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Droits de l’enfant

Haut-Commissaire : la fracture numérique laisse les jeunes de côté

29 Mars 2023

Table ronde menée par des enfants sur les droits de l’enfant et l’environnement numérique à l’occasion de la 52e session du Conseil des droits de l’homme à Genève, Suisse. © HCDH

« Nous savons que les enfants et les jeunes sont plus nombreux que jamais à être en ligne, que ce soit à la maison ou à l’école », a déclaré Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme. « Vous êtes la génération la plus connectée au monde. »

Malheureusement, cette « connexion » dépend de votre lieu de naissance. Selon M. Türk, en raison de la fracture numérique, 2,2 milliards d’enfants et de jeunes de moins de 25 ans dans le monde n’ont toujours pas accès à Internet à la maison.

« Cela signifie qu’ils sont laissés de côté, incapables d’accéder à l’éducation et aux formations, ou aux actualités et informations susceptibles de les aider à protéger leur santé, leur sécurité et leurs droits », a-t-il déclaré durant la première table ronde menée par des enfants sur les droits de l’enfant et l’environnement numérique à l’occasion de la 52e session du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies à Genève, en Suisse.

Selon l’UNICEF, l’accès à Internet varie considérablement en fonction du groupe de revenu du pays, du fossé entre les zones rurales et urbaines et de la richesse des ménages. Il existe également un écart important entre les pays à revenu élevé et les pays à faible revenu, avec une couverture de 87 % contre 6 %.

Mariana, une jeune fille d’ascendance africaine âgée de 12 ans et qui milite en faveur des droits humains, a participé à la table ronde. Elle vit avec sa famille dans la région rurale de Cauca, en Colombie, et a peur que les enfants de son village ne soient laissés de côté. Pour éviter cela, elle estime que les pays doivent non seulement s’intéresser aux enfants qui vivent dans les grandes villes, mais aussi soutenir les zones rurales où les ressources sont limitées en fournissant aux enfants des outils technologiques et un accès à Internet. Selon elle, il existe également des lacunes concernant l’éducation numérique, afin de protéger les enfants de la pornographie en ligne, de l’intimidation et du harcèlement sexuel.

« Je pense aussi qu’il faut élaborer des politiques pour tous les enfants qui soient utiles, inclusives et reconnaissent notre diversité », a-t-elle expliqué. « Car dans les campagnes, il y a des filles et des garçons qui comme moi ont des rêves et l’envie d’avancer, on a besoin d’un coup de pouce ! »

Youth advocates, left to right, Kidus from Ethiopia and Nidhi from India participated in a panel on the rights of the child and the digital space in Geneva, Switzerland. Photo Credit: ©OHCHR

De gauche à droite, Kidus (Éthiopie) et Nidhi (Inde), qui ont participé à la table ronde sur les droits de l’enfant et l’environnement numérique à Genève, en Suisse. © HCDH

La protection des enfants qui utilisent Internet est une priorité absolue pour Nidhi, une jeune militante et créatrice de podcasts de 14 ans originaire d’Inde et qui vit à présent en Malaisie. Selon Nidhi, un utilisateur en ligne sur trois dans le monde est un enfant, ce qui rend la protection des données aussi importante pour les enfants que pour les adultes.

« La plupart du temps, ils ne savent même pas comment utiliser sans risque les outils en ligne ou comment protéger leurs informations personnelles, ce qui les rend extrêmement vulnérables », a-t-elle expliqué.

On estime que 72 millions de données personnelles seront collectées sur chaque enfant dans le monde avant son treizième anniversaire. Cela est inquiétant.

Nidhi, jeune militante

Selon Nidhi, les pratiques consistant à collecter plus de données que nécessaire sont contraires à l’éthique et constituent une violation de l’espace en ligne des enfants. Cela est d’autant plus préoccupant que la plupart des enfants ne peuvent pas comprendre les conséquences à long terme de la divulgation de leurs informations personnelles, a-t-elle ajouté.

À l’âge de neuf ans, Nidhi se souvient de la peur qu’elle a eue en découvrant un jeu sur Internet.

« Cette image m’a profondément marquée et en en parlant avec mes amis, j’ai réalisé que beaucoup d’entre eux avaient vécu la même chose, et que cette expérience nous avait terrorisés pendant des années », a-t-elle déclaré. « Cela montre comment les enfants peuvent accidentellement être exposés à des contenus inappropriés. »

Bien que ce moment ait été effrayant pour elle, elle a la chance de bénéficier du soutien de sa famille, mais elle a conscience que de nombreux enfants sont livrés à eux-mêmes pour naviguer dans le monde numérique. L’année dernière, Nidhi s’est rendue dans une communauté de réfugiés somaliens en Malaisie pour faire du bénévolat dans leur école locale.

« J’ai réalisé que beaucoup d’enfants n’avaient pas accès à Internet ou à des appareils numériques, et qu’ils n’avaient aucune connaissance de la sécurité en ligne et des moyens de se protéger dans l’environnement numérique », a-t-elle déclaré.

Kidus, 17 ans, défenseur des droits de l’enfant en Éthiopie, a déclaré que si la technologie numérique offre des possibilités aux enfants, elle comporte également d’importants risques pour leur bien-être, notamment l’exploitation sexuelle, la prostitution, le harcèlement, la traite des êtres humains, l’exploitation par le travail, la violence ethnique ou raciale, y compris la discrimination, l’intimidation, les discours de haine et la cyberagression.

« Un environnement numérique sûr est indispensable pour élever des enfants en toute sécurité », a-t-il déclaré. « De cette manière, nous pourrons garantir à la génération future un bien-être global, une plus grande productivité et la paix. »

M. Türk a appelé les gouvernements et les entreprises à combler le fossé numérique, qui aggrave encore les discriminations et les inégalités.

« Nous devons nous efforcer de créer des environnements en ligne qui permettent aux enfants d’interagir et de s’épanouir, à l’abri des comportements en ligne néfastes et addictifs ou de la comparaison incessante avec leurs pairs », a-t-il énoncé.

Il a également souligné l’importance de la participation des enfants en ligne et hors ligne.

« Vous ne pouvez pas être réduits à une “base d’utilisateurs” privée de tout rôle humain », a-t-il indiqué.

Il a rappelé que les droits des enfants doivent être protégés, y compris le droit d’être entendu.

« Je vous demande aujourd’hui d’imaginer ce qui se passerait si nous construisions un monde en ligne dans l’intérêt supérieur des enfants, où ceux-ci pourraient profiter en toute sécurité de toutes les possibilités que la technologie peut leur offrir. »