Enquête sur les violations des droits de l'homme et les abus dont sont victimes les Rohingyas
26 septembre 2017
Plus de 400 000 Rohingyas ont fui l'État de Rakhine au Myanmar au cours des dernières semaines, affluant en masse vers le Bangladesh voisin. Des rapports indiquent qu'ils ont été chassés de leurs villages par des forces militaires qui les ont attaqués dans leurs maisons et ont incendié de vastes étendues de territoire. Des images satellites montrent que près de 200 villages rohingyas ont été détruits et vidés.
Une mission internationale d'établissement des faits, mise en place par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, a envoyé une équipe au Bangladesh, où des centaines de milliers de rohingyas sont arrivés au cours du dernier mois et ont trouvé refuge dans des camps improvisés. Une résolution du Conseil des droits de l'homme de mars 2017 a demandé à la mission internationale d'établir les faits et les circonstances relatifs aux violations alléguées des droits de l'homme et des atteintes à ces droits au Myanmar et plus particulièrement dans l'État de Rakhine.
" Il est important pour nous de voir de nos propres yeux les lieux de ces violations et abus allégués et de parler directement avec les personnes affectées et avec les autorités ", a déclaré Marzuki Darusman, président de la mission d'établissement des faits, dans son récent compte rendu au Conseil des droits de l'homme durant sa 36è session à Genève.
Insistant sur le fait que la mission d'établissement des faits a pour mandat d'examiner la situation des droits de l'homme dans tout le Myanmar, M. Darusman a ajouté: " Je saisis cette occasion pour réitérer notre demande de coopération au Gouvernement du Myanmar et qu’il nous accorde avant tout l'accès au pays. "
Des rapports sur les violations des droits de l'homme lors de récentes attaques contre les Rohingyas dénoncent le meurtre de civils, la torture, le viol et d’autres formes de violences sexuelles ainsi que l'incendie et la destruction de villages entiers. Les autorités du Myanmar affirment que l'opération militaire répondait aux attaques de trente postes de police par des militants Rohingyas. Selon les estimations de l'ONU, l'opération a poussé plus d'un tiers des 1,1 millions de Rohingyas vivant au Myanmar à traverser la frontière avec le Bangladesh, rejoignant ainsi des dizaines de milliers de Rohingyas déjà sur place après avoir fui des épisodes de violence antérieurs.
M. Darusman a exhorté les autorités du Myanmar à autoriser l'accès immédiat aux agences d'aide humanitaires.
" Laissant de côté nos conclusions, dont je ne voudrais pas devancer le contenu, il est évident que nous sommes face à une grave crise humanitaire qui exige une attention immédiate ", a-t-il déclaré au Conseil.
Lors de la 36è session du Conseil des droits de l’homme, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme Zeid Ra’ad Al Hussein a déclaré aux États membres, " Myanmar ayant refusé l’accès aux enquêteurs des droits de l'homme, nous ne pouvons pas évaluer pleinement la situation actuelle. Toutefois, elle semble être un exemple classique de nettoyage ethnique. "
La Commission consultative sur l'État Rakhine, présidée par l'ancien Secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, a noté dans un rapport publié en août 2017 que les gouvernements qui se sont succédés au Myanmar depuis 1962 ont progressivement privé la population Rohingya de leurs droits politiques et civils, y compris de leurs droits à la citoyenneté, rendant ainsi un grand nombre d'entre eux apatrides. Bien que les Rohingyas vivent depuis des générations dans l'État de Rakhine sur la côte ouest du Myanmar, cette minorité majoritairement musulmane n'est pas officiellement reconnue comme l'une des 135 ethnies du pays. Au cours des dernières décennies, les violences et les persécutions ont conduit des centaines de milliers de Rohingyas vers les pays voisins.
" J'appelle le gouvernement à mettre fin à son opération militaire cruelle, à enquêter sur toutes les violations perpétrées et à inverser les discriminations sévères et généralisées à l’encontre de la population Rohingya ", a déclaré Zeid.
M. Darusman a exhorté la communauté internationale à soutenir son appel aux autorités du Myanmar afin qu’elles accordent à l'équipe de la mission d'enquête l'accès au pays.
" Les centaines de milliers de réfugiés, les personnes déplacées à l'intérieur du pays, les communautés affectées et toutes les victimes des violations présumées des droits de l'homme et des atteintes à ces droits, méritent que l'on rapporte fidèlement ce qui s'est passé et qui en sont les responsables ", a déclaré M. Darusman au Conseil des droits de l’homme.
26 septembre 2016