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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND LES PRÉSIDENTS DE LA SUISSE, DE LA FRANCE, DE LA RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE DE YOUGOSLAVIE ET DE LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

30 Mars 2001



Commission des droits de l'homme
57ème session
30 mars 2001
Matin






Elle entend également le Secrétaire général des Nations Unies



La Commission des droits de l'homme a entendu, ce matin, les Présidents de la Suisse, de la France, de la République fédérale de Yougoslavie et de la République démocratique du Congo, ainsi que le Secrétaire général des Nations Unies, le Président en exercice de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et des ministres de la Hongrie, du Rwanda et de l'Autorité palestinienne.

Le Président de la Confédération suisse, M. Moritz Leuenberger, a regretté que les valeurs fondatrices telles que la liberté de religion et de conscience, la liberté d'expression, ou encore la promotion de la démocratie et des principes de l'État de droit, soient bafouées quotidiennement dans le monde. Pays riches comme pays pauvres, grandes nations comme petits pays, nous avons tous notre part de responsabilité dans cet état de fait. En se globalisant, la politique doit s'interroger sur la cohérence de ses stratégies ou sur l'incohérence de ses silences, qui masquent mal une certaine hypocrisie. Combien de fois la raison économique ou la raison d'État n'a-t-elle pas conduit à taire des violations des droits de l'homme dans un pays, partenaire commercial ou allié stratégique? Le Président a déclaré que nul gouvernement, nulle société ou ethnie, nulle entreprise multinationale ne pouvait se soustraire à sa responsabilité locale ou globale.

Le Président de la France, M. Jacques Chirac, a souligné que la France souhaite d'autant moins s'ériger en donneuse de leçons qu'elle-même peut parfaire son bilan. La situation dans les prisons, l'état de la présomption d'innocence, la persistance de la pauvreté, des réflexes racistes parfois, demeurent des domaines où le pays peut et doit progresser. M. Chirac a d'autre part jugé nécessaire de compléter la Convention contre la torture en lui adjoignant un protocole international de visite. Il faut en outre progresser dans la rédaction de la Déclaration des droits des populations ou peuples autochtones, a déclaré M. Chirac. Il a par ailleurs estimé que le Secrétaire général pourrait recevoir comme mission de réfléchir à la forme et au contenu d'un texte universel consacré à la bioéthique. À l'heure du réchauffement climatique et de «l'inquiétante et inacceptable remise en cause du Protocole de Kyoto», M. Chirac a appelé tous les États, et d'abord les pays industrialisés, à mettre en oeuvre sans retard le Protocole de Kyoto».

Le Président de la République fédérale de Yougoslavie, M. Vojislav Kostunica, a souligné l'importance que son Gouvernement accorde à la défense et à la promotion des droits de l'homme et des libertés fondamentales de tous ses citoyens. Le Gouvernement s'est efforcé de se pencher d'urgence sur le problème des réfugiés ou personnes déplacées; la nouvelle politique sur les réfugiés menée par le gouvernement est fondée sur les principes de solidarité, de libre choix et de justice. Le Président yougoslave a par ailleurs estimé que le futur de la région ne réside pas dans l'esprit de division qui anime certains mais dans le renforcement de l'état de droit et des garanties des libertés et des droits fondamentaux.

Le Président de la République démocratique du Congo, M. Joseph Kabila, a souhaité voir le Secrétaire général poursuivre «son oeuvre grandiose pour la restauration de la paix dans mon pays lors d'un second mandat». La guerre d'agression et l'occupation illégale d'une partie de son territoire par les troupes rwandaises, ougandaises et burundaises est la base d'un véritable calvaire pour le peuple congolais et cette situation préjudiciable aux droits de l'homme ne peut prendre fin qu'avec le retrait total et définitif des troupes d'agression, a-t-il déclaré. À cet égard, il a souhaité que l'application des plans de désengagement soit immédiatement suivie du déploiement des Casques bleus. M. Kabila a indiqué que son premier voeu est de permettre au peuple congolais de retrouver la paix afin de s'atteler aux nobles tâches de la reconstruction du pays et il a réaffirmé sa volonté de renforcer l'état de droit, de consolider la démocratie et de garantir les droits de l'homme.

Le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, a rendu hommage à Mme Mary Robinson, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, et à ses efforts pour sensibiliser la communauté internationale aux droits économiques, sociaux et culturels trop souvent négligés, en particulier le droit au développement. Il a en outre estimé qu'il fallait dès à présent mettre tout en oeuvre pour que la Conférence mondiale contre le racisme devienne un idéal de progrès pour l'humanité toute entière. Le racisme et l'intolérance sont des maux dont souffrent tous les pays sans exception, a-t-il rappelé. Ces comportements font obstacle au développement et servent aussi de prétexte pour déclencher un conflit armé. Il a souligné la nécessité vitale de la coopération des États avec le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale et l'importance de porter toute l'attention sur la déclaration et le programme d'action de la Conférence de Durban qui devront être solides pour pouvoir faire autorité, être tournés vers l'avenir, et permettre à tous les peuples de pouvoir s'y reconnaître.

Le Ministre des affaires étrangères de la Roumanie et Président en exercice de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), M. Mircea Dan Geoana a insisté sur le rôle de l'SCEE pour améliorer et contrôler la coopération en matière de lutte contre le trafic des êtres humains, et a exprimé sa préoccupation s'agissant des crises dans l'ex-République yougoslave de Macédoine.



Le Ministre de la planification de la coopération internationale de l'Autorité palestinienne, M. Nabeel Shaath, a déclaré que l'Autorité palestinienne s'est engagée à coopérer avec Israël mais cela ne doit pas signifier la négation des droits les plus fondamentaux du peuple palestinien. Il a appelé Israël à oeuvrer avec l'Autorité palestinienne en vue de mettre fin à la violence et d'arriver à une paix juste et durable.

Le Ministre des affaires étrangères de la Hongrie, M. Janos Martonyi, a réitéré le ferme engagement de son pays en faveur des droits de l'homme, en particulier les droits des minorités nationales, et s'est prononcé en faveur d'un instrument juridiquement contraignant sur les droits des minorités.

Le Ministre de la justice et des relations institutionnelles du Rwanda, M. Jean de Dieu Mucyo, a soutenu l'idée de transférer le siège du TPI pour le Rwanda vers le Rwanda car les procès de génocide dans le pays ont un aspect plus pédagogique que punitif sur la population rwandaise.

Au cours de sa prochaine séance plénière, cet après-midi à 15 heures, la Commission reprendra l'examen du point de son ordre du jour consacré à la question de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales où qu'elle se produise dans le monde.



Déclarations

M. MORITZ LEUENBERGER, Président de la Suisse, a salué l'occasion de s'exprimer devant la Commission des droits de l'homme, véritable conscience morale de la communauté internationale. Authentique précurseur de sa difficile mission, Jean-Jacques Rousseau, citoyen de Genève, écrivait que «l'homme est né libre et partout il est dans les fers». M. Leuenberger a regretté que les valeurs fondatrices de la communauté des humains, telles que la liberté de religion et de conscience, la liberté d'expression, ou encore de la promotion de la démocratie et des principes de l'état de droit soient bafouées quotidiennement dans le monde. Guerres, assassinats, emprisonnements, tortures, disparitions, viols piétinent chaque jour les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels de la personne, de la communauté. Pays riches comme pays pauvres, grandes nations comme petits pays, nous avons tous notre part de responsabilité dans cet état de fait. Car nous vivons tous, interdépendants, dans le «village global» où biens, informations, capitaux et personnes circulent facilement. Les gouvernants ont favorisé cette mondialisation, cette libéralisation, cette ouverture des frontières. On en attend croissance et prospérité pour tous, même si pour l'heure les inégalités se renforcent. Ces inégalités sont insupportables : deux milliards de personnes vivent avec moins de 2 dollars par jour. Un monde d'inégalités criantes et de pauvreté croissante ne peut pas être un monde de paix. Le droit au développement fait partie intégrante des droits de l'homme. Les pays riches portent une responsabilité particulière face à l'immense pauvreté. Le protectionnisme commercial, l'échange inégal, la faiblesse des investissements et de la coopération, la fuite des cerveaux et des capitaux ne favorisent pas le développement. Après avoir globalisé l'économie, il s'agit maintenant de globaliser la politique, de globaliser la responsabilité politique, économique et sociale.

Le droit international a réalisé de constants progrès sous l'égide de l'ONU et des organisations régionales. L'impunité des criminels de guerre, des responsables de génocide n'est plus garantie. Les Tribunaux internationaux sur le Rwanda, l'ex-Yougoslavie et la Cour pénale

internationale, que le Parlement suisse est sur le point d'approuver, constituent de nouveaux instruments très précieux. En se globalisant, la politique doit s'interroger sur la cohérence de ses stratégies. Ou sur l'incohérence de ses silences, qui masquent mal une certaine hypocrisie.

Le Président de la Suisse a déclaré qu'il lui serait facile, obéissant ainsi à une sorte de rituel qui engage peu, de dresser la liste des violations des droits de l'homme dans le monde. En commençant par les grands de ce monde, membres du Conseil de sécurité, il lui serait aisé de condamner l'existence de la peine de mort, par exemple aux États-Unis, de réaffirmer que les droits de l'homme ne sont pas respectés en Tchétchénie, de rappeler que les mesures de répression à l'encontre des minorités et de communautés religieuses restent massives en Chine. Il lui serait facile d'allonger la liste, de citer par exemple l'Afghanistan, le Soudan, le Proche-Orient ou d'autres régions. Il a déclaré que la responsabilité de la communauté internationale va plus loin que la simple incantation. Elle implique pour chaque État de prendre des mesures concrètes, y compris dans les domaines économique et politique, comme les régimes répressifs. C'est le droit international qui doit guider ces mesures, et non pas les intérêts particuliers ou les visions de tel ou tel État.

Avec sa nouvelle Constitution fédérale, véritable catalogue des droits et libertés fondamentaux, la Suisse s'inscrit volontiers en pays-modèle des droits de la personne. La Suisse est pourtant parfois condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme. On lui reproche des faits de discrimination raciale, d'inégalités de rémunération entre hommes et femmes ou encore l'interdiction du regroupement familial pour les travailleurs saisonniers étrangers. M. Leuenberger a fait observer que cela démontre que les droits et libertés fondamentaux ne sont jamais acquis une fois pour toutes. La Suisse espère que cette Commission puisse, au cours de cette session, accomplir des progrès en vue d'un protocole additionnel à la Convention contre la torture et donner un signal politique clair en vue de la Conférence mondiale sur les enfants et de celle contre le racisme de Durban à laquelle le Président de la Suisse compte participer. Seule la mise en oeuvre sans complaisance de nos résolutions nous rapprochera d'un monde de liberté, de justice et de solidarité, seul garant d'une véritable politique des droits de l'homme, a-t-il ajouté. Le Président a tenu à rendre hommage à Mme Mary Robinson, Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, pour son engagement et pour son intense activité.

M. KOFI ANNAN, Secrétaire général des Nations Unies, a rendu hommage à Mme Mary Robinson, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, dont il a dit respecter la décision de ne pas solliciter un second mandat, tout en la regrettant profondément. Il a souligné les efforts de Mme Robinson pour sensibiliser la communauté internationale aux droits économiques, sociaux et culturels trop souvent négligés, en particulier le droit au développement. Il s'est engagé, dans les mois à venir, à développer de concert avec la Haut-Commissaire cet acquis et, en particulier, à assurer le succès de la Conférence mondiale contre le racisme. À cet égard, il a estimé qu'il fallait dès à présent mettre tout en oeuvre pour que cette conférence réédite pour Durban ce que le Sommet «Planète Terre» a accompli pour Rio de Janeiro, c'est-à-dire qu'elle en fasse un idéal de progrès pour l'humanité toute entière. «Le racisme et l'intolérance sont des maux dont souffrent tous les pays sans exception», a rappelé le Secrétaire général qui a évoqué certaines formes de discrimination qui ne sont que trop familières, à commencer par celles auxquelles les femmes sont en butte. Il a également évoqué les attaques contre les immigrés et les nouvelles formes d'intolérance apparues ces dix dernières années, en particulier, l'ostracisme dont son victimes les porteurs du VIH/sida, l'inquiétude que certains ressentent face à l'intensification des mouvements transfrontières qui va de pair avec la mondialisation, la mise à profit par certains l'internet, outil extraordinaire d'éducation et d'enrichissement intellectuel, pour véhiculer des messages de haine et des images dégradantes, contraires à la dignité humaine. Ces comportements sont profondément inquiétants et font obstacle au développement. Ils servent aussi de prétexte pour déclencher un conflit armé, qui va jeter sur les routes réfugiés et personnes déplacées, a-t-il ajouté.

M. Annan a déploré qu'en dépit de l'adoption d'un ensemble impressionnant de lois et de la création d'institutions et de groupes de surveillance indépendants visant à faire respecter les droits de l'homme, ceux auxquels on dénie la jouissance des ces droits ignorent le plus souvent jusqu'à leur existence. C'est à cette lourde tâche que devront s'atteler les participants de la Conférence a-t-il déclaré, estimant qu'en dépit de ce que pensent certains, les Conférences mondiales ne sont ni une perte d'argent, ni une perte de temps, et que la Conférence de Durban peut avoir une profonde influence sur la vie de toutes les victimes du racisme. À cet égard, il a souligné la nécessité vitale de la coopération des États avec le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale. En effet, si la Conférence aura de toute façon le mérite de sensibiliser l'opinion et à faire naître un conscience collective, l'objectif principal est d'infléchir l'action des pouvoirs publics. Pour cela, nous devons porter toute notre attention sur la déclaration et le programme d'action de la Conférence, a-t-il déclaré, rappelant que les documents publiés à l'issue des conférences stimulent la création de nouvelles institutions pour la promotion des droits de l'homme et sont parfois de puissants instruments de changement pacifique. En conséquence, il a demandé à tous de faire en sorte que l'on dispose d'une déclaration et d'un programme d'action solides et qui fassent autorité, tournés vers l'avenir et dans lesquels tous les peuples puissent se reconnaître.

M. JACQUES CHIRAC, Président de la France, a souligné que si les Nations Unies s'affirment chaque jour davantage comme la patrie virtuelle et l'instrument principal de la défense des droits de l'homme, il n'en demeure pas moins que beaucoup reste à faire. Une architecture complexe a été mise en place, a rappelé le Président français avant d'ajouter qu'il faut en améliorer le fonctionnement, notamment pour mieux lutter contre le cumul des discriminations dont souffrent les femmes et les populations vulnérables. Il a affirmé que l'objectif doit être la ratification universelle des pactes et traités. L'adhésion de la Chine, où vit le cinquième de l'humanité, au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels constitue une avancée importante, a estimé le Président avant de souligner que le dialogue que l'ONU et l'Europe entretiennent avec elle sur ces sujets n'en est que plus justifié pour l'encourager à ratifier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et à en assurer le respect. Il est en outre urgent qu'entre en vigueur le traité instituant la Cour pénale internationale, a affirmé M. Chirac.

La France plaide avec force pour que le budget ordinaire des Nations Unies augmente la dotation du Haut-Commissariat aux droits de l'homme, a déclaré le Président. Par l'accord de coopération qu'elle va conclure avec lui, elle consacrera plus de dix millions de francs supplémentaires à des projets d'assistance technique. Parce que les idéaux et les principes qui nous animent s'appliquent partout, la Commission doit se saisir des problèmes qui soulèvent l'émotion légitime de la communauté internationale, a déclaré Jacques Chirac. Ainsi, quelle aurait été sa crédibilité si elle n'avait pas inscrit l'année dernière à son ordre du jour la question tchétchène ?, a-t-il demandé. De même, en raison de la dramatique dégradation de la situation dans les territoires palestiniens occupés, il est de son devoir d'y examiner l'état des droits de l'homme, dans un esprit d'équité et en se fondant sur les seuls faits.

M. Chirac a souligné que la France souhaite d'autant moins s'ériger en donneuse de leçons qu'elle-même peut parfaire son bilan. Les droits fondamentaux y sont pleinement respectés. Mais malgré ses efforts et ses lois, la situation dans les prisons, l'état de la présomption d'innocence, la persistance de la pauvreté, des réflexes racistes parfois, demeurent des domaines où la France peut et doit progresser.

La France est réservée à l'égard des sanctions, a rappelé le Président Chirac : économiques, elles frappent d'abord les populations civiles; politiques, elles provoquent un raidissement des dirigeants concernés. Mais quand un pays bafoue massivement les valeurs universelles, la communauté internationale se doit de le condamner et d'exercer, dans le respect de la Charte des Nations Unies, des pressions ciblées pour faire évoluer la situation, a estimé M. Chirac. Dans un monde où les entreprises s'internationalisent toujours plus, nous avons besoin que soient mieux établies leurs responsabilités, a poursuivi le Président français. Le Secrétaire général a proposé ce «pacte mondial» novateur par lequel elles s'engagent à respecter les droits fondamentaux, a rappelé M. Chirac, avant de préciser que la France appuie cette initiative et lui apportera son soutien financier.

Soulignant que rien n'est plus révoltant que la torture, le Président français a insisté sur la nécessité de compléter la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en lui adjoignant un protocole international de visite. La pratique trop courante des disparitions forcées est un autre motif de révolte, a ajouté M. Chirac qui a exprimé le souhait que la Commission se mobilise contre ce crime odieux et que les gouvernements des pays concernés qui, comme celui de Colombie, ont décidé de le combattre, l'appuient dans cet effort. M. Chirac en a par ailleurs appelé à l'abolition universelle de la peine de mort, dont la première étape serait un moratoire général.

L'éradication de la pauvreté est une priorité, a déclaré M. Chirac. Jamais le monde n'a été aussi riche et pourtant plus de deux milliards d'entre nous vivent avec moins de 2 euros par jour. Les trithérapies existent et pourtant, de par le monde, des centaines de milliers de personnes continuent de mourir du sida sans pouvoir en bénéficier. Il faut réaffirmer avec force le droit au développement, le droit à la santé, a déclaré M. Chirac. À Dakar, en novembre, avec l'ONU et à l'initiative du Sénégal et de la France, l'industrie, les ONG et les États devront s'entendre sur des mécanismes de prix et des projets par pays ouvrant l'accès des malades aux soins contre le sida.

La Conférence mondiale contre le racisme fera oeuvre utile en s'attaquant aux problèmes d'aujourd'hui, a déclaré M. Chirac. Le racisme se manifeste sur tous les continents, a-t-il rappelé. C'est la xénophobie et l'affrontement ethnique dont souffrent, entre autres, l'Indonésie, la région des Grands Lacs africains ou la Sierra Leone et qui ont meurtri l'Europe des Balkans. C'est l'obscurantisme dont la tragédie afghane nous montre les ravages. Enfin, il nous faut progresser dans la rédaction de la Déclaration des droits des populations ou peuples autochtones. Ce qui est en jeu, a souligné le Président français, c'est la définition et la mise en oeuvre d'une éthique planétaire capable de fonder l'avenir de l'homme en gardant en mémoire son origine et ses liens avec la nature. S'agissant d'internet, les mesures de protection et de contrôle seront efficaces si elles sont universelles, a par ailleurs souligné M. Chirac. Le Secrétaire général pourrait en outre devenir le pivot de la réflexion des organisations internationales sur les enjeux liés au génome humain et pourrait recevoir comme première mission de réfléchir à la forme et au contenu d'un texte universel consacré à la bioéthique. À l'heure du réchauffement climatique et de l'inquiétante et inacceptable remise en cause du Protocole de Kyoto, M. Chirac, a appelé tous les États, et d'abord les pays industrialisés, à mettre en oeuvre sans retard le Protocole de Kyoto.

M. VOJISLAV KOSTUNICA, Président de la République fédérale de Yougoslavie, a rendu hommage à la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Mme Mary Robinson, pour le courage, la détermination et l'impartialité dont elle a fait preuve au cours de son mandat. Il a également remercié le Rapporteur spécial, Mr. Jiri Dientsbier, pour son rapport complet, extrêmement utile, qui donne une image plus claire de la situation des droits de l'homme en République fédérale de Yougoslavie, en Bosnie-Herzégovine et en Croatie. Depuis neuf ans, c'est aujourd'hui la première apparition de représentants yougoslaves devant la Commission. La population s'est élevée le 5 octobre pour défendre sa volonté exprimée par les urnes et a permis, par une révolution pacifique et sans effusion de sang, de renverser le régime autoritaire qui avait détruit les droits de l'homme et les libertés fondamentales pendant 56 ans. Maintenant, il s'agit de construire une société nouvelle, saine et libre sur les ruines d'un système inhumain. Il est important de s'attaquer au problème difficile du terrorisme albanais, a par ailleurs souligné M. Kostunica.

L'exercice des libertés et des droits fondamentaux est l'une des premières épreuves à passer pour la démocratie. Une société sur la voie de la démocratie peut installer efficacement des institutions et établir des règles générales de conduite politique mais cela reste à un niveau formel. Cette société peut inclure dans sa constitution un catalogue de libertés et de droits fondamentaux et adopter des lois qui garantissent de nombreux doits personnels, politiques, économiques et sociaux à ses citoyens; mais la matérialisation de ces principes et de ces lois demandent que de nombreuses conditions préalables soient remplies. La liste de ces conditions préalables pour la République fédérale de Yougoslavie est longue du fait que le pays a été dirigé par des régimes non démocratiques pendant plus de cinq décennies. Les changements dans la vie publique sont concevables seulement s'il existe une collaboration entre l'organisation civile et l'activité politique. Un nouveau cadre constitutionnel et juridique pour les libertés et les droits fondamentaux doit être établi et des réformes judiciaires doivent être entreprises. Ce sera une tâche difficile. Le pays fait face à une situation difficile liée à la nécessité d'une reconstruction interne et de la viabilité même de l'État. Face à des demandes sécessionnistes, l'État a concentré son énergie à lutter pour sa survie. Les aspirations politiques et les actions visant la sécession ne favorisent pas la création des conditions nécessaires à l'amélioration de la situation des droits de l'homme dans le pays. Le Président yougoslave a estimé que le futur de la région ne réside pas dans l'esprit de division qui anime certains mais dans le renforcement de l'état de droit et des garanties des libertés et des droits fondamentaux.

Le République fédérale de Yougoslavie est un État complexe qui comprend deux unités fédérales composées de différentes ethnies, forces économiques et traditions culturelles. Ces éléments exigent une formule constitutionnelle appropriée qui tienne compte de la complexité et de la diversité de ces facteurs. Il est urgent d'entreprendre des réformes judiciaires et de résoudre les problèmes constitutionnels qui peuvent se poser. Plusieurs projets juridiques sont en cours d'élaboration en Serbie, qui visent à assurer la protection des droits des minorités, à préparer une privatisation efficace et à favoriser les investissements étrangers. Le Président s'est félicité de la coopération entre son pays et le Tribunal criminel international pour l'ex-Yougoslavie. Il a précisé que son pays a pris des mesures importantes pour promouvoir et défendre les droits de l'homme. Ainsi, il a établi un Ministère fédéral pour les minorités et les communautés ethniques, adopté une loi sur l'amnistie et a amendé la loi sur les procédures criminelles. Des lois régissant le statut des organisations non gouvernementales et des partis politiques sont en cours d'élaboration. Le gouvernement s'est efforcé de se pencher de façon urgente sur les problèmes des 800 000 réfugiés et personnes déplacées en République fédérale de Yougoslavie. La nouvelle politique sur les réfugiés menée par le gouvernement est fondée sur la solidarité, le libre choix et la justice. Le Président a estimé qu'il était juste que chaque réfugié puisse prendre une décision de façon indépendante au sujet de son avenir et a reconnu qu'il était du devoir de l'État d'offrir aux réfugiés l'assistance dont ils ont besoin quel que soit leur choix. Le Président a regretté qu'il existe une tendance à associer les droits de l'homme au droit des minorités. Le Gouvernement de la République fédérale de Yougoslavie reconnaît l'importante responsabilité qui est la sienne et renouvelle son engagement à sortir le pays de la crise et de promouvoir et renforcer le plein respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales de tous ses citoyens.

M. JOSEPH KABILA, Président de la République démocratique du Congo, a exprimé le souhait que le Secrétaire général des Nations Unis poursuive son oeuvre grandiose pour la restauration de la paix dans son pays lors d'un second mandat. Rappelant que le changement intervenu dans son pays en 1997 avait pour but de libérer les Congolais de la dictature et de leur rendre leur dignité, il a précisé que la situation rencontrée à l'issue de la guerre de libération a contraint le Gouvernement de Salut public à instaurer un régime d'exception transitoire. Néanmoins, et malgré la guerre d'agression, le Gouvernement de Salut public s'est efforcé de préserver le noyau dur ou intangible des droits de l'homme. M. Kabila a évoqué un certain nombre d'activités entreprises en ce sens.

La guerre d'agression et l'occupation illégale d'une partie du territoire congolais par les troupes rwandaises, ougandaises et burundaises est la base d'un véritable calvaire pour le peuple congolais et cette situation préjudiciable aux droits de l'homme ne peut prendre fin qu'avec le retrait total et définitif des troupes d'agression, a-t-il déclaré. À cet égard, il a rappelé que selon plusieurs sources, environ 2,5 millions de Congolais ont péri et qu'une catastrophe humanitaire insupportable est la conséquence de cette guerre. Il a également évoqué les massacres de civils qui ont atteint une telle gravité que certaines voix autorisées n'ont pas hésité à les qualifier de génocide. Le peuple congolais exige une juste et équitable réparation des préjudices subis, a déclaré M. Kabila, indiquant que c'est le sens des actions menées devant la Cour internationale de Justice et la Commission africaines des droits de l'homme et des peuples.

Réitérant le fait que la situation des droits de l'homme et du droit international humanitaire constitue une préoccupation permanente de son gouvernement, M. Kabila a réaffirmé sa volonté de renforcer l'état de droit, de consolider la démocratie et de garantir les droits de l'homme. Dans cette optique, il a évoqué l'organisation en mai prochain d'une Conférence nationale sur les droits de l'homme qui a pour but notamment d'interpeller la communauté internationale sur les violations massives des droits humains dans les zones occupées. M. Kabila a en outre indiqué que son premier voeu est de permettre au peuple congolais de retrouver la paix afin de s'atteler aux nobles tâches de reconstruction du pays. À cet égard, il a souhaité que l'application des plans de désengagement soit immédiatement suivie du déploiement des Casques bleus. Il a en outre annoncé son intention de ratifier le Protocole additionnel II aux Conventions de Genève.

M. MIRCEA DAN GEOANA, Ministre des affaires étrangères de la Roumanie et Président en exercice de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a souligné la nécessité d'une utilisation maximale des institutions de l'OSCE telles que le Bureau pour les institutions démocratiques et les droits de l'homme, le Haut Commissaire pour les minorités nationales et le Représentant pour la liberté des médias. Le Président de l'OSCE a souligné que l'organisation avait un rôle à jouer pour améliorer et contrôler la coopération en matière de lutte contre le trafic des êtres humains. Il est bien connu que la Roumanie, comme d'autres pays de la région, est à la fois un pays de départ et de transit des trafics humains, a rappelé le Ministre roumain des affaires étrangères. Aussi, la Roumanie organisera-t-elle un conférence sur le trafic des êtres humains et l'immigration illégale le 21 mai prochain. Notre objectif est de renforcer à l'échelle nationale, régionale et internationale les mesures concrètes susceptibles de répondre à ce problème. Durant la présidence roumaine de l'OSCE, la Roumanie entend accélérer la réponse de l'Organisation aux situations de conflit émergentes et améliorer l'efficacité des capacités de l'OSCE en matière de gestion des crises.

L'OSCE est très préoccupée par la récente crise dans l'ex-République yougoslave de Macédoine, a déclaré le Président en exercice de l'OSCE avant de souligner que la communauté internationale se devait de réagir de manière ferme, cohérente et résolue afin de prévenir l'escalade de la violence. M. Geoana a indiqué qu'il envisageait de se rendre à Skopje avec ses collègues de la troïka dans un avenir proche. Il a affirmé avoir trouvé en la société macédonienne une démocratie jeune et vibrante disposant de toutes les ressources pour surmonter la crise actuelle.

Au Kosovo, a poursuivi M. Geoana, l'organisation d'élections provinciales, conformément à la résolution 1244 du Conseil de sécurité, reste l'un des principaux défis que devront relever la communauté internationale et l'OSCE. En attendant la décision politique concernant le calendrier de ces élections, de nombreuses questions restent encore à résoudre, notamment en ce qui concerne l'achèvement du processus de retour, en toute sécurité, des réfugiés et personnes déplacées. L'OsCE continuera d'apporter son plein soutien à l'instauration d'une société démocratique en Bosnie-Herzégovine. Le Président de l'OSCE a par ailleurs souligné que dans le Caucase, la situation en Tchétchénie reste instable et tendue. La Présidence roumaine de l'OSCE a reçu de la Fédération de Russie des assurances concernant le retour du Groupe d'assistance de l'OSCE, ce qui devrait permettre à l'OSCE de coopérer à des actions humanitaires. Le Président en exercice de l'OSCE a lancé un appel aux gouvernements d'Asie centrale afin qu'ils prennent les mesures législatives nécessaires permettant de mettre un terme aux pratiques de harcèlement et de détention des militants des droits de l'homme et des militants religieux, en particulier au Kirghizistan, au Tadjikistan et au Turkménistan. Le situation des réfugiés au Tadjikistan et en Ouzbékistan reste vivement préoccupante, a déclaré M. Geoana.

M. NABEEL SHAATH, Ministre de la planification de la coopération internationale de l'Autorité nationale palestinienne, a remercié la Commission pour ses efforts et pour son appui au peuple palestinien. Il a également souligné la contribution importante des organisations non gouvernementales. L'examen de la situation des droits de l'homme est le meilleur moyen de voir quels sont les progrès accomplis. Le ministre a déclaré que son gouvernement oeuvre à faire avancer les normes en matière de droits de l'homme. Il est essentiel d'évaluer de façon continue si les efforts entrepris sont suffisants. Les graves violations de droits de l'homme qui ont été commises en Palestine auraient pu être évitées si les instruments internationaux avaient été respectés. Le ministre palestinien a évoqué la guerre cruelle menée par Israël contre le peuple palestinien. Les exactions commises par les forces israéliennes ne peuvent pas être acceptées. Les forces israéliennes ont encore aujourd'hui bombardé Hébron et Ramalah. Toute la nuit dernière, il y a eu des bombardements dont, encore une fois, des civils palestiniens ont été les victimes. La situation est bien connue des membres de la Commission qui a fait préparer un rapport à ce sujet. Le ministre a rendu hommage à la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Mme Mary Robinson, pour la clarté de son rapport. Il s'est également félicité des rapports établi par le Rapporteur spécial et la Commission d'enquête sur les violations des droits de l'homme et du droit humanitaire dans les territoires palestiniens occupés.

Le Ministre palestinien a souligné la nécessité de respecter pleinement les normes internationales établies dans la Déclaration des droits de l'homme et dans tous les instruments juridiques internationaux pertinents. Toutes les parties doivent respecter les normes des droits de l'homme en vigueur. Le respect des dispositions de la quatrième Convention de Genève est également nécessaire et il est regrettable de constater qu'Israël continue à refuser d'appliquer les dispositions de cette Convention. Le ministre a estimé que ce qui fait obstacle à la mise en oeuvre de tous ces instruments juridiques est l'absence d'une réelle volonté politique. Un mécanisme international devrait être créé de toute urgence pour garantir la protection des droits fondamentaux du peuple palestinien et soulager ses souffrances physiques, sociales et économiques. Il est regrettable que les États-Unis, il y a quelques jours, aient une nouvelle fois bloqué, en exerçant leur droit de veto, une résolution du Conseil de sécurité qui demandait l'envoi d'une force d'observation des Nations Unies dans les territoires palestiniens. Il faut absolument que l'occupation cesse et que l'on parvienne à une paix juste et durable. Le Ministre a regretté le manque de coopération d'Israël. L'Autorité palestinienne est déterminée à poursuivre un dialogue et le processus de paix. Le peuple palestinien a le droit d'exercer son droit à l'autodétermination. Les agressions israéliennes continuent à redoubler de vigueur. Le Gouvernement israélien actuel a déclaré que des milliers de nouvelles habitations allaient être construites à Jérusalem, Bethlehem et Hébron. Malgré les leçons tirées du passé et les nombreux efforts entrepris, Israël continue de violer toutes les normes du droit international et sape tout effort pour arriver à un accord. Les forces d'occupation ne relâchent pas leur contrôle des territoires occupés et il y a une escalade grave de la violence et des violations des droits inaliénables du peuple palestinien. Il faut maintenir le dialogue entre les Palestiniens et les Israéliens.

L'Autorité palestinienne s'engage à coopérer avec Israël mais cela ne doit pas signifier la négation des droits les plus fondamentaux du peuple palestinien. Le respect des droits de l'homme doit faire partie du processus de paix. La population palestinienne doit avoir le sentiment d'être en sécurité sur son territoire et à l'abri des châtiments collectifs et d'un bouclage injuste de ses territoires. Le peuple palestinien ne doit pas être soumis aux menaces et aux violences des forces d'occupation. Aucun progrès réel ne pourra être fait tant qu'Israël n'aura pas prouvé qu'il est prêt à respecter toutes les dispositions de la quatrième Convention de Genève et des instruments juridiques internationaux pertinents. Le Ministre a réaffirmé de façon catégorique l'engagement de l'Autorité palestinienne à poursuivre le processus de paix et d'arriver à une paix juste et durable. La puissance occupante peut, si elle le veut, mettre un terme à la spirale de la confrontation et de la violence. Le ministre a regretté que l'appel de paix qui continue à être lancé depuis de nombreuses années par le Président de l'Autorité palestinienne, M. Yasser Arafat, reste sans réponse. Le Ministre a appelé Israël à oeuvrer avec l'Autorité palestinienne pour mettre fin à la violence et arriver à une paix juste et durable.

M. JANOS MARTONYI, Ministre des affaires étrangères de la Hongrie, a indiqué que la protection internationale des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont au coeur de la politique étrangère de la Hongrie. À cet égard, il a réitéré le ferme engagement de son pays en faveur des valeurs communes de démocratie, de liberté, de primauté du droit et de respect pour les droits de l'homme, y compris les droits des minorités nationales. Il a estimé que la Commission, pour maintenir sa crédibilité, doit mesurer ses actions à l'aune de l'avancement de la démocratie et doit protéger les victimes de violations, informer le public des violations et les condamner.

S'agissant de la protection des minorités nationales, il a rappelé que ce n'est pas la reconnaissance des droits des minorités mais bien plutôt le déni de leurs demandes légitimes qui contribue à l'instabilité, aux conflits voire aux bains de sang. Il a estimé que la condition essentielle pour trouver une solution durable et souple impliquant les minorités nationales réside dans la primauté du droit et le respect des droits de l'homme en général. Ce n'est que dans un tel environnement que des actions de discrimination positive pourront être prises par les États en faveur des minorités nationales sans être considérées comme discriminatoires à l'égard de la majorité.

La Hongrie se félicite du projet initié par le Haut-Commissariat dans le domaine de la protection des minorités et espère qu'il contribuera à attirer à nouveau l'attention de la communauté internationale sur l'importance de cette question. En outre, M. Martonyi a estimé, au vu des crises majeures de la décennie passée, y compris aux frontières de son pays, qu'il est temps pour les Nations Unies d'élaborer un document universel et juridiquement contraignant sur les droits des minorités. À cet égard, il a souhaité que le dixième anniversaire de l'adoption de la Déclaration sur les droits des minorités l'an prochain donnera un nouvel élan à l'élaboration d'un tel instrument.

À six mois de la prochaine Conférence mondiale contre le racisme, la Hongrie estime nécessaire d'évaluer les résultats obtenus au cours des réunions préparatoires. À cet égard, il a indiqué qu'elles ont démontré une attente réelle de tous pour que cette conférence soit orientée vers l'action. Il a exprimé sa ferme conviction que le racisme ne peut et ne doit être combattu que de manière globale et dans la perspective des droits de l'homme.

M. JEAN DE DIEU MUCYO, Ministre de la justice et des relations institutionnelles du Rwanda, a souligné que, sept ans après le génocide, même si tout n'est pas parfait, les réalisations de son gouvernement dans le domaine des droits de l'homme et de la réconciliation nationale sont appréciables et encourageantes, comme l'a d'ailleurs dit et répété le Représentant spécial sur le Rwanda, M. Michel Moussali. M. Mucyo a par ailleurs déclaré que la coopération de son pays avec le Tribunal pénal international pour le Rwanda subit une évolution positive, bien que la protection et le traitement des témoins restent toujours préoccupants. Il a soutenu l'idée de transférer le siège du TPI pour le Rwanda vers le Rwanda car les procès de génocide dans le pays ont un aspect plus pédagogique que punitif sur la population rwandaise. Le TPI pour le Rwanda s'étant jusqu'à présent uniquement occupé des actions pénales, le Rwanda appuie l'idée de connaître aussi des actions civiles.

Le ministre rwandais a déclaré que, malgré les efforts réalisés par son gouvernement, la situation dans les prisons et cachots reste préoccupante en raison du nombre important de détenus, mais des solutions ont été envisagées, notamment un projet visant à réglementer leur administration, qui est sur le point de passer devant le Conseil des ministres. Des réflexions ont amené le gouvernement à envisager la solution de recourir à la justice participative dite Gacaca. Il s'agit d'une justice intermédiaire, entre la justice traditionnelle et la justice classique, ayant comme base la participation de la population à l'éclaircissement de la vérité. Même si les juridictions gacaca sont la priorité absolue du Rwanda, nous n'oublions pas les juridictions classiques, a souligné le Ministre de la justice et des réformes institutionnelles. À ce niveau, a-t-il poursuivi, des mesures efficaces ont été prises pour la poursuite et la répression des crimes de droit commun, surtout les crimes sexuels commis contre des femmes et des enfants. En ce qui concerne le conflit en République démocratique du Congo, le Ministre rwandais a réaffirmé encore une fois le soutien de son pays aux accords de Lusaka. Il a indiqué que le Rwanda a pris la décision unilatérale de procéder à un retrait de ses troupes militaires de 200 km par rapport à ses positions initiales.




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