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Terrorisme

En proie à une peur perpétuelle

30 Juillet 2015

L’État islamique d’Iraq et du Levant (Daech) s’est livré à des violations systématiques et généralisées des droits de l’homme en République arabe syrienne et en Iraq, selon un rapport présenté par le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, Ben Emmerson. Ces violations, de la plus extrême gravité, pourraient être assimilées à des crimes de génocide, à des crimes de guerre, à des crimes contre l’humanité et à des attaques généralisées contre la population civile.

« La brutalité et l’ampleur des violences visent, semble-t-il, à renforcer le monopole absolu du groupe sur la vie sociale et politique et à contraindre les populations vivant sous son joug à se conformer à sa loi. Par conséquent, les civils qui restent dans les régions contrôlées par Daech vivent dans une peur perpétuelle, presque inimaginable », indique M. Emmerson dans son rapport, présenté à l’occasion de la 29e session du Conseil des droits de l’homme à Genève (Suisse).

Daech a pris des groupes religieux et ethniques pour cibles en Iraq et en République arabe syrienne et commis des actes de violence contre des civils en raison de leurs liens avec ces groupes. Ces communautés religieuses ou ethniques ont été contraintes de s’assimiler, de prendre la fuite ou d’affronter la mort. En Iraq, selon différents témoignages, des violences ont été perpétrées à l’encontre des Yézidis, les hommes étant séparés des femmes et des enfants, puis emmenés dans des fossés et exécutés sauvagement.

Les femmes et les enfants sont, eux aussi, particulièrement exposés à la violence et à la discrimination. Les femmes sont menacées par la violence sexuelle et sexiste, notamment sous forme d’esclavage sexuel, d’asservissement, d’exécutions et de viols. Elles sont confinées dans leurs maisons et obligées de se conformer à un code vestimentaire strict.

Des enfants de six ans à peine ont été violés, torturés et enlevés. D’après le rapport, des enfants qui n’avaient pas plus de huit ans ont été formés et affectés à des fonctions militaires. « On ferait regarder aux enfants des vidéos de décapitations et d’exécutions en masse pour les rendre insensibles aux formes de violence employées par Daech. »

Les moyens militaires de Daech continuent d’augmenter, avec pour corollaire la propagation de la terreur chez les civils. On estime que plus de 20 000 combattants étrangers, originaires d’environ 80 pays, ont rejoint les rangs de groupes armés non-étatiques.

Le rapport traite également de l’intervention militaire de la coalition internationale d’États menée par les États-Unis contre Daech et de son impact sur les civils. Les civils qui vivent sur le territoire contrôlé par Daech résident principalement dans des zones urbaines, où ont eu lieu bon nombre des frappes aériennes de la coalition. Il semble également que Daech place, à des fins stratégiques, ses combattants au sein de la population civile ou dans des zones peuplées de civils, ou encore utilise les hôpitaux ou les écoles comme bases militaires, afin de faire des victimes civiles en cas d’attaque par la coalition.

Le rapport attire l’attention sur le manque de transparence des opérations de la coalition en Iraq et en République arabe syrienne. « Chaque nation participant à la guerre aérienne opère suivant des règles d’engagement et de conduite spécifiques, et les degrés de transparence diffèrent considérablement », observe M. Emmerson. Comme les frappes aériennes sont lancées par différents acteurs, il est difficile de savoir quels sont les États responsables d’un événement et la date à laquelle les opérations auront lieu. Le Rapporteur spécial rappelle que les États de la coalition ont l’obligation, en vertu du droit international, de veiller à ce que leurs opérations militaires contre Daech soient transparentes et les responsabilités clairement identifiées, et de faire en sorte que tout décès de civil résultant de ces opérations fasse l’objet d’une enquête rapide, indépendante et impartiale.

Lors d’une réunion-débat consacrée aux effets du terrorisme sur la jouissance des droits de l’homme et des libertés fondamentales, organisée en juillet, M. Emmerson a souligné que son rapport mettait en évidence l’incapacité du Conseil de sécurité à prendre sans délai les mesures qui s’imposaient pour protéger les civils dans les zones touchées. Il a également rappelé que la coalition internationale d’États engagés dans des actions militaires contre Daech devait veiller à ce que des mesures soient prises pour protéger les civils et éviter de faire davantage de victimes.

Il faut de toute urgence répondre aux besoins des victimes du terrorisme et garantir le respect de leurs droits, selon la Haut-Commissaire adjointe aux droits de l’homme, Flavia Pansieri. « Les droits des victimes doivent être reconnus, leur détresse et leur dignité respectées, tout comme leur droit à la vérité, à la justice et à des réparations, et leur droit de vivre à l’abri de la peur et avec le soutien dont ils ont besoin », a déclaré Mme Pansieri.

M. Emmerson a ajouté que les États ont l’obligation de prendre immédiatement des mesures pour protéger les civils des actes de terrorisme et de violence et que ces groupes armés non étatiques doivent répondre de leurs crimes et être poursuivis en conséquence.

Selon M. Emmerson, Daech est tenu, au titre du droit international, de respecter certaines obligations fondamentales en matière de droits de l’homme, comme le droit à la vie, l’interdiction absolue de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants, l’interdiction de l’esclavage et l’interdiction des disparitions forcées, ainsi que le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion.

30 juillet 2015