Skip to main content

Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME : PRÉSENTATION DE RAPPORTS SUR L'INTOLÉRANCE RELIGIEUSE, L'INDÉPENDANCE DE LA JUSTICE ET LA RÉHABILITATION DES VICTIMES

12 Avril 1999


APRÈS-MIDI
HR/CN/99/32
12 avril 1999




La Commission des droits de l'homme a entendu, cet après-midi, les Rapporteurs spéciaux sur l'intolérance religieuse et l'indépendance des juges et des avocats, ainsi que l'Expert indépendant sur le droit à la restitution, à la compensation et à la réhabilitation des victimes de graves violations des droits de l'homme. Leurs rapports sont présentés dans le cadre de l'examen de la question des droits civils et politiques.

M.AbdelfattahAmor a présenté son rapport sur l'intolérance religieuse, dans lequel il souligne notamment que l'action de promotion de la liberté de religion ou de conviction demeure intimement liée à l'action de promotion de la démocratie et du développement. Le Rapporteur spécial souligne également l'importance de prendre des mesures dans le domaine de l'éducation. Il estime prioritaire de lutter contre deux fléaux, à savoir l'extrémisme et la discrimination à l'égard des femmes. Dans sa présentation, le Rapporteur spécial a rendu compte des missions qu'il a effectuées aux États-Unis et au VietNam l'an dernier, ainsi que des mesures de suivi concernant la République islamique d'Iran et l'Afghanistan.

Présentant son rapport sur l'indépendance des juges et des avocats, M.Param Cumaraswamy a attiré l'attention de la Commission sur le nouveau phénomène que constitue la pratique des prétendus «meurtres pour l'honneur». Il a passé en revue, en particulier, les situations au Pakistan, en Irlande du Nord, en Belgique, au Bélize. Il a notamment lancé un appel au Gouvernement pakistanais afin qu'il assure immédiatement la sécurité et la protection de MmeAsma Jahangir, avocate et Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, qui a reçu des menaces de mort tout récemment.

M.Chérif Bassiouni, Expert indépendant sur le droit à restitution, à indemnisation et à réadaptation des victimes de graves violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a notamment souligné la nécessité veiller à ce que, en cas de demande d'indemnisation ou de réadaptation, l'ampleur des dommages-intérêts accordés corresponde à la gravité du préjudice subi.

Les délégations du Soudan, de la Fédération de Russie, de la République de Corée, de Cuba, de la Tunisie et du Paraguay ont participé au débat, de même que les représentants des organisations non gouvernementales suivantes: European Union of Public Relations, Mouvement international de la réconciliation, International Human Rights Association of American Minorities, Union interparlementaire, Comité mondial pour la liberté de la presse, World Council of Churches, National Union of Jurists of Cuba, Franciscains international, Jeunesse étudiante catholique internationale, Brahma Kumaris World Spiritual University, Robert F. Kennedy Memorial, Fédération latino-américaine des associations des familles des détenus disparus, Centre de la tribune de la femme et autres ONG, Worldview International Foundation, Third World Movement against the Exploitation of Women, Organisation néerlandaise pour la coopération internationale au développement, Institut international de la paix, Assemblée permanente pour les droits de l'homme, Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté, Centre Europe-tiers monde et Aliran Kesedaran Negara - National Consciousness Movement.

Demain matin, à 10 heures, la Commission devrait se prononcer sur un projet de résolution concernant la situation du Kosovo (E/CN.4/1999/L.3/Rev.1), suite au débat spécial qu'elle a tenu sur la question le 1er avril dernier et compte tenu de l'urgence de la situation. Elle doit également terminer son débat sur les droits civils et politiques avant d'aborder le débat relatif aux droits fondamentaux des femmes.

Présentation de rapports sur les droits civils et politiques

M.PARAM CUMARASWAMY, Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats, présentant son rapport à la Commission, a indiqué que depuis qu'il a soumis son rapport, il a reçu des réponses de Djibouti, de la Malaisie, de la Nouvelle-Zélande et du SriLanka. Il a également indiqué que le Gouvernement du Guatemala l'a invité à effectuer une mission dans le pays. M.Cumaraswamy a par ailleurs salué la seconde décision récemment prise par la Chambre des Lords du Royaume-Uni en ce qui concerne le cas Pinochet par laquelle les Lords ont catégoriquement réaffirmé l'importance de garder à l'esprit, lors de toute décision judiciaire, le principe selon lequel les tribunaux, y compris les cours d'appel, doivent non seulement être indépendants et impartiaux mais aussi être perçus comme tels. Le Rapporteur spécial s'est également réjoui de la décision de la Cour suprême du Pakistan déclarant que, selon la Constitution du Pakistan, l'établissement de tribunaux militaires pour juger des civils est inconstitutionnel. S'agissant du suivi de sa mission en Belgique, le Rapporteur spécial a indiqué que dans ses réformes constitutionnelles visant à améliorer le système judiciaire, le Gouvernement belge a tenu compte de certaines des recommandations qu'il avait exprimées au cours de sa première mission, en particulier en ce qui concerne la composition du Conseil supérieur de la magistrature.

M.Cumaraswamy a par ailleurs salué certaines des mesures prises par le Chef de la Gendarmerie royale de l'Ulster (Royal Ulster Constabulary, RUC) qui pourraient réduire les incidents de harcèlement et d'intimidation à l'encontre des avocats durant les interrogatoires de suspects dans les centres de détention. Le meurtre brutal de Rosemary Nelson perpétré par les ennemis de la paix, de la justice et de la primauté du droit, le 15 mars dernier, va encore une fois laisser une impression déplorable en ce qui concerne l'indépendance des avocats et des autres défenseurs des droits de l'homme en Irlande du Nord. Au cours des deux années écoulées, le Rapporteur spécial avait exprimé sa préoccupation pour la sécurité personnelle de cette personne et fait part des menaces qui pesaient sur sa vie au Gouvernement du Royaume-Uni. Tout en se réjouissant de l'invitation lancée par le Chef du RUC afin qu'une expertise extérieure prenne la tête de l'enquête concernant ce meurtre, avec l'assistance d'experts en médecine légale du FBI, le Rapporteur spécial a exprimé l'espoir que l'implication de la RUC dans la procédure d'enquête n'affectera pas l'impartialité et la crédibilité de l'enquête, étant donné que Rosemary Nelson avait porté plainte contre des fonctionnaires de la RUC et avait exprimé son manque de confiance à l'égard du mécanisme d'enquête de la RUC.

S'agissant du meurtre de Patrick Finucane, le Rapporteur spécial a indiqué qu'il est plus convaincu que jamais de la nécessité de mettre sur pied une commission d'enquête royale au sujet de ce meurtre pour vérifier s'il y a eu implication des forces de sécurité, y compris de la RUC, dans ce meurtre. M.Cumaraswamy a annoncé qu'il soulèverait cette question lors d'une rencontre prévue à Londres mercredi prochain avec la Secrétaire d'État pour l'Irlande du Nord ainsi que lors d'une rencontre prévue jeudi avec la Commission Chris Patten sur la police en Irlande du Nord. Il a lancé un appel aux 1800 membres de la Société du droit (Law Society) d'Irlande du Nord afin qu'ils surmontent leurs divergences sectaires et défendent l'indépendance de leur profession.

Le Rapporteur spécial s'est par ailleurs inquiété de n'avoir reçu aucune réponse du Gouvernement du Belize concernant les allégations faisant état d'un éventuel limogeage du Chief Justice du Belize.

M.Cumaraswamy a d'autre part attiré l'attention de la Commission sur le nouveau phénomène que constitue la pratique des prétendus «meurtres pour l'honneur» et a fait état à cet égard de l'incident survenu le 6 avril dernier dans le bureau de la juriste MmeAsma Jahangir à Lahore (Pakistan) où l'une de ses clientes qui la consultait pour une question matrimoniale a été abattue sous les yeux de ses avocats et de sa mère. Suite à ce meurtre, le Rapporteur spécial a été informé durant cette fin de semaine qu'une menace a été proférée à l'encontre de MmeJahangir qui est également Rapporteuse spéciale des NationsUnies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, a déclaré M.Cumaraswamy. Le Rapporteur spécial a lancé un appel au Gouvernement du Pakistan afin qu'il assure immédiatement la sécurité et la protection de MmeJahangir et de ses collègues.

Dans son rapport (E/CN.4/1999/60), M. Cumaraswamy souligne que plusieurs gouvernements auxquels il avait demandé de pouvoir faire une mission in situ n'ont pas répondu positivement et précise, à cet égard, qu'il ne cherche pas seulement à faire des missions dans les pays où juges et avocats sont menacés dans leur indépendance mais aussi dans les pays où l'on fait des efforts pour améliorer et renforcer cette indépendance, afin de pouvoir signaler ces faits positifs à la Commission. Les pays, et en particulier les pays en transition, étant de plus en plus nombreux à demander une assistance technique et des programmes de formation pour l'application des normes relatives aux droits de l'homme, pour la consolidation du règne du droit et pour l'amélioration de l'administration de la justice, le Rapporteur spécial travaillera en liaison étroite avec le Département «Activités et programmes» du Haut Commissariat aux droits de l'homme afin de contribuer à ces efforts.

Dans le cas du Royaume-Uni, le Rapporteur spécial renouvelle la recommandation qu'il avait déjà faite dans son précédent rapport pour que le Gouvernement ouvre une enquête judiciaire indépendante sur le meurtre de Patrick Finucane. Sur le même sujet, il invite instamment le Gouvernement à rendre public le deuxième rapport de M.John Stevens. Il lance en outre un nouvel appel aux gouvernements pour qu'ils répondent promptement à ses interventions et pour qu'ils donnent une suite positive à ses demandes de mission sur le terrain. Le Rapporteur spécial invite les gouvernements, les magistrales nationales, les barreaux et les ONG à soumettre à son examen tout jugement et tout texte officiel affectant l'indépendance des juges et avocats, que ces jugements et ces textes aient un effet positif ou négatif.

M.CHRIF BASSIOUNI, Expert indépendant sur le droit à restitution, à indemnisation et à réadaptation des victimes de graves violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a indiqué que de nombreux mandats thématiques de la Commission se préoccupaient du même sujet et il a noté une grande diversité des approches. À cet égard, il a souligné la nécessité d'établir une certaine uniformité dans les définitions des principaux mandats et de rechercher la cohérence entre les différents types de réparations. Il a également souligné la nécessité d'établir des liens entre le type de violation et le type de réparation. Rappelant que ce qui est visé par ces directives, ce sont les systèmes juridiques nationaux, il a indiqué qu'il fallait tenir compte de leur diversité. Enfin, il faut trouver des recours au niveau international afin de palier au fait que le droit à réparation peut être nié au plan national. Soulignant les nombreuses lacunes qui subsistent dans ce domaine, l'Expert indépendant a proposé que son prochain rapport traite de ces questions. Il a toutefois estimé impossible de poursuivre l'examen des grands systèmes juridiques sans les ressources financières nécessaires.

Dans son rapport (E/CN.4/1999/65), l'Expert indépendant rappelle qu'il a notamment été chargé, par la Commission, d'établir une version révisée des principes et directives fondamentaux concernant la réparation en faveur des victimes des violations des droits de l'homme élaborés par M.Theo van Boven, en tenant compte des opinions et observations formulées par les États, les organisations intergouvernementales et non gouvernementales, et de la présenter à la présente session de la Commission en vue de son adoption par l'Assemblée générale. Le rapport contient une analyse comparative des projets de directives établis respectivement par MM.van Boven et LouisJoinet (dont le mandat conféré par la Sous-Commission couvrait la réparation en faveur des victimes de violations des droits civils et politiques). Il ressort de cette analyse comparative qu'il reste à clarifier ou résoudre un certain nombre de questions importantes avant de pouvoir s'atteler à l'élaboration d'une version révisée. Il convient notamment de clarifier la terminologie. Dans le cadre de ce travail de clarification, l'Expert indépendant juge nécessaire d'adopter comme point de départ la victime des violations. Si tel est le point de départ du travail à effectuer, alors il n'y a aucune raison d'exclure de ces directives les violations commises dans le cadre de conflits armés, souligne le rapport.

L'Expert estime en outre nécessaire de clarifier la relation normative du droit à réparation avec, tout à la fois, le droit international relatif aux droits de l'homme et le droit international humanitaire. D'autre part, il semble évident que si l'on définit le droit à réparation comme n'étant applicable qu'aux «violations flagrantes des droits de l'homme», il devient nécessaire de disposer d'une définition juridique acceptée de cette expression. En outre, il faudra peut-être élaborer, et incorporer aux directives, un principe directeur spécifiquement consacré à la responsabilité des nouveaux gouvernements en matière d'indemnisation à raison de violations antérieures, précise le rapport, qui souligne que dans des situations comme celle du Rwanda, les règles normales relatives à la responsabilité des États et à la succession d'États peuvent s'avérer injustes à l'égard de l'État successeur, en lui imposant un fardeau qu'il convient peut-être à la communauté internationale d'assumer. L'Expert estime en outre nécessaire d'étudier les critères juridiques utilisés aux plans international, régional et national pour veiller à ce que, en cas de demande de restitution, d'indemnisation ou de réadaptation, l'ampleur des dommages-intérêts accordés corresponde à la gravité du préjudice subi.

Pour s'acquitter du mandat qui lui a été confié, l'Expert estime nécessaire de tenir des consultations avec les gouvernements et les organisations intergouvernementales et non gouvernementales intéressées et d'étudier les lois et procédures nationales relatives à la restitution, à l'indemnisation et à la réadaptation, puis de soumettre, au cours de l'été 1999 au plus tard, un projet de rapport aux gouvernements, aux institutions, organismes et programmes des NationsUnies, aux organisations intergouvernementales, au CICR et aux ONG, en sollicitant leurs vues et observations.

M.ABDELFATTAH AMOR, Rapporteur spécial sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction, a présenté son rapport (E/CN.4/1999/58 et Add.1 et 2), dans lequel il souligne que l'action de promotion de la liberté de religion ou de conviction demeure intimement liée à l'action de promotion de la démocratie et du développement. L'extrême pauvreté, en particulier, est de nature à rendre illusoires les droits de l'homme et à favoriser l'extrémisme, précise-t-il. Afin de permettre l'élaboration d'une stratégie internationale scolaire de lutte contre l'intolérance et la discrimination fondées sur la religion ou la conviction, le Rapporteur spécial recommande la tenue d'une conférence internationale sur l'éducation, à l'initiative des États et/ou des organisations non gouvernementales. Il estime prioritaire de lutter contre deux fléaux, à savoir l'extrémisme et la discrimination à l'égard des femmes et réitère, à cette fin, sa recommandation visant l'élaboration et l'adoption par la communauté internationale d'un «minimum de règles et principes communs de conduite et de comportement à l'égard de l'extrémisme religieux» ainsi que sa recommandation visant la tenue d'un séminaire sur la condition de la femme au regard de la religion, des traditions et des droits de l'homme.

Présentant son rapport, M.Amor a indiqué qu'il avait adressé des communications à plusieurs États et reçu des réponses. Il a notamment fait part de trois appels urgents qu'il a adressés à la République islamique d'Iran concernant des baha'is dont deux ont été condamnés à mort en raison, comme les informations portent à le croire, de leurs convictions religieuses. Il a jugé important que la République islamique d'Iran réexamine son attitude à l'égard de la foi baha'ie.

En ce qui concerne les femmes, M. Amor a mis l'accent sur les atteintes les plus flagrantes résultant de l'extrémisme religieux, de l'obscurantisme et des manipulations et interprétations erronées de la religion telles qu'en témoigne le véritable apartheid pratiqué par les Taliban contre les femmes en Afghanistan. Il a également attiré l'attention sur les discriminations plus subtiles affectant la place de la femme au sein de la société et des sphères privées et publiques, notamment en ce qui concerne le rôle de la femme en politique.

Le Rapporteur spécial a indiqué que des demandes de visite, notamment en Israël et en Fédération de Russie, sont restées jusque-là sans suite. La Turquie, par contre, lui a fait parvenir son accord au sujet de sa demande de visite. M.Amor a jugé opportun d'opérer un changement au niveau de la dénomination de son mandat afin que, de mandat sur l'intolérance religieuse, il devienne mandat sur la liberté de religion et de conviction.

À l'issue de la visite qu'il a effectuée aux États-Unis en janvier et février 1998 (voir l'additif 1 au rapport), M.Amor souligne notamment que l'Islam est la religion dont le nombre d'adeptes augmente le plus rapidement dans ce pays (ils sont actuellement entre 3,5 et 3,8 millions). Les représentants musulmans ont déclaré ressentir une forme manifeste d'islamophobie et d'intolérance à la fois raciale et religieuse au sein de la société américaine. À cet égard, le Rapporteur spécial souligne le rôle particulièrement préjudiciable des médias en général, qui véhiculent un message stéréotypé, tronqué voire de haine, consistant à assimiler les musulmans à des extrémistes et à des terroristes. Parmi les manifestations d'intolérance et de discrimination à la fois raciale et religieuse, M.Amor cite les actes de vandalisme à l'encontre de mosquées et de propriétés privées de musulmans, les agressions verbales et physiques, la discrimination dans le domaine de l'emploi ainsi que le système de sécurité utilisé par les compagnies aériennes américaines qui utilise un «profil de terroriste» considéré comme discriminatoire et humiliant pour les Arabes et les musulmans. Bien entendu, ces manifestations ne sont pas le résultat d'une quelconque politique des autorités américaines à l'encontre des musulmans, précise le rapport.

M. Amor ajoute dans son rapport sur les États-Unis que les représentants de la communauté juive ont déclaré que les Juifs bénéficiaient aux États-Unis d'une situation privilégiée -et même unique- en raison d'un degré de liberté religieuse sans pareil dans le monde. Le rapport relève cependant que dans le rapport de l'Attorney general sur les statistiques de crime de haine aux États-Unis en date de janvier 1998, sur les 1400 crimes de haine signalés au FBI, 80% étaient dirigés contre des Juifs.

M.Amor indique que les déclarations de certaines personnes publiques irritées par les visites des rapporteurs spéciaux des NationsUnies aux États-Unis sont plus que surprenantes dans la mesure où elles sembleraient donner à penser que la première puissance mondiale craint une «domination» de l'ONU et souhaite se poser en donneuse de leçon à l'étranger tout en refusant les critiques concernant la situation intérieure perçue positivement sans limite ni réserve. «Il serait donc souhaitable que ces positions particulières restent des épiphénomènes n'affectant pas l'ouverture qui caractérise les États-Unis» et que «l'engagement de ce pays dans le domaine des droits de l'homme acquière une dimension concrète -et pas simplement formelle», affirme le Rapporteur spécial. Au terme de son étude, le Rapporteur spécial estime que la situation réelle des États-Unis dans le domaine de la tolérance et de la non-discrimination est en général satisfaisante. Il souligne néanmoins que la situation des Indiens reste préoccupante.

Concernant la visite qu'il a effectuée au VietNam en octobre 1998 (additif 2), M.Amor souligne qu'il est fondamental de ne pas exploiter aux dépens des droits de l'homme et en particulier de la liberté de religion ou de conviction le fait que l'idéologie communiste soit la «religion de l'État ou d'État». Il est donc nécessaire que les politiques d'État ne prennent pas en tutelle la religion, notamment pour en définir le contenu, les concepts ou les limites, en dehors de celles qui sont strictement nécessaires et qui sont prévues dans l'article premier de la Déclaration de 1981. La politique du Gouvernement dans le domaine de la tolérance et de la non-discrimination fondée sur la religion ou la conviction connaît en général, depuis la politique d'ouverture de 1990, des aspects positifs consistant à se détacher d'une politique antireligieuse. Cependant, si cette amélioration progressive, mais délimitée et contrôlée, de la liberté de religion peut se caractériser par une levée d'interdictions formelles, il s'agit, malgré tout, de liberté sous conditions strictes, souligne le rapport. Cette liberté et ces avancées sont octroyées et retirées selon le bon vouloir des autorités disposant d'un pouvoir d'appréciation et d'intervention exorbitant.

Les communautés religieuses du VietNam (bouddhiste, caodai, hoa hao, musulmane) ne peuvent s'établir et se maintenir librement et en toute indépendance, à l'exception de l'Église catholique et de la majorité des congrégations protestantes, affirme le rapport. Le Rapporteur spécial encourage le Gouvernement vietnamien à étendre les mesures d'amnistie à tous les prisonniers détenus pour avoir pacifiquement et légitimement exercé leur droit à la liberté d'opinion, de conscience, d'expression et de le religion.

Suite du débat sur les droits civils et politiques

M. ALI AHMED ELNASRI (Soudan) a déclaré que son pays est acquis au caractère universel des droits de l'homme. Il a souligné que les droits civils et politiques devaient être respectés partout dans le monde. Il existe de nombreuses menaces au respect des droits civils et politique, a-t-il déclaré. L'une d'entre elle est la politique de deux poids deux mesures. Le Gouvernement des États-Unis a bombardé une usine au Soudan en août 1998 sans raison. La communauté internationale se doit de faire une enquête à ce sujet, a estimé M. Elnasri.

Le représentant soudanais a souligné l'importance de la coopération internationale. Cette coopération de la part du Gouvernement soudanais s'étend à de nombreux domaines. Il y a une autre menace au respect des droits civils et politique, c'est la guerre ; elle se propage en ce moment au Kosovo. C'est la citoyenneté qui est à la base des droits. En 1998, le Gouvernement soudanais a adopté une Constitution garantissant le droit à la vie et les droits fondamentaux tels que la liberté d'association, la protection des spécificités culturelles, des communications, du secret de la correspondance et à la présomption d'innocence, a souligné le représentant.

M. Vladislav ERMAKOV (Fédération de Russie) a estimé, à l'instar du Rapporteur spécial, que l'extrémisme religieux devait être combattu et a souligné la nécessité d'un action conjointe de la communauté internationale. Pour sa part, la Fédération de Russie a adopté une loi sur la liberté de conscience et de religion et a procédé à l'enregistrement d'un grand nombre de mouvements religieux. Certains ont toutefois été refusés, en général pour des raisons de non-conformité administrative ou de la dangerosité de leur doctrine.

Devant la complexité de la situation, le Gouvernement russe fait de son mieux pour assurer l'application des garanties constitutionnelles à tous les mouvements religieux, a indiqué le représentant. Il a en outre souligné la nécessité de mettre en place des stratégies de lutte contre l'intolérance notamment par le biais de l'éducation. Il s'est dit profondément convaincu que la liberté de conscience et la tolérance religieuse doivent être respectées. À cet égard, il s'est joint aux appels du Pape et du Patriarche orthodoxe pour qu'il soit mis fin à la lutte fratricide dans les Balkans.

M. MAN-SSON CHANG (République de Corée) a regretté que les gouvernements de trente-deux pays aient refusé de communiquer avec le Groupe de travail sur les disparitions forcées alors que le nombre total de cas de disparitions en suspens reste élevé et que de nouveaux cas ont été transmis au Groupe de travail en 1998. Il a lancé un appel en faveur de l'adhésion de tous les États à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il a souligné que l'arrivée au pouvoir du Président Kim Dae-Jung en février 1998 a permis de renforcer l'élan en faveur des droits de l'homme en République de Corée. Dès le début, le nouveau gouvernement a fermement encouragé la démocratie et les droits de l'homme ainsi que le renforcement de l'économie de marché.

Pour prouver sa volonté sincère de réconciliation, le Gouvernement a prononcé trois amnisties depuis l'an dernier en vertu desquelles près de six mille personnes ont été libérées. Le Gouvernement reconnaît que la Loi sur la sécurité nationale pourrait restreindre les droits et libertés de la population dans des domaines tels que la liberté d'expression. Il envisage donc une révision de cette loi ou la promulgation d'une nouvelle loi pour amender ou remplacer la loi existante à un moment approprié, dans le futur.

M.MIGUEL ALFONSO MARTÍNEZ (Cuba) a estimé que le point 11, à l'examen aujourd'hui, qui est l'un des plus importants dans le programme de travail de la Commission, devrait inviter à réflexion sur une révision drastique des méthodes de la Commission dans l'accomplissement de sa tâche.

M.Alfonso Martínez a noté qu'en 1999, la Commission est saisie de 38documents au titre de ce point, qui portent sur des sujets aussi importants que la torture, les disparitions forcées ou volontaires, l'impunité des violations des droits de l'homme. Au total, les membres de la Commission ont à examiner 1 103 pages, ce qui n'est pas rien. Sur ces pages, la délégation cubaine n'a pas honte de reconnaître qu'elle n'a pu en examiner dans le détail que 800, ce qui ne représente que 75%. M.Alfonso Martínez a félicité les autres délégations qui ont pu lire entièrement tous ces documents. Comment peut-on travailler correctement dans ces conditions, s'est demandé le représentant cubain, d'autant que les délégations ne disposent que de 10 minutes pour s'exprimer. Selon le délégué, la raison de cet organisation du travail de la Commission est simple : il s'agit de manoeuvres de certains pour que l'on ne traite pas de ces questions.

M.KAMEL MORJANE (Tunisie) a rappelé que le poids des réalités politiques, sociologiques, économiques et culturelles peut entraver la pleine et entière jouissance des droits de l'homme. À cet égard, il a rappelé que le développement économique et social constitue le meilleur atout pour favoriser la jouissance des droits civils et politiques. Il est évident que les Gouvernements ont la première responsabilité de créer les conditions nécessaires au respect des droits de l'homme, mais l'environnement international est également susceptible de réduire les risques de marginalisation et d'instabilité que peuvent engendrer les nouvelles contraintes de la mondialisation de l'économie de marché.

C'est en concrétisant une philosophie des droits de l'homme qui se fonde sur une approche globale et interdépendante que la Tunisie s'est attachée à mettre en oeuvre des réformes profondes dans tous les domaines de la vie publique. Tout récemment, les acquis de la Tunisie dans le domaine des droits de l'homme se sont renforcés grâce à une série de réformes politiques et judiciaires visant à renforcer l'État de droit et la concrétisation de la démocratie, a fait valoir M.Morjane. Il a précisé que, dans le domaine des droits de l'homme, la coopération était certainement le meilleur moyen de promouvoir et de protéger ces droits. Il a dénoncé l'exploitation politique de ce sujet par certaines organisations non gouvernementales qui diffusent des allégations infondées contre les pays.

M. ELADIO LOIZAGA (Paraguay) a affirmé que l'assassinat du Vice-Président Luis María Argaña a permis de mettre à jour la connivence entre l'ex-Président Cubas et le général Lino Oviedo, qui ont assuré l'impunité de leurs complices qui ont perpétré des attentats contre les représentants du pouvoir judiciaire qui cherchaient à restaurer l'État de droit. Il a déploré la répression brutale et le massacre dont ont été victimes de jeunes étudiants et des paysans dans la nuit du 26 mars dernier, commis par des francs tireurs répondant aux ordres d'officiers. Il a affirmé que les dispositions constitutionnelles concernant l'indépendance du pouvoir judiciaire ont été violées de manière flagrante par le pouvoir exécutif qui n'a pas tenu compte des décisions de la Cour suprême de respecter la condamnation de Lino Oviedo, aujourd'hui en fuite.

Le représentant du Paraguay a exprimé le ferme engagement du Gouvernement d'unité nationale de respecter l'indépendance du judiciaire et de sauvegarder et protéger les droits civils et politiques de tous les citoyens, sans exception. Le gouvernement s'engage à coopérer avec la justice pour que les coupables soient poursuivis.

MME NAZIMA MUNSHI (European Union of Public Relations) a rappelé que l'administration de la justice et la tolérance religieuse sont intimement liées. À cet égard, elle a indiqué qu'au Pakistan, qui est une démocratie où la justice est indépendante et les lois faites par un Parlement élu, la communauté Ahmadiya se voit dénié son droit civil à observer ses croyances et à pratiquer sa religion. Elle s'est indignée de l'alliance entre les extrémistes, un gouvernement partisan et des juges hostiles pour annuler l'article 18 de la Déclaration des droits de l'homme donnant aux individus et aux communautés le droit de choisir et de pratiquer leur propre religion. Elle a attiré l'attention sur cette combinaison effrayante du Gouvernement pakistanais, des extrémistes militants et du pouvoir judiciaire unis dans la volonté d'exterminer la communauté ahmadiya. Le pouvoir judiciaire, lié par des lois discriminatoires et sous la pression des extrémistes religieux, est incapable de protéger les libertés et les droits des citoyens à vivre leur foi comme le veut la primauté du droit et la Déclaration des droits de l'homme.

M.JONATHAN SISSON (Mouvement international de la réconciliation) a rappelé que son association a été l'une des premières a soulever la question des droits de l'homme au Tibet. Il a réitéré son appel à la censure du Gouvernement chinois et a demandé instamment à la Commission de condamner le Gouvernement chinois pour ses violations graves et systématiques des droits de l'homme. Selon ses sources, plus de 30 000 moines sur les 46 300 que compte le Tibet ont reçu une «réhabilitation patriotique». Très clairement, les autorités chinoises veulent que disparaissent les institutions monastiques au Tibet. C'est l'avenir de la tradition monastique elle-même qui est remis en question, a-t-il déclaré. Cette campagne de la Chine est une grave violation à la liberté de religion telle que définie à l'article 18 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948. Ce droit est réitéré dans l'article 15 de la Convention internationale sur les droits civils et politiques. Le fait que la Chine soit devenue signataire de la Convention en octobre 1998 est une raison de plus pour demander des comptes au Gouvernement chinois. En conclusion, M.Sisson a demandé l'envoi du Rapporteur spécial sur l'intolérance religieuse au Tibet.

M.GHULAM RASOOL DAR (International Human Rights Association of American Minorities) a affirmé que la torture perpétrée par les forces indiennes est courante au Cachemire. Il a également souligné que la Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires a condamné l'Inde dans son rapport et a rappelé que le rapport d'Amnesty International intitulé «Disparitions au Jammu-et-Cachemire» est extrêmement sévère à l'égard de l'Inde. Le moment est venu pour la Commission d'agir pour mettre un terme à ces abus odieux, a estimé le représentant.

M.FREDERIC LECOCQ (Union interparlementaire) a rappelé que la démocratie implique l'existence d'un parlement représentatif de tous les secteurs de la population et pouvant s'exprimer librement. Or, il existe encore trop de violations de ce droit. L'Union interparlementaire attire l'attention sur les violations des droits de l'homme des parlementaires qui sont soumis à des arrestations arbitraires, à des tortures et à des procès iniques. Le représentant a cité en particulier le cas de M.Lim, chef de l'opposition en Malaisie, emprisonné pour avoir dénoncé le viol d'une jeune fille par un responsable gouvernemental et déchu de son statut de parlementaire. Lors de la visite de sa délégation en Malaisie, l'Union interparlementaire n'a pu rencontrer M.Lim en prison sans témoins; elle est très préoccupée par les conditions de détention de M.Lim. Elle tient à rappeler que le droit à la liberté d'expression et à une justice impartiale et indépendante sont la base de la démocratie parlementaire.

M.RONALD KOVEN (Comité mondial pour la liberté de la presse) ne partage pas l'avis de ceux qui acceptent parfois des limites à la liberté d'expression pour des motifs d'ordre public, y compris le Rapporteur spécial. Parmi les cas de violation de la liberté d'expression étudiés par le Comité, la plupart ont pour motif l'ordre public invoqué par les États. Ce n'est pas parce que les lois existent qu'elles sont légitimes. M. Koven a noté à cet égard la déclaration de la Malaisie de ce matin qui parlait de restrictions au motif de stabilité du pays. Il s'est par ailleurs dit en accord avec le Rapporteur spécial sur la nécessité de supprimer les lois sur la diffamation. Le Comité mondial pour la liberté de la presse va à cet égard lancer une campagne mondiale pour l'abrogation de ces lois. Par ailleurs, il a estimé que les médias qui se développent par le biais des technologies nouvelles doivent bénéficier des mêmes garanties que les médias traditionnels.

MME MARIETTE GRANGE (World Council of Churches) a mis l'accent sur l'importance de la lutte contre l'impunité, soulignant qu'il ne peut y avoir de véritable réconciliation sans recherche des responsabilités pour les crimes passés. Le rapport présenté le 25 février dernier par la mission de la vérité chargée de clarifier les violations de droits de l'homme liées au conflit armé au Guatemala a permis de rendre aux victimes de ces violations leur dignité. Pour le Gouvernement du Guatemala comme pour la communauté internationale, le défi consiste désormais à se montrer à la hauteur en assurant la mise en oeuvre des recommandations énoncées dans ce rapport. À ce jour, le système d'administration de la justice continue d'assurer l'impunité au Guatemala, a affirmé la représentante. Elle s'est réjouie de l'annonce faite cet après-midi par le Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats en ce qui concerne l'invitation qui lui a été adressée par le Gouvernement du Guatemala.

M.FRANCISCO GARCÍA HENRÍQUEZ (Unión Nacional de Juristas de Cuba) a déploré la vulnérabilité des systèmes judiciaires dans de nombreux pays alors que le pouvoir judiciaire est le garant du respect des droits de l'homme. À cet égard, il a dénoncé la privatisation des prisons. Il s'est en outre félicité de l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale dont il a souligné l'importance au regard de la notion fondamentale de l'égalité souveraine des États. Il a en outre rappelé que les exécutions extrajudiciaires ne sont pas l'apanage des pays en développement et a dénoncé l'utilisation de la peine de mort aux États-Unis. Il a en outre rappelé que Cuba a été un des premiers États à ratifier la Convention internationale contre la torture. Enfin, les juristes cubains se félicitent de la proclamation de l'année internationale de la culture et de la paix en 2000.

M.PHILIPPE LEBLANC (Franciscain international) s'est inquiété du développement de l'intolérance religieuse. Dans les pays où la discrimination religieuse figure dans les lois, il faut une action concertée des gouvernements et de la communauté internationale. Au Pakistan, la loi instaure une discrimination religieuse, ce qui favorise une culture de l'intolérance. Les lois anti-blasphème peuvent être une source de persécution des minorités. Le représentant s'est aussi déclaré préoccupé par la montée de la violence contre les minorités religieuses en Inde. Il a recommandé que le Rapporteur spécial sur l'intolérance religieuse assure le suivi de sa visite de 1995 au Pakistan le plus rapidement possible pour se rendre compte de la situation sur place. De plus, il a recommandé au Gouvernement du Pakistan d'examiner sérieusement les moyens de modifier sa législation afin qu'elle soit conforme aux principes contenus dans la Déclaration pour l'élimination de toutes les formes d'intolérance fondée sur la religion ou la croyance.

M.SIHYUN CHO (Jeunesse étudiante catholique internationale) a attiré l'attention de la Commission sur les violations massives des droits de l'homme perpétrées en vertu de lois de sécurité nationale à travers le monde, en particulier en République de Corée, en Chine, en Indonésie, en Malaisie, en Inde, au Myanmar et au Pérou. Les lois de sécurité nationale sont des lois spéciales promulguées dans le but de permettre à des organes de l'État de prendre des mesures violant le droit international relatif aux droits de l'homme, comme en témoigne l'exemple typique de la République de Corée où, depuis février 1998, 413 personnes ont été emprisonnées et poursuivies pour infraction à la Loi sur la sécurité nationale. Le représentant a exhorté le Gouvernement de la République de Corée à abroger cette loi et a demandé au Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats de se rendre dans ce pays et dans d'autres pays où sont appliquées des lois de sécurité nationale. Il a également demandé à la Commission de nommer un rapporteur spécial sur les lois de sécurité nationale et a demandé au Rapporteur spécial sur la liberté d'expression d'entreprendre pour son prochain rapport une étude portant sur les violations massives des droits de l'homme commises en vertu de lois de sécurité nationale.

MME JAYANTI KIRPALANI (Brahma Kumaris World Spiritual University) a indiqué que la discrimination et l'intolérance religieuse augmentaient à mesure que déclinait l'estime de soi et a souligné la nécessité de se mettre en paix avec son identité. Le respect de soi-même entraîne le respect d'autrui. C'est le but de l'enseignement de Brahma Kumaris. En 1995, un programme d'éducation a été mis en place sur la base des mêmes valeurs et opère dans plus de 70 pays en partenariat avec l'UNICEF et l'Unesco. MmeKirpalani a appelé à un engagement pour promouvoir une culture de valeurs à travers une transformation personnelle. Elle a déploré la persistance de manifestations d'intolérance et de discrimination sur la base de croyances religieuses dans certains pays, en particulier en Europe. À cet égard, elle a demandé qu'un rapporteur spécial soit nommé pour examiner la situation dans les pays européens qui ont qualifié certaines organisations de sectes sans enquête préalable et sans laisser à ces organisations l'occasion de d'exposer leurs travaux et leurs valeurs.

M.LIU NIANCHUN (Robert F. Kennedy Memorial) a déclaré que son droit à la liberté d'expression a été violé en mai 1995 par la Chine. Il s'est dit victime d'un enlèvement arbitraire. Il a ensuite été condamné administrativement à trois ans de rééducation. M.Liu dit avoir été soumis à la torture à maintes reprises. En juin 1997, sa peine a été prorogée. Le représentant a affirmé que les autorités du camp ont ordonné aux autres prisonniers de le battre, ce qui est une pratique courante dans les centres de détention chinois, a-t-il ajouté. Il a exprimé l'espoir que le Rapporteur spécial sur la liberté d'opinion et d'expression qui a abordé son cas dans son Rapport de 1999 pourra se rendre en Chine prochainement. En ce qui concerne l'Indonésie, le représentant a déclaré que les objectifs de sécurité nationale ou de stabilité continuent de servir d'alibi à l'État pour porter atteinte aux droits civils et politiques. Aussi, la Commission devrait exhorter le gouvernement indonésien à assurer une véritable sécurité nationale en libérant toutes les personnes détenues pour avoir exercé pacifiquement leurs droits internationalement reconnus.

MME YANETTE BAUTISTA (Fédération latino-américaine des associations des familles des détenus disparus) a souligné que pour la seule année 1998, le Groupe de travail sur les disparitions forcées a transmis 1015 nouveaux dossiers à 31 gouvernements. Elle a déploré qu'il n'existe pas encore de convention interdisant la disparition forcée et a rappelé que le projet de convention sur les disparitions forcées qui est aujourd'hui soumis à la Commission est le fruit de deux décennies de travaux réalisés par les parents de personnes disparues, les organisations non gouvernementales, les experts indépendants et d'autres membres de la communauté internationale. Aussi, a-t-elle lancé un appel à la Commission pour qu'elle établisse un groupe de travail intersession qui aurait pour mandat d'étudier et d'adopter un avant-projet de convention sur les disparitions forcées.


MME SUSANA FRIED (Centre de la tribune de la femme, au nom également d'autres organisations) a dénoncé le meurtre, le 6 avril dernier, d'une femme de 29 ans par un homme engagé par sa propre famille parce qu'elle voulait engager une procédure de divorce. Ces «meurtres d'honneur» sont une honte. La police et le pouvoir judiciaire défendent les familles et encouragent ces meurtres, a-t-elle déclaré. Les femmes ne peuvent agir en leur nom propre et engager des procédures contre leurs familles. Ces violences sont trop fréquentes dans plusieurs pays. Elle a demandé à la Commission de condamner ces crimes d'honneur et de demander des études sur les causes et les recours face à ce genre d'actes. Elle a également exprimé sa préoccupation face aux menaces contre la vie de MmeJahangir dont la tête a été mise à prix et a demandé à la Commission et au Gouvernement du Pakistan de prendre des mesures pour la protéger. Elle a également exprimé sa solidarité avec les défenseurs des droits de l'homme qui risquent ou ont perdu la vie.

M.SOE AUNG (Worldview International Foundation) s'est exprimé sur la situation de la liberté d'expression au Myanmar, où, a-t-il dit, des personnes ont été punies simplement pour avoir exprimé leurs points de vue. Le régime militaire a effectivement et systématiquement supprimé ceux qui ont des vues différentes que les leurs, a-t-il affirmé. Mon peuple est extrêmement pauvre et les droits à la liberté d'expression, d'association et d'assemblée peuvent paraître être un luxe. En fait, ces libertés sont nécessaires pour assurer un véritable développement qui aide réellement la population. Si nous ne pouvons pas soulever les problèmes qui affectent notre vie de tous les jours, y compris la façon dont est conduite l'économie et l'administration du pays, comment pourrait-on résoudre ces problèmes ? Si nous sommes tout le temps obligés de vivre dans la peur, comment les citoyens peuvent-ils participer au progrès du pays, s'est demandé le représentant. Il a demandé instamment que le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de liberté d'expression et d'opinion incluent la Birmanie dans son prochain rapport. De plus, il a engagé les autorités birmanes de relâcher inconditionnellement toutes les personnes qui sont détenues pour avoir exercé leur droit à la liberté d'expression.

MME TATI KRISNAWATY (Third World Movement Against the Exploitation of Women) a souligné que le fait de mettre un terme à l'impunité est fondamentalement une question politique. Lorsque subsistent au sein d'une nouvelle entité politique des éléments de structures politiques répressives et qu'aucune mesure concrète n'est prise pour assurer le retrait des militaires de tous les aspects de la vie politique et sociale, il paraît difficile de faire cesser l'impunité, a-t-elle déclaré. Elle a affirmé qu'en Indonésie, les violations des droits de l'homme font rarement l'objet d'enquêtes adéquates et sont encore plus rarement poursuivies devant la justice. En dépit de toutes les mesures prises par l'administration Habibi depuis mai 1998 en matière de coopération avec les mécanismes de droits de l'homme des NationsUnies, le pouvoir judiciaire est toujours sous le contrôle du pouvoir exécutif et sous contrôle militaire. La Commission devrait donc surveiller étroitement l'application des recommandations faites par le Groupe de travail sur la détention arbitraire à l'issue de sa visite en Indonésie en février 1999 ainsi que l'application des recommandations faites par la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes.

M.IRIANTO SUBIAKTO (Organisation néerlandaise pour la coopération internationale au développement) a demandé au Gouvernement indonésien de prendre des mesures pour éclaircir les cas de disparitions involontaires. Il a dénoncé la responsabilité dans la majeure partie des cas du Gouvernement et du pouvoir militaire, notamment au Timor oriental. Les membres des familles des disparus ont souvent peur de déclarer les disparitions aux autorités car celles-ci y sont souvent pour quelque chose. En effet, selon M.Subiakto, les disparitions sont presque toujours imputables au Gouvernement ou à l'armée. Il a dénoncé l'impunité qui règne et appelé la Commission à faire pression pour qu'une véritable enquête soit menée sur les disparitions et qu'un terme soit mis à l'impunité. Il a également demandé que le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires se rende en Indonésie.

MME SAMINA IBRAHIM (Institut international de la paix) a déclaré qu'avec la victoire contre les forces du colonialisme, les peuples des anciennes colonies ont espéré pouvoir bénéficier de la liberté et d'un environnement démocratique. Il y a de nombreux exemples où la religion est utilisée par les États et certains groupes non étatiques comme une force destructrice. Par exemple, c'est justement lorsque le peuple du Pakistan commençait à apprécier les bienfaits de la démocratie que les tenants de la loi martiale ont décidé de supprimer la démocratie. En 1998, la charia et le Coran sont devenus les Lois suprêmes au Pakistan, mais cela n'a rien à voir avec l'Islam, c'est objectivement un moyen utilisé par le pouvoir pour brider la parole à toute critique. Les médias peuvent ainsi être muselés, les opposants politiques envoyés en prison. La représentante a réitéré que la liberté d'expression et d'opinion sont les fondements de toute liberté sur laquelle l'édifice de la démocratie repose et doivent être protégés par tous moyens.

M.HORACIA RAVENNA (Assemblée permanente pour les droits de l'homme) a demandé que des mesures soient prises pour faire baisser le chômage et répondre, par le biais de mesures socio-économiques, à l'augmentation de la criminalité et de l'insécurité dans les villes. Il a affirmé que le Gouvernement argentin a profité de la situation qui prévaut dans le pays en matière d'insécurité pour lancer une campagne de répression tendancieuse contre les citoyens d'autres pays latino-américains. Les autorités argentines ont pris ces derniers jours de nouvelles mesures associant de manière simpliste immigrant, insécurité et chômage. Le Président Menem n'a pas respecté les engagements qu'il avait pris en avril 1998, en paraphant la Déclaration de Santiago, en faveur de la défense des droits des travailleurs migrants. Ce sont la pauvreté et le chômage qui menacent la sécurité sociale et les étrangers sont les victimes d'un système qu'ils n'ont aucunement contribué à créer.

MME SARILA ABEYSEKERA (Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté) a dénoncé les violations persistantes des droits civils et politiques au Sri Lanka. En particulier, les disparitions, la torture et les exécutions sommaires et arbitraires continuent dans les zones de conflits du Nord et de l'Est ainsi que dans le Sud. Cette situation affecte particulièrement les droits des femmes de toutes les communautés. Elle a en particulier souligné l'impunité qui règne et qui participe au climat de peur ambiant. Signalant la découverte de charniers à Chenmani et Jaffna, elle a demandé à la Commission de faire pression pour qu'une enquête soit diligentée. Elle lui demande également d'encourager et de faciliter la visite du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires. Elle a en outre exprimé sa vive préoccupation face aux récentes déclarations du Ministre de la justice annonçant le rétablissement de la peine de mort.

MME CYNTHIA NEURY (Centre Europe-tiers monde) a rappelé la recommandation faite à l'issue des «Rencontres internationales sur l'impunité» réunies à Genève en novembre 1992 selon laquelle la question de l'impunité devrait inclure les violations graves des droits économiques, sociaux et culturels. Elle a demandé à la Commission de prendre acte du rapport final sur la question de l'impunité des auteurs de violations des droits économiques, sociaux et culturels (E/CN.4/Sub.2/1997/8) et de créer un mécanisme de suivi qui permettrait de poursuivre l'examen du phénomène de l'impunité. Elle a par ailleurs jugé préoccupante la situation des défenseurs des droits de l'homme en Tunisie et a demandé aux autorités tunisiennes de mettre fin à la répression et aux harcèlements que subissent les opposants politiques et les démocrates dans ce pays.

MME DEBORAH STOTHARD (Aliran Kesedaran Negara - National Consciousness Movement) a dénoncé l'arrestation à Rangoun de 18 personnes venant d'Australie, d'Indonésie, de Malaisie, des Philippines, de Thaïlande et des États-Unis pour avoir délivré des messages de bonne volonté et condamné à 5ans de prisons après un procès fantoche. La détention et le procès prouvent que la Birmanie ne respecte la primauté du droit et il n'y a eu que deux procès public en Birmanie au cours des dernières années, a noté MmeStothard. Elle a également déploré que les violations de la primauté du droit et de la liberté d'expression, d'assemblée et d'association soient à présent aussi répandues en Malaisie qu'en Birmanie. Elle a également déploré les violations à Singapour et jugés injustes les restrictions et le harcèlement contre les opposants politiques.

VOIR CETTE PAGE EN :