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Déclarations Procédures spéciales

« L’ordre international s’effondre à Gaza » : les experts de l’ONU évoquent l’année écoulée, marquée par les attaques génocidaires contre les Palestiniens

11 octobre 2024

GENÈVE – Un an après le début de l’offensive génocidaire d’Israël à Gaza, un groupe d’experts indépendants dans le domaine des droits humains a publié la déclaration suivante.

« Le monde est confronté à la crise la plus profonde que l’on ait connue depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les atrocités dont nous avons été témoins pendant la Seconde Guerre mondiale ont fait naître une volonté collective de dire « plus jamais ça » et de créer l’Organisation des Nations Unies dans ce but. Cependant, un an après l’attaque du 7 octobre par le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens contre Israël, le monde assiste à une escalade brutale de la violence, qui se traduit par des attaques génocidaires, un nettoyage ethnique et des punitions collectives visant les Palestiniens, ce qui risque d’affaiblir profondément le système multilatéral international.

L’assaut militaire israélien qui a commencé immédiatement après l’attaque du 7 octobre a été accompagné de déclarations génocidaires de la part des dirigeants israéliens. Le 9 octobre, le Ministre israélien de la défense, M. Gallant, a ordonné un « siège total, sans électricité, sans nourriture, sans eau, sans carburant » et une attaque de grande envergure sur la plus grande prison à ciel ouvert de notre époque. Le 28 octobre, après plusieurs semaines de frappes aériennes sur Gaza, au moment où l’invasion terrestre commençait dans un contexte de discours anti-palestiniens violents de la part de responsables israéliens, de personnalités publiques et d’autres, le Premier Ministre Netanyahu a ordonné : « Souvenez-vous de ce que te fit Amalek, nous en avons reçu l’ordre. Et nous nous en souvenons. » Ce faisant, il a invoqué la référence biblique : « Va maintenant, frappe Amalek, et dévouez par interdit tout ce qui lui appartient ; tu ne l’épargneras point, et tu feras mourir hommes et femmes, enfants et nourrissons, bœufs et brebis, chameaux et ânes. »

Un an plus tard, la promesse des dirigeants israéliens de détruire Gaza a été tenue. La bande de Gaza est aujourd’hui un champ de ruines et de restes humains, où les survivants, des hommes et des femmes, des enfants et des personnes âgées, s’accrochent tant bien que mal à la vie dans la misère et la maladie. Les bombes israéliennes n’ont épargné personne, que ce soient les journalistes, les étudiants, les universitaires, les médecins, les infirmières, les nourrissons, les femmes enceintes, les personnes handicapées, les fonctionnaires, les personnes à la recherche de nourriture et d’un abri, ou encore les travailleurs humanitaires, y compris le personnel des Nations Unies. Des familles entières ont été exterminées et des générations effacées, des millions de vies ont été déchirées.

Presque tous les survivants sont déplacés, coincés dans des parties de plus en plus réduites de ce minuscule territoire, entassés dans des camps et des abris surpeuplés, n’ayant nulle part où aller. Les bombardements incessants ont transformé les zones humanitaires en champs de bataille.

Le renforcement du siège, les restrictions imposées à l’aide et le ciblage incessant des habitations et des infrastructures civiles essentielles ont provoqué une famine sans précédent. En raison de la dévastation des infrastructures de santé, des maladies évitables sont devenues incurables et la propagation des maladies et des épidémies s’est accélérée, tandis que la destruction massive des structures éducatives, culturelles et patrimoniales et du territoire met profondément en péril la culture, l’identité nationale et l’existence sur la carte de la Palestine.

Pendant ce temps, alors que le monde observe la population de Gaza vivre dans la terreur constante d’un anéantissement imminent, diffusé et partagé sur les médias sociaux, un comportement délibéré menaçant de provoquer l’extinction des Palestiniens par des déplacements massifs, la mort, la destruction et l’annexion de terres émerge en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est.

Rien ne saurait justifier ces actes. Depuis un an, nous implorons les États d’intervenir, conformément à leurs obligations morales et juridiques de prévenir ces atrocités et de préserver le système juridique international, les droits humains et l’humanité. Nos appels sont restés pour la plupart lettre morte, tout comme ceux de millions de personnes dans le monde qui ont utilisé leurs plateformes pour plaider en faveur de la fin de la violence, et qui continuent de faire face à des tactiques répressives visant à les faire taire et à les punir, et ce dans plusieurs pays.

L’ordre juridique international s’effondre face à ces atrocités. Les requêtes aux fins de la délivrance de mandats d’arrêt présentées par le Procureur de la Cour pénale internationale, restent en suspens dans l’attente d’une décision de la Cour, alors que la campagne génocidaire fait rage. Les mesures conservatoires ordonnées par la Cour internationale de Justice pour prévenir les actes de génocide et conserver les preuves des crimes commis à Gaza restent sans suite. L’avis consultatif, qui déclare l’occupation d’Israël illégale et constitutive de ségrégation raciale et d’apartheid, et qui a été suivi d’une résolution de l’Assemblée générale largement soutenue, n’a toujours pas été mis en œuvre. Défiant le sentiment général de la communauté internationale, Israël continue d’agir avec un mépris flagrant pour l’ordre international.

En raison de l’incapacité de la communauté internationale à garantir un cessez-le-feu et à établir la responsabilité de tous les auteurs ou complices de crimes odieux, des actes d’une brutalité sans précédent non seulement se poursuivent, mais s’étendent aussi à l’ensemble de la région, mettant le Liban à feu et à sang.

Cette spirale de destruction doit cesser. La communauté internationale doit agir de toute urgence pour modifier la trajectoire de la violence, si nous voulons éviter une catastrophe à grande échelle aux conséquences impensables, surtout pour les enfants.

Nous appelons tous les dirigeants à passer outre les discours déshumanisants et polarisants et à œuvrer activement à l’arrêt immédiat de toutes les hostilités et de tous les crimes en Palestine/Israël et dans la région, à la libération immédiate de toutes les personnes détenues arbitrairement, qu’il s’agisse d’Israéliens détenus à Gaza ou de Palestiniens détenus par Israël.

Nous appelons à la mise en place immédiate d’une aide humanitaire vitale à toutes les personnes touchées et nous demandons que son accès soit garanti par la communauté internationale.

Nous rendons hommage à toutes les victimes, récentes et passées. Nos sociétés doivent permettre de faire face à l’immense poids de la douleur et des traumatismes collectifs, au sein des populations les plus profondément touchées par cette situation, et dans les communautés du monde entier qui ont témoigné et agi. Nous devons essayer d’avancer ensemble. Nous lançons un appel sincère au peuple israélien, reconnaissant son profond traumatisme et sa douleur, et sollicitant son soutien pour favoriser le changement et travailler ensemble afin de mettre un terme à la violence et aux souffrances du peuple palestinien.

Nous exigeons de tous, acteurs étatiques et individus, qu’ils accordent la priorité au respect du droit international et des droits humains, sans discrimination ni politique de deux poids, deux mesures.

Le monde doit rapidement recentrer sa conscience morale en faveur de la justice et de la liberté pour tous et s’engager à nouveau pour la paix internationale, qui ne sera jamais atteinte tant que chacun, y compris les Palestiniens et les Israéliens, n’aura pas la possibilité de vivre dans la dignité et la liberté sur un pied d’égalité. »

Francesca Albanese, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 ; Pedro Arrojo-Agudo, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement ; Balakrishnan Rajagopal, Rapporteur spécial sur le droit à un logement convenable ; George Katrougalos, Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable ; Tlaleng Mofokeng, Rapporteuse spéciale sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible ; Alexandra Xanthaki, Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels ; Michael Fakhri, Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation ; Irene Khan, Rapporteuse spéciale sur le droit à la liberté d’opinion et d’expression ; Nicolas Levrat, Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités ; Tomoya Obokata, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences ; Gina Romero, Rapporteuse spéciale sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association ; Paula Gaviria Betancur, Rapporteuse spéciale sur les droits humains des personnes déplacées dans leur propre pays ; Reem Alsalem, Rapporteuse spéciale sur la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes et les filles, ses causes et ses conséquences ; Heba Hagrass, Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées ; Ashwini K.P. Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée ; Astrid Puentes Riaño, Rapporteuse spéciale sur le droit humain à un environnement propre, sain et durable ; Farida Shaheed, Rapporteuse spéciale sur le droit à l’éducation ; Cecilia Bailliet, Experte indépendante sur les droits de l’homme et la solidarité internationale ; Siobhán Mullally, Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants ; Laura Nyirinkindi (Présidente), Claudia Flores (Vice-Présidente), Dorothy Estrada Tanck, Ivana Krstić, et Haina Lu, Groupe de travail sur la discrimination à l’égard des femmes et des filles ; Jovana Jezdimirovic Ranito (Présidente-Rapporteuse), Ravindran Daniel, Michelle Small, Joana de Deus Pereira, Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires ; Geneviève Savigny (Présidente-Rapporteuse), Carlos Duarte, Uche Ewelukwa, Shalmali Guttal, Davit Hakobyan, Groupe de travail sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales et Barbara G. Reynolds (Présidente), Bina D’Costa, Catherine Namakula, Dominique Day, Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine

Les Rapporteurs spéciaux relèvent de ce qu’on appelle les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. Le terme « procédures spéciales », qui désigne le plus grand corps d’experts indépendants au sein du système onusien des droits de l’homme, est généralement attribué aux mécanismes indépendants d’enquête et de supervision mis en place par le Conseil des droits de l’homme afin de traiter de la situation spécifique d’un pays ou de questions thématiques dans toutes les régions du monde. Les experts des procédures spéciales travaillent bénévolement ; ils n’appartiennent pas au personnel de l’ONU et ne perçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou de toute organisation et exercent leurs fonctions à titre individuel.

Pour plus d’informations, veuillez contacter : hrc-sr-opt@un.org

Pour toute requête des médias relative à d’autres experts indépendants des Nations Unies, veuillez contacter Dharisha Indraguptha (dharisha.indraguptha@un.org) ou John Newland (john.newland@un.org).

Suivez les actualités des experts indépendants des droits de l’homme des Nations Unies sur Twitter : @UN_SPExperts.

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