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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME: DECLARATIONS DES MINISTRES DES AFFAIRES ETRANGERES ESPAGNOL, SLOVENE ET SUÉDOIS

19 Mars 2002



Commission des droits de l'homme
60ème session
19 mars 2002
Matin



La Commission entend également des déclarations
du Vice-Premier Ministre de la Croatie et
du Ministre des droits de l'homme de la Turquie



La Commission des droits de l'homme a entendu, ce matin, les Ministres des affaires étrangères de l'Espagne, de la Slovénie et de la Suède ainsi que le Ministre des droits de l'homme de la Turquie et du Vice-Premier Ministre de la Croatie. Elle a par ailleurs entamé son débat au titre de l'organisation des travaux et a décidé de poursuivre ses consultations concernant le choix du thème de la journée de débat spécial qu'elle devrait tenir, selon son programme de travail provisoire, le vendredi 12 avril 2002 dans l'après-midi.

Le Ministre espagnol des affaires étrangères, M. Josep Piqué, a affirmé qu'il n'est pas question que le terrorisme l'emporte et contraigne les sociétés démocratiques à abdiquer leurs principes et leurs valeurs. À l'instar de M. Piqué, M. Dimitrij Rupel, Ministre des affaires étrangères de la Slovénie, ainsi que Mme Anna Lindh, Ministre des affaires étrangères de la Suède, ont rappelé que la lutte contre le terrorisme doit être menée dans le respect des droits de l'homme. M. Rupel a souligné que cette lutte doit en outre être menée tout en s'attaquant aux causes profondes qui alimentent le terreau favorable au terrorisme.

À l'instar du Ministre espagnol, le chef de la diplomatie a notamment mis l'accent sur la nécessité d'agir contre la peine de mort qui, a-t-elle affirmé, n'a pas sa place dans une société civilisée. Le Ministre des droits de l'homme de la Turquie, M. Nejat Arseven, a notamment indiqué qu'en vertu des amendements qui ont été apportés à la Constitution du pays en octobre dernier, la peine de mort a été abolie, sauf en temps de guerre, de menace imminente de guerre et en cas de crimes de terrorisme. Mme Zeljka Antunovic, Vice-Premier Ministre de la Croatie, a indiqué que son pays appuie l'élaboration du protocole n°13 à la Convention européenne des droits de l'homme relatif à l'abolition de la peine de mort et espère que ce nouvel instrument sera largement accepté.

Dans le cadre de l'examen des questions relatives à l'organisation de ses travaux, la Commission a entendu des déclarations des représentants du Pakistan (au nom de l'Organisation de la Conférence islamique), du Japon (au nom du Groupe des pays d'Asie), de Cuba, de l'Indonésie (au nom du Groupe des pays partageant le même avis) et de la Chine.

La Turquie, l'Arménie et l'Azerbaïdjan ont exercé leur droit de réponse.

Sur recommandation du Bureau, la Commission a par ailleurs décidé d'inviter le Ministre des affaires étrangères du Gouvernement transitoire du Timor oriental, M. Ramos Horta, à s'exprimer à la tribune au cours de la session.

La Commission poursuivra ses travaux cet après-midi à 15 heures. Elle entendra notamment des déclarations du Ministre des affaires étrangères de la Lituanie, M. Antanas Valionis; du Vice-Ministre des affaires étrangères d'Israël, M. Michael Melchior; de M. Antti Satuli, Secrétaire d'État de la Finlande; du Haut Représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union européenne, M. Javier Solana; du Ministre des affaires étrangères du Canada, M. Bill Graham; ainsi que du Ministre des affaires étrangères de l'Afghanistan, M. Abdullah Abdullah.


Déclarations de hauts dignitaires

M. JOSEP PIQUE I CAMPS, Ministre des affaires étrangères de l'Espagne, s'exprimant au nom de l'Union européenne et des États associés, a invité les États à renforcer leur coopération avec les mécanismes existants, notamment avec le Haut-Commissariat aux droits de l'homme et les comités d'experts. Se félicitant de l'évolution du droit international, qui a permis d'instaurer un système complet de conventions, il a reconnu qu'il ne suffisait pas de réclamer le respect universel des droits civils et politiques et qu'il fallait s'engager aussi dans les domaines de la santé, de l'éducation, du droit au travail et du développement. Il a souligné que l'Union européenne ne prétendait pas imposer ses propres règles de conduite à d'autres pays, mais que les États étaient néanmoins liés par les instruments internationaux auxquels ils ont souscrit.

Exprimant sa préoccupation au sujet du terrorisme, qui porte atteinte au droit fondamental à la vie, M. Pique i Camps a engagé la communauté internationale à œuvrer d'une manière concertée pour éradiquer ce terrible phénomène. Toutefois, a-t-il poursuivi, ce combat doit être mené dans un cadre de plein respect des droits et des libertés fondamentales sur lesquels est fondé l'État de droit. C'est la condition sine qua non pour faire prévaloir les valeurs démocratiques. Il n'est pas question que le terrorisme l'emporte et contraigne les sociétés démocratiques à abdiquer leurs principes et leur valeurs en adoptant sa logique perverse, a-t-il mis en garde. Le Ministre s'est félicité du travail des tribunaux spéciaux internationaux et a souhaité que la Cour pénale internationale puisse entrer en fonction rapidement. Il a rappelé que beaucoup reste à faire pour combattre les inégalités et les discriminations, s'agissant notamment de l'émancipation de la femme et de la protection des droits de l'enfant. Il a émis l'espoir que la prochaine Session extraordinaire de l'Assemblée générale sur les enfants, qui se tiendra à New York en mai prochain, et que l'Assemblée mondiale sur le vieillissement, prévue à Madrid au mois d'avril, marqueront des étapes décisives à cet égard.

En dernier lieu, M. Pique i Camps a attiré l'attention de la Commission sur la question de la peine de mort, châtiment en contradiction avec la dignité humaine, et sur la question de la torture. L'Union européenne continuera d'œuvrer pour parvenir à l'abolition universelle de la peine de mort et insistera pour obtenir l'imposition de moratoires, a-t-il déclaré. En ce qui concerne la torture, il s'est félicité qu'après des années de préparation, le Protocole facultatif contre la torture, qui présente un mécanisme de visites préventives, sera soumis à la Commission cette année. Il a estimé que le projet élaboré par le Groupe de travail sur la question, sous la présidence de Mme Elizabeth Odio Benito, présente un texte équilibré qu'il convient de préserver.

M. NEJAT ARSEVEN, Ministre d'État en charge des droits de l'homme de la Turquie, a déclaré que la cinquante-huitième session de la Commission des droits de l'homme se déroule dans une atmosphère différente depuis les événements du 11 septembre 2001. En effet, ces événements ont montré que le terrorisme est un des problèmes les plus importants auxquels est confrontée la communauté internationale, qui a besoin, plus que jamais, d'actions solidaires contre ce fléau. La Turquie a souffert du terrorisme ces vingt dernières années, le ministre turc a souligné que rien ne justifie le terrorisme et qu'il faut disposer d'une stratégie qui puisse compter sur la participation de tous les États et des organisations internationales.

Le ministre a déclaré que la Turquie a entrepris ces dernières années un processus de réformes globales pour la promotion et la protection des droits de l'homme. Le parlement turc a adopté des amendements constitutionnels le 3 octobre 2001 qui visent à élever le niveau des droits de l'homme au plus haut niveau possible, conformément à la Convention européenne des droits de l'homme. Il a rappelé qu'aucune exécution capitale n'a eu lieu en Turquie depuis 18 ans. Des changements dans le code pénal turc, en vigueur depuis le 1er janvier 2002, concernant notamment les mesures anti-terroristes, ont été effectuées conformément aux conventions internationales dans le domaine des droits de l'homme. Il a en outre indiqué que la formation sur les droits de l'homme a été introduite dans les académies de police, dans la formation des juges, des avocats et des formateurs dans le domaine des droits de l'homme.

M. Arseven a déclaré que la Turquie compte bientôt ratifier différents instruments dans le domaine des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, et la lutte contre la discrimination raciale. La Turquie compte sur l'appui de la communauté internationale et de la société civile pour l'élimination des défaillances dans la pratique des droits de l'homme.

Le Ministre chargé des droits de l'homme a déclaré que la Turquie espère que les décisions adoptées à la Conférence mondiale contre le racisme de Durban en septembre 2001 seront bientôt appliquées. Il a en outre assuré que la Turquie poursuivra ses efforts pour assurer le respect des doits de l'homme et des droits fondamentaux des émigrants dans leur nouvel environnement.

M. DIMITRIJ RUPEL, Ministre des affaires étrangères de la Slovénie, a réaffirmé la nécessité de s'attaquer au terrorisme et à ses acteurs, qui doivent être traduits en justice. Cette lutte doit cependant être menée, d'une part, dans le respect des droits de l'homme, des libertés fondamentales, et des pactes et traités internationaux qui les consacrent et, d'autre part, avec le souci de s'attaquer aux causes profondes qui créent le terreau favorable au terrorisme.
M. Rupel a souligné que la stabilité et la prospérité en Europe du Sud-Est revêtent une importance particulière pour la Slovénie, qui n'a eu de cesse de prendre des mesures en faveur de la coopération régionale, en vue de la stabilisation de la région. La Slovénie a notamment participé à des efforts de déminage dans les États touchés par des conflits armés dans les Balkans, ainsi qu'à la création des conditions nécessaires au retour des réfugiés en assurant le déminage des zones affectées. La Slovénie exprime par ailleurs l'espoir que les travaux engagés sur un protocole visant à créer un mécanisme international de prévention de la torture pourront être conclus dans un avenir proche et appuie l'élaboration d'un instrument international sur les disparitions involontaires.

M. Rupel a évoqué, pour conclure, les dispositions adoptées en Slovénie pour favoriser l'application généralisée des normes internationales en matière de droits de l'homme. Il a dans ce cadre souligné la coopération de plus en plus fructueuse du Gouvernement slovène avec les organisations non gouvernementales locales, notamment sur les thèmes de l'égalité entre hommes et femmes, de la lutte contre l'homophobie ou de la participation des personnes handicapées. M. Rupel a souligné le rôle utile joué par les organisations non gouvernementales pour rappeler aux gouvernements les défaillances dans le domaine de la protection des droits de l'homme. Il a fait valoir que le Ministre slovène des affaires étrangères rencontre régulièrement les représentants des organisations non gouvernementales avant la session annuelle de la Commission des droits de l'homme. Ce dialogue est précieux dans les efforts communs qui sont menés pour parvenir à une société où tous les citoyens jouissent de l'égale protection de leurs droits.

MME ANNA LINDH, Ministre des affaires étrangères de la Suède, s'est félicitée que la Suède soit devenue membre de la Commission des droits de l'homme pour les années 2002 à 2004. Elle a souligné que les droits de l'homme constituent l'un des piliers de la politique étrangère de son pays. Relevant que la mondialisation a permis d'abolir les frontières de l'économie, du commerce et des marchés, elle a souligné qu'un marché sans frontières doit être équilibré par des valeurs également sans frontières.

La Ministre suédoise a par ailleurs attiré l'attention de la Commission sur le conflit du Moyen-Orient qui menace de dégénérer en guerre totale. La période prolongée d'occupation du territoire palestinien ainsi que les violations du droit international auxquelles se livre Israël sont à la base des crises actuelles. Nous sommes préoccupés par les exécutions extrajudiciaires et sommaires et l'usage excessif et aveugle de la force auxquels se livre Israël contre des civils, a insisté Mme Lindh. Nous sommes également préoccupés par les attentats-suicides et par les actes terroristes perpétrés par des Palestiniens à l'encontre de civils israéliens, a-t-elle ajouté. Ce conflit ne saurait être résolu par des moyens militaires, a souligné Mme Lindh. Il faut qu'il y ait une solution politique basée sur le droit international et sur le principe de la terre contre la paix, a-t-elle précisé avant de souligner que le moment est venu d'agir. Un accord sur la mise en place d'un mécanisme de surveillance international qui serait chargé de veiller au respect du droit international, du droit humanitaire international et des conventions internationales constituerait une étape constructive, a déclaré la Ministre.

Mme Lindh a par ailleurs mis l'accent sur la nécessité d'agir contre la peine de mort qui, a-t-elle affirmé, n'a pas sa place dans une société civilisée. Des pays comme la Chine, l'Arabie saoudite, les États-Unis, l'Iran et l'Iraq persistent dans cette pratique barbare, a-t-elle rappelé avant de s'inquiéter que certains gouvernements, notamment le Gouvernement thaïlandais, envisagent aujourd'hui de réintroduire la peine capitale ou de rompre le moratoire. Rappelant que la connaissance est un préalable indispensable pour que les individus puissent revendiquer leurs droits et pour que les choses changent, elle a souligné que c'est précisément pour cela que les dictateurs craignent la liberté d'opinion et d'expression. Il existe à cet égard de nombreux exemples, a-t-elle poursuivi: au Bélarus, des journalistes sont persécutés; en Chine, des membres de minorités religieuses sont détenus; en Turquie, des Kurdes sont harcelés. L'exemple le plus récent est fourni par le Zimbabwe où les élections se sont apparentées à une parodie de démocratie, a ajouté Mme Lindh.

Tout en se réjouissant que de nombreux États aient, depuis les événements du 11 septembre dernier, pris des mesures législatives et autres afin de protéger leurs populations contre les actes terroristes, Mme Lindh a mis l'accent sur la nécessité de veiller à ce que ces mesures ne bafouent pas les droits de l'homme et les règles du droit ni ne soient utilisées comme prétexte par d'autres pour le faire. Il ne saurait être accepté que la lutte contre le terrorisme soit utilisée comme excuse pour combattre l'opposition politique, les mouvements séparatistes ou les minorités religieuses. La sécurité ne doit pas être favorisée au détriment des droits de l'homme, a insisté la Ministre suédoise.

MME ZELJKA ANTUNOVIC, Vice-Premier Ministre de Croatie, a rappelé l'engagement de son pays en faveur des droits de l'homme et fait part de la création d'une Commission nationale des droits de l'homme chargée d'élaborer un plan national d'action pour la promotion et la protection des droits de l'homme et d'un Bureau des droits de l'homme chargé de coordonner les activités relatives aux droits de l'homme en Croatie. Le Ministre a ensuite attiré l'attention sur la Conférence sur les droits de l'homme et la démocratisation qui s'est réunie en octobre 2001, à Dubrovnik, en vue d'évaluer et de stimuler la coopération régionale dans le domaine des droits de l'homme. Elle a fait savoir qu'au niveau régional, la Croatie participait à de nombreuses initiatives et programmes, notamment au Pacte de stabilité en Europe du Sud-Est. En outre, la Croatie a signé un accord de stabilisation et d'association avec la Communauté européenne, qui renforce les liens entre la Croatie et l'Union européenne. Rappelant que son pays continue à faire face aux conséquences de la guerre et du retour des réfugiés, la Vice-Premier Ministre a attiré l'attention de la communauté internationale sur la poursuite des opérations de déminage humanitaire pour lesquelles la Croatie a besoin de fonds supplémentaires. En vue de faciliter le retour des réfugiés, elle s'est félicitée de l'adoption d'un calendrier régional pour 2001-2003, qui est l'une des initiatives les plus réussies du Pacte de stabilité.

S'agissant des résultats de la Conférence mondiale de Durban contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée, Mme Antunovic a estimé que des initiatives devaient être prises aux niveaux national et régional pour combattre ce fléau et appliquer le Programme d'action de Durban. Ainsi, la Croatie envisage d'élaborer rapidement un plan national d'action en vue de mettre en œuvre les recommandations adoptées à Durban. Elle a exhorté les États à ratifier ce Progamme d'action. Par ailleurs, elle a indiqué que son pays appuyait fermement la reconnaissance par tous les États des droits des objecteurs de conscience et les a invités à réviser leur législation sur ce point.

Mme Antunovic s'est déclaré favorable à toute initiative visant à harmoniser les législations nationales concernant la torture avec les normes internationales, notamment la Convention contre la torture et les traitements cruels, inhumains et dégradants. Elle a fait part de l'appui de son pays au Groupe de travail chargé d'élaborer un projet de protocole facultatif à la Convention en vue d'établir un mécanisme préventif international chargé d'enquêter sur les lieux de détention. Elle a également indiqué que son pays appuyait et participait pleinement à l'élaboration du protocole No 13 de la Convention européenne des droits de l'homme relatif à l'abolition de la peine de mort. Elle a émis l'espoir que ce protocole serait largement accepté et enverra un message clair à tous les États en faveur de l'abolition totale de la peine capitale. La Vice-Premier Ministre a ensuite abordé la question des droits des femmes et de la protection des droits de l'enfant et a détaillé les initiatives de son pays sur ces questions. En dernier lieu, elle a souligné l'engagement de son pays dans la lutte contre le terrorisme.


Débat sur l'organisation des travaux

M. MUNIR AKRAM (Pakistan, au nom de l'Organisation de la Conférence islamique - OCI) a souligné que la promotion des droits de l'homme est l'un des principaux piliers de l'Islam. Il a rappelé que lors de ses réunions et autres sommets ministériels, l'OCI a adopté diverses résolutions condamnant les violations des droits de l'homme dont sont victimes des populations islamiques en Palestine occupée et autres territoires arabes, au Jammu-et-Cachemire, en Bosnie-Herzégovine, ainsi que l'agression de l'Arménie contre l'Azerbaïdjan et l'isolement inhumain imposé à la population chypriote turque.

"Le monde islamique a été unanime dans sa condamnation des attentats perpétrés aux États-Unis le 11 septembre dernier et nos gouvernements ont offert toute la coopération possible à la coalition internationale contre le terrorisme", a déclaré le représentant du Pakistan. Il a néanmoins mis l'accent sur la nécessité de distinguer le terrorisme de la lutte légitime des peuples pour l'exercice de leur droit à l'autodétermination et contre l'occupation étrangère, voire la domination étrangère ou coloniale. Il est regrettable que certaines forces aient exploité les événements du 11 septembre pour justifier l'intensification de la répression contre les populations en Palestine, au Cachemire et ailleurs, a affirmé le représentant. Cette session de la Commission devra agir de manière vigoureuse pour s'opposer à ceux qui s'efforcent de promouvoir l'islamophobie et la propagande contre l'islam. Pour sa part, l'OCI cherchera à agir en ce sens durant la présente session de la Commission, en particulier dans le cadre des résolutions portant sur la diffamation des religions et sur les droits de l'homme et le terrorisme. Dans ce contexte, a poursuivi le représentant pakistanais, les États membres de l'OCI estiment que la campagne visant à éradiquer le terrorisme ne pourra réussir sans traiter les causes profondes du terrorisme telles que l'occupation étrangère, la pauvreté, le sous-développement, les inégalités dans l'ordre économique international, les inégalités au sein des sociétés et entre elles, ainsi que la pratique de deux poids, deux mesures qui génère l'iniquité.

Le représentant du Pakistan a par ailleurs attiré l'attention de la Commission sur le cas d'un pays membre de l'OCI dont la situation des droits de l'homme est examinée depuis 19 ans par la Commission en dépit du fait que la communauté internationale reconnaît largement les progrès qui y ont été réalisés en matière de promotion des droits de l'homme. Par ailleurs, les violations incessantes des droits des Palestiniens et des autres arabes sous domination israélienne doivent être efficacement traitées au cours de la présente session de la Commission, a déclaré M. Akram. L'OCI souhaite par ailleurs une solution juste et pacifique au différend du Jammu-et-Cachemire, conformément à la légalité internationale. M. Akram a fait part de ses condoléances aux proches des victimes de l'attentat qui s'est produit hier contre une église à Islamabad.

Le représentant de l'Organisation de la Conférence islamique a par ailleurs relevé que la pratique qui consiste pour le Secrétariat de la Commission à partager des informations confidentielles avec la Division de la femme au titre de la procédure 1503 n'est fondée sur aucun mandat légal officiel. En certaines circonstances, un tel échange d'information pourrait bafouer la confidentialité de la procédure.

M. YASUAKI NOGAWA (Japon), s'exprimant au nom du Groupe des pays d'Asie, a regretté que les décisions prises l'année dernière concernant l'organisation de ses travaux n'aient pas donné satisfaction. Il a exhorté à l'instauration d'une meilleure atmosphère de travail visant à améliorer l'efficacité de la Commission, à éviter sa politisation et à créer un climat favorable au consensus. Pour ce faire, il convient notamment de veiller à la transparence des consultations sur les projets de résolutions, a-t-il déclaré. En ce qui concerne la participation des organisations non gouvernementales aux travaux de la Commission, tout en se félicitant de leur contribution, le représentant japonais a estimé qu'il convenait d'empêcher les participations non autorisées et de favoriser les interventions conjointes. Le représentant a souligné l'importance de respecter la procédure d'accréditation des organisations non gouvernementales et d'éviter les contributions qui, n'ayant aucun lien avec les droits de l'homme, instaurent un climat malsain. Il a recommandé que tous les documents distribués par les organisations non gouvernementales soient soumis à vérification pour éviter la distribution de faux.

Le représentant a ensuite suggéré que les débats avec les rapporteurs spéciaux suivent le modèle du dialogue interactif adopté par la Troisième Commission de l'Assemblée générale. Il a par ailleurs estimé que l'on devrait limiter la durée de la session de la Commission à quatre semaines. Pour ce faire, il importe d'appliquer les mesures préconisées par le Secrétariat en vue d'éviter la prolongation des réunions, de veiller à ce que les documents soient distribués à temps, au strict respect du temps de parole, à ce que des résolutions qui ne sont plus justifiées par la situation internationale ne soient plus soumises.

M. JUAN ANTONIO FERNÁNDEZ PALACIOS (Cuba) a constaté que l'absence d'un certain pays parmi les 53 États membres de la session of the Commission ne suffirait pas à créer les conditions nécessaires aux changements qui s'imposent au sein de la Commission car de nombreux pays industrialisés se sont laissés entraîner dans une politique sélective de diabolisation et de stigmatisation des pays du Sud dans les travaux de la Commission. Dans un même ordre d'idées, M. Fernández Palacios a dénoncé le manque de consensus dans lequel s'est déroulée la négociation autour du document E/CN.4/2002/16, sur les règles observées par la Commission des droits de l'homme dans l'organisation de ses travaux et la conduite de ses débats. Il a en outre regretté la quantité excessive de documents divers émanant de la Commission, qui nuit au travail de fond et à la confrontation des idées pourtant indispensable.

La cinquante-huitième session de la Conférence aurait pu représenter un tournant ouvrant la voie vers une réelle coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme. Mais des signes semblent indiquer le contraire et d'autres pays en développement sont en train d'être accusés. Cet état des choses témoigne d'une intention de plus en plus marquée de dicter des règles visant à maintenir le statu quo, à uniformiser la pensée et à figer les conditions de façon à écarter la Commission de toute possibilité de débat et de respect des différences.

M. NUGROHO WISNUMURTI (Indonésie), s'exprimant au nom du Groupe des États partageant le même avis, a estimé que la Commission devait se préoccuper des graves violations des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés et des conséquences des événements du 11 septembre 2001. Estimant que l'esprit de coopération marquant la lutte contre le terrorisme devrait régner aussi au sein de la Commission, il a regretté que les travaux de la Commission restent entachés par la polarisation et une politique de deux poids deux mesures. Il a rappelé qu'il était contraire à l'esprit de la Charte de montrer du doigt certains États. Ainsi, il s'est inquiété que les résolutions concernant le respect des droits de l'homme par les États continuent de viser les pays en développement en dépit de leurs efforts et des progrès accomplis. Il est urgent, a-t-il estimé, de créer un climat de dialogue et de coopération dans ce domaine. En ce qui concerne la participation des organisations non gouvernementales, il a souligné la nécessité de respecter strictement les procédures d'accréditation par l'ECOSOC et de contrôler les documents mis en circulation afin d'éviter une utilisation frauduleuse des ressources des Nations Unies.
À propos de l'organisation des votes au sein de la Commission, le représentant a rappelé que l'expérience a montré qu'il n'était pas réaliste de prévoir de voter lors d'une même séance sur les résolutions portant sur différents points de l'ordre du jour. S'agissant du débat général, il a insisté sur le respect de la transparence et des règles démocratiques. Il s'est également déclaré favorable à ce que les débats avec les rapporteurs et représentants spéciaux suivent le modèle adopté par la Troisième Commission de l'Assemblée générale et soit limité à la participation des détenteurs de mandats et des États. Par ailleurs, il importe de veiller à la transparence des consultations sur les projets de résolution qui doivent circuler librement afin que les États puissent en prendre connaissance suffisamment à l'avance. En dernier lieu, le représentant s'est déclaré préoccupé par l'état de la documentation qui s'est encore détérioré cette année, les documents étant soumis tardivement et n'étant pas toujours disponibles dans les six langues officielles. Pour faciliter la traduction, il conviendrait sans doute de discontinuer la publication de rapports sur des sujets devenus obsolètes, a-t-il suggéré.

M. SHA ZUKANG (Chine) a déclaré que cette session a la difficile tâche d'appliquer la Déclaration et le Programme d'action adoptés par la Conférence mondiale contre le racisme. Il a regretté que la confrontation politique au nom des droits de l'homme perturbe la Commission, qui devrait être un forum d'échange et devrait renforcer la coopération entre les états. Ce n'est que par la coopération que les différences pourront être réduites et que la promotion des droits de l'homme peut faire des progrès. . M. Sha a évoqué les problèmes rencontrés par de nombreux pays dans la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels et du droit au développement. Ces droits légitimes font partie intégrante des questions relatives aux droits de l'homme, au même titre que les droits civils et politiques. La Commission devrait rectifier le déséquilibre entre ces deux catégories de droits. Il a rappelé que la promotion des droits économiques, sociaux et culturels dans les pays en développement se heurte aux problèmes liés aux conflits armés, à la pauvreté et à l'injustice résultant de l'ordre économique et financier mondial. Il a exhorté la communauté internationale à aider ces pays à éliminer ces obstacles et à surmonter leurs difficultés.

Le représentant chinois a par ailleurs constaté que de plus en plus d'organisations non gouvernementales obtiennent un statut du Conseil économique et social. Il a estimé que certaines de ces organisations non gouvernementales ont abusé de leur statut, ont bafoué les principes et les buts de la charte des Nations Unies et ont même importuné les délégués de certains pays. Il a souhaité que la commission règle la participation des organisations non gouvernementales.


Exercice du droit de réponse

Le représentant de la Turquie, répondant à l'intervention de la Ministre suédoise des affaires étrangères, a regretté que la Ministre ait fait une mention erronée et arbitraire de la Turquie. Il a rappelé que son pays était démocratique, que ses dirigeants étaient légalement élus et que la liberté d'expression y était garantie. Il a regretté que la Ministre suédoise confonde la lutte contre le terrorisme et le respect des droits de l'homme et a insisté sur le fait que seule la voix des terroristes était muselée en Turquie.

Le représentant de l'Arménie, répondant à la déclaration du Pakistan, a regretté que par cette déclaration la commission commence déjà à dévier de l'ordre du jour. En outre, il a estimé qu'il était inacceptable que le représentant du Pakistan fasse une mention injuste de la situation dans la région. Reconnaissant qu'il faut faire la différence entre le terrorisme et le droit des peuples à l'autodétermination, il a indiqué qu'il apporterait ultérieurement des précisions sur la situation dans la région.

Le représentant de l'Azerbaïdjan, répondant à l'intervention l'Arménie, a fait observer que son pays subit l'agression arménienne depuis 40 ans; de nombreuses victimes sont à déplorer, y compris femmes et enfants, et des nombreuses personnes ont été déplacées. L'Azerbaïdjan tient à souligner que les accusations portées par l'Arménie sont sans fondement.

Le représentant de l'Arménie a regretté que l'Azerbaïdjan tente de discréditer l'Arménie. Refusant de politiser le débat, elle a estimé que la délégation de l'Azerbaïdjan doit renoncer à ses activités de propagande pour se concentrer sur les activités de la Commission.

Le représentant de l'Azerbaïjan a accusé l'Arménie d'avoir pris possession d'une partie de son territoire et s'est indigné du manque de sérieux des déclarations de ce pays.





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