvernementales qui ont commenté son document de travail sur la difficulté d'établir la preuve des violences sexuelles. Elle a notamment rappelé que, dans son document de travail, elle a souligné que les enfants ne doivent pas subir le stress des témoignages devant les tribunaux. Mme Rakotoarisoa a attiré l'attention sur les pratiques de plusieurs pays, tels que les États-Unis, où les professionnels parlent à la place des enfants afin que ces derniers ne revivent pas le traumatisme qu'ils ont vécu. Certains pays acceptent déjà le principe de renversement de la preuve, mais d'autres sont contre car ils estiment que cela va à l'encontre de la présomption d'innocence, a en outre rappelé l'experte. La notion de résistance de la victime dans le contexte du viol est dangereuse car elle accorde une marge de manœuvre aux auteurs de violence sexuelle, a ajouté Mme Rakotoarisoa.

MME FLORIZELLE O'CONNOR, experte de la Sous-Commission, a remercié tous ceux qui ont fait des commentaires sur son document de travail sur les femmes en prison. Elle a souligné que c'est souvent des années après leur libération que l'on peut obtenir des informations sur l'incarcération des femmes. Par ailleurs, l'experte a estimé que la Sous-Commission devrait publier un document global sur les problèmes rencontrés par les femmes dans les systèmes de justice pénale, avec un accent particulier sur le problème des violences sexuelles.

M. MIGUEL ALFONSO MARTÍNEZ, expert de la Sous-Commission, a souhaité réagir à la déclaration faite hier après-midi par son collègue M. Lee A. Casey s'agissant de la question de l'application universelle des traités. À M. Casey qui affirmait être d'accord avec la notion de défense de la souveraineté nationale, M. Alfonso Martínez a souhaité souligner aussi les désaccords entre M. Casey et lui-même. M. Alfonso Martínez a souligné qu'il souhaitait se distancer de certaines positions de son collègue. Il a précisé à cet égard être partisan de la défense de la souveraineté de tous les pays du monde et non seulement de la souveraineté de son propre pays.

M. CASEY, expert de la Sous-Commission, a déclaré ne pas savoir exactement à quel propos faisait allusion M. Alfonso Martínez dans sa déclaration. Il a par ailleurs affirmé que le principe de la souveraineté nationale est, dans son esprit, bien valable pour tous les États et non pas uniquement pour le sien.

M. ALFONSO MARTÍNEZ, expert de la Sous-Commission, a déclaré ne pas comprendre la conception de M. Casey concernant la souveraineté, alors même qu'une législation nationale des États-Unis vient précisément porter atteinte à la souveraineté de Cuba à travers un blocus économique. À moins que M. Casey ait décidé de rejoindre ceux qui contestent une telle mesure, «ce dont je serais ravi», a conclu M. Alfonso Martínez.

Droit de réponse

M. WILLIAMS KEBE SEKA (Côte d'Ivoire) a réagi à la déclaration faite par l'organisation non gouvernementale United Nations Watch, qui s'est référée à l'homicide de Jean Hélène, en rappelant que le Gouvernement ivoirien a condamné cet acte odieux. L'enquête menée sur cette affaire a abouti à une peine d'emprisonnement ferme de 17 ans prononcée à l'encontre de la personne mise en cause. Il a en outre été conclu que le Gouvernement ivoirien n'était nullement impliqué, a rappelé le représentant.

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