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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME OUVRE LES TRAVAUX DE SA SESSION DE 2002 EN ÉLISANT L'AMBASSADEUR DE POLOGNE À SA PRÉSIDENCE

18 Mars 2002



Commission des droits de l'homme
58ème session
18 mars 2002
Matin





La Haut-Commissaire aux droits de l'homme indique
qu'elle participe pour la dernière fois aux travaux de la Commission
en tant que Haut-Commissaire



La Commission des droits de l'homme a entamé, ce matin, les travaux de sa cinquante-huitième session en élisant par acclamation à sa présidence l'Ambassadeur de Pologne, M. Krzysztof Jakubowski. Ont été élus vice-présidents l'Ambassadeur d'Allemagne M. Walter Lewalter l'Ambassadeur d'Afrique du Sud M. Sipho George Nene et l'Ambassadeur de la République arabe syrienne M.Toufik Salloum. Le Brésilien Frederico Duque Estrada Meyer a été élu Rapporteur de la Commission.
La Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Mme Mary Robinson, s'adressant cette année pour la dernière fois à la Commission en tant que Haut-Commissaire, a rendu compte de ses activités au cours de l'année écoulée et a notamment déclaré que «les édifices qui ont été détruits le 11 septembre peuvent être remplacés, mais si les piliers du système international sont endommagés ou détruits, ils ne seront pas faciles à rétablir».
Ouvrant la session, le Président sortant de la Commission, M. Leandro Despouy, a notamment affirmé que combattre le terrorisme sur la base de la primauté du droit n'est pas seulement un impératif de justice; c'est aussi la manière la plus rationnelle d'éviter la propagation de la violence et d'isoler les terroristes. Le Président sortant a par ailleurs évoqué la déroute vertigineuse de l'économie de son pays, l'Argentine, en affirmant que la communauté internationale - et en particulier la Commission - doivent se tenir informées de l'évolution de la situation dans ce pays.
Le nouveau Président de la Commission, M. Krzysztof Jakubowski, a notamment insisté sur la nécessité pour cet organe d'adopter une méthode de travail fondée sur la coopération et le dialogue. Cette méthode est applicable évidemment à tous les échelons de la négociation en vue de la résolution des conflits, en particulier dans cette époque où le terrorisme et la violence en général sont autant de menaces contre les droits de l'homme.
La Commission a par ailleurs adopté son ordre du jour tel qu'il figure dans les documents E/CN.4/2002/1 et Add.1 et 2.
La Commission poursuivra ses travaux demain matin, à 10 heures. Elle se penchera sur l'organisation de ses travaux et entamera l'examen du rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme.

Déclarations d'ouverture
M. LEANDRO DESPOUY (Argentine), Président sortant de la Commission des droits de l'homme, a souligné qu'il y a peu de temps encore, le Bureau de la Commission s'acquittait de fonctions très limitées durant la période intersessionnelle. Mais l'augmentation des activités de la Commission l'ont amené à accomplir des fonctions de façon presque permanente. Il faut donc se demander si le moment n'est pas venu de reconnaître explicitement ce fait, a suggéré M. Despouy.
Le Président de la cinquante-septième session de la Commission a rappelé que la conjoncture internationale n'a pas été calme durant la dernière période de session de la Commission. Alors que les travaux de la Commission battaient leur plein, les taliban, dans un acte totalement irrationnel, ont procédé au bombardement des statues bouddhistes de Bamyan. Chacun se souviendra également que, durant la dernière session de la Commission, la situation au Moyen-Orient n'a cessé de s'aggraver - la Commission ayant à se pencher sur des projets de résolution alors que la Palestine connaissait une augmentation de la violence et une escalade militaire. Malheureusement, la situation n'a fait que s'aggraver depuis. Les morts se comptent par centaines et, tout au long de l'année, aucun effort de paix n'a abouti. Heureusement, tout récemment, de nouvelles voies de négociations commencent à être discutées, comme en témoigne la proposition du Prince héritier d'Arabie saoudite. Il faut espérer que ces initiatives se solderont par un accord de paix durable qui réponde aux aspirations de paix et de sécurité que méritent tant les Palestiniens que les Israéliens. À cet égard, il convient de saluer la récente résolution du Conseil de sécurité (résolution 1397 du 12 mars dernier) qui soutient l'idée de l'établissement de deux États voisins.
Le 11 septembre, trois jours après la clôture de la Conférence de Durban, le monde stupéfait assistait en direct aux deux attentats terroristes les plus spectaculaires qui se soient produits dans l'Histoire. Vint ensuite la guerre d'Afghanistan. La reconstruction de ce pays par la communauté internationale symbolise le type même des nouvelles responsabilités que l'Organisation des Nations Unies va devoir assumer. M. Despouy a par ailleurs souligné que les conflits interethniques et religieux ont augmenté dans de nombreuses parties du monde.
Le Président sortant de la Commission a rappelé que, pendant plusieurs jours, les images de Buenos Aires ont alterné avec celles de Kaboul, montrant au monde entier la vertigineuse déroute de l'économie argentine ainsi que la colère du peuple argentin face à la perte de son épargne et la brutale chute d'un gouvernement démocratique, élu par le peuple. Les événements ont commencé par une manifestation massive et pacifique avant d'atteindre des niveaux de violence de plus en plus préoccupants, le bilan s'établissant finalement à une trentaine de morts et près d'une centaine de blessés graves. La justice argentine enquête sur les responsabilités des autorités d'alors et plusieurs politiciens ainsi que le responsable de la sécurité intérieure sont d'ores et déjà détenus. La communauté internationale et en particulier la Commission doivent suivre de près le résultat de ces enquêtes et se tenir informées de l'évolution de la situation. Ce qui est grave, a ajouté M Despouy, c'est que pendant que le pays s'efforce de sortir de l'une des pires crises économiques et politiques de son histoire, les critères auxquels est conditionnée l'aide internationale sont de telle nature qu'ils ne laissent présager qu'une plus grande instabilité politique. M. Despouy a souligné que l'inégalité flagrante entre ceux qui ont tout et le nombre croissant de ceux qui n'ont rien est précisément l'aspect le plus préoccupant et le plus inhumain du phénomène de mondialisation en cours.
M. Despouy a souligné que combattre le terrorisme dans le respect de la primauté du droit n'est pas seulement un impératif de justice; c'est aussi la manière la plus rationnelle d'éviter la propagation de la violence et d'isoler les terroristes. Le Président sortant a d'autre part salué l'entrée imminente de la Suisse en tant que membre à part entière des Nations Unies en estimant que ce pays fera bénéficier les Nations Unies de sa vaste culture et tradition humanitaires, et a souligné que l'indépendance imminente du Timor oriental, le 20 mai prochain, constitue un événement particulièrement important.
Quant au suivi de la Conférence mondiale contre le racisme, M. Despouy a indiqué qu'un accord est intervenu avec le futur président de la Commission afin qu'il prépare une note sur l'état actuel des consultations menées jusqu'ici dans la perspective d'établir la liste des cinq personnalités devant être choisies par le Secrétaire général comme experts éminents chargés du suivi de la Déclaration et du Programme d'action de Durban.
MME MARY ROBINSON, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a déclaré qu'elle s'adressait cette année pour la dernière fois aux travaux de la Commission en tant que Haut-Commissaire aux droits de l'homme. Elle a déclaré qu'au cours de son mandat, elle a toujours suivi la recommandation du Secrétaire général, qu'elle remercie pour sa confiance et son appui, de conserver un regard extérieur tout en étant au sein des Nations Unies. Elle a déclaré qu'elle était fière de l'équipe de collègues qu'elle dirige et a souligné que le Haut-Commissariat a atteint un niveau élevé de professionnalisme et joue désormais un rôle essentiel dans le programme des Nations Unies pour les droits de l'homme.
Les événements du 11 septembre n'ont pas seulement eu des conséquences pour le peuple des États-Unis et les victimes de 80 autres pays, c'était une attaque contre le système des relations internationales sur lesquelles se fonde le travail de la Commission et des Nations Unies. Mme Robinson a estimé qu'aujourd'hui, les normes internationales dans le domaine des droits de l'homme sont menacés et la Commission a une responsabilité particulière de les défendre vigoureusement. Elle a souligné l'importance, après les événements du 11 septembre, de l'adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 1373 et de la création d'un mécanisme nouveau, le Comitéde lutte contre le terrorisme, avec lequel le Haut-Commissariat a coopéré de façon constructive. Soulignant que c'est la Commission qui a la responsabilité première s'agissant d'attirer l'attention des États membres sur l'importance d'adhérer aux normes internationales en matière de droits de l'homme, elle a invité la Commission à examiner la possibilité d'établir un mécanisme chargé de surveiller la mise en œuvre de la résolution 1373 sous l'angle des droits de l'homme, et a indiqué que le Haut-Commissariat apporterait son plein appui en ce sens. Elle a souligné qu'il faut répondre au terrorisme non seulement par l'adoption de mesures législatives et de sécurité "mais aussi avec l'arsenal des valeurs communes et des droits universels qui nous définissent comme une communauté mondiale et qui nous permettent de nous rejoindre au delà de nos différences".
La Haut-Commissaire a rappelé les Plans d'actions établis dans le cadre de la Conférence mondiale contre le racisme et de l'Année pour le dialogue entre les civilisations des Nations Unies, qui sont encore plus d'actualité après les événements du 11 septembre. Ces Plans d'actions doivent être suivis par tous les États alors que l'on assiste à une montée de sentiments islamophobes, anti-arabes et antisémites.
Rendant compte de ses activités au cours de l'année écoulée, la Haut-Commissaire a indiqué qu'elle a visité l'Afghanistan la semaine dernière et a célébré la Journée internationale de la femme à Kaboul. Un premier séminaire sur les droits de l'homme a eu lieu à Kaboul avec le soutien du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme et le Représentant spécial du Secrétaire général en Afghanistan, M. Lakhdar Brahimi. Le Président Hamid Karzhai s'est engagé à créer une commission de la vérité en Afghanistan pour faire la lumière sur les abus des droits de l'homme en Afghanistan. La situation au nord de l'Afghanistan demeure toutefois très préoccupante, a déclaré la Haut-Commissaire.
Mme Robinson a par ailleurs indiqué qu'elle a maintenu un dialogue régulier avec les autorités russes concernant la Tchétchénie. Elle constate un mouvement positif dans la région. Trop de familles ont été déplacées et des violences observées. Les deux parties doivent se rencontrer pour trouver des solutions politiques au conflit. En 2001, le Haut-Commissariat aux droits de l'homme s'est penché sur les problèmes et besoins en Asie centrale. Des délégations d'experts du Haut Commissariat ont pu se rendre au Tadjikistan, en Ouzbékistan et au Kirghizistan. La Haut-Commissaire s'est également rendue en Égypte, au Bahreïn et au Liban.
Au sujet des territoires palestiniens occupés, la Haut-Commissaire a souligné que la violence se poursuit et que les Palestiniens continuent àd'être soumis à une vaste gamme de violation des droits de l'homme alors qu'Israël continue de subir les meurtres délibérés de civils. Elle a réitéré son appel en faveur de la présence d'observateurs internationaux sur le terrain en tant que facteur dissuasif s'agissant des violations des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés et des attentats suicides et autres contre des civils israéliens.
Mme Robinson a attiré l'attention de la Commission sur le programme d'assistance technique mis en œuvre par le Haut-Commissariat aux droits de l'homme en Sierra Leone. Le processus électoral au Zimbabwe a suscité en Afrique de la satisfaction de la part de certains alors que d'autres observateurs africains ont dénoncé de graves dysfonctionnements. Pour sa part, la Haut-Commissaire avait déjà exprimé avant les élections, sa préoccupation croissante devant la violence, les intimidations et l'absence d'État de droit et d'autres normes démocratiques au Zimbabwe. Les conséquences de cette situation politique sont dévastatrices pour le bien-être économique de millions de pauvres dans le pays.
En Colombie, le Haut-Commissariat est disposé à jouer un rôle plus important en matière de surveillance du respect des droits de l'homme. Au Timor Oriental, il faut continuer à encourager la protection des droits de l'homme en organisant notamment des séminaires sur les droits de l'homme.
En Chine, le programme de coopération technique pour 2002 poursuivra le travail relatif à la formation de la police, l'application de peines pour délits mineurs et l'éducation dans le domaine des droits de l'homme. Cette année sera en outre commencé un programme de formation des juges, des avocats et des administrateurs de prison, et des activités de promotion des droits économiques, sociaux et culturels en province. Si la coopération avec la Chine se déroule bien, la Haut-Commissaire a rappelé aux autorités, lors de sa dernière visite, en novembre, ses préoccupations concernant le respect des droits de l'homme.
La Haut-Commissaire a par ailleurs souligné que la présence de spécialistes des droits de l'homme devient une partie intégrante des opérations pour le maintien de la paix. Le travail sur le terrain est une dimension essentielle du travail du Haut Commissariat.
La Haut-Commissaire a soumis une idée pour examen par la Commission : la composition de la Commission apporte avec elle des obligation aussi bien que des droits. «Si les obligations en vertu de la Charte des Nations Unies et de la Déclaration universelle des droits de l'homme s'appliquent à chaque État, elles devraient être ressenties plus fortement et appliquée plus rigoureusement par ceux qui siègent comme membres de cette instance prééminente des droits de l'homme» , a souligné Mme Robinson. Elle a rappelé à cet égard que 35 États ont accepté de lancer une invitation ouverte à tous les Rapporteurs spéciaux pour qu'ils effectuent une visite dans leur pays. Elle a estimé que la Commission enverrait un message fort si tous les membres de la Commission faisaient de même.
Mme Robinson a enfin attiré l'attention sur la session spéciale de l'Assemblée générale sur les enfants qui se tiendra en mai et qui avait été reportée suite aux événements du 11 septembre. Cette session offre une bonne occasion de promouvoir la protection des enfants et de leurs droits dans le monde entier. La Haut-Commissaire a souligné les liens entre les droits de l'homme, les droits de l'enfant et le Sommet mondial pour le développement durable qui se tiendra à Johannesburg en août.
En conclusion, Mme Robinson a mis l'accent sur la lourde responsabilité qui incombe à la Commission pour défendre et promouvoir les normes internationales relatives aux droits de l'homme dans un nouvel environnement marqué par la menace d'actes terroristes et la crainte devant l'utilisation possible d'armes de destruction massive.
M. KRZYSZTOF JAKUBOWSKI, Président de la cinquante-huitième session de la Commission des droits de l'homme, a souligné que la Commission commence ses travaux dans un monde violent, aux développements imprévisibles. Certains des défis qui se poseront à elle exigeront des solutions qu'elle ne peut même pas encore imaginer. Pour garantir la défense des valeurs universelles dans le système international, il faudra assurer le respect des droits de l'homme, qui sont les fondements de la paix, de la justice et du développement. Depuis ses débuts en 1947, la Commission des droits de l'homme a toujours œuvré au respect de ces principes. Le nombre et le type de missions qui lui sont confiées augmente sans cesse, témoignage éloquent de l'importance de la Commission. Elle doit maintenant, plus que jamais, veiller à l'application effective des traités qui ont été élaborés et adoptés.
Le nouveau Président de la Commission a insisté sur la nécessité d'adopter une méthode de travail fondée sur la coopération et le dialogue, en particulier en cette année du dialogue entre les civilisations. Cette méthode est applicable à tous les échelons de la négociation en vue de la résolution des conflits, en particulier en cette période où le terrorisme et la violence en général sont autant de menaces contre les droits de l'homme.
M. Jakubowski a estimé que la Commission devrait examiner de près les activités qu'elle mène en matière de protection des droits de l'homme et se pencher sur les moyens de mettre la coopération internationale au service de la protection internationale des droits de l'homme, qui doit être à la base du concept de culture des droits de l'homme. En même temps, les droits de l'homme ne doivent pas être un facteur d'uniformisation; il faut promouvoir et protéger les cultures nationales, les pratiques religieuses et les traditions autochtones qui sont à la base mêmes de la philosophie des droits de l'homme.
Le Président a appelé à une réflexion au sein de la Commission sur la façon de ce qui peut être fait pour améliorer les droits de l'homme partout dans le monde, et non pas seulement dans certaines parties seulement, ici ou là. La liste des questions que la Commission doit traiter est longue, et le Président a relevé à cet égard qu'il n'y a pas de «sessions plus ou moins difficiles»; toutes les sessions sont difficiles, car les sujets qu'elles abordent sont eux-mêmes difficiles, à l'image du monde compliqué qu'ils reflètent. La Commission doit donc, dans son fonctionnement, refléter la nécessité de la recherche du dialogue et de solutions adaptées aux problèmes. Le Président est convaincu que la Commission peut réussir dans cette mission, car cela dépend essentiellement de l'attitude individuelle des membres de la Commission et de tous les intervenants. La compréhension mutuelle doit être recherchée, l'esprit de consensus favorisé, sans que cela ne préjuge de la nécessité de savoir garder un ton ferme et franc sur les sujets difficiles.



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