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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME CONCLUT SON DÉBAT DE HAUT NIVEAU

17 Mars 2005

Commission des droits de l'homme
APRÈS-MIDI (15 heures - 18 heures)

17 mars 2005


Le Timor-Leste avertit des risques qu'induiraient
des pressions de la communauté internationale sur une
Indonésie dont l'expérience démocratique est encore fragile



La Commission des droits de l'homme a achevé, cet après-midi, ses quatre journées de travaux spécifiquement consacrées à son débat de haut niveau, durant lequel se sont succédé à la tribune les hauts dignitaires de près d'une centaine de pays. Elle a entendu la Ministre de la justice du Rwanda, les Ministres des affaires étrangères du Timor-Leste, de la Pologne et de la Slovaquie; ainsi que le Secrétaire d'État aux affaires étrangères de la Norvège; le Ministre d'État aux affaires étrangères de l'Irlande; le Vice-Ministre aux affaires internationales et juridiques de l'Iran; et la Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés par intérim.

Le Ministre des affaires étrangères et de la coopération du Timor-Leste, M. José Ramos Horta, a souligné que l'expérience démocratique de l'Indonésie demeure fragile et que des pressions extérieures de la communauté internationale sur les dirigeants indonésiens auraient pour conséquence de provoquer des troubles et pourraient conduire à la résurgence de sentiments nationalistes qui mettrait en péril la démocratie indonésienne. M. Ramos Horta s'est en outre dit étonné de la présentation à la présente session d'un rapport du Haut Commissariat sur la situation des droits de l'homme à Timor Leste; plutôt que de se centrer sur les progrès ou sur le manque de coopération technique, le rapport porte sur des questions pour lesquelles le Haut Commissariat n'a pas obtenu de mandat, a-t-il affirmé.

Les États puissants ont le pouvoir et le devoir de transformer les structures économiques mondiales afin d'assurer des relations commerciales justes entre toutes les nations du monde, a souligné le Vice-Ministre aux affaires internationales et juridiques de l'Iran, M. G.Ali Khoshroo. Pris isolément, les États n'ont qu'une faible marge de manœuvre pour contrecarrer les effets néfastes de la mondialisation, a-t-il ajouté. La Commission a un rôle à jouer à cet égard en fixant les règles du jeu et en identifiant les domaines dans lesquels devraient être entreprises des réformes dans les politiques économiques mondiales dans l'intérêt de tous les peuples du monde.

Le Ministre d'État au Département des affaires étrangères de l'Irlande, chargé d'une responsabilité spéciale pour le développement outre-mer et les droits de l'homme, M. Conor Lenihan, a pour sa part affirmé que pour faire progresser efficacement la cause des droits de l'homme, il convient d'être aussi efficace dans d'autres domaines, tels que la prévention des conflits et la gestion des crises, le maintien de la paix, l'assistance humanitaire, la reconstruction économique et la coopération en faveur du développement.

Le Ministre des affaires étrangères de la Pologne, M. Adam Daniel Rotfeld, a commenté la proposition du Groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement visant à universaliser la composition de la Commission en soulignant que l'expérience montre que les organes à composition restreinte sont plus efficaces. Pour sa part, le Secrétaire d'État aux affaires étrangères de la Norvège, M. Vidar Helgesen, a apporté son soutien à cette proposition d'universalisation de la Commission en souhaitant toutefois que la participation des organisations non gouvernementales aux travaux de cette instance n'en soit pas affaiblie.

M. Helgesen s'est félicité du nombre impressionnant de normes existant en matière de droits de l'homme mais elles doivent être mises en œuvre et respectées. Le Ministre slovaque des affaires étrangères, M. Eduard Kukan, a lui aussi estimé qu'il est temps que la Commission et le Haut Commissariat aux droits de l'homme axent leurs activités, non plus sur l'élaboration de normes, mais sur leur mise en œuvre.

Le Secrétaire d'État aux affaires étrangères de la Norvège s'est par ailleurs inquiété de l'érosion des normes concernant l'interdiction de la torture alors qu'il s'agit d'une norme contraignante à laquelle nul ne saurait déroger.

La Ministre rwandaise de la justice, Mme Edda Mukabagwiza, a estimé que les efforts de justice et de lutte contre l'impunité des planificateurs et exécutants du génocide demeurent très insuffisants. Elle a par ailleurs souligné que, si le Rwanda s'est retiré de République démocratique du Congo, c'est qu'il avait confiance dans la volonté et les moyens de la communauté internationale pour mettre fin à la présence dans ce territoire des ex-FAR et milices Interahamwe, qui ont planifié et dirigé l'exécution du génocide rwandais, et elle attend avec impatience que des actions concrètes soient menées à cet effet.

S'agissant de la situation au Darfour, où il se rendra prochainement, M. Lenihan a déclaré que la communauté internationale a un rôle important à jouer en apportant une solution politique rapide au conflit et en s'attaquant à ses conséquences. La Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés par intérim, Mme Wendy Chamberlin, a notamment indiqué qu'au Darfour, le HCR a déployé 50 fonctionnaires dans trois zones reculées du pays.

La Turquie, la Grèce, l'Arménie, les Philippines, la Lettonie, l'Azerbaïdjan, Chypre et la Fédération de Russie ont exercé le droit de réponse.


La Conférence entamera demain matin, à 10 heures, ses travaux de fond en commençant par l'examen du rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme.

Fin du débat de haut niveau

MME EDDA MUKABAGWIZA, Ministre de la justice du Rwanda, a salué la décision de l'Assemblée générale de commémorer le génocide rwandais le 7 avril, témoignant ainsi de la solidarité universelle avec le peuple rwandais, victime de l'un des plus abominables crimes contre l'humanité. Toutefois, a déclaré la Ministre, la communauté internationale ne devrait pas en rester là. Les efforts de justice et de lutte contre l'impunité des planificateurs et exécutants du génocide demeurent très insuffisants. Nous attendons des États membres des Nations Unies qu'ils collaborent efficacement avec le Tribunal pénal international pénal pour le Rwanda. Qui dit responsabilités, dit réparation. Ainsi, la Ministre a souligné les conséquences du génocide sur la population rwandaise. Partant, elle a déclaré que le Gouvernement du Rwanda n'épargne aucun effort pour améliorer les conditions de vie des survivants mais compte sur la participation accrue de la communauté internationale et de chacun des États membres des Nations Unies.

La Ministre rwandaise de la justice a salué la décision du Secrétaire général de renforcer la prévention du génocide et son pays accueille avec bienveillance la nomination du Conseiller spécial du Secrétaire général sur la prévention du génocide. La Ministre a émis l'espoir que le conseiller spécial pourra disposer des moyens nécessaires pour remplir sa tâche. Pour ce qui concerne le Rwanda, il faudrait qu'un accent particulier soit mis sur la présence persistante des ex-FAR et milices Interahamwe, toujours en armes en République démocratique du Congo. Ces forces armées ont planifié et dirigé l'exécution du génocide rwandais avant d'être exfiltrés en République démocratique du Congo sous le couvert de « l'Opération turquoise» autorisée par les Nations Unies. Si le Rwanda s'est retiré de ce territoire, a affirmé la Ministre, c'est qu'il avait confiance dans la volonté et les moyens de la communauté internationale pour mettre fin le plus rapidement à cette situation. Nous gardons l'espoir que notre confiance ne sera pas déçue et attendons avec impatience que des actions concrètes soient menées à cet effet. La paix durable à laquelle nous aspirons tous n'est pas un avènement accidentel mais la conséquence de solutions aux causes profondes de l'insécurité.

M. JOSÉ RAMOS-HORTA, Ministre des affaires étrangères et de la coopération du Timor-Leste, a souligné que les Gouvernements indonésien et timorais sont conscients, plus que quiconque, de la nécessité qu'il y a à accepter les fardeaux du passé. C'est pourquoi une commission vérité et amitié a été mise sur pied par ces deux gouvernements le 14 décembre dernier. Le Gouvernement du Timor-Leste s'est pour sa part donné pour priorité de défendre les actions de justice qui tendent à restaurer la dignité humaine. En 2004, la nation pluriethnique et multiculturelle qu'est l'Indonésie a quant à elle connu deux élections démocratiques jugées comme ayant été impartiales par tous les observateurs. Dans ce cadre, les partis islamistes radicaux ont échoué. Cependant, l'expérience démocratique de l'Indonésie demeure fragile et rien ne peut assurer que ces éléments radicaux ne gagneront pas en influence et, au bout du compte, en pouvoir. C'est pourquoi les Timorais et la communauté internationale doivent comprendre les défis complexes auxquels sont exposés les dirigeants civils élus en Indonésie. Dans ce contexte, des pressions extérieures de la communauté internationale sur ces dirigeants auraient pour conséquence de provoquer des troubles et pourraient conduire à la résurgence de sentiments nationalistes qui mettrait en péril la démocratie indonésienne. Ceux qui sont confortablement installés dans leurs bureaux de Genève et de New York ne peuvent se permettre le luxe de donner des leçons de morale aux autres sur la justice et la nécessité de combattre l'impunité comme si les acteurs sur le terrain et les dirigeants politiques n'étaient pas animés de bonnes intentions.

M. Ramos-Horta a souligné que la Commission pour la vérité et l'amitié aura pour mandat de faire apparaître la vérité sur les allégations de violations de droit de l'homme commises en 1999. Elle se composera de dix membres: cinq d'Indonésie et cinq de Timor-Leste. Les membres jouiront d'une immunité et toutes les dispositions en matière de sécurité seront garanties. Le Timor-Leste a par ailleurs pris des mesures en matière de santé et d'éducation ainsi qu'en faveur des femmes et des enfants. Le Ministre a en outre reconnu la fragilité du secteur judiciaire dans son pays et a regretté l'accès toujours insuffisant à la justice. Cependant, a-t-il précisé, au cours de la première année après son élection, le Parlement a ratifié sept conventions clés en matière de droits de l'homme. Le Ministre s'est dit étonné de l'inscription à l'ordre du jour de la soixante et unième session de la Commission des droits de l'homme d'un point intitulé « rapport du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme à Timor-Leste ». En effet, aucune déclaration présidentielle ni résolution adoptée à la soixantième session ne mentionnait de point intitulé «la situation des droits de l'homme au Timor-Leste». Plutôt que de se centrer sur les progrès ou sur le manque de coopération technique, le rapport porte sur des questions pour lesquelles le Haut Commissariat n'a pas obtenu de mandat, ce qui entraîne une confusion entre des questions relatives à la coopération technique et d'autres relatives à des accusations de violations de droits de l'homme qui auraient été commises par des représentants des autorités du Timor Leste. Le mandat confié aux Nations Unies en matière de droits de l'homme consiste à conseiller et à aider les autorités en matière de droits de l'homme. Mais les experts semblent être plus intéressés par un travail de police. Enfin, le Ministre a dit ne pas comprendre la logique qui sous-tend les arguments en faveur d'une composition universelle de la Commission dans la mesure où une telle composition serait plus représentative mais pas forcément plus démocratique et efficace.

M. ADAM DANIEL ROTFELD, Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a déclaré que son pays était favorable à un réexamen des bases notionnelles des Nations Unies et des principes de base et objectifs de la Charte des Nations Unies, sans pour autant changer la Charte elle-même. Les principes de souveraineté, de légitimité, de transparence des États et de leurs dirigeants, de subsidiarité, de complémentarité, de solidarité et de responsabilité doivent être ajustés aux circonstances actuelles et les droits de l'homme figurer au cœur de tout effort de réforme. Le mois dernier, la Pologne a apporté sa contribution à la réforme de l'Organisation en soumettant au Secrétaire général des Nations Unies le projet d'une action de politique nouvelle pour l'ONU. C'est en phase avec le Groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement que la Pologne a proposé que la création d'un Conseil des droits de l'homme comme organe principal des Nations Unies soit un objectif stratégique de l'Organisation, le but étant de transformer la protection des droits de l'homme en l'un des trois piliers de l'ONU.

La Pologne a examiné avec attention les propositions du Groupe de personnalités de haut niveau relatives à la réforme du système de promotion et de protection des droits de l'homme aux Nations Unies, y compris la réforme de la Commission des droits de l'homme elle-même, a ajouté le Ministre. Si la composition universelle de la Commission peut contribuer à renforcer sa crédibilité et la rendre pleinement représentative, il demeure néanmoins un risque de la voir faire double emploi avec les travaux de la troisième Commission de l'Assemblée générale des Nations Unies. Comment également continuer sous l'influence du Conseil économique et social, lequel n'aurait que le quart des membres de la Commission? De même, l'expérience montre que les organes à composition restreinte sont plus efficaces, puisque les intérêts de groupe s'y font moins sentir. Le Haut Commissariat aux droits de l'homme devrait également être mieux équipé et renoncer à sa culture de réaction pour privilégier une culture de prévention. Le Ministre a par ailleurs souligné que son pays, qui dénonce toute manifestation d'intolérance et de xénophobie, de discrimination fondée sur la race, l'origine ethnique, la religion, de même que les actes antisémites, estime que la communauté internationale devrait montrer une détermination égale pour éradiquer d'autres formes de discrimination, comme celle dirigée contre l'islam et le christianisme et l'intolérance quelle qu'en soit le motif.

M. EDUARD KUKAN, Ministre des affaires étrangères de la Slovaquie, a déclaré que depuis 60 ans, le concept de dignité humaine énoncé à l'article premier de la Déclaration universelle des droits de l'homme a trop souvent été négligé, oublié, voire bafoué par des États et des régimes politiques dans le monde entier. Nombre de justifications ont été mises en avant pour agir de la sorte: souveraineté nationale, intérêts politiques, traditions culturelles ou religieuses. Si les États ont le droit légitime de défendre leurs intérêts ou leur souveraineté nationale, aucune circonstance ne saurait justifier les atteintes à la dignité humaine. La dignité humaine doit toujours être protégée et les auteurs de violations flagrantes des droits de l'homme traduits en justice, a déclaré le Ministre. M. Kukan a déclaré que pour mener à bien sa mission, la Commission des droits de l'homme, ses mécanismes spéciaux ainsi que le Haut-Commissariat aux droits de l'homme devraient explorer tous les moyens d'action à leur disposition. Au delà de l'élaboration de normes, a précisé le Ministre, cela signifie, d'une part, la surveillance de leur mise en œuvre et, d'autre part, la coopération technique, l'éducation et le dialogue. C'est dans cet esprit que la Slovaquie se félicite du second rapport du Secrétaire général sur la réforme des Nations Unies et notamment de la recommandation visant à promouvoir l'intégration des droits de l'homme dans toutes les activités des Nations Unies. M. Kukan a par ailleurs appuyé l'idée de renforcer les capacités des institutions nationales relatives aux droits de l'homme.

Le Ministre slovaque des affaires étrangères a par ailleurs estimé que les propositions du Groupe des personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement visant à renforcer l'universalité de la Commission ou à créer un conseil des droits de l'homme sont dignes de la plus grande attention. La Slovaquie estime qu'il est temps que la Commission et le Haut Commissariat aux droits de l'homme axent leurs activités, non plus sur l'élaboration de normes, mais sur leur mise en œuvre. Le Ministre s'est ensuite réjoui que l'état de droit et la démocratie gagnent du terrain dans les pays voisins de la Slovaquie. Venant à la situation des droits de l'homme dans son propre pays, le Ministre a notamment évoqué l'entrée en vigueur d'une loi de lutte contre la discrimination. L'objet de ce texte, a-t-il précisé, est de lutter contre la discrimination fondée sur le sexe, la religion ou la conviction, la race, la nationalité ou l'origine ethnique, le handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. À cela s'ajoutent nombre de programmes destinés à renforcer les droits des groupes les plus vulnérables de la société, notamment les Roms.

M. VIDAR HELGESEN, Secrétaire d'État aux affaires étrangères de la Norvège, s'est félicité du processus de réforme entrepris au sein du Haut Commissariat aux droits de l'homme. Il a aussi insisté sur les liens qui existent entre droits de l'homme, développement durable, paix et sécurité. Il en outre appuyé la recommandation qui tend à universaliser la participation à la Commission mais a souhaité dans le même temps que la participation des organisations non gouvernementales ne soit pas affaiblie. La Norvège soutient par ailleurs les propositions visant à une augmentation du budget du Haut-Commissariat. Convaincue qu'il existe des liens étroits entre la paix et la sécurité et les droits de l'homme, la Norvège plaide en faveur d'une collaboration accrue entre les instances de défense des droits de l'homme et le Conseil de sécurité. M. Helgesen a en outre souhaité que soit mis de l'ordre au sein de l'Organisation et que les cas de mauvaise conduite soient punis. Il a par ailleurs exprimé sa préoccupation concernant la dégradation de la situation des droits de l'homme au Népal; il a en particulier appelé à la libération des prisonniers politiques et a demandé que la liberté de la presse soit garantie.

Le Secrétaire d'État norvégien aux affaires étrangères s'est félicité du nombre impressionnant de normes existant en matière de droits de l'homme mais a appelé à ce que l'on veille à faire en sorte qu'elles soient mises en œuvre et respectées. Il faut également réagir aux liens qui existent entre droits de l'homme et conflits armés, a-t-il poursuivi. Dans ce contexte, il a estimé que les efforts de la communauté internationale au Darfour ont été insuffisants et sont arrivés trop tard. Les droits de l'homme doivent être considérés comme un élément de prévention des conflits. En outre, a poursuivi M. Helgesen, prévenir les actes de terreur est une responsabilité fondamentale qui incombe aux États, mais cela doit se faire dans le respect des droits de l'homme. Il s'est en particulier inquiété de l'érosion des normes concernant l'interdiction de la torture alors qu'il s'agit d'une norme contraignante à laquelle nul ne saurait déroger. Enfin, le Secrétaire d'État norvégien s'est dit préoccupé par les tentatives entreprises pour réduire la Commission au silence concernant la situation dans certains pays. L'expertise et l'objectivité de ses mécanismes sont irremplaçables. Les procédures spéciales jouent un rôle fondamental et l'on doit protéger leur autonomie. Le dialogue et la coopération s'imposent et la Commission est l'instance privilégiée pour les mener à bien.

M. CONOR LENIHAN, Ministre d'État au Département des affaires étrangères de l'Irlande, chargé d'une responsabilité spéciale pour le développement outre-mer et les droits de l'homme, a affirmé que pour faire progresser efficacement la cause des droits de l'homme, il convient d'être aussi efficace dans d'autres domaines, tels que la prévention des conflits et la gestion des crises, le maintien de la paix, l'assistance humanitaire, la reconstruction économique et la coopération en faveur du développement. S'il est impossible de garantir la pleine jouissance des droits de l'homme sans le développement, il est tout aussi impossible d'atteindre le développement durable sans respecter les droits de l'homme. La bonne gouvernance et le respect de l'état de droit sont essentiels à la création des conditions propices à la jouissance des droits de l'homme, a poursuivi M. Lenihan. Des institutions démocratiques solides constituent en outre une bonne base pour l'élimination de la pauvreté.

S'agissant de la situation au Darfour, où il se rendra prochainement, M. Lenihan a déclaré que la communauté internationale a un rôle important à jouer en apportant une solution politique rapide au conflit et en s'attaquant à ses conséquences. Le Ministre a souligné qu'en 2004, l'Irlande a apporté à la région du Darfour une aide de 6,38 millions d'euros, dont une partie est réservée aux activités relatives aux droits de l'homme. La promotion et la protection des droits de l'homme font parties intégrantes de la protection des populations vulnérables dans les situations de conflit comme celle du Darfour. Mettre fin à l'impunité et traduire en la justice les auteurs de violations graves des droits de l'homme est également essentiel. L'Irlande soutient vigoureusement la recommandation visant à promouvoir l'interaction entre le Haut Commissaire aux droits de l'homme et le Conseil de sécurité, a par ailleurs indiqué M. Lenihan.

M. G. ALI KHOSHROO, Vice-Ministre pour les affaires internationales et juridiques de l'Iran, a souligné les progrès significatifs enregistrés par la communauté internationale dans la mise en place d'un réseau mondial d'instruments et de mécanismes visant à promouvoir et protéger les droits de l'homme. Toutefois, a-t-il regretté, le mouvement mondial de promotion des droits de l'homme continue d'être confronté à des défis et des obstacles permanents. Ces défis sont tellement grands qu'ils sont susceptibles non seulement d'empêcher de nouveaux progrès mais aussi d'entraîner la remise en cause de situations qui semblaient acquises. Les États puissants ont le pouvoir et le devoir de transformer les structures économiques mondiales afin d'assurer des relations commerciales justes entre tous les pays, a souligné le Vice-Ministre. Pris isolément, les États n'ont qu'une faible marge de manœuvre pour contrecarrer les effets néfastes de la mondialisation, a-t-il poursuivi, soulignant que les défis mondiaux nécessitent des réformes mondiales. On a beaucoup parlé des effets néfastes de la mondialisation sur les pauvres; mais ces effets négatifs affectent également les plus riches, a-t-il fait remarquer. Aussi, les politiques économiques mondiales devraient-elles être réformées dans l'intérêt de tous les peuples du monde. La Commission a un rôle à jouer à cet égard en fixant les règles du jeu et en identifiant les domaines dans lesquels des réformes devraient être engagées.

Le Vice-Ministre iranien a ensuite souligné la nécessité de faire preuve d'objectivité dans l'approche des questions relatives aux droits de l'homme. Les Nations Unies et la Commission ne fonctionneront de manière optimale que si l'impartialité et l'objectivité sont respectées, non seulement au sein du système mais également dans le cadre des structures régionales. La pratique consistant à cibler des situations spécifiques en matière de droits de l'homme ne saurait être perçue comme un moyen d'éliminer les violations des droits de l'homme, a estimé M. Khoshroo. Il a en outre insisté sur la nécessité de respecter la diversité culturelle. Pour l'Iran, l'universalité ne signifie pas l'hégémonie d'une culture. Le respect universel des droits de l'homme est un consensus interculturel dans le cadre duquel toutes les régions et toutes les cultures jouissent de la liberté de préserver leur identité. Le Vice-Ministre a estimé que certaines des propositions contenues dans le rapport du Groupe de haut-niveau sur les menaces, les défis et le changement ne sont pas de nature à renforcer le professionnalisme et la crédibilité de la Commission. Certaines pourraient même conforter les tendances à la politisation. Aussi, le Vice-Ministre a-t-il encouragé le Groupe à poursuivre sa réflexion, l'assurant de son plein concours.

MME WENDY CHAMBERLIN, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés par intérim, a déclaré que le HCR fait de son mieux pour prendre en charge les personnes déplacées à l'intérieur de leurs frontières. Au Darfour par exemple, le HCR a déployé 50 fonctionnaires dans trois zones reculées du pays. Mme Chamberlin a par ailleurs insisté sur l'importance de la coopération entre les institutions des Nations Unies et les organisation non gouvernementales. Le HCR fournit notamment une assistance psychologique et psychosociale aux réfugiés, a par ailleurs rappelé la Haut Commissaire par intérim. Elle a souligné que le HCR veille en outre à ce que le rapatriement des réfugiés se déroule en toute sécurité et dans la dignité; il s'efforce de suivre de près la situation des personnes rentrées chez elles. Enfin, Mme Chamberlin a fait savoir que le HCR joue un grand rôle en faveur des personnes qui sont privées de leur droit à la nationalité et qui se trouvent dépourvues d'identité juridique.


Droit de réponse

M. TÜRKEKUL KURTTEKIN (Turquie) a affirmé que l'intervention, mardi, du Ministre des affaires étrangères de Chypre constituait, une fois de plus, une pure manifestation de mémoire sélective car elle a omis de mentionner la violation massive des droits de l'homme commise par les Chypriotes grecs depuis 1963, lorsque l'ordre légal établi selon les termes des accords de 1959-1960 a été renversé et que les Chypriotes turcs ont été la cible d'une campagne de purification ethnique. Le problème est que les Chypriotes grecs ne sont pas prêts à une solution fondée sur l'équité politique et le partage du pouvoir avec les Chypriotes turcs. Le représentant a conclu en appelant la communauté internationale à rectifier cette situation injuste.

M. TASSOS KRIEKOUKIS (Grèce) a répondu à la déclaration faite durant le segment de haut niveau par le Secrétaire général de l'Organisation de la conférence islamique (OCI) en affirmant que les droits des membres de la minorité musulmane en Thrace sont pleinement garantis et protégés dans le cadre d'une société démocratique où prime le droit.

M. ZOHRAB MNATSAKANIAN (Arménie) s'est dit déçu par l'intervention du Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Azerbaïdjan présentant l'interprétation que fait son gouvernement de la situation conflictuelle au Haut-Karabakh. L'Azerbaïdjan devrait manifester sa volonté de reconnaître les véritables causes du conflit et s'efforcer de les distinguer de ses solutions. L'Arménie comprend que le fardeau des réfugiés est bien réel, ayant elle-même accueilli aussi des centaines de milliers de réfugiés en provenance d'Azerbaïdjan. Néanmoins le mépris des questions de sécurité et, par extension, du statut du Haut-Karabakh remet en cause la sincérité de l'Azerbaïdjan au regard du processus de paix.

MME JUNEVER MAHILUM-WEST (Philippines), en réponse au Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique qui a fait référence à la situation des musulmans dans le Sud de son pays, a déclaré que, contrairement à ce qui a été suggéré, le Gouvernement philippin est déterminé à mener à bien un processus de paix complet en vue d'assurer le bien-être des communautés musulmanes en particulier. Des réformes et des projets ont été mis en œuvre à cette fin, a insisté la représentante. Cette action affirmative se fonde sur une participation populaire, un programme de réhabilitation et de réintégration, des initiatives de développement économique et social et la protection des droits de l'homme fondamentaux des musulmans, a-t-elle précisé.

M. RAIMONDS JANSONS (Lettonie) a relevé que, dans sa déclaration, le Vice-Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie a omis de dire qu'à ce jour, son propre pays ne reconnaissait toujours pas que la Lettonie avait été occupée par l'Union soviétique. La Lettonie ne peut accepter que les perspectives historiques soient présentées de façon biaisée. La Fédération de Russie n'est pas la mieux placée pour parler du problème des minorités en Lettonie, a poursuivi le représentant. Il s'est en outre dit préoccupé par le nombre d'incidents racistes qui se sont produits en Fédération de Russie. Récemment encore, trois jeunes étudiants asiatiques ont été attaqués et ont dû être hospitalisés alors que deux défenseurs des droits de l'homme ont été tués.

M. AZAD CAFAROV (Azerbaïdjan) a dénoncé l'hypocrisie de la déclaration de l'Arménie. Le Nagorno-Karabagh a toujours fait partie de l'Azerbaïdjan, comme cela a d'ailleurs été reconnu par les Nations Unies, a-t-il déclaré. Il a rappelé plusieurs résolutions du Conseil de l'Europe confirmant que l'occupation du Nagorno-Karabagh par l'Arménie était contraire aux principes du droit international.

M. JAMES C. DROUSHIOTIS (Chypre) a déclaré que son pays continue d'être victime d'une occupation illégale par la Turquie qui applique une politique d'isolement économique. Le Gouvernement chypriote a largement fait preuve de sa bonne volonté pour faciliter la réunification de Chypre, a-t-il rappelé. Il a souligné qu'à travers plusieurs de ses résolutions, le Conseil de sécurité ne reconnaît qu'un seul État chypriote.

M. PAVEL CHERNIKOV (Fédération de Russie) a rappelé qu'il existe au sein de la Commission un consensus sur le fait qu'aucun pays n'est parfait en matière de droits de l'homme. La Fédération de Russie n'est certes pas à l'abri des critiques mais estime toutefois que les critiques de la Lettonie à son endroit ne sont pas justifiées.

M. TÜRKEKUL KURTTEKIN (Turquie) a contesté les propos du représentant de Chypre selon lesquels l'exercice du droit de vote dans le cadre du référendum sur le plan Annan aurait été démocratique. Des rapports ont indiqué que des Chypriotes turcs avaient été harcelés par les opposants au plan et d'entre eux ont même renoncé à figurer parmi les partisans du plan. Il a également dénoncé l'embargo économique dont sont victimes les Chypriotes turcs.

M. JAMES C. DROUSHIOTIS (Chypre) a rappelé que 76% des inscrits ont voté contre le plan Annan, au cours de procédures libres et démocratiques. Rien ni personne ne peut contester ce fait. En ce qui concerne l'embargo, il a estimé que ce dernier était tout autant imposé par le régime d'occupation lui-même avec pour objectif de renforcer la tendance à la sécession. Le Gouvernement chypriote veut une solution qui réponde aux espoirs des deux communautés, a affirmé le représentant de Chypre.


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