Communiqués de presse Commission des droits de l'homme
COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME : LES MINISTRES DE PLUSIEURS PAYS DÉPLORENT LE DÉCLENCHEMENT CE MATIN D'UNE GUERRE CONTRE L'IRAQ
20 mars 2003
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Commission des droits de l'homme
59ème session
20 mars 2003
Matin
Le Rwanda indique qu'il prendra ses responsabilités
pour assurer sa sécurité si la situation qui prévaut
dans la région n'est pas corrigée pour maintenir
les acquis du processus de paix
La Commission des droits de l'homme a poursuivi, ce matin, son débat de haut niveau en entendant des déclarations des Ministres des affaires étrangères de Cuba et de la République de Moldova, des Ministres de la justice du Honduras, de l'Algérie et du Rwanda, du Vice-Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, ainsi que du Directeur général de l'Organisation internationale des migrations (OIM).
Plusieurs intervenants ont réagi au déclenchement, ce matin, de la guerre en Iraq. Ainsi, le Ministre des affaires étrangères de Cuba, M. Felipe Pérez Roque, a déclaré que l'agression illégale, injuste et inutile contre l'Iraq, déjà déclenchée brutalement en dépit du refus unanime de l'opinion publique mondiale, transforme le droit à l'autodétermination et à la souveraineté des peuples en un simple mirage. À l'issue de cette guerre surgira un nouvel ordre mondial dans lequel notre ancienne aspiration de voir la planète régie par «l'empire de la loi» aura été remplacée par l'imposition d'un ordre régi par «la loi de l'empire», a-t-il expliqué. Affirmant que toute la planète est devenue l'otage des décisions capricieuses d'un pouvoir illimité qui ignore tout engagement international et décide en fonction de ses propres intérêts, M. Pérez Roque a appelé à la mise en place d'une coalition qui inscrirait de nouveau sur sa bannière l'aspiration à la liberté, à l'égalité et à la fraternité entre tous les peuples - une coalition pour la justice et la paix.
Le Ministre des affaires étrangères de la République de Moldova, M. Nicolae Dudau, a dit regretter qu'il n'ait pas été possible de trouver une solution pacifique à la crise iraquienne. Il a lancé un appel afin que tout soit fait pour atténuer les conséquences humanitaires de ce conflit. Le Ministre de la justice de l'Algérie, M. Mohamed Charfi, a pour sa part rappelé que cette guerre se déroule en violation de la légalité internationale et doit donc cesser immédiatement. Aussi, a-t-il demandé à la Commission de se prononcer en ce sens. Le Vice-Ministre aux affaires étrangères de la Fédération de Russie, M. Yuri Fedotov a affirmé qu'il existe des raisons fondées de craindre que l'opération militaire contre l'Iraq ne fasse qu'accroître les menaces globales de terrorisme. La guerre, inéluctablement, va entraîner de nombreuses pertes humaines et fait poindre la menace d'une catastrophe humanitaire.
Évoquant par ailleurs la situation en République tchétchène, M. Fedotov a souligné que seul le peuple peut décider de son sort et adopter sa constitution - fondement d'un règlement politique en Tchétchénie. Le référendum du 23 mars doit ouvrir une nouvelle phase du processus de retour à la normale de cette république, a-t-il affirmé.
M. Jean de Dieu Mucyo, Ministre de la justice et des relations institutionnelles du Rwanda, a fait observer que les accords de paix de Lusaka et de Pretoria sont gravement violés et que le processus de paix en République démocratique du Congo est compromis par l'évolution récente de la situation sécuritaire, se rapprochant des frontières du Rwanda. «Si cette situation très préoccupante n'est pas corrigée pour maintenir les acquis du processus de paix en cours, le Rwanda prendra ses responsabilités pour assurer la sécurité de ses frontières et de son peuple», a-t-il déclaré.
Le Ministre de la gouvernance et de la justice du Honduras, M. Jorge Ramón Hernández, a pour sa part attiré l'attention de la Commission sur un très grave problème auquel est confronté ces dernières années le Honduras qui connaît une augmentation considérable de la violence des bandes de jeunes ces deux dernières années. Il a lancé un appel à la communauté internationale afin qu'elle se joigne au Honduras pour apporter une réponse adéquate à cette situation.
En fin de séance, le Maroc et l'Ouganda ont exercé le droit de réponse.
La Commission poursuivra son débat de haut niveau cet après-midi, à 15 heures, pour entendre notamment la Directrice générale de l'OMS, les Ministres des droits de l'homme du Burkina Faso, de la République démocratique du Congo et du Burundi, ainsi que la Ministre des affaires étrangères de la Suède et du Cameroun et le Ministre des affaires présidentielles et de l'administration du Botswana.
Déclarations
M. JORGE RAMÓN HERNÁNDEZ ALCERRO, Ministre de la gouvernance et de la justice du Honduras, a attiré l'attention de la Commission sur un très grave problème auquel est confronté ces dernières années le Honduras où, entre 1998 et décembre 2002, 744 jeunes gens de moins de 18 ans ont été assassinés dans le pays. Ces meurtres se sont produits essentiellement dans les zones urbaines et avant tout dans les deux principales villes du pays, à savoir Tegucigalpa et San Pedro Sula, a-t-il précisé. Jusqu'à présent les responsables de ces crimes n'ont pas été appréhendés, a-t-il ajouté. Un nombre important de ces meurtres peut être attribué à une hausse considérable de la violence en bande ces deux dernières années, a poursuivi le Ministre. Il a mis en exergue deux facteurs à prendre en compte dans ce contexte, à savoir, d'une part, le nombre croissant de jeunes honduriens ayant un passif judiciaire expulsés d'Amérique du Nord et, de l'autre, la croissance disproportionnée du nombre d'enfants tués durant la même période.
Le phénomène des bandes de jeunes au Honduras est apparu dans le pays au cours des années 1990, a rappelé M. Hernández Alcerro. Ces bandes ont forgé un modèle de conduite calqué sur la culture des bandes existant dans les grands centres urbains de certains pays développés, a-t-il expliqué. Soucieux d'assurer le respect de l'État de droit, le Gouvernement ne ménage actuellement aucun effort pour découvrir la vérité derrière ces meurtres, a-t-il affirmé. Peu après son entrée en fonction l'an dernier et face à l'ampleur du problème, le Président Ricardo Maduro a mis en place la Commission permanente pour la protection de l'intégrité morale et physique des enfants, qui a notamment proposé la mise sur pied d'une unité spéciale d'enquête sur les décès violents d'enfants, l'intégration des ONG traitant des questions relatives aux enfants dans les processus d'enquête et de supervision, la mise en place d'un programme national d'enregistrement des armes; la création d'un groupe spécial de prévention des bandes, ainsi qu'un plan national pour la réhabilitation et la réintégration sociale des membres de ces bandes.
Il est évident que depuis le début de son mandat, l'administration du Président Maduro est fermement engagée à rechercher une solution permanente à ces problèmes qui trouvent leurs racines profondes dans les mauvaises conditions sociales et économiques du pays, a poursuivi M. Hernández Alcerro. Il a lancé un appel à la communauté internationale, c'est-à-dire aussi bien aux organisations gouvernementales qu'aux organisations non gouvernementales, afin qu'elle se joigne au Honduras pour apporter une réponse adéquate à cette situation.
M. YURI FEDOTOV, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a déclaré que la période de l'affrontement entre les blocs a cédé la place à de nouveaux défis en matière de sécurité. Le but des institutions internationales est de contribuer par tous les moyens possibles au renforcement de la responsabilité universelle et au traitement des problèmes existants qui concernent la protection des droits de l'homme. Il s'agit dans ce processus d'impliquer toutes les parties dans une discussion, plutôt que de désigner des États «voyous»; l'aide ciblée aux pays éprouvant des difficultés est plus payante que l'exercice de pressions politiques, a souligné le vice-ministre russe.
M. Fedotov a souligné que le terrorisme était une menace pour chaque pays, quels que soient sa position géographique ou son niveau de développement. Le terrorisme s'attaque aux fondements mêmes des structures des États et cause de terribles souffrances aux gens ordinaires. La Russie elle-même n'est pas épargnée par ce fléau, qui s'en prend au droit fondammental de la personne, le droit à la vie. Récemment, le lien entre terrorisme et droits de l'homme est devenu encore plus évident. La Russie est tout à fait prête à renforcer la coopération entre États en matière de lutte antiterroriste, y compris dans son aspect qui relève de la protection des droits de l'homme. Une mesure concrète à cet égard pourrait être l'application d'une initiative de M. Ivanov, Ministre des Affaires étrangères de la Russie, de rédaction d'un code de protection des droits de l'homme contre les effets du terrorisme.
Concernant la crise en Iraq, M. Fedotov a estimé qu'il y a lieu de craindre que l'intervention militaire actuelle, prise sans l'aval du Conseil de sécurité, et alors que toutes les voies pacifiques n'ont pas été épuisées, ne fera qu'augmenter la menace globale du terrorisme. Malheureusement, a-t-il noté, c'est au moment où les inspections semblaient fonctionner que des frappes ont lieu. La menace d'une catastrophe humanitaire pointe, avec la destruction d'infrastructures civiles déjà fortement ébranlées. Les conséquences pour la protection des droits de l'homme pourraient être graves et il faut que la situation revienne à la normale.
En ce qui concerne la situation en Tchétchénie, le ministre a dit qu'il s'agissait d'une partie inaliénable du territoire de son pays. Seul le peuple tchétchène est habilité à déterminer son propre destin et adopter une constitution. Le prochain référendum constitutionnel qui se tiendra en Tchétchénie ouvrira une nouvelle phase dans le retour à la vie normale. M. Fedotov a conclu son intervention en déplorant la politisation croissante des débats de la Commission, qui est un obstacle aux progrès; il a exprimé le vœu que puisse changer le ton parfois accusatoire et empreint de motivations politiques des débats.
M. MOHAMED CHARFI, Ministre de la justice, Garde des sceaux de l'Algérie, a regretté que cette session de la Commission se déroule sur fond de la guerre en Iraq qui se déroule en direct sous nos yeux. Rappelant que cette offensive a été lancée en violation du droit international, il a demandé à la Commission de prendre ses responsabilités à cet égard. Il a déclaré que c'était dans l'enceinte de la Commission que les préoccupations communes relatives aux droits de l'homme doivent être exprimées, partagées et échangées. C'est dans cette enceinte et dans celle plus vaste qui l'intègre que l'honneur de l'espèce humaine peut et doit être sauvegardée, en dehors de tout esprit de confrontation ou d'affrontement. C'est ici, dans la sérénité et la responsabilité, que doit s'organiser le système mondial de protection et de promotion des droits de l'homme, a-t-il insisté. Toutefois, malgré les efforts considérables et les avancées remarquables que l'on a pu observer, il reste un long chemin à parcourir pour que la personne humaine reprenne sa place en tant qu'élément central de toute société. Après avoir dénoncé les guerres et les conflits internes, les violations des droits civils et politiques, l'extrême précarité, la pauvreté et la famine, il a affirmé solennellement qu'à l'heure où de lourdes tensions pèsent sur le Moyen Orient et ailleurs, le seul viatique qui doit guider la communauté des nations est la primauté du droit sur la force. De même, a-t-il poursuivi, le droit à l'autodétermination pour le peuple de Palestine et pour le peuple du Sahara occidental doit trouver sans tarder et définitivement son traitement par le respect des décisions pertinentes de l'ONU pour mettre fin à des situations d'occupation étrangère qui durent depuis des décennies.
M. Charfi a ensuite souligné l'actualité de la Déclaration de Vienne de juin 1993 qui a fondé l'universalité, l'indivisibilité et l'interdépendance de l'ensemble des droits de l'homme, qu'ils soient politiques, civils, culturels ou économiques et sociaux. Il n'y a pas de droits mineurs par rapport à d'autres s'est-il exclamé. Pour toutes ces questions, la Commission des droits de l'homme founit l'espace idoine pour que soient réaffirmés avec force tous les droits humains, particulièrement le droit à l'alimentation et le droit à la santé, en faisant jouer la solidarité entre les nations, entre les peuples et entre les individus. Dans ce contexte, il a mis l'accent sur le droit au développement, qualifié de «droit matriciel» par M. Mohamed Bedjaoui, ancien Président de la Cour internationale de justice. Partant, le Garde des Sceaux algérien a estimé que la sensibilité à la question des droits de l'homme devait changer de nature. Elle ne devrait plus être perçue à la seule aune des obligations découlant du mandat de gouvernance et du statut de citoyenneté, mais être considérée à l'aune du développement économique et social. En effet, les droits de l'homme sont devenus des facteurs du développement global : les hommes ont aujourd'hui autant faim d'État de droit que d'économie, ils ont autant soif de démocratie que de prospérité, a-t-il poursuivi. C'est pourquoi la communauté internationale devrait être attentive aux efforts déployés par les nations dites de transition démocratique pour les encourager et les aider à réussir au plus tôt cette transition. Cela commande que soit redéfinie l'approche en vigueur, faite de censure et d'injonction, pour laisser place à une approche plus dynamique, plus solidaire, fondée sur l'incitation et la coopération.
M. Charfi a ensuite attiré l'attention sur le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique, qui mise autant sur l'innovation africaine que sur les vertus d'une coopération internationale équilibrée, qui soit ouverte et dénuée d'arrière pensée. Dans cette quête au développement, la ressource humaine est un enjeu essentiel, a-t-il déclaré, regrettant que la fuite des cerveaux marque une nouvelle détérioration des termes de l'échange. Il a exprimé ses préoccupations devant les «OPA» lancées par les pays du Nord sur les compétences des pays du Sud, ce qui revient à un transfert illégitime de richesse et constitue une sérieuse entrave aux efforts de développement. Il a estimé qu'il était temps que la communauté internationale réfléchisse à un mécanisme de compensation dans ce domaine. Il a ensuite dressé le bilan de la transition démocratique de l'Algérie et a rendu compte de la création d'une direction générale des droits de l'homme au sein du ministère de la justice. Cet organe participera à la réforme de la justice entreprise par le Gouvernement. Elle aura pour tâche de répondre aux sollicitations des mécanismes des Nations Unies, d'assurer la protection et la promotion des droits de l'homme et l'interface avec les différentes organisations non gouvernementales et les institutions nationales.
M. FELIPE PÉREZ ROQUE, Ministre des affaires étrangères de Cuba, a déclaré que l'élection de Mme Najat El Mehdi Al-Hajjaji à la présidence de la Commission prouve que l'arrogance et les intérêts de domination hégémonique peuvent échouer à la Commission lorsque prévalent l'unité et l'esprit de collaboration entre l'immense majorité de ses membres. «Nous espérons que notre décision de vous élire, contre l'opposition entêtée et les pressions exercées par la délégation nord-américaine, ne transformera pas la Commission des droits de l'homme en un autre «recoin obscur du monde»», a déclaré le Ministre. M. Pérez Roque a déclaré que, pour son pays, la priorité consiste à sauver de la paralysie l'Organisation des Nations Unies et ses mécanismes de sécurité collective et de faire face au non-respect délibéré des principes consacrés dans la Charte.
L'agression illégale, injuste et inutile contre l'Iraq, un pays du tiers-monde, déjà déclenchée brutalement en dépit du refus unanime de l'opinion publique mondiale, transforme le droit à l'autodétermination et à la souveraineté des peuples en un simple mirage, a poursuivi M. Pérez Roque. À l'issue de cette guerre surgira «un nouvel ordre mondial dans lequel notre ancienne aspiration de voir la planète régie par l'empire de la loi aura été écrasée par l'imposition d'un ordre régi par la loi de l'empire», a déclaré le Ministre cubain. «Aurions-nous pu prévoir que même l'Union européenne, ce sage et patient exercice d'intégration aujourd'hui - de toute évidence - brisé, ne parviendrait pas à mettre un frein aux appétits bellicistes et hégémoniques du Gouvernement des États-Unis?», a-t-il ajouté. Toute la planète est devenue l'otage des décisions capricieuses d'un pouvoir illimité qui ignore tout engagement international et décide en fonction de ses propres intérêts et de sa conception particulière de la sécurité nationale, a déclaré M. Pérez Roque. «Nous nous acheminons vers un nouvel ordre mondial dans lequel la concertation est remplacée par la menace et la persuasion par la peur», a-t-il poursuivi. Aussi, «notre dilemme et notre défi consiste-t-il à faire face, unis, à un danger qui nous menace tous», a-t-il affirmé.
Cuba croit néanmoins fermement qu'il existe une forte raison de faire preuve d'optimiste. En effet, dans l'histoire de l'humanité, les grandes crises ont toujours ouvert la voie aux grandes solutions. Aucune tyrannie, aucun empire ayant des prétentions hégémoniques n'est parvenu à s'imposer durablement contre les aspirations de justice et de liberté des peuples. «Pourquoi ne pas tenter de mettre en place une coalition qui inscrirait de nouveau sur sa bannière l'aspiration à la liberté, à l'égalité et à la fraternité entre tous les peuples», a demandé le Ministre cubain? «Nous ne sommes pas seuls et nous pouvons compter sur l'appui décisif de secteurs de plus en plus importants du peuple nord-américain», a-t-il poursuivi, ajoutant que le peuple cubain a des preuves qui attestent des «sentiments idéalistes et justes du peuple nord-américain lorsqu'il connaît la vérité». «Les énormes mobilisations qui se tiennent partout dans le monde contre une guerre inutile et injustifiable contre l'Iraq tout en s'opposant à l'imposition du modèle néo-libéral dans un monde globalisé qui appauvrit nos pays en les empêchant de rêver au développement ne sont-elles pas réellement encourageantes», a poursuivi M. Pérez Roque.
Le Ministre cubain a par ailleurs invité les membres de la Commission à appuyer le projet de résolution qui stimule la participation populaire, l'équité, la justice sociale et la non-discrimination comme bases essentielles de la démocratie. Il a déclaré que le monde a un besoin urgent de paix de manière à pouvoir consacrer toutes ses ressources à la lutte contre la faim, la pauvreté, le sous-développement, la destruction de l'environnement, l'analphabétisme, les maladies et la marginalisation croissante à laquelle est soumise la majorité de la population du monde. «Édifions une coalition pour la justice et la paix», a conclu M. Pérez Roque.
M. BRUNSON MCKINLEY, Directeur général de l'Organisation internationale des migrations, s'est proposé de montrer à la Commission dans quelle mesure les activités de l'OIM peuvent concerner la protection des droits de l'homme. Ce sujet est tout à fait d'actualité compte tenu de plusieurs développements récents, tels que l'entrée en force prochaine de la Convention des Nations Unies sur la protection des droits des travailleurs migrants et de leurs familles, ou les inquiétudes sécuritaires qui, dans la vague des attentats du 11 septembre, influencent la perception des personnes migrantes et l'exercice de leurs droits de l'homme. Le mandat général de l'OIM est de fournir, en partenariat avec d'autres acteurs de la communauté internationale, une aide et des services aux migrants ainsi qu'aux gouvernements. L'OIM promeut le respect des droits de l'homme, comme par exemple dans le cadre du problème des migrations forcées ou des autres aspects de son action, qu'il s'agisse d'information au public, de débats de nature politique, de coopération régionale et internationale, de récolte d'information technique, de coopération technique ou encore de questions liées à la santé.
Ainsi, l'OIM a toujours eu un rôle à jouer dans les situations d'après-conflit, qu'il s'agisse de fourniture de moyens de transport ou d'aide au retour. Corollaire à ces situations, la réintégration des anciens combattants dans la vie civile est aussi un élément essentiel dans le rétablissement de la paix (Mozambique, Haïti, Kosovo, Timor Leste, entre autres). D'autres activités post-conflit que traite l'OIM: organisation de la participation des personnes déplacées hors de leurs pays aux votations et référendums (Bosnie-Herzégovine, Timor-Leste), de leurs demandes de réparations en matière foncière (Bosnie-Herzégovine) ou de non respect des leurs droits de l'homme (Programme allemand de compensation du travail forcé). M. McKinley a rappelé que faciliter la migration de centaines de milliers de personnes de l'Europe de l'après-guerre a été la première mission dévolue à l'organisation au moment de sa fondation en 1951. Actuellement, la situation a beaucoup changé, car la plupart des pays sont, en fait, tout à la fois but, origine et étapes de transit lors des migrations. Quant au contrôle des frontières, il n'est pas en soi incompatible avec le respect des droits et de la dignité des migrants, a estimé M. McKinley. Dans ce contexte, il est cependant important que les migrants soient informés de leurs droits. En effet, on constate que les droits des migrants (et surtout des migrantes, qui comptent pour une part croissante dans les migrations) sont d'autant mieux garantis que les migrants en sont conscients. Il appartient aux pays d'origine des migrations de prendre des mesures pratiques afin que leurs ressortissants candidats à la migration soient donc informés de leurs droits.
Les menaces sur les droits de l'homme des migrants sont le fait des contrebandiers et des trafiquants. Les conditions économiques, sociales et culturelles des pays d'origine peuvent avoir une influence sur la vulnérabilité des migrants. L'OIM combat le trafic par la prévention, la protection et l'aide aux victimes et les programmes de renforcement des capacités destinés aux gouvernements afin qu'ils remédient aux problèmes de trafic de main-d'œuvre. Enfin, l'OIM estime que la question de la santé des migrants devrait être traitée par les gouvernements sous l'angle de l'inclusion, plutôt que de l'exclusion des systèmes de santé, attitude plus rentable pour l'état de la santé publique et pour l'intégration des communautés étrangères.
M. NICOLAE DUDAU, Ministre des affaires étrangères de la République de Moldova, a déploré qu'il n'ait pas été possible de trouver une solution pacifique à la crise en Iraq. Il a espéré que tout serait fait pour atténuer les conséquences humanitaires de ce conflit. Revenant sur l'assassinat tragique du Premier Ministre de Serbie, Zoran Djindjic, il a fait part des condoléances de son Gouvernement à la famille de Zoran Djindjic et au peuple de Serbie.
M. Dudau a ensuite rendu compte des efforts entrepris par son pays dans le domaine des droits de l'homme, en vue de son intégration dans l'Union européenne. Il a indiqué qu'en vue d'assurer la conformité entre la législation nationale et les six principaux instruments auxquels la République de Moldova est partie, le Gouvernement a engagé un processus de réformes qui a abouti, entre autres, à l'adoption en 2002 d'un nouveau Code pénal et à l'inclusion dans le Code civil de nombreuses dispositions visant à protéger la dignité de la personne humaine. En outre, un nouveau code de procédure pénale est en cours de discussion au Parlement. S'agissant de l'établissement d'institutions nationales de protection des droits de l'homme, il a indiqué que le Parlement moldave agissait également en qualité de commission permanente des droits de l'homme et des minorités. Il a précisé que le principal mécanisme national de protection des droits de l'homme restait l'appareil judiciaire et que son pays envisageait la possibilité de permettre aux citoyens de saisir directement la Cour constitutionnelle. Au titre des mécanismes non judiciaires, il a cité la création de l'institution des médiateurs parlementaires et d'un centre national des droits de l'homme. Reconnaissant l'insuffisante culture juridique de la population, la Moldova a mis en œuvre des programmes de formation, et un plan national d'action est en cours d'élaboration, avec la collaboration du Haut Commissariat aux droits de l'homme et du Programme des Nations Unies pour le développement. Dans ce contexte, une conférence nationale réunira à la fin du mois des experts indépendants, des membres des organisations non gouvernementales et des syndicats.
M. Dudau a attiré l'attention sur la question de la traite des personnes, véritable fléau social dans le pays. Il a rendu compte des actions entreprises par son gouvernement, avec l'aide de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), pour y remédier. Ainsi, une commission gouvernementale a été mise en place, le nouveau Code pénal prévoit des sanctions sévères pour la prostitution et la traite. En outre, un plan national d'action, intégré au Plan de lutte contre la traite dans l'Europe du Sud-Est a été adopté. À cet égard, il a appelé les pays donateurs à soutenir ce projet qui est décrit dans l'appel de l'OIM pour 2003. Le Ministre moldove s'est ensuite penché sur la question du séparatisme qui a de sérieuses conséquences sur les droits de l'homme. Il a dénoncé les pratiques discriminatoires à l'égard de la population moldave de Transdniestrie, qui représente 41 % d'une population de 600 000, menées par les séparatistes qui contrôlent la région. Il a expliqué que les séparatistes appliquent la législation de l'ex-Union soviétique, continuent d'appliquer la torture et des traitements inhumains et dégradants aux prisonniers. Il a fait de l'initiative du Président de la République de Moldova, M. Vladimir Voronin, qui entend proposer un aménagement de la Constitution visant à résoudre ce vieux conflit en instaurant une république fédérale. Le Ministre a toutefois demandé à la communauté internationale de faire preuve d'une plus grande sévérité à l'égard des séparatistes, car il est dangereux de tolérer un îlot de «hors la loi» au cœur de l'Europe.
M. JEAN DE DIEU MUCYO, Ministre de la justice et des relations institutionnelles du Rwanda, a rappelé que le tableau de la situation des droits de l'homme dans son pays qu'il avait dressé il y a deux ans devant la Commission, corroboré par le rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Rwanda, avait amené la Commission à prendre la décision conséquente et responsable de dispenser ce pays de faire l'objet d'une observation quasi permanente de la part d'un rapporteur spécial. La situation d'insécurité du pays prévalant au sortir du génocide de 1994 est sans doute encore fraîche dans la mémoire de tous, a-t-il poursuivi. Telle insécurité se remarquait aussi bien à l'intérieur du pays du fait essentiellement des actions des infiltrés, qu'aux frontières occidentales du pays du fait que les ex-FAR et Interahamwe auteurs du génocide avaient trouvé refuge à l'Est de l'ex-Zaïre, avec une partie de la population rwandaise réfugiée civile prise en otage. Dans un premier temps, il a été nécessaire de procéder au rapatriement des réfugiés installés à quelques mètres de la frontière Est du pays. Mais avec l'intensification des infiltrations et des attaques qui s'en suivirent, la recherche de la sécurité du pays a conduit au déploiement de l'armée rwandaise à l'Est de la République démocratique du Congo et à la poursuite des infiltrés en fuite, pour prévenir toute attaque à partir de leur base arrière.
Suite à la conclusion en juillet 2002 de l'Accord de Pretoria avec la République démocratique du Congo, le Rwanda a décidé unilatéralement de retirer l'intégralité de ses troupes de l'ex-Zaïre sous la surveillance de la MONUC. «Le Rwanda reste en attente à ce jour du respect de ses engagements par la République démocratique du Congo, soit le désarmement et le rapatriement des ex-FAR et Interahamwe se trouvant toujours sur son territoire et appelle la communauté internationale à jouer un rôle actif, tel qu'elle s'y est engagée, par l'appui à la mise en œuvre et au respect de l'Accord de Pretoria», a indiqué M. Mucyo. À l'époque du retrait intégral de ses troupes, le Rwanda avait attiré l'attention de la communauté internationale sur les dangers du vide laissé par les troupes rwandaises sur des territoires où ne s'exerçait pas l'autorité d'un État de droit, a rappelé le Ministre. «Malheureusement, la situation en cours dans la région d'Ituri donne raison à nos mises en garde d'alors», a-t-il fait observer. De plus, actuellement, les accords de paix de Lusaka et de Pretoria sont gravement violés et le processus de paix en République démocratique du Congo compromis par l'évolution récente de la situation sécuritaire dans la région des Grands Lacs, avec d'une part le retour de l'armée ougandaise en République démocratique du Congo et, de l'autre, l'alliance des armées congolaise et ougandaise avec les Interahamwe et les ex-FAR se trouvant encore sur le territoire de la République démocratique du Congo pour attaquer les positions du RCD, se rapprochant ainsi des frontières du Rwanda. «Si cette situation très préoccupante n'est pas corrigée pour maintenir les acquis du processus de paix en cours, le Rwanda prendra ses responsabilités pour assurer la sécurité de ses frontières et de son peuple», a déclaré le Ministre rwandais de la justice.
Au cours de ces deux dernières années, a-t-il poursuivi, grâce au rétablissement de la sécurité interne et de la sécurité à ses frontières, le Rwanda a pu concentrer ses efforts sur les programmes de bonne gouvernance, de décentralisation, de construction d'un État de droit et à la promotion de la réconciliation nationale. Sur le plan de la justice de réconciliation nationale, les juridictions Gacaca, qui puisent leur origine dans le droit traditionnel rwandais, permettront de réaliser un triple objectif de justice, de vérité sur le génocide et de réconciliation nationale. La transition en place depuis le 19 juillet 1994 devrait prendre fin au cours de cette année, ouvrant la voie à l'éclosion complète de la participation directe du citoyen à la désignation de ses dirigeants et de ses représentants, a par ailleurs indiqué le Ministre. Il a précisé que la procédure sera déclenchée par l'organisation, en mai 2003, du référendum constituant et que, six mois après le référendum, les élections présidentielles seront organisées. Neuf ans après le génocide et la guerre de 1994, le Rwanda a fait un long chemin en matière de droits de l'homme, a souligné le Ministre de la justice. «Tous nos partenaires et nos frères africains auront le loisir de constater de visu les résultats de ces efforts lors de la Réunion ministérielle des ministres africains des droits de l'homme que le Rwanda aura l'honneur d'accueillir du 5 au 9 mai 2003», a-t-il affirmé.
Droits de réponse
Le Maroc a rejeté l'amalgame fait par le Ministre algérien de la justice entre la situation au Sahara occidental et celle de la Palestine. Il a dénoncé la situation dans les camps de Tindouf et a demandé à l'Algérie d'adopter une vision qui ne soit pas passéiste et tienne compte des efforts de l'ONU et de James Baker dans la recherche d'une solution pacifique.
L'Ouganda, répondant au Ministre de la justice du Rwanda, a déclaré que la présence de son pays dans une province de la République démocratique du Congo fait l'objet d'un accord. Ainsi les craintes exprimées par le ministre rwandais sont sans fondement puisque la frontière du Rwanda est à plus de 750 kilomètres des troupes ougandaises. Il a précisé que les troupes ougandaises sont en République démocratique du Congo avec accord de l'ONU et que son pays était prêt à les retirer dès que la situation le permettrait. Il a affirmé de l'engagement de son pays en faveur de la paix dans la régions des Grands Lacs.
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