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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTAME L'EXAMEN DES QUESTIONS RELATIVES AUX DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

29 Mars 2005

Commission des droits de l'homme
MATIN
29 mars 2005



Elle entend aussi la présentation des rapports sur les situations des droits de l'homme
en République populaire démocratique de Corée, au Bélarus et au Myanmar


La Commission des droits de l'homme a entamé, ce matin, l'examen des questions relatives aux droits économiques, sociaux et culturels, en entendant le Rapporteur spécial sur les conséquences néfastes des mouvements et déversement illicites de déchets toxiques sur les droits de l'homme, ainsi que les déclarations de huit pays. Elle a également achevé l'examen de la question de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales où qu'elle se produise en entendant les Rapporteurs spéciaux sur les situations des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée, au Bélarus et au Myanmar.

Le nouveau Rapporteur spécial sur les déchets toxiques, M. Okechukwu Ibeanu, a exhorté les gouvernements à faciliter ses visites sur le terrain et a notamment indiqué qu'il allait, dans ses prochains rapports, accorder la priorité à la question des effets dévastateurs des transferts illicites de pesticides. Les représentants de la Turquie et de Cuba sont intervenus dans le cadre du bref dialogue interactif qui a suivi cette présentation.

Dans le cadre du débat général sur les droits économiques, sociaux et culturels, les représentants de la Libye (au nom de la Ligue des États arabes), du Pakistan, de l'Égypte, du Mexique (au nom du Groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes), du Luxembourg (au nom de l'Union européenne), de Cuba, de la République du Congo et de l'Inde ont fait des déclarations.

S'agissant de la question de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales où qu'elle se produise, M. Vitit Muntarbhorn, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée, a estimé que ce pays devrait être invité à respecter la primauté du droit et à réformer l'administration de la justice. Le pays devrait en outre s'attaquer aux causes premières des déplacements, empêcher la persécution des personnes déplacées et faire en sorte que l'aide humanitaire parvienne à tous.

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée a déclaré que son pays n'acceptait pas la résolution le concernant adoptée l'an dernier, affirmant qu'elle relevait d'une propagande menée par des forces hostiles au pays. Au cours du dialogue interactif qui a suivi, les représentants du Luxembourg (au nom de l'Union européenne), du Canada et du Japon sont intervenus, regrettant que les autorités de Pyongyang n'aient pas donné suite à la demande du Rapporteur spécial de se rendre dans le pays.

Le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Bélarus, M. Adrian Severin, a rappelé qu'il n'a pas pu, lui non plus, se rendre dans le pays sur lequel porte son mandat, ni procéder à un échange de vues avec les autorités. La nature autoritaire du régime et le système de contrôle étroit sur la société n'offrent aucune chance au développement, au respect et au renforcement des droits de l'homme, a-t-il déclaré. Par ailleurs, tant que le Bélarus fera partie d'un vaste jeu géopolitique, la communauté internationale demeurera divisée sur la question des droits de l'homme dans ce pays, a-t-il ajouté. Évoquant la détérioration des droits de l'homme au Bélarus, il a appelé les forces démocratiques émergentes de ce pays à s'unir. Il est avant tout urgent d'améliorer l'indépendance du système judiciaire et de promouvoir la liberté de la presse, a souligné M. Severin.

Le représentant du Bélarus a souligné que toute résolution politiquement motivée adoptée sous une pression sans précédent des États-Unis serait contre-productive. Il a indiqué que son pays demeurait ouvert à une coopération avec les institutions des Nations Unies sur la base des principes d'universalité, de non-sélectivité et d'objectivité. Les méthodes de travail du Rapporteur spécial témoignent d'une attitude hostile envers un État souverain, a-t-il ajouté. Dans le cadre du dialogue interactif qui a suivi, les représentants de la Fédération de Russie, de la Chine, de Cuba, des États-Unis, du Luxembourg (au nom de l'Union européenne), du Canada et du Kenya ont pris la parole. Plusieurs délégations ont critiqué la démarche du Rapporteur spécial, estimant qu'elle était fondée sur des motifs politiques et qu'elle allait à l'encontre des principes de justice et d'objectivité qui doivent guider l'action de la Commission.

Pour sa part, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, M. Paulo Sérgio Pinheiro, a souligné qu'il n'a pas pu se rendre dans le pays depuis sa dernière visite, en novembre 2003. Les mesures prises par le Gouvernement ne semblent pas indiquer d'amélioration, a-t-il déclaré, ajoutant que pour trouver une solution plus durable à la situation des droits de l'homme au Myanmar, il conviendrait en premier lieu de procéder à la libération des nombreux prisonniers politiques.

En réponse à la présentation de ce rapport, le représentant du Myanmar a expliqué que si la dernière visite du Rapporteur spécial dans le pays remonte à 2003, le moment n'est pas encore opportun pour l'accueillir de nouveau aujourd'hui. Son rapport est un reflet de son professionnalisme, a-t-il ajouté. Le représentant du Luxembourg (au nom de l'Union européenne) est intervenu dans le cadre du dialogue interactif qui a suivi la présentation du rapport.

En fin de séance, la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Mme Louise Arbour, a notamment insisté sur le professionnalisme des équipes du Haut Commissariat dans ses services d'appui aux rapporteurs spéciaux et a regretté certains commentaires mettant en question l'intégrité de certains rapporteurs spéciaux.


La Commission reprendra cet après-midi, à 15 heures, l'examen des questions relatives aux droits économiques, sociaux et culturels.


Présentation du rapport sur la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée

M. VITIT MUNTARBHORN, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée, a rappelé que le pays était partie à quatre traités clés des droits de l'homme: le Pacte international relatif aux droits civils et politiques; le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels; la Convention relative aux droits de l'enfant; et la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Il a souligné que le pays avait autorisé des militants des droits de l'homme à entrer dans le pays pour y examiner la situation du point de vue de ces droits. Le Rapporteur spécial a également cité comme signe encourageant le réchauffement des relations avec un certain nombre d'autres pays. De même, a-t-il ajouté, le pays dispose de structures juridiques et opérationnelles susceptibles de protéger et de promouvoir les droits de l'homme.

Le Rapporteur spécial a par ailleurs rappelé que le pays avait traversé, au milieu des années 90, une grave crise alimentaire, provoquée par les inondations et la sécheresse, ces facteurs ayant eu un impact important sur le développement du pays et mis en danger de nombreuses vies humaines. Il a mis l'accent sur la nécessité de poursuivre l'aide alimentaire à la population et d'assurer une plus grande surveillance de cette aide. En effet, l'aide n'atteint pas tous ceux qui en ont besoin, a-t-il dit, évoquant des usages clandestins. Les autorités ne permettent pas à des organisations humanitaires de procéder à des vérifications de ce point de vue, a-t-il fait observer. S'agissant du droit à la liberté de mouvement et de la protection des personnes déplacées, M. Muntarbhorn a souligné que des contraintes politiques et la crise alimentaire obligeaient des personnes à se rendre dans d'autres pays; il a insisté sur la nécessité de conférer un statut aux réfugiés. Concernant les droits à la sécurité de la personne, à un traitement humain, à la non-discrimination et à l'accès a la justice, le Rapporteur spécial a fait état de violations de ces droits par la République populaire démocratique de Corée. Il a ainsi fait état de punitions collectives, fondées sur le principe de la détention par associations. Si un membre d'une famille est détenu, d'autres membres de sa famille peuvent l'être également, a-t-il expliqué. S'agissant du droit aux normes de santé les plus élevées possibles et du droit à l'éducation, il a souligné que si la situation s'est aggravée avec la crise du milieu des années 90, la situation économique, elle, s'est quelque peu améliorée sur certains fronts. Toutefois, des défis qualitatifs demeurent, a-t-il poursuivi. Dans le domaine du droit à l'autodétermination, à la participation politique, l'accès à l'information, la liberté d'expression, de croyance, d'opinion, d'association et de religion, les autorités affirment que ces droits sont respectés, mais la réalité indique souvent le contraire, a-t-il dit. Le Rapporteur spécial a également indiqué que les femmes et les enfants étaient devenus particulièrement vulnérables depuis la crise. Bien que le pays ait enregistré un déclin de la malnutrition, le taux reste élevé, a-t-il constaté.

Le Rapporteur spécial a déclaré que la République populaire démocratique de Corée devait être invitée à respecter la primauté du droit et à réformer l'administration de la justice, en particulier en améliorant le système pénitentiaire et en abolissant la peine capitale. Elle devrait en outre s'attaquer aux causes premières des déplacements, empêcher la persécution des personnes déplacées et faire en sorte que l'aide humanitaire parvienne à tous.

Le rapport sur la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée (E/CN.4/2005/34) souligne que le pays doit faire face à divers problèmes redoutables pour assurer le respect de certains droits et libertés ? le droit à l'alimentation et le droit à la vie; le droit à la sécurité, le droit d'être traité avec humanité et d'être à l'abri de la discrimination, ainsi que l'accès à la justice; le droit de circuler librement et la protection des personnes ayant quitté leur lieu de résidence; le droit de toute personne de jouir du meilleur état de santé qu'elle soit capable d'atteindre et le droit à l'éducation; le droit à l'autodétermination/le droit de participer à la vie politique, l'accès à l'information, la liberté d'expression/d'opinion, la liberté d'association et la liberté de conviction/de religion; enfin, les droits de personnes ou de groupes particuliers, dont les femmes et les enfants. Si certains faits constructifs sont intervenus dans le pays au cours des dernières décennies, il y a aussi eu des inégalités et transgressions ? souvent énormes ? dans l'application des droits de l'homme, qui exigent que des mesures soient immédiatement prises afin d'empêcher les abus et de redresser la situation.

Le Rapporteur spécial recommande à la République populaire démocratique de Corée de se conformer aux normes internationales en matière de droits de l'homme, y compris les quatre traités relatifs aux droits de l'homme auxquels elle est partie, donner suite aux recommandations des organes établis par ces traités pour en suivre l'application, et adhérer à d'autres traités dans ce domaine et les appliquer et de réformer les lois et pratiques qui sont incompatibles avec ces normes. Le pays devrait en outre soutenir les droits de l'homme, de même que la démocratie, la paix, le développement durable et la démilitarisation, en ménageant à la société civile des possibilités plus importantes de participation à la prise de décisions, à tous les niveaux, et à leur mise en œuvre, réformer l'administration de la justice et, en particulier, améliorer le système pénitentiaire, abolir la peine capitale et les punitions corporelles ainsi que le travail forcé, et mettre fin à la détention préventive ou administrative ainsi qu'à la détention de personnes pour délit politique. Il devrait veiller à ce que l'assistance humanitaire, y compris l'aide alimentaire, parvienne aux groupes auxquels elle est destinée, à ce que l'accès à ces groupes se fasse sans entrave et à ce que la distribution de l'aide fasse l'objet d'une surveillance et d'une justification dans la transparence.
Le Rapporteur spécial souligne que les autres membres de la communauté internationale devraient promouvoir la mise en place, de concert avec la République populaire démocratique de Corée, de voies permettant une émigration sûre et ordonnée afin de réduire les départs clandestins et promouvoir une coopération entre les pays pour lutter contre le trafic et la traite des personnes et traiter avec humanité les victimes et s'assurer que l'aide et l'assistance parviennent aux groupes vulnérables, grâce à une surveillance et une justification transparentes, appuyées par un accès sans entrave des organisations humanitaires à ces groupes.

La Commission est également saisie d'une note du Secrétariat sur la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée (E/CN.4/2005/32) qui rappelle qu'en vue d'examiner les moyens d'engager une coopération technique entre le Haut Commissariat aux droits de l'homme et la République populaire démocratique de Corée, le Haut Commissaire par intérim en fonction avait adressé le 8 août 2003 une lettre au Représentant permanent de la République populaire démocratique de Corée et que plusieurs contacts de travail entre des fonctionnaires du Haut Commissariat et des représentants de la Mission permanente avaient eu lieu auparavant et ont eu lieu depuis. Le Haut Commissaire par intérim a adressé un autre courrier daté du 16 décembre 2003, et a reçu une courte réponse, le 30 décembre 2003, l'informant que le Gouvernement était comme toujours attaché à une coopération étroite avec le Haut-Commissariat aux droits de l'homme. Depuis cet échange de correspondance, le Haut-Commissaire a évoqué la possibilité d'étudier les moyens d'entreprendre des activités de coopération technique lors d'une réunion tenue le 24 août 2004 avec le Représentant permanent. Ce dernier a indiqué qu'il avait pris note de la proposition, qui serait soumise à l'examen du Gouvernement à Pyongyang. Aucune autre réponse sur ce sujet n'a été reçue du Gouvernement depuis cette rencontre.

En réponse à la présentation du rapport sur son pays, M. CHOE MYONG NAM (République populaire démocratique de Corée) a déclaré que son pays n'acceptait pas la résolution le concernant qui avait été votée lors de la soixantième session de la Commission. Il s'agit en effet d'une propagande menée par des forces hostiles à la République populaire démocratique de Corée. Le représentant a ajouté que son pays rejette catégoriquement l'intervention du Rapporteur spécial. La Commission est devenue une arène de propagande politique qui n'a rien à voir avec la promotion des droits de l'homme, a insisté le représentant. Aussi, la Commission risque-t-elle de perdre sa raison d'être car elle empiète sur la souveraineté des États, a-t-il ajouté. Il a demandé au Rapporteur spécial de ne pas perdre de vue le fait que son rapport traite d'un État souverain et de son peuple. Le Rapporteur spécial se doit par conséquent de respecter le système politique et culturel ainsi que les traditions d'un système social fondé par ce peuple.

Dialogue interacif

M. ALPHONSE BERNS (Luxembourg, au nom de l'Union européenne) a regretté que les autorités que la République populaire démocratique de Corée n'aient pas donné suite à la demande du Rapporteur spécial de se rendre dans le pays. Il a par ailleurs demandé au Rapporteur spécial s'il existait une marge de manœuvre pour intensifier dans ce pays l'activité d'organisations telle que le Programme alimentaire mondial. Y a-t-il des signaux de la République populaire démocratique de Corée indiquant qu'une coopération technique pourrait commencer sous quelque forme que ce soit, s'est également enquis le représentant de l'Union européenne? Si de tels signaux existent, quel serait, d'après le Rapporteur spécial, les premiers pas à faire, a-t-il demandé?

MME CHANTAL WALKER (Canada) a demandé aux autorités de la République populaire démocratique de Corée de bien vouloir accéder aux demandes de visites des mécanismes spéciaux des droits de l'homme dans le pays. Elle s'est dite particulièrement préoccupée par le problème de la torture en République populaire démocratique de Corée. Elle a par ailleurs demandé au Rapporteur spécial s'il disposait d'informations concernant la situation des femmes dans ce pays.

M. ICHIRO FUJISAKI (Japon) a regretté que la République populaire démocratique de Corée n'ait pas permis au Rapporteur spécial de se rendre sur son territoire. Il s'est dit étonné que le Rapporteur spécial puisse être traité comme il l'a été par le représentant de la République populaire démocratique de Corée. Étant donné que la mission du Rapporteur spécial n'a pas pu être menée à bien en raison de l'attitude de la République populaire démocratique de Corée, le Japon estime que son mandat doit être prorogé.

Le Rapporteur spécial, M. MUNTARBHORN, a déclaré que son mandat constitue pour la République populaire démocratique de Corée l'occasion de promouvoir les droits de l'homme. Il a tendu la main aux autorités de Pyongyang et a dit attendre avec impatience la possibilité de travailler avec elles de manière constructive. En réponse à l'intervention du représentant du Luxembourg, le Rapporteur spécial a souligné qu'il est indispensable de mettre en place une aide humanitaire d'urgence. Il est également essentiel que les institutions des Nations Unies restent dans le pays, a-t-il souligné. M. Muntarbhorn a par ailleurs déclaré que pour entrer en contact avec la République populaire démocratique de Corée, il serait bon d'utiliser les traités auxquels le pays est partie, particulièrement les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Il faut continuer à encourager le pays à mettre en œuvre les recommandations émanant des différents organes de traités, a souligné le Rapporteur spécial.


Présentation du rapport sur la situation des droits de l'homme au Bélarus

M. ADRIAN SEVERIN, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Bélarus, a indiqué que sa mission s'inscrit dans le triple contexte d'une inquiétude croissante de la communauté internationale au sujet de la détérioration constante de la situation des droits de l'homme au Bélarus; d'un rejet total par les autorités bélarussiennes de toutes les accusations concernant des violations de droits de l'homme; et d'un manque de soutien apporté par le pays à la mission du Rapporteur spécial. Par conséquent, M. Severin n'a pas pu se rendre au Bélarus ni procéder à un échange de vues avec les autorités. Il a précisé qu'il avait en revanche eu des discussions avec des militants des droits de l'homme et avec des personnalités qui s'efforcent de promouvoir la démocratie au Bélarus. Il a souligné que la question des droits de l'homme au Bélarus s'inscrit dans un contexte à la fois interne et international. D'un point de vue interne, la nature autoritaire du régime et le système de contrôle étroit sur la société n'offrent aucune chance au
développement, au respect et au renforcement des droits de l'homme. D'un point de vue externe, les désaccords internationaux au sujet du Bélarus ainsi que les considérations géopolitiques n'ont pas un impact favorable sur la situation des droits de l'homme dans le pays. Tant que le Bélarus fera partie d'un vaste jeu géopolitique, la communauté internationale demeurera divisée sur la question des droits de l'homme dans ce pays, a déclaré M. Severin.

Le Rapporteur spécial a ajouté que la détérioration de la situation des droits de l'homme au Bélarus non seulement est une source d'inquiétude d'un point de vue humanitaire mais elle a également des conséquences sur la sécurité internationale. Afin de promouvoir les droits de l'homme au Bélarus, les forces démocratiques émergentes de ce pays doivent s'unir, a-t-il déclaré. Il faut également mettre en place une action cohérente fondée sur la solidarité de la communauté internationale. Dans ce contexte, la Fédération de Russie joue un rôle important en tant que pays voisin ayant une relation spéciale avec le Bélarus, a souligné M. Severin. Afin de promouvoir les droits de l'homme dans le pays, le Rapporteur spécial recommande de préserver un équilibre entre les sanctions et l'engagement, entre l'isolement des dirigeants dictatoriaux et le dialogue avec ceux qui sont prêts à soutenir l'ouverture démocratique et entre une approche fondée sur la confrontation et une attitude éducative positive. Il faut en particulier établir un programme d'éducation publique et de sensibilisation aux droits de l'homme, a affirmé M. Severin. Il faut également fournir une assistance technique aux organisations non gouvernementales, a-t-il poursuivi. Il est en outre nécessaire de soutenir l'organisation d'une table ronde nationale institutionnalisée sur les droits de l'homme au Bélarus, ainsi que de convoquer une conférence internationale et de créer un groupe de contact sur la situation des droits de l'homme au Bélarus. Il est avant tout urgent d'améliorer l'indépendance du système judiciaire et de promouvoir la liberté de la presse, a conclu le Rapporteur spécial.

Le rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Bélarus (E/CN.4/2005/35) est daté du 18 mars 2005 et n'est pas encore disponible en français. Il est basé sur les missions qu'il a effectuées en Pologne, en Lituanie et en Lettonie, et ses rencontres avec des représentants d'organisations des droits de l'homme et de la société civile du Bélarus, d'institutions des Nations Unies et d'institutions européennes, notamment. Le Rapporteur spécial note avec regret que le Gouvernement du Bélarus n'ait pas répondu favorablement à sa demande de se rendre en mission dans le pays et n'a pas souhaité coopérer à l'accomplissement de son mandat.

En réponse à la présentation de ce rapport, M. SERGEI ALEINIK (Bélarus) a souligné que toute résolution politiquement motivée adoptée sous une pression sans précédent des États-Unis serait contre-productive. Les ressources dont disposait le Rapporteur spécial auraient dû être utilisées pour assurer une assurance technique aux pays en développement et la réalisation du droit au développement, a-t-il dit, ajoutant que la tentative des États-Unis d'exercer une pression politique avait échoué. Les regrets exprimés par le Rapporteur spécial face à un refus de possibilité de dialogue ne sont que démagogie et hypocrisie, a-t-il souligné. Il s'est ainsi déclaré choqué par le contenu du document, le Rapporteur spécial étant, selon lui, sorti de son mandat. Il semble, a-t-il poursuivi, qu'il cherche à s'approprier au moins les pouvoirs du Conseil de sécurité. Le représentant a souligné que son pays remplissait de bonne foi ses obligations internationales et demeurait ouvert à une coopération avec les institutions des Nations Unies sur la base des principes d'universalité, de non-sélectivité et d'objectivité.

La présentation qui est faite du rôle du Bélarus dans le renforcement de la sécurité internationale est détournée, a poursuivi le représentant bélarussien, ajoutant qu'il s'agissait là, à ses yeux, d'une preuve manifeste de cynisme, d'hypocrisie politique extrême et d'irresponsabilité. De même, a-t-il dit, les méthodes de travail du Rapporteur spécial non seulement témoignent d'une attitude hostile envers un État souverain mais elles discréditent en outre les procédures spéciales de la Commission et sapent son autorité. Le représentant bélarussien a exprimé sa profonde indignation face aux déclarations du Rapporteur spécial selon lesquelles en tant que nation, le Bélarus a un important problème d'identité. Le représentant a énergiquement protesté contre la forme et le contenu du rapport, exigeant que son auteur exprime publiquement des excuses pour avoir humilié le pays et son peuple.

Dialogue interactif

M. VLADIMIR PARSHIKOV (Fédération de Russie) a estimé que l'examen de la situation des droits de l'homme au Bélarus était fondé sur des motifs politiques. Les règles de présentation du rapport n'ont pas été respectées et le Rapporteur spécial a outrepassé son mandat, a-t-il affirmé. Un tel rapport ne mérite pas l'attention de la Commission, a-t-il insisté. Comment un rapporteur spécial peut-il se permettre de souligner la nécessité d'un changement de gouvernement dans un État membre souverain, s'est insurgé le représentant russe? Ce rapport est inacceptable à un moment où le Belarus manifeste sa volonté d'amorcer un dialogue avec les mécanismes spéciaux des droits de l'homme. Le Bélarus devrait donc pouvoir compter sur l'envoi par la Commission d'un signal positif.

M. XIA JINGGE (Chine) a souligné que le Rapporteur spécial ne s'est jamais rendu au Bélarus, ce qui ne l'empêche pas de citer un grand nombre de cas individuels. Quelles ont donc été les sources d'information du Rapporteur spécial et a-t-il pu en vérifier le bien fondé, s'est-il interrogé? Le Rapporteur spécial affirme que le Bélarus est un pays fermé, proche de la dictature; mais les cas individuels de violation des droits de l'homme peuvent survenir dans n'importe quel pays, y compris dans ceux qui s'autoproclament ardents défenseurs des droits de l'homme, a poursuivi le représentant chinois. La Chine est d'avis que la démarche du Rapporteur spécial va à l'encontre des principes de justice et d'objectivité qui doivent guider l'action de la Commission.

M. JUAN ANTONIO FERNÁNDEZ PALACIOS (Cuba) a mis en doute l'impartialité et l'indépendance du Rapporteur spécial. Le rapport soumis à l'examen de la Commission est une insulte au Bélarus, a ajouté le représentant cubain. Ce rapport procède d'une démarche politique, a-t-il regretté. À sa lecture, on ne reconnaît pas le Bélarus. N'y aurait-il rien de positif au Bélarus en matière de droits de l'homme, a demandé le représentant cubain? Tel qu'il est décrit dans le rapport, nous ne reconnaissons pas le Bélarus, a-t-il affirmé, indiquant que des membres de la délégation cubaine se sont rendus à Minsk. Le Rapporteur spécial a outrepassé son mandat, a poursuivi le représentant cubain, ajoutant que la demande d'excuses formulée par la délégation du Bélarus est pleinement justifiée.

MME AMY MCKEE (États-Unis) s'est prononcée en faveur de la mise en œuvre des recommandations énoncées par le Rapporteur spécial et a dit partager les inquiétudes de ce dernier s'agissant de la détérioration de la situation des droits de l'homme au Bélarus. La représentante a également appuyé le contenu des résolutions votées depuis deux ans par la Commission et l'Assemblée générale s'agissant de ce pays. Elle a en particulier soutenu l'idée de créer un groupe d'amis pour la promotion des droits de l'homme au Bélarus ainsi que celle de mener des enquêtes sur les disparitions. La représentante des États-Unis a en outre encouragé le Gouvernement bélarussien à coopérer avec la communauté internationale.

M. ALPHONSE BERNS (Luxembourg, au nom de l'Union européenne) a demandé au Rapporteur spécial comment il envisageait de poursuivre sa mission en l'absence de coopération de la part des autorités bélarussiennes. Il a souhaité savoir quels sont les prochains objectifs du Rapporteur. Le représentant luxembourgeois a également demandé quelles étaient les recommandations jugées prioritaires et quelles étaient celles qui étaient susceptibles d'avoir le plus grand impact en vue d'un changement de la situation des droits de l'homme au Bélarus.

MME CHANTAL WALKER (Canada) a indiqué que sa délégation aimerait entendre le Rapporteur spécial s'exprimer sur la question des relations entre l'identité nationale et les droits de l'homme.

M. PHILLIP RICHARD O. OWADE (Kenya) s'est dit déçu que le rapport semble être plus politique que technique. Il s'apparente davantage à un rapport présenté au Conseil de sécurité qu'à la Commission des droits de l'homme, a-t-il dit. Si l'on veut que les changements aient un impact sur les populations, les mécanismes spéciaux de la Commission devraient, plutôt que les condamner, encourager les pays à améliorer la situation des droits de l'homme. Aussi, conviendrait-il de s'interroger sur la manière dont le Gouvernement pourrait intervenir pour que la situation s'améliore.

En réponse aux questions posées par plusieurs représentants, le Rapporteur spécial, M. SEVERIN, Rapporteur spécial, a fermement rejeté les accusations de subjectivité le concernant. Il a assuré que son rapport a été préparé à partir d'informations recueillies lors de rencontres avec des représentants de la société civile du Bélarus. Le rapport contient des éléments positifs qui, il est vrai, sont rares. Une visite dans le pays m'aurait peut être permis de rendre compte de davantage d'éléments positifs, a fait observer le Rapporteur spécial. Malheureusement, je n'ai pas obtenu d'accord pour me rendre dans le pays, a-t-il rappelé. M. Severin a par ailleurs insisté sur la précaution dont il a fait preuve dans l'exploitation de ses sources d'information. Comment parler de progrès lorsqu'il est question de personnes disparues et de personnes emprisonnées sans avoir été jugées, a-t-il demandé? Comment parler de progrès lorsque des Organisations non gouvernementales sont interdites pour des motifs ridicules? Oui, il existe un problème d'identité au Bélarus, a par ailleurs déclaré le Rapporteur spécial. Il a estimé que son rapport n'était pas de nature politique. Il n'en demeure pas moins clair qu'il n'existe pas un environnement politique favorable à la promotion des droits de l'homme, a-t-il affirmé, soulignant qu'il n'est pas possible d'aborder les questions des droits de l'homme sans les replacer dans un contexte politique.

MME LOUISE ARBOUR, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, intervenant à la fin de la session de ce matin, a déclaré que le Haut Commissariat accorde un appui a plus de 42 mécanismes spéciaux et doit pour ce faire compter sur les ressources approuvées par la Commission des droits de l'homme. Les insuffisances dans l'assistance apportée à un rapporteur spécial ne sauraient être imputables à un manque de professionnalisme ou de loyauté des fonctionnaires du Haut Commissariat. Elle a assuré que son équipe prodigue des conseils de façon professionnelle et a dit regretter certains commentaires faits ce matin et jetant le doute sur l'intégrité de certains rapporteurs spéciaux.


Présentation du rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar

Le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, M. PAULO SÉRGIO PINHEIRO, a regretté que la situation des droits de l'homme dans ce pays n'ait pas fondamentalement changé depuis son dernier rapport. Il a en outre fait savoir que son travail s'est trouvé limité par l'insuffisante coopération du Gouvernement du Myanmar. M. Pinheiro a précisé qu'il n'a en effet pas pu se rendre dans le pays depuis sa dernière visite de novembre 2003. Il a toutefois déclaré que les mesures prises par le Gouvernement ne semblent pas indiquer d'amélioration, a-t-il souligné. La Convention nationale a été reconduite le 17 février 2005, a poursuivi le Rapporteur spécial, qui a regretté que sa composition soit la même que la précédente de même que ses méthodes de travail. Or, une Convention nationale restructurée pourrait permettre de promouvoir un processus de démocratisation. La promotion des droits de l'homme pourrait également devenir effective si la Convention nationale se transformait en forum de réconciliation nationale.

Pour trouver une solution plus durable à la situation des droits de l'homme au Myanmar, des mesures crédibles doivent être prises par tous les acteurs, a poursuivi le Rapporteur spécial. En premier lieu, il convient de procéder à la libération du nombre important de prisonniers politiques car seule une libération totale et inconditionnelle de ces personnes ouvrira la voie à la réconciliation et à la primauté du droit. Ces libérations doivent aller de pair avec la fin de la pratique consistant à emprisonner des individus qui ne font qu'exprimer leur opinion. Le rétablissement de la liberté politique est une condition préalable à la réconciliation nationale, a insisté M. Pinheiro. Il a en outre indiqué avoir reçu des informations récentes concernant des violences sexuelles perpétrées à l'égard de femmes et a demandé au Gouvernement de réagir sur ce point. Tous les auteurs nationaux et internationaux doivent travailler ensemble au règlement des questions non politiques et sociales, a par ailleurs estimé M. Pinheiro. Il s'est félicité que depuis 2004, le Gouvernement ait permis au Haut Commissariat pour les réfugiés de se rendre sur la frontière orientale du pays et au Programme des Nations Unies pour le développement de mener des programmes humanitaires. Le Rapporteur spécial a jugé indispensable de lancer un processus de consultation structuré visant la mise en place d'un système de consultation populaire.

Le rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar (E/CN.4/2005/36) affirme que les déclarations et actes de l'actuel gouvernement ne semblent annoncer aucun changement d'orientation concernant le processus lié à la Convention nationale. Cette dernière pourrait stimuler de nouvelles avancées politiques vers la démocratisation envisagée dans la feuille de route établie par le Gouvernement. Le rapport indique en outre que pour garantir une solution réellement durable à l'impasse politique dans laquelle se trouve le pays, tous les acteurs devraient faire des efforts crédibles pour s'assurer que la Ligue nationale pour la démocratie (NLD) et d'autres partis se joignent au processus. Le rapport réaffirme que le rétablissement du droit des partis politiques et des partenaires du cessez-le-feu de fonctionner et mener librement des activités politiques pacifiques constitue également une condition préalable d'un processus crédible de réconciliation nationale et de transition politique.
Concernant les allégations faisant état de violations contre les civils vivant dans les zones des minorités ethniques affectées par le conflit armé, le Gouvernement doit examiner sérieusement cette question s'il entend sincèrement promouvoir la cause de la paix, du développement et de la justice. Il est plus que jamais vital que tous les États, en particulier ceux de la région, mettent fortement l'accent sur le dialogue et la négociation continus avec le Gouvernement du Myanmar. Il serait absurde que la communauté internationale attende la fin de la transition politique pour coopérer à des initiatives dont le but est d'améliorer la vie des personnes vulnérables au Myanmar et abandonne ainsi la population à son sort jusqu'à l'achèvement de la démocratisation.
Le rapport du Secrétaire général sur la situation des droits de l'homme au Myanmar (E/CN.4/2005/130) rappelle que le Secrétaire général a affirmé dès le début que la Convention nationale et les autres composantes du plan en sept étapes pour une transition démocratique présentées par le Gouvernement du Myanmar en 2003 peuvent constituer un véritable pas en avant. Le 17 février 2005, la Convention s'est de nouveau réunie sans la participation des représentants de la LND et d'autres partis politiques. En outre, non seulement Daw Aung San Suu Kyi continue d'être assignée à résidence, mais elle et son adjoint ont vu leur maintien en détention prolongé d'une année supplémentaire. Le Secrétaire engage donc à nouveau les autorités du Myanmar à prendre les mesures nécessaires pour mettre en œuvre le plan de manière plus ouverte et crédible. Le Secrétaire général exhorte, une fois de plus, les autorités du Myanmar à reprendre sans délai un dialogue politique de fond avec les représentants de tous les groupes ethniques nationaux et les responsables politiques, notamment Daw Aung San Suu Kyi, afin de parvenir à un véritable processus de réconciliation nationale. Enfin, le Secrétaire général réaffirme que le Gouvernement du Myanmar est tenu de veiller à ce que le peuple du Myanmar jouisse des mêmes bienfaits découlant du développement économique, social et politique que les habitants d'autres pays de la région.
En réponse à la présentation du rapport du Rapporteur spécial, M. U MYA THAN (Myanmar) a affirmé que son pays avait toujours coopéré avec la Commission, dans un esprit de bonne volonté et de sincérité. Si sa dernière visite au Myanmar remonte à 2003, le moment n'est pas encore opportun pour l'accueillir de nouveau aujourd'hui, a-t-il dit. Son rapport est un reflet de son professionnalisme, a-t-il ajouté, se félicitant notamment des faits positifs qui y sont mentionnés. Il a notamment fait valoir que la convocation de la Convention nationale en février 2005 constitue une mesure positive dans le cadre de la feuille de routes vers la démocratie. Évoquant la situation dans le nord-ouest du pays, il a indiqué que les autorités coopéraient avec le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés afin de rapatrier les réfugiés au sein de la communauté. Il n'y a pas de discrimination pour cause de religion au Myanmar, a en outre assuré le représentant. Le Myanmar a réalisé des progrès significatifs sur la voie d'un système démocratique, a-t-il dit.

Dialogue interactif

M. ALPHONSE BERNS (Luxembourg, au nom de l'Union européenne) s'est dit gravement préoccupé par le fait que le Rapporteur spécial n'ait pas pu se rendre dans le pays. A-t-il pu établir des contacts avec le régime, s'est interrogé le représentant luxembourgeois? Quels pourraient être les premiers objectifs d'une visite du Rapporteur spécial dans le pays, a-t-il également demandé? Sinon, quelles sont ses priorités pour les années à venir ? Que pensez-vous d'une présence d'observateurs pour surveiller les élections, a-t-il demandé à l'adresse de M. Pinheiro.

Le Rapporteur spécial, M. PINHEIRO, a dit maintenir des contacts avec le représentant du Gouvernement du Myanmar. Une possibilité de visite est toujours à l'étude, a-t-il précisé. L'impossibilité de se rendre dans le pays qui fait l'objet de son mandat oblige tout rapporteur à utiliser des sources autres que celle découlant d'une enquête directe sur le terrain, a-t-il souligné. M. Pinheiro a indiqué qu'en ce qui le concerne, il continuerait à entretenir des contacts avec les Organisations non gouvernementales et les pays voisins. Il est toujours intéressant d'avoir une présence internationale lors d'élections, a-t-il estimé, tout en jugeant la question encore prématurée pour ce qui est du Myanmar. Il a exprimé l'espoir que les autorités du Myanmar répondront positivement à sa demande de visite. Le refus d'accorder un droit de visite affaiblit les mécanismes spéciaux de la Commission, a-t-il ajouté.


Présentations de rapports au titre des droits économiques, sociaux et culturels

M. OKECHUKWU IBEANU, Rapporteur spécial sur les conséquences néfastes des mouvements et déversement illicites de déchets toxiques sur les droits de l'homme, a souligné que son mandat a ceci de particulier qu'il place l'être humain et les droits de l'homme au centre de l'étude des questions environnementales. Il a souligné que les accords multilatéraux dans le domaine de l'environnement visent à protéger la santé, mais portent sur les aspects techniques et méthodologiques des mouvements de matières dangereuses sans prendre en compte leurs conséquences sur l'ensemble des droits de l'homme. En outre, ils n'offrent pas aux particuliers de recours en cas de violations de droits de l'homme consécutives à des activités touchant à l'environnement, exception faite de la Convention d'Aarhus. Le Rapporteur spécial a dit attacher une importance particulière aux informations reçues directement des communautés ou des individus qui se disent touchés par des mouvements illicites de déchets et de produits dangereux. Il a en outre exhorté les gouvernements à répondre à ses demandes de commentaires sur les accusations portées contre eux.

Afin de faire en sorte que son travail soit le plus pertinent possible, le Rapporteur spécial a aussi fait savoir qu'il attache une grande importance aux visites qu'il effectue sur le terrain dans la mesure où elles offrent la possibilité d'identifier des problèmes et de chercher des solutions qui pourraient bénéficier aux individus et aux communautés. Ces visites lui permettent de mener des consultations avec les gouvernements et les communautés concernées. Il a donc exhorté les gouvernements à faciliter de telles visites. Le Rapporteur a ajouté qu'il allait, dans ses prochains rapports, accorder la priorité à la question des effets dévastateurs des transferts illicites de pesticides et de la poursuite des responsables de telles pratiques. La question du dédommagement des victimes sera également abordée. Le Rapporteur spécial envisage en outre d'examiner les questions liées au transfert vers les pays en développement de produits devenus obsolètes ou en fin de vie, tels que les téléphones portables, les ordinateurs, les produits pharmaceutiques.

Dans son rapport sur les conséquences néfastes des mouvements et déversements illicites de produits et déchets toxiques et nocifs pour la jouissance des droits de l'homme (E/CN.4/2005/45) le Rapporteur spécial insiste sur le fait que la valeur ajoutée de la mission du Rapporteur spécial découle de son approche axée sur les droits de l'homme. Le Rapporteur spécial prévoit de centrer ses futurs rapports à la Commission sur des questions thématiques particulières et de donner suite aux allégations de violations en collaboration avec les gouvernements et les autres acteurs concernés. Le rapport décrit les faits nouveaux survenus sur le plan juridique en matière d'environnement depuis que le Rapporteur spécial précédent a rendu compte de ses travaux à la soixantième session de la Commission et résume les observations générales et les informations communiquées au Rapporteur spécial par des gouvernements et d'autres sources. Au titre des conclusions et recommandations, le Rapporteur spécial encourage en particulier les gouvernements à continuer de lui faire part de leurs observations, ainsi qu'il le leur demande, sur les allégations portées à son attention; à accueillir favorablement ses demandes d'invitation à se rendre sur le terrain; à envisager de ratifier l'ensemble des différents instruments multilatéraux et régionaux de protection de l'environnement qui relèvent de son mandat, et veiller à leur mise en œuvre effective.

Dans un additif à son rapport (E/CN.4/2005/45/Add.1), M. Ibeanu présente une mise à jour sur des cas examinés dans des rapports présentés par son prédécesseur, Mme Fatma Ouhachi-Vezely.


Examen du rapport

M. TURKEKUL KURTTEKIN (Turquie) s'est déclaré heureux de voir qu'au cours de sa visite en Turquie, la Rapporteuse spéciale, Mme Fatma Ouhachi-Vezely, ait été témoin de l'importance des réformes législatives prises par le gouvernement turc dans le secteur relevant de son mandat. Il s'est dit en outre heureux de constater une approche soulignant l'importance de la coopération internationale face aux défis des mouvements et déversements illicites de déchets toxiques. Il a rappelé que la Turquie, en tant que pays de transit de déchets et produits toxiques et dangereux, était hautement exposée à des risques de trafics illégaux. Le représentant a en outre indiqué que des progrès considérables avaient été enregistrés vers une solution concernant le navire Ulla, et ce grâce à approche coopérative et responsable du Gouvernement espagnol et de l'entreprise concernée.

MME CLAUDIA PÉREZ ÁLVAREZ (Cuba) s'est félicitée de l'intention du Rapporteur spécial d'assurer le suivi des communications émanant de particuliers surtout si l'on tient compte du fait que les accords multilatéraux ne permettent pas ce genre de procédure. Cuba souhaite que la Commission soit tenue informée des nouveautés intervenant dans le cadre d'accords multilatéraux en matière d'environnement. Cuba se félicite que le Rapporteur spécial souhaite travailler sur les questions relatives aux pesticides et aux transferts d'appareils électroniques obsolètes, notamment. Il serait intéressant que le Rapporteur spécial se penche également sur la question du renforcement de l'obligation redditionnelle des entreprises transnationales.

Répondant aux questions et commentaires concernant son rapport, M. IBEANU, Rapporteur spécial, a insisté sur l'importance du suivi. Il faut donner suite à toutes les déficiences constatées. Il faut veiller à ce que les déficiences soient portées à la connaissance de la Commission. Il faut continuer à encourager les gouvernements à répondre aux allégations de pollution. À cet égard, il a souligné que les gouvernements doivent répondre plus favorablement aux demandes de visites dans les pays. En outre, le Rapporteur spécial a exprimé la volonté de continuer à travailler avec les communautés et les groupes disposant d'informations utiles et dignes de foi afin que le mandat réponde aux attentes.

Débat sur les droits économiques, sociaux et culturels

MME HUSNYA MARKUS (Libye, au nom de la Ligue des États arabes) a déclaré que l'année 2005 est une étape fondamentale pour atteindre les objectifs que se sont fixés les Nations Unies à l'horizon 2015 en matière de réduction de la pauvreté. Cependant, si les travaux se poursuivent à ce rythme, ces objectifs ne pourront être atteints. Les statistiques qui ont été publiées sont particulièrement préoccupantes: trois quarts de la population vivent dans la pauvreté absolue et un quart dans la pauvreté; la majorité des personnes victimes de la malnutrition vivent en Asie et en Afrique. Le problème de la pauvreté va continuer de se poser. Il est même prévu qu'il s'aggrave à moins que des mesures ne soient prises. Le contexte politique, économique et social du monde doit être plus favorable aux pays en voie de développement. Les pays développés doivent en particulier honorer leurs promesses en matière d'aide au développement.

La mondialisation est à l'origine de la pauvreté, a souligné la représentante du Groupe arabe. Étant donné qu'il s'agit d'un phénomène incontournable, il faut se pencher sur la question de l'allègement du fardeau qui pèse sur les pays en voie de développement. La communauté internationale doit, dans un premier temps, élaborer des politiques de développement et fournir une assistance impliquant les droits politiques, sociaux et culturels des populations concernées. Enfin, la représentante a rappelé qu'il existe un ensemble de résolutions qui nous oblige à collaborer collectivement pour qu'elles soient appuyées et mises en œuvre.

M. MASOOD KHAN (Pakistan) a affirmé que si les Objectifs du millénaire pour le développement n'étaient pas atteints, la sécurité mondiale serait impossible. Ce que nous devons faire, à titre collectif et individuel, aux niveaux national, régional et international est clair, a-t-il dit, appuyant le rapport de M. Jeffrey Sachs intitulé «Investir dans le développement», selon lequel les Objectifs du millénaire pour le développement sont des cibles à atteindre pour régler le problème de la pauvreté extrême dans toutes ses dimensions. Afin de poursuivre cet objectif, nous devons assurer la protection des droits de l'homme fondamentaux à la santé, à l'éducation et à la sécurité, a-t-il dit, précisant qu'il était d'accord avec M. Sachs pour dire que le moment était venu et que les coûts impliqués dans la réalisation des objectifs sont supportables. Il faut une volonté politique, a-t-il assuré. Le représentant a déclaré que les pays développés devaient notamment répondre à l'appel lancé par le Secrétaire général des Nations Unies de fixer un calendrier pour la réalisation de l'objectif d'une participation à hauteur de 0,7% du PIB à l'aide publique au développement. Afin de promouvoir les droits économiques, sociaux et culturels, le Pakistan a mis en place une stratégie et a signé, l'an passé du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le pays a adopté une politique de croissance économique menée avec succès et a consenti des efforts soutenus en faveur de l'amélioration des conditions de vie de la population. De même, le Pakistan investit son temps et son énergie dans la coopération sous-régionale, a ajouté le représentant, évoquant le renforcement de ses relations avec l'Association des nations du Sud-Est asiatique.

M. ALAA W. ROUSHDY (Égypte) a rappelé que la constitution de son pays garantit à tous la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels. L'Égypte a ainsi mis en place des services de santé et d'éducation à travers tout le pays, a souligné le représentant. En outre, le pays s'efforce par des mesures concrètes d'améliorer la situation des membres les plus vulnérables de la population. Trop longtemps les droits économiques, sociaux et culturels ont été négligés, a souligné le représentant, qui a rappelé le caractère indivisible des droits de l'homme. Ces droits doivent être mis en œuvre progressivement, notamment au travers de la coopération internationale. Le représentant a estimé qu'il fallait se pencher sur la nature juridique des obligations en matière de développement et comment répondre aux manquements dans ce domaine. Quand la communauté internationale s'acquittera-t-elle de ses obligations en matière de promotion des droits économiques, sociaux et culturels, s'est demandé le représentant.

M. LUIS JAVIER CAMPUZANO (Mexique, au nom du Groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes - GRULAC) a rappelé que les pays du GRULAC accordent une importance particulière aux droits économiques, sociaux et culturels. À cet égard, la deuxième session du groupe de travail à composition non limitée du GRULAC a joué un rôle actif dans la formulation des options à prendre pour l'élaboration d'un protocole facultatif au Pacte sur les droits économiques, sociaux et culturels. Un tel protocole permettrait de supprimer le déséquilibre historique qui existe entre les deux groupes de droits de l'homme. Le protocole facultatif au Pacte permettrait aussi de réaffirmer le caractère indivisible de tous les droits de l'homme. Le GRULAC est en outre favorable à la notion de réalisation progressive des droits économiques sociaux et culturels car cela permet de tenir compte des retards et des difficultés historiques et structurelles des pays.

La violation des droits économiques, sociaux et culturels a en général lieu simultanément. Le sous emploi, les bas salaires, l'analphabétisme, la malnutrition, les maladies sont en général des problèmes qui affectent en même temps tous les membres des familles pauvres du monde. Cependant, il ne s'agit pas seulement d'un problème de violation simultanée: la pauvreté est aussi le résultat d'une violation successive des droits de l'homme qui se transmet d'une génération à l'autre. C'est ce qu'on appelle le cercle vicieux de la pauvreté. Étant donné le caractère interdépendant des deux groupes des droits de l'homme, la pauvreté entraîne également un affaiblissement des institutions et affecte les libertés civiles. Il faut donc aborder le problème dans un contexte global afin d'envisager des mécanismes de transformation des cercles vicieux de la pauvreté en cercles vertueux du bien être. Dans ce contexte, le représentant a estimé qu'un protocole facultatif au Pacte sur les droits économiques, sociaux et culturels pourrait combler certaines déficiences du Pacte. Tout risque de double emploi serait en outre éliminé par l'adoption de critères clairs, a conclu le représentant.

M. ALPHONSE BERNS (Luxembourg, au nom de l'Union européenne) s'est félicité de la ratification du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels par 150 États et a engagé les États qui ne l'ont pas encore fait à y adhérer. Certaines dispositions du Pacte doivent être appliquées dans leur totalité et sans délai, notamment celles relatives à l'égalité, à la non discrimination, aux droits syndicaux, aux conditions de travail, à l'enseignement primaire et à la liberté de la recherche scientifique, a-t-il souligné. Le représentant a également affirmé que les obligations de respect et de protection des droits économiques, sociaux et culturels étaient généralement applicables sans délai et nécessitaient peu, ou pas, de ressources. L'Union européenne considère que les États doivent veiller, conformément à leurs obligations internationales en matière de droits de l'homme, à ce que tous les individus, et notamment les défenseurs des droits de l'homme, se voient dûment protégés par la loi et à ce que le respect de la légalité soit garanti dans toutes les procédures judiciaires. L'Union européenne souligne que la bonne gouvernance est fondamentale pour assurer une croissance économique soutenue, l'éradication de la pauvreté et la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. L'Union européenne engage tous les États parties à collaborer avec le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, a-t-il ajouté, saluant les initiatives prises dans le sens d'une coopération accrue entre le Comité et les autres acteurs concernés, notamment les procédures spéciales pertinentes et les Groupes de travail de la Commission et des institutions et programmes spécialisés de l'ONU.

M. Berns a par ailleurs affirmé que l'Union européenne réitérait son attachement à la mise en œuvre des Objectifs du millénaire pour le développement, parmi lesquels la réduction de moitié de la proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour. En outre, les États doivent prendre toutes les mesures qui s'imposent, individuellement et dans le cadre de la coopération internationale, pour protéger et promouvoir le droit à une alimentation suffisante et assurer l'accès à l'eau potable. L'Union européenne salue également les progrès réalisés dans la mise en œuvre du droit à un logement convenable. Elle appelle les États à prendre toutes les mesures, y compris juridiques, nécessaires à l'élimination des obstacles à la mise en œuvre du droit à l'éducation. Elle salue enfin les efforts entrepris au sein du système des Nations Unies afin de promouvoir le droit de toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale susceptible d'être atteint.

MME CLAUDIA PÉREZ ÁLVAREZ (Cuba) a déclaré que les rapports présentés au titre du point 10 de l'ordre du jour de la Commission des droits de l'homme montrent bien les conséquences néfastes de l'ordre néo-libéral international actuel et de la mondialisation de l'économie sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels. Sans nourriture et sans eau potable, sans la possibilité de lire et d'écrire, sans accès à l'emploi et à la sécurité sociale et sans assistance médicale, un être humain ne saurait prendre une part active à la vie politique de son pays et agir sur le cours des événements, a souligné la représentante. Pour Cuba, le droit à la vie et le droit au développement de millions d'être humains dans le monde sont menacés par les plans hégémoniques de la seule superpuissance mondiale qui ne cesse de renforcer sa supériorité militaire et menace ceux qui se dressent contre ses visées impérialistes.

La représentante cubaine a déclaré que les États-Unis cherchent par tous les moyens à détruire le système politique, économique et social mis en place par Cuba. Mais ces tentatives ne seront jamais couronnées de succès, a-t-elle affirmé. Le peuple cubain sait bien que les conditions de son existence et de son développement en tant que nation souveraine et indépendante reposent sur sa détermination à rester uni, à lutter et à triompher de toute agression et menace. Les Cubains apprécient sincèrement le soutien et la solidarité de la communauté internationale dans son combat. Ce soutien, a estimé la représentante, montre bien que le combat mené par Cuba a une signification universelle et poursuit l'objectif commun de parvenir à un monde meilleur, ce qui est non seulement possible mais également indispensable à la survie de l'humanité.

M. ROGER JULIEN MENGA (République du Congo) a déclaré que le droit international relatif aux droits de l'homme vise à protéger l'ensemble des droits dont chacun a besoin pour mener une vie pleine, sure et saine en toute liberté et sécurité. Le droit de vivre dans la dignité ne peut exister que si tous les êtres humains disposent, dans des conditions suffisantes et équitables, de tous les moyens de survie essentiels: travail, nourriture, logement, soins de santé, éducation et culture. L'interdépendance croissante du monde dans le contexte de la mondialisation rend nécessaire la cohérence des politiques planétaires et nationales, a poursuivi le représentant. La communauté internationale doit se donner les moyens de corriger et résorber les déséquilibre affectant de façon fondamentale la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels. Cela doit être conçu comme une mesure de solidarité internationale pour donner une perspective à ceux qui sont démunis pour des raisons tenant à l'histoire ou à la géographie.

M. HARDEEP SINGH PURI (Inde) a rappelé que la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels était indispensable à la dignité de l'homme. L'expérience nous a enseigné que les droits économiques, sociaux et culturels étaient mieux respectés dans des sociétés ouvertes, libres et démocratiques, où les politiques gouvernementales étaient le reflet des aspirations du peuple. Il a déclaré que le gouvernement remplissait son devoir sacré d'habiliter les pauvres et d'éliminer le fléau de la pauvreté. Le représentant a ajouté que l'Inde s'était engagée à atteindre d'ici 2009 des objectifs ambitieux fixés en matière d'élimination de la pauvreté, d'éducation, de santé, d'hygiène et de revenus. Le Gouvernement indien estime que l'Inde rurale doit être considérée comme un moteur de croissance et oriente les investissements publics vers les infrastructures rurales. Avant même l'adhésion de l'Inde au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, l'importance de ces droits était déjà reconnue dans sa Constitution. La réalisation pratique des droits inscrits dans le Pacte dépend du niveau de développement du pays, a-t-il souligné. Alors que la croissance économique de l'Inde se poursuit, une part croissante de ressources publiques devient disponible pour la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels de chaque individu, a-t-il ajouté. Le représentant indien a par ailleurs souligné que le régime du commerce international devait créer les possibilités d'un développement humain et permettre aux pays en développement d'entreprendre des réformes, notamment institutionnelles.
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