Communiqués de presse Commission des droits de l'homme
LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE UN RAPPORT SUR LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME EN COLOMBIE
14 avril 2004
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Commission des droits de l'homme
APRÈS-MIDI
13 avril 2004
Elle procède à l'élection de douze membres de la
Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme
La Commission des droits de l'homme a examiné, cet après-midi, le rapport du Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme en Colombie. Elle a également examiné le rapport de la Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme, organe subsidiaire de la Commission. À cet égard, les mandats de la moitié des vingt-six membres de la Sous-Commission arrivant cette année à échéance, la Commission a procédé à l'élection ou la réélection de douze des treize nouveaux membres.
Présentant le rapport du Haut-Commissaire sur la situation des droits de l'homme en Colombie, le Haut Commissaire aux droits de l'homme par intérim, M. Bertrand Ramcharan, a notamment regretté qu'aucun des groupes armés illégaux n'ait tenté d'appliquer de quelque manière les recommandations du dernier rapport. Les deux groupes de guérillas, les FARC-EP et l'ELN, ainsi que les groupes paramilitaires ont continué à tuer, à prendre des otages, à provoquer des déplacements de populations, à recruter des mineurs et à poser des mines antipersonnel, a-t-il déploré. Des informations ont également été reçues sur des violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international imputables à des membres des forces armées et de la police, a souligné M. Ramcharan. Il a également réitéré l'importance qu'il y a à ne laisser aucune place à l'impunité et a déploré que l'application de la loi de «sécurité démocratique» ne soit pas toujours compatible avec les engagements internationaux pris par la Colombie.
À l'issue de cette présentation, le représentant de la Colombie est intervenu, soulignant notamment que durant l'année 2003, le nombre de cas de déplacements forcés a chuté de 50%, le nombre d'assassinats de 20%, le nombre d'enlèvements de 26% et le nombre de meurtres de syndicalistes de 57%. Sont également intervenus les représentants de l'Irlande (au nom de l'Union européenne), des États-Unis, de la Suisse, de la Norvège et du Canada, ainsi que les représentants des organisations non gouvernementales suivantes : Commission internationale de juristes (au nom également de la Commission colombienne de juristes et de Amnesty International); Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH); Organisation mondiale contre la torture (au nom également de la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme); Franciscain international (au nom également de Dominicains pour justice et paix);
Human Rights Watch; Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples;
Fédération syndicale mondiale; Association internationale des juristes démocrates;
Fédération latino-américaine des associations des familles des détenus disparus - FEDEDAM; Confédération internationale des syndicats libres et Agir ensemble pour les droits de l'homme; Consejo Indio de Sud America.
À l'issue du débat, la Colombie a fait une déclaration dans l'exercice de son droit de réponse.
Au titre de l'examen du rapport de la Sous-Commission, présenté par sa Présidente, Mme Halima Embarek Warzazi, le représentant du Nigéria a fait une déclaration, ainsi que les représentants des organisations non gouvernementales suivantes: Organisation mondiale contre la torture (au nom également du Mouvement international d'apostolat des milieux sociaux); Organisation internationale pour le développement de la liberté d'enseignement (OIDEL); Comité consultatif mondial de la société des amis (QUAKER); Service international pour les droits de l'homme; Fédération latino-américaine des associations des familles des détenus disparus (FEDEDAM); Pax Romana et l'Assemblée permanente pour les droits de l'homme.
La Commission doit achever demain matin, à partir de 10 heures, la procédure d'élection des nouveaux membres de la Sous-Commission en élisant un membre appartenant au Groupe africain. Elle doit également entendre des institutions nationales de promotion et de protection des droits de l'homme.
Présentation du rapport du Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme en Colombie
M. BERTRAND RAMCHARAN, Haut-Commissaire aux droits de l'homme par intérim, a présenté le rapport du Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme en Colombie en soulignant que peu de situations font l'objet d'un examen aussi approfondi que celle de la Colombie. Soulignant que le Bureau du Haut Commissariat aux droits de l'homme en Colombie a poursuivi sa relation avec le Gouvernement colombien, il a affirmé que, même si de nombreuses recommandations restent à mettre en œuvre, le travail a été approfondi et le Bureau a effectué des visites systématiques dans les zones qui sont sources de préoccupation. Le Bureau en Colombie a également continué à conseiller le Gouvernement et à lui apporter sa coopération technique. Un nouveau bureau annexe a été ouvert il y a quelques semaines dans la zone de Bucaramanga, dans le nord-est du pays, a indiqué M. Ramcharan.
Le Haut-Commissaire aux droits de l'homme par intérim a regretté qu'aucun des groupes armés illégaux n'ait tenté d'appliquer de quelque manière les recommandations du dernier rapport. Les deux groupes de guérillas, les FARC-EP et l'ELN, ainsi que les groupes paramilitaires ont continué à tuer, à prendre des otages, à provoquer des déplacements de populations, à recruter des mineurs et à poser des mines antipersonnel. Ils ont continué à martyriser la population et à mener des actions terroristes, a poursuivi M. Ramcharan. Des informations ont également été reçues sur des violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international imputables à des membres des forces armées et de la police. Le Haut-Commissaire par intérim a souligné l'importance cruciale de progresser sur la voie du dialogue afin de rétablir la paix . Il a également réitéré l'importance qu'il y a à ne laisser aucune place à l'impunité et à garantir les droits des victimes et de leurs familles à la vérité, à la justice et à une indemnisation. Il a en outre déploré que l'application de la loi de «sécurité démocratique» ne soit pas toujours compatible avec les engagements internationaux pris par la Colombie. À cet égard, il a estimé que le défi auquel sont confrontés tant le Gouvernement que le Congrès consiste à faire en sorte que les législations adoptées ne viennent pas saper les institutions et mécanismes nationaux courageux qui existent pour protéger les droits et libertés fondamentaux. M. Ramcharan a particulièrement insisté sur la nécessité d'amender la loi contre le terrorisme, qui est incompatible avec les instruments internationaux auxquels la Colombie est partie.
M. Ramcharan a attiré l'attention sur le fait que les chiffres officiels indiquent une réduction du nombre d'actes violents en 2003. Toutefois, il a exprimé sa préoccupation face à la situation des droits de l'homme, qui continue d'être critique. Il a notamment souligné que des allégations dignes de foi font état de violations perpétrées par les forces armées et par la police. Il s'est tout particulièrement inquiété d'allégations de collusion entre des fonctionnaires et des groupes paramilitaires, qui n'a pas fait l'objet de sanctions. Plus généralement, il a exprimé sa préoccupation face à l'impunité persistante dans le pays et a regretté que le Bureau du Procureur n'ait pas réussi à prouver la responsabilité d'officiers supérieurs dans des actes graves en rapport avec des massacres. En outre, les groupes vulnérables, tels que les journalistes, les populations autochtones, les Afro-Colombiens, les personnes déplacées, les femmes et les enfants vivent dans des conditions extrêmement difficiles. Non seulement ils souffrent du conflit armé mais aussi de l'action des fonctionnaires à travers la politique de sécurité, les discriminations et les violations de leurs droits économiques, sociaux et culturels. Il a rappelé qu'il est du devoir des fonctionnaires de respecter et de garantir le travail des défenseurs des droits de l'homme.
Le rapport reprend nombre de recommandations déjà formulées l'an passé mais qui n'ont toujours pas été mises en œuvre, a précisé M. Ramcharan. IIl se concentre sur la prévention et la protection; le conflit interne; la primauté du droit et l'impunité; les politiques économiques et sociales; la promotion d'une culture des droits de l'homme; et sur la coopération technique du Bureau du Haut Commissariat en Colombie. M. Ramcharan a insisté sur le fait qu'il est essentiel que les groupes armés appliquent sans délai les recommandations qui leur ont été adressées; il est impératif qu'ils respectent totalement les droits des populations civiles et les obligations découlant du droit international humanitaire. Le Haut-Commissaire par intérim a également invité le Gouvernement colombien à approfondir son engagement et à appliquer les recommandations qui lui sont adressées.
Dans son rapport sur la situation des droits de l'homme en Colombie (E/CN.4/2004/13), le Haut-Commissaire aux droits de l'homme estime que l'évolution du conflit armé interne et les problèmes d'endettement, de déficit des finances publiques, ainsi que la politique législative ont constitué de nouveaux défis pour le pays. Le Gouvernement a intensifié les opérations visant à maintenir ou à rétablir l'ordre public dans le cadre de la politique de «sécurité démocratique». Les combats entre les forces de l'ordre et les groupes armés illégaux, en particulier les groupes de guérilleros, se sont intensifiés et, rencontrant une résistance accrue de la part des forces de sécurité, les guérilleros se sont repliés vers les zones rurales traditionnelles et se sont livrés à des actes de terrorisme. Le dialogue a été développé entre le bureau en Colombie du Haut-Commissaire et le Gouvernement, en particulier avec le vice-président et d'autres organes de l'État, afin d'obtenir une meilleure application des recommandations. Il y a eu quelques progrès mais la majorité des recommandations n'étaient toujours pas appliquées quand le présent rapport était sur le point d'être achevé.
La situation des droits de l'homme en Colombie a continué d'être critique, affirme le rapport. Pendant l'année, le Bureau du Haut-Commissaire a enregistré des plaintes faisant état de violations du droit à la vie, à l'intégration physique, à la liberté et à la sécurité de la personne; du droit à un procès équitable et aux garanties judiciaires; de l'indépendance et de l'impartialité du système judiciaire; du respect de la vie privée ainsi que des libertés fondamentales que sont le droit de circulation, de résidence, la liberté d'opinion et d'expression et des droits politiques. Le Bureau en Colombie a continué de recevoir de plus en plus de plaintes dénonçant des violations dans lesquelles étaient directement impliqués des agents de l'État, et en particulier des forces de sécurité, dans plusieurs cas conjointement avec la Fiscalía General. Malgré une diminution des meurtres de dirigeants syndicaux, la situation des défenseurs des droits de l'homme et des dirigeants syndicaux a continué d'être critique. La discrimination et les violations des droits économiques, sociaux et culturels subies par les groupes ethniques n'ont pas cessé. Le conflit armé interne a aggravé le sort des communautés autochtones et des Afro-Colombiens, un accroissement des actes de violence sélectifs commis par les groupes armés illégaux étant observé. La situation des journalistes, toujours aussi précaire, s'est caractérisée par des restrictions à l'exercice du droit à la liberté d'opinion, d'expression et d'information, en particulier à cause des actions des groupes armés illégaux. En 2003, la tendance à l'augmentation des déplacements forcés s'est inversée mais le phénomène a continué d'être important.
Le rapport du Haut-Commissaire présente un ensemble de recommandations concrètes et prioritaires pour l'année 2004, fort de la conviction que leur application pourrait contribuer de façon notable à améliorer la situation en Colombie. Ces recommandations portent sur des questions importantes relatives à la prévention et la protection, au conflit armé interne, au respect de la légalité et à l'impunité, aux politiques économiques et sociales, à la promotion d'une culture des droits de l'homme et aux services de conseil et d'assistance technique du Bureau en Colombie du Haut-Commissaire. Les recommandations s'adressent aux autorités du pays, aux groupes armés illégaux, aux secteurs représentatifs de la société civile et à la communauté internationale.
Déclarations concernant le rapport sur la situation des droits de l'homme en Colombie
Son pays étant directement concerné par le rapport du Haut-Commissaire, M. CARLOS FRANCO ECHAVARRÍA (Colombie) a remercié le Haut-Commissaire pour son rapport et l'a assuré de la détermination de son gouvernement à poursuivre leur collaboration. Le rapport, a estimé le représentant, témoigne des garanties accordées par la Colombie au pluralisme politique et au renforcement de la démocratie, comme en témoignent concrètement les deux élections qui se sont tenues en 2003. La protection des droits de l'homme est le but ultime du Gouvernement, qui bénéficie pour ce faire d'une légitimité populaire. Il vaut la peine, a affirmé le représentant colombien, de souligner que, durant l'année 2003, le nombre de cas de déplacements forcés a chuté de 50%, le nombre d'assassinats de 20%, le nombre d'enlèvements de 26% et le nombre de meurtres de syndicalistes de 57%. La conclusion est claire, a insisté le représentant : la Colombie jouit d'un régime démocratique et légitime dont la politique a permis d'améliorer la grave situation des droits de l'homme de la population colombienne.
Ces faits prouvent par ailleurs le bien-fondé des observations du rapport du Haut-Commissaire concernant la politique de sécurité démocratique du Gouvernement : les objectifs principaux en sont bien la protection de tous les Colombiens, sans aucune discrimination; la garantie du respect de leurs droits et libertés; et le respect de l'autorité démocratique sur tout le territoire. Cette politique, enfin, est devenue une garantie réelle, qui permet la confrontation pacifique des idées politiques. Le Gouvernement reconnaît toutefois que ses efforts sont encore insuffisants, a poursuivi le représentant. Il est ainsi conscient de la nécessité de parvenir à une meilleure administration de la justice, de mieux contrecarrer les actions violentes commises par les bandes armées illégales contre la population civile et de poursuivre en justice, et de punir si nécessaire, les agents du Gouvernement accusés de violations des droits de l'homme.
Le représentant colombien a souligné la convergence qui existe entre nombre de recommandations du Haut-Commissaire et les politiques lancées en Colombie depuis 2002 dans le cadre du Plan de développement de l'actuel Gouvernement. S'agissant de la polémique sur la question de savoir quels moyens sont nécessaires pour faire face à la situation sur le terrain et si ces moyens sont conformes aux dispositions des conventions internationales, il convient de garder à l'esprit que, malgré les circonstances exceptionnelles que connaît le pays, les mesures qui ont été prises l'ont été au terme d'une procédure démocratique permettant d'en contrôler l'application, a fait valoir le représentant. S'agissant de l'autre question délicate - celle de la négociation avec les groupes d'autodéfense et du projet de loi visant leur démilitarisation-, le représentant a indiqué que cette offre, ouverte à tous les groupes armés illégaux, a été lancée par le Gouvernement afin de mettre un terme à leur action et de rétablir le monopole étatique de la force armée. Le débat entourant ce processus de démobilisation s'est déroulé ouvertement et dans le calme, avec des audiences publiques auxquelles étaient conviés des intervenants nationaux et étrangers, a rappelé le représentant colombien. Aussi, ce projet est aujourd'hui enrichi des nombreuses contributions issues du débat public, a-t-il ajouté.
La Colombie a réalisé des progrès considérables depuis dix ans, a poursuivi le représentant, citant notamment l'adoption d'une des constitutions les plus progressistes qui soient, la ratification des traités et conventions internationales et l'adaptation subséquente de la législation interne, les offres de négociation de paix, ainsi que l'ouverture du pays aux processus d'enquêtes internationaux. Enfin, tous les groupes illégaux ont été combattus avec la même détermination, a assuré le représentant colombien. Le monde peut être certain que le Gouvernement colombien ne manquera pas à son engagement de défendre tous les droits de tous les Colombiens, a conclu le représentant.
MME MARY WHELAN (Irlande, au nom de l'Union européenne) s'est félicitée de la volonté de la Colombie de mener un dialogue constructif avec le Bureau du Haut Commissariat aux droits de l'homme à Bogotá. L'Union européenne appuie pleinement l'importante Déclaration de Londres adoptée le 10 juillet 2003. Elle se réjouit des progrès significatifs accomplis en vue d'étendre l'autorité de l'État à l'ensemble du territoire colombien. L'Union européenne appuie pleinement le Gouvernement de la Colombie dans sa lutte contre le terrorisme et contre le trafic de stupéfiants, deux fléaux qui font peser une menace constante sur la construction démocratique dans le pays. Ce combat doit se faire dans le respect des règles de l'état de droit, a souligné la représentante irlandaise. L'Union européenne se réjouit par ailleurs de l'engagement du Président Uribe à rechercher une solution négociée au différend qui déchire le pays. L'Union européenne est d'avis qu'une solution globale et négociée permettra de parvenir à une paix durable et se tient prête à assister le Président dans cette action. L'Union européenne a suivi de près les accords conclus entre le Gouvernement et les groupes armés, visant une démilitarisation de ces derniers d'ici à 2005.
La représentante irlandaise a toutefois exprimé sa préoccupation face aux graves violations des droits de l'homme qui continuent de se produire en Colombie. Elle a appelé le Gouvernement colombien à respecter les principes du droit humanitaire international. Elle a fermement condamné la technique de la prise d'otage et a lancé un appel en faveur de la libération immédiate des personnes kidnappées. La représentante a par ailleurs exprimé son inquiétude face à l'impunité qui entoure l'activité des groupes armés; elle a exhorté le Gouvernement à y mettre un terme. Enfin, l'Union européenne exhorte la Colombie à mettre en œuvre de façon concrète et prioritaire les recommandations du Haut Commissaire aux droits de l'homme et de la Commission.
M. JEFFREY DE LAURENTIS (États-Unis) a déclaré que l'engagement du Président Uribe en faveur du renforcement de la démocratie était évident et que la situation sur le terrain s'était ainsi améliorée. L'État assure désormais des services essentiels tels que la sécurité policière, ce qui permet aux Colombiens de se faire entendre plutôt que d'être soumis à la terreur des groupes armés illégaux. Le Gouvernement a aussi accompli des efforts en matière de lutte contre les forces paramilitaires, a dit le représentant des États-Unis, notant que le cessez-le-feu observé par certaines de ces forces a permis de réduire le niveau de violence; cependant, ni les FARC ni l'ELN n'ont accepté de trêve, pas plus qu'elles n'ont répondu aux offres de dialogue du Gouvernement, a déploré le représentant des États-Unis. Ce dernier a reconnu que le respect des recommandations des Nations Unies n'est certes pas le critère ultime de la situation des droits de l'homme en Colombie; il est de fait, a-t-il aussi relevé, que le Gouvernement a progressé de manière importante vis-à-vis de plusieurs de ces recommandations. Ainsi, le programme de protection des défenseurs des droits de l'homme enregistre des résultats positifs; la Chambre de justice a fait son apparition dans 23 régions et un programme de formation ciblé a permis de réduire les plaintes des citoyens contre les forces de l'ordre. Des lacunes demeurent, mais l'amélioration générale de la situation ne peut être niée, a conclu le représentant des États-Unis.
M. JEAN-DANIEL VIGNY (Suisse) s'est félicité de la collaboration entre le Bureau du Haut Commissariat aux droits de l'homme en Colombie et le Gouvernement colombien. Il a rappelé au Gouvernement l'importance de tout entreprendre pour mettre en œuvre les recommandations du Haut Commissariat. La Suisse reconnaît la légitimité des efforts entrepris pour restaurer l'ordre et la sécurité dans le pays et salue à cet égard les premiers résultats enregistrés; elle tient toutefois à souligner l'importance d'un renforcement des contrôles civils indépendants sur les actions des forces de l'ordre et déplore l'octroi de pouvoirs de police judiciaire aux forces armées. La Suisse est en outre préoccupée par les informations faisant état de détentions arbitraires, à l'encontre surtout de dirigeants communautaires, de défenseurs des droits de l'homme et de syndicalistes, ainsi que par l'existence de cas d'exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées et de torture imputables à des agents de l'État. La Suisse condamne par ailleurs les graves infractions au droit international humanitaire commises par les FARC, l'ELN et les AUC, ainsi que le recrutement d'enfants par l'armée colombienne. Elle s'inquiète en outre de la situation des communautés indigènes et afro-colombienne, principales victimes des déplacements forcés. La Suisse constate que le Gouvernement a intensifié ses efforts dans la lutte contre les groupes paramilitaires et encourage tout effort visant la recherche d'une solution négociée au conflit armé.
MME ASTRID HELLE AJAMAY (Norvège) a souligné que les politiques colombiennes en matière de droit humanitaire et de droits de l'homme sont fortement marquées par les exigences liées au respect de la «sécurité démocratique». La Norvège comprend que ces politiques ont pour but de consolider l'état de droit dans le pays et de garantir le droit à la sûreté personnelle des citoyens colombiens; toutefois, elle reste préoccupée par le fait que les recommandations du Haut-Commissaire aux droits de l'homme ne sont pas suffisamment prises en compte dans la politique gouvernementale. La Norvège est également préoccupée par le manque de considération accordée aux recommandations du Haut-Commissaire par les groupes armés. La Norvège exhorte les groupes armés à libérer immédiatement et sans condition tous les otages et à cesser de recruter des enfants à des fins militaires.
M. PAUL MEYER (Canada) a félicité le Gouvernement de la Colombie pour l'amélioration de la situation dans le pays mais s'est déclaré inquiet des informations faisant encore état de détentions arbitraires et illégales, d'exécutions arbitraires et d'autres violations des droits de l'homme. La Colombie doit rester fidèle à ses obligations internationales et engager les ressources nécessaires pour raffermir ses institutions et investir dans les services sociaux dans toutes les parties du pays. S'agissant du processus de démobilisation des forces armées illégales, force est de constater que les paramilitaires poursuivent leurs exactions : la Colombie doit les affronter résolument et imputer aux fonctionnaires la responsabilité pénale de leurs liens avec les opérations de ces groupes, a insisté le représentant canadien. Le Canada exhorte tous les groupes armés illégaux à respecter la vie des civils et à libérer immédiatement et sans condition tous leurs otages. Le Canada est également préoccupé par le sort des défenseurs des droits de l'homme et par le grand nombre de personnes déplacées en Colombie.
M. ANDRÉS SÁNCHEZ (Commission internationale de juristes, au nom également de la Commission colombienne de juristes et de Amnesty International) a dénoncé l'aggravation de la situation en Colombie en 2003, en raison non seulement des violations mais aussi à la politique de démantèlement de l'État social et démocratique mise en œuvre par le Gouvernement. Il a demandé que la Commission agisse fermement face à la situation qui se détériore, contrairement à ce que le Gouvernement tente de faire croire. Environ 4 000 personnes ont été assassinées pour des raisons politiques cette année, ce qui représente le double du nombre de tués il y a six ans, a poursuivi le représentant. En outre, il y a eu une grave augmentation des disparitions forcées, ainsi que des exécutions extrajudiciaires et des actes de torture dans un climat d'impunité. Plusieurs actions du Gouvernement sont en contradiction flagrante avec les engagements pris par la Colombie. Le représentant a préconisé l'adoption de mesures visant à garantir que le Gouvernement respecte sa parole; il pourrait par exemple s'agir de demander au Haut-Commissaire de soumettre un rapport intérimaire à l'Assemblée générale.
Le représentant de (Fédération internationale des ligues des droits de l'homme - FIDH) a estimé que le Gouvernement colombien n'a déployé aucun effort pour démettre de leurs fonctions certains fonctionnaires qui entretiennent des liens avec les groupes armés. Elle a par ailleurs dénoncé le fait que la loi colombienne investisse les forces armées de pouvoirs de police judiciaire. La FIDH est également préoccupée par l'usage sélectif de la force contre les défenseurs des droits de l'homme. Les menaces, les assassinats et les persécutions continuent d'être les mécanismes habituels utilisés par les groupes armés pour réduire au silence toutes les voix qui s'élèvent en faveur des droits de l'homme et de la justice.
M. JOHN QUIGLEY (Franciscain international, au nom également de Dominicains pour justice et paix) a établi un lien entre les très nombreux déplacements internes de population constatés en Colombie, le contrôle militaire du pays et l'instauration d'un modèle économique donné. Quoi qu'en dise le Gouvernement, a-t-il déploré, la diminution du nombre des personnes déplacées ne s'accompagne pas d'une amélioration de la situation de ces populations. Les politiques du Gouvernement dans ce domaine se sont avéré être un échec, ce dont témoigne l'appauvrissement des populations déplacées. Le représentant a par ailleurs dénoncé l'utilisation de la force pour faire aboutir des intérêts économiques particuliers. Si la politique gouvernementale échoue, a-t-il déploré, c'est avant tout par manque de motivation politique. Le Gouvernement doit absolument prendre en compte tous les facteurs qui suscitent les déplacements à grande échelle.
M. LOUBNA FREIH (Human Rights Watch) a déploré que le Gouvernement colombien n'ait pas réussi à rompre les liens qui unissent les forces de sécurité et les paramilitaires, ni à assurer que les auteurs de crimes contre l'humanité soient traduits en justice. La guérilla commet également de graves violations, a-t-elle souligné tout en insistant sur le fait que les efforts pour combattre la violence de la guérilla ont conduit à l'abrogation de droits sans réussir à ramener la sécurité. Elle a demandé à la Commission de continuer à demander au Gouvernement colombien de mettre en œuvre les recommandations du Haut Commissariat et de demander à ce dernier de soumettre un rapport de suivi lors de la prochaine session. Elle a également estimé que le mandat du Bureau du Haut Commissariat en Colombie devrait devrait être renégocié afin de l'autoriser à transmettre aux organisations internationales ou non gouvernementales, ainsi qu'à la presse des informations sur des cas précis.
MME VERENA GRAF (Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples) a déclaré qu'en 2003, 4538 personnes sont mortes de manière violente du fait du conflit social ou armé qui sévit en Colombie. Bien que les statistiques diffusées par le Gouvernement colombien tendent à montrer que les violations graves des droits de l'homme sont en baisse, il semble qu'en réalité ces atteintes n'aient pas diminué. La représentante a en outre remis en cause la politique de démobilisation des groupes armés. Elle a également souligné que des réformes constitutionnelles ont entraîné la suspension de nombreuses garanties démocratiques prévues dans les conventions internationales. Certaines d'entre elles conférent notamment à l'armée des pouvoirs de police judiciaire.
MME AIDA AVELLA (Fédération syndicale mondiale) a dénoncé la situation dramatique des travailleurs colombiens et les détentions, les mesures d'exil forcé, les perquisitions qui se poursuivent dans les locaux de syndicalistes. Quatre-vingt-douze d'entre eux ont été assassinés en 2003; en 2004, onze ont été menacés, ainsi que leurs familles. Le syndicat des enseignants de Risaralda a été menacé par les forces paramilitaires et n'a pas bénéficié de la protection de l'État. Mme Toledo Rubiano, syndicaliste, a été assassinée le 24 mars à Tame; M. Segundo Vergara, président du syndicat des chauffeurs de taxis de Carthagène, a subi le même sort. La représentante a demandé à la Commission de nommer un rapporteur spécial et de mettre sur pied un mécanisme complémentaire pour lutter contre ces violations des droits de l'homme en Colombie.
MME GLORIA MANSILLA (Association internationale des juristes démocrates) a dénoncé les assassinats de défenseurs des droits de l'homme et le non-respect par le Gouvernement colombien du droit à exercer des activités syndicales ou politiques. Elle a également dénoncé la poursuite des déplacements internes du fait non seulement des opérations militaires mais aussi du Plan Colombie et d'intérêts économiques et géopolitiques en jeu. Il y a une crise humanitaire non déclarée pour les plus de trois millions de personnes déplacés, s'est-elle indignée. La politique de sécurité démocratique, le non-respect des recommandations du Haut Commissariat et des obligations internationales reflètent le manque de volonté politique. Elle a demandé la mise en place de mécanismes supplémentaires, tels que la présentation d'un rapport intérimaire à l'Assemblée générale et la nomination d'un rapporteur spécial sur la situation en Colombie.
M. JOSÉ DANIEL ALVAREZ (Fédération latino-américaine des associations des familles des détenus disparus - FEDEDAM) a exprimé sa préoccupation quant au projet de loi sur les peines de substitution qui, en contradiction flagrante avec les principes directeurs du droit international des droits de l'homme, prévoit la possibilité pour le Gouvernement d'octroyer des avantages à des paramilitaires qui se seraient rendus coupables de crimes contre l'humanité. Le représentant a exhorté les Nations Unies à réagir promptement à ce projet afin de préserver le droit des victimes à connaître la vérité et à obtenir réparation des dommages qu'elles ont subis. Il a par ailleurs estimé que la visite en Colombie du Rapporteur spécial sur les disparitions forcées s'impose de façon urgente.
MME ANNA BIONDI BIRD (Confédération internationale des syndicats libres) a dit sa vive préoccupation devant l'insécurité dans laquelle vivent les syndicalistes colombiens. Le nombre d'assassinats de syndicalistes a diminué, a aussi reconnu la représentante, mais cela est dû à des négociations du Gouvernement avec les groupes paramilitaires qui ont abouti de fait à leur assurer l'impunité pour les crimes commis. La représentante a dénoncé l'assassinat récent d'un important représentant syndical à Bogotá, probablement par les forces paramilitaires. Pour la représentante, le Gouvernement colombien doit lutter contre l'impunité qui profite aux auteurs de ces très nombreux meurtres, dont deux seulement ont été condamnés à ce jour. Le 10 décembre dernier, la Confédération a remis aux autorités colombiennes une liste de 18 noms de syndicalistes dont les assassinats restent impunis. Le Gouvernement n'a pas donné de réponse à cette demande de renseignements. Pour la représentante, le Gouvernement persécute les syndicalistes pour faire aboutir son propre programme économique de privatisation et d'interdiction des syndicats. La représentante a notamment demandé au Haut-Commissaire en exercice de continuer à faire rapport, y compris au sujet du respect des droits économiques et sociaux des Colombiens.
M. ANDRES PEREZ BERRIO (Agir ensemble pour les droits de l'homme) a dénoncé les liens entre les agents de l'État et les groupes paramilitaires et l'impunité flagrante qui règne, comme en témoigne le cas du général Rito Alejo del Rio, libéré faute de preuves. Il a également dénoncé l'absence d'un processus de paix sérieux et de politique de sécurité respectueuse de la démocratie, ainsi que les négociations confidentielles avec les groupes paramilitaires, sans participation des citoyens et des victimes, qui ne garantissent pas la vérité, la justice et le droit à indemnisation, alors même que ces groupes n'ont pas cessé leurs attaques contre la population civile.
M. TOMAS CONDORI (Consejo Indio de Sud America) a déclaré que les peuples autochtones de Colombie sont victimes de la terreur imposée par les groupes militaires. Le représentant a affirmé que le Gouvernement colombien ne fait malheureusement pas de distinction entre la population civile combattante et non combattante. Nous sommes contraints à vivre prisonniers dans nos territoires, a dénoncé le représentant. Il a par ailleurs souligné les nombreuses violations du droit à la terre. Il a enfin souligné que les modes de vie traditionnels des peuples autochtones sont menacés en raison du conflit armé.
Droit de réponse
M. CARLOS FRANCO ECHAVARRIA (Colombie), exerçant son droit de réponse, a invité toutes les parties intéressées à la situation en Colombie à en débattre de manière approfondie dans le cadre des institutions de son pays. Le représentant a aussi tenu à rectifier certaines affirmations qui sont, de son avis, manifestement fausses. Ainsi, le projet de démobilisation ne prévoit pas que le Président dispose de pouvoirs judiciaires en la matière. Il n'est pas vrai non plus que les opposants politiques soient arrêtés pour au seul motif qu'ils sont opposants; certains de ces opposants sont d'ailleurs à la tête de municipalités colombiennes, a fait remarquer le représentant, qui aussi réaffirmé qu'une diminution du nombre des disparitions forcées a bien été constatée. Les affirmations qui nient ces faits ne permettent pas de faire avancer les choses, a estimé le représentant. Le Gouvernement a la volonté de négocier avec tous les groupes concernés, y compris les églises et les pays amis, a dit le représentant, pour lequel la voix du peuple colombien est claire: il ne veut plus de ce conflit.
Élection de nouveaux membres de la Sous-Commission
Les mandats de la moitié des vingt-six membres de la Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme, organe subsidiaire de la Commission, arrivant cette année à échéance, la Commission devait procéder à l'élection de treize nouveaux membres. À la fin de la séance de cet après-midi, douze des treize nouveaux membres ont été élus ou réélus, un membre appartenant au Groupe des pays africains restant à élire.
La Commission des droits de l'homme a ainsi élu ou réélu les personnes suivantes en tant que membres de la Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme (la majorité absolue étant de 27 voix sur les 53 membres de la Commission):
- pour le Groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes: M. Miguel Alfonso Martínez (Cuba - réélu) et M. Janio Iván Tuñón Veilles (Panama), seuls candidats présentés par ce Groupe.
- pour le Groupe des pays occidentaux: M. Marc Bossuyt (Belgique - réélu), M. Gudmundur Alfredsson (Islande) et M. David Rivkin (États-Unis), seuls candidats présentés par ce Groupe
- pour le Groupe des pays d'Europe de l'Est: M. Gáspár Bíró (Hongrie - élu avec 42 voix au premier tour) et Mme Iulia Motoc (Roumanie - réélue avec 39 voix au premier tour).
- pour le Groupe des pays asiatiques: Mme Chung Chin-sung (République de Corée, jusqu'ici suppléante de son compatriote M. Soo Gil Park, élue avec 44 voix au premier tour) et M. Yozo Yokota (Japon - réélu avec 40 voix au premier tour).
- pour le Groupe des pays africains: M. Ibrahim Salama (Égypte, élu avec 33 voix au premier tour), M. Mohamed Habib Cherif (Tunisie, élu avec 33 voix au premier tour) et Mme Halima Embarek Warzazi (Maroc, réélue avec 31 voix au premier tour). Un membre du Groupe africain reste à élire.
Présentation du rapport de la Sous Commission
MME HALIMA EMBAREK WARZAZI, Présidente de la Sous-Commission pour la promotion et la protection des droits de l'homme, présentant le rapport de la Sous-Commission, a indiqué que plusieurs experts de cet organe se sont inquiétés de l'érosion des droits de l'homme sous couvert de la lutte contre le terrorisme et ont noté que les droits de l'homme relèvent essentiellement d'une question de sécurité : sécurité de la vie, sécurité alimentaire, physique, sociale et de l'identité. L'accent a été mis sur l'importance de l'éducation aux droits de l'homme mais aussi sur la lutte contre la torture ou encore sur le sentiment d'une justice des droits de l'homme à deux vitesses. La Sous-Commission n'a adopté aucune résolution sur des situations spécifiques. Toutefois, ayant à l'esprit les reproches des organisations non gouvernementales et l'impuissance des experts à faire face à certaines situations de violations sérieuses, la Commission peut souhaiter autoriser la Sous-Commission à refléter de façon adéquate toute information susceptible de l'éclairer sur des situations auxquelles la Commission réserverait ensuite les décisions qu'elle jugerait appropriées.
La Présidente de la Sous-Commission a par ailleurs indiqué que le Groupe de travail sur les formes contemporaines d'esclavage a présenté ses recommandations qui visent à lutter contre toutes les formes de discrimination et d'exploitation dont sont victimes notamment les femmes et les fillettes. Au cours des débats sur les problèmes affectant les femmes, l'accent a été mis sur les nouveaux problèmes tels que le sida, la traite des personnes, la pauvreté sans limite et les questions de bioéthique, qui constituent pour elles de nouvelles et sérieuses menaces. Il a également été souligné qu'il fallait s'interroger sur la diffusion d'une culture dans laquelle l'arme à feu est la seule source de pouvoir.
S'agissant l'étude de la Rapporteuse spéciale sur le terrorisme et les droits de l'homme, Mme Warzazi a relevé que la situation ne s'est pas améliorée et que c'est une ère d'insécurité globale, d'incertitude et d'érosion de la loi internationale qui s'est ouverte. Le Rapporteur spécial sur la discrimination dans le système de justice pénale s'est proposé d'étudier successivement les inégalités structurelles, la précarité du statut de la victime dans le processus pénal et les distinctions pouvant porter atteinte aux droits fondamentaux. S'agissant de la consolidation de la démocratie, il a été souligné que la lutte en faveur de la démocratie ne peut être dissociée de celle contre la pauvreté. Mme Warzazi a particulièrement mis l'accent sur les documents et études présentés concernant les effets de la mondialisation sur les droits de l'homme, la pauvreté extrême et les méfaits de la corruption qui doit être considéré comme un cancer au sein des sociétés et qui se nourrit notamment de la mondialisation à travers les sociétés transnationales, des programmes de privatisation imposés par le FMI et la Banque mondiale et de la corruption du secteur privé. Avec l'adoption unanime des normes sur les responsabilités des sociétés transnationales, la Sous-Commission a remédié à une grosse lacune en matière de protection des droits de l'homme de millions de personnes, a en outre fait valoir Mme Warzazi. La Sous-Commission transmet donc ces normes à la Commission en formulant l'espoir qu'elle sera en mesure de les étudier. Mme Warzazi a par ailleurs indiqué que les 30 résolutions et les 13 décisions ont été négociées en séances privées, que les rapports et études ont fait l'objet d'un dialogue interactif entre les experts qui s'est étendu pour la première fois aux ONG. En outre, deux nouvelles études ont été décidées, l'une sur l'identification des alternatives possibles permettant la mise en œuvre du droit au développement, l'autre sur les droits de l'homme et la solidarité internationale.
Le rapport de la Sous-Commission (E/CN.4/2004/2-E/CN.4/Sub.2/2003/43) contient notamment un projet de résolution et quatorze projets de décision sur lesquels la Commission est invitée à se prononcer. Il présente les travaux de la cinquante-cinquième session de la Sous-Commission, tenue à Genève du 28 juillet au 15 août 2003 et au cours de laquelle ont été adoptées trente résolutions et dix-sept décisions, toutes rassemblées dans le rapport.
Débat sur le rapport de la Sous Commission
M. SAIDU BALARABE SAMAILA (Nigéria) s'est réjoui de l'amélioration de la qualité du dialogue entre les experts de la Sous-Commission, les organisations non gouvernementales et les observateurs gouvernementaux. Il s'est par ailleurs félicité que la Sous-Commission ait abandonné ses résolutions par pays en se consacrant dorénavant à la définition de résolutions thématiques ou de recommandations, étant en cela plus proche de son mandat initial. Le représentant a ensuite exprimé l'attachement de son pays à la lutte contre le terrorisme. À cet égard, il a déclaré que les mesures de lutte contre le terrorisme, qu'elles soient de nature législative, judiciaire ou pratique, doivent être strictement appliquées à ceux que l'on peut raisonnablement désigner comme étant des auteurs d'actes terroristes, et à eux seuls. Toutes les mesures prises dans ce domaine doivent se faire dans le respect du droit international relatifs aux droits de l'homme. Comment combattre le terrorisme tout en respectant les droits de l'homme ? C'est là une question qui mérite un examen approfondi de la part de la Sous-Commission, a affirmé le représentant. Il s'est par ailleurs dit satisfait de voir la Sous-Commission se saisir de la question de la corruption et s'est félicité par ailleurs de la création d'un Forum social. Le Nigéria croit fermement que la Sous-Commission continuera de jouer un rôle essentiel dans le système des Nations Unies. Cet organe restera une voix indépendante pour les sans voix et les groupes les plus vulnérables de la société.
MME MEGHNA ABRAHAM (Organisation mondiale contre la torture, au nom également du Mouvement international d'apostolat des milieux sociaux) a déclaré que les organisations au nom desquelles elle s'exprime apportent leur plein soutien aux normes des Nations Unies en matière de respect des droits de l'homme par le monde des affaires. Ces normes, dont le rôle est de codifier les obligations existantes au regard du droit international, établissent que les États ont l'obligation de faire respecter par le milieu des affaires les normes promulguées par les organisations internationales, dans l'idée d'encourager en dernière analyse la création d'un environnement stable et responsabilisant pour les entreprises et l'économie. Le rôle de la Sous-commission est décisif à ce stade, elle doit s'efforcer de rassembler toutes les parties dans les débats autour de l'élaboration des normes des droits de l'homme.
MME STEPHANIE DUPUY (Organisation internationale pour le développement de la liberté d'enseignement - OIDEL) a souligné l'importance des notions de participation et de bonne gouvernance dans le cadre de la consolidation de la démocratie. Une bonne gouvernance implique une participation active de tous les citoyens et donc une collaboration entre l'État, la société civile et les sociétés privées. Il faut donc que l'État respecte le principe de subsidiarité et un juste équilibre dans l'intervention de l'État dans l'espace public.
MME RACHEL BRETT TAYLOR (Comité consultatif mondial de la société des amis - QUAKER) s'est félicité de la décision de la Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme de charger Mme Florizelle O'Connor de réaliser une étude sur les femmes en prison. Cette décision est d'autant plus opportune que la question des conditions de détention des femmes n'a fait jusque là l'objet que d'un intérêt limité. Le représentant a estimé que le but de l'étude devrait être d'identifier les problèmes clés auxquels sont confrontés les femmes et leurs enfants pour déterminer les moyens d'y remédier.
M. CASPER LEIHOLT (Service international pour les droits de l'homme) a déclaré que l'influence des sociétés transnationales sur la vie économique et politique des États s'est renforcée de manière considérable ces dernières années. Leur pouvoir politique dépasse souvent celui de certains petits États dans lesquelles elles opèrent. Leurs activités ont des effets profonds sur les droits économiques, sociaux et culturels de nations entières. Ceci exige une réflexion transnationale sur le rôle et les responsabilités de ces sociétés. L'initiative de la Sous-Commission pour la formulation de normes à ce sujet est une bonne chose: les normes soulignent la responsabilité des États en matière de promotion et de respect, par les sociétés transnationales, des droits de l'homme. Cette réflexion doit se poursuivre et les parties prenantes devraient être invitées à étudier la manière dont ces normes peuvent être appliquées. La Commission devrait engager un processus de suivi de ce travail, a conclu le représentant.
M. PATRICIO RICE (Fédération latino-américaine des associations des familles des détenus disparus - FEDEDAM) a salué le travail effectué par la Sous Commission, qui a notamment lancé les études sur les disparitions forcées qui permettront peut-être l'adoption d'un nouvel instrument sur cette question. Il a toutefois déploré que la Sous-Commission ne puisse plus examiner les situations spécifiques dans les pays et a demandé à la Commission de lui accorder à nouveau une pleine liberté d'enquête et d'action. Il a par ailleurs appelé la Commission à entériner les travaux de la Sous-Commission, en particulier s'agissant des normes de responsabilité pour les sociétés transnationales, comblant une grave lacune, ainsi que ses travaux sur le terrorisme et les droits de l'homme. À cet égard, il a estimé urgent que la communauté internationale se rende compte des graves dangers des actions contre le terrorisme qui violent les droits de l'homme.
M. CASPER LEIHOLT (Pax Romana) a souligné que l'exploitation des ressources naturelles par de grandes sociétés multinationales dans différents domaines est souvent allée de pair avec des déplacements de populations autochtones, sans réparation ou dédommagement adéquat. Dans certains pays africains, l'installation de multinationales s'est accompagnée de violations graves des droits de l'homme. Certaines entreprises menacent directement l'identité et la culture des pays dans lesquels elles s'installent. Aussi, le représentant s'est-il réjoui de l'adoption par la Sous-Commission de projets de normes sur la responsabilité des sociétés transnationales. Il a par ailleurs exhorté la Commission des droits de l'homme à adopter le projet de normes.
M. GIVI MIKANADZE (Assemblée permanente pour les droits de l'homme) a déclaré que son organisation appuyait les recommandations de la Sous-Commission en faveur de l'éducation. Une éducation favorable au développement humain et au développement de sociétés libres doit figurer en priorité dans les programmes de développement. Il convient de lancer une seconde décennie pour l'éducation aux droits de l'homme, a aussi dit le représentant, et de fournir aux populations des matériels éducatifs dans les langues locales.
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