Communiqués de presse Haut-Commissariat aux droits de l’homme
Haïti : un rapport de l'ONU indique que la violence des gangs se propage et appelle au déploiement rapide d'une mission multinationale de sécurité
28 novembre 2023
GENEVE/PORT-AU-PRINCE (28 novembre 2023) - Un nouveau rapport de l'ONU publié aujourd'hui détaille une nouvelle et choquante augmentation de la violence des gangs en Haïti alors que les gangs criminels forgent des alliances et s'étendent dans des zones rurales auparavant considérées comme sûres – meurtres, viols, enlèvements et destruction de biens, entre autres abus.
Le rapport, publié par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme et le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), appelle au déploiement urgent de la mission multinationale de soutien à la sécurité autorisée par le Conseil de sécurité de l'ONU en octobre, conformément aux normes et standards internationaux en matière de droits humains. Des efforts accrus devront être déployés pour renforcer les institutions de l’État de droit en Haïti, en particulier la police, le système judiciaire et le système pénitentiaire, note le rapport.
Le rapport se concentre sur le district du Bas-Artibonite, situé au centre d'Haïti, à environ 100 kilomètres de la capitale Port-au-Prince, qui a connu une augmentation significative de la violence des gangs au cours des deux dernières années. Entre janvier 2022 et octobre 2023, au moins 1 694 personnes ont été tuées, blessées ou kidnappées dans le Bas-Artibonite.
Les enlèvements contre rançon par des groupes criminels sont devenus une crainte constante pour les usagers des transports publics du Bas-Artibonite, indique le rapport. L'histoire de Darleine, une femme de 22 ans, n'est qu'une parmi tant d'autres : elle a été traînée hors d'un bus en mars de cette année par des membres d'un gang, qui l'ont retenue captive pendant plus de deux semaines et l'ont battue et violée à plusieurs reprises. Quelques semaines après sa libération, elle s'est suicidée.
Le rapport documente les groupes criminels qui saccagent les villages « rivaux », exécutant la population locale et recourant à la violence sexuelle contre les femmes et même les très jeunes enfants. Les groupes pillent également les propriétés, les récoltes et le bétail des agriculteurs et détruisent les canaux d’irrigation, contribuant ainsi au déplacement de plus de 22 000 personnes de leurs villages ce qui réduit considérablement la superficie des terres cultivées, augmentant ainsi l’insécurité alimentaire. En septembre 2023, plus de 45 pour cent de la population du Bas-Artibonite était en situation d’insécurité alimentaire aiguë. La violence des gangs a également empêché de nombreuses familles d’agriculteurs de rembourser leurs dettes ou d’accéder aux services de base.
Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Volker Türk, a averti qu'à travers Haïti, au moins 3 960 personnes ont été tuées, 1 432 blessées et 2 951 kidnappées dans les violences liées aux gangs cette année seulement.
« La situation en Haïti est cataclysmique. Nous continuons de recevoir des informations faisant état de meurtres, de violences sexuelles, de déplacements et d’autres violences – notamment dans les hôpitaux », a déclaré Türk.
« Face à la terrible violence contre la population qui s'étend – à l'intérieur et à l'extérieur de Port-au-Prince – et à l'incapacité de la police à les arrêter, la mission multinationale de soutien à la sécurité, indispensable, doit être déployée en Haïti dès que possible », a déclaré le Haut-Commissaire aux droits de l'homme Volker Türk.
Le Haut-Commissaire a souligné que la mission de soutien doit inclure des mécanismes de contrôle interne et d'autres garanties pour garantir sa conformité avec les normes et standards internationaux en matière de droits humains.
Compte tenu de l'aggravation de la violence, et suite au rapport d'octobre 2023 du Groupe d'experts de l'ONU sur Haïti, le présent rapport appelle également le Conseil de sécurité à mettre à jour la liste des individus et entités soumis aux sanctions de l'ONU pour avoir soutenu, préparé, ordonné ou commis des actes contraires au droit international des droits humains.
« Il faut continuer de mettre l'accent sur la mise en œuvre de l'embargo sur les armes et les sanctions visant ceux qui sont à l'origine de cette situation intenable », a déclaré le Haut-Commissaire.
« J'appelle également les autorités haïtiennes à remplir leurs obligations internationales en matière de droits humains mais aussi à mettre en place des mesures robustes pour renforcer les institutions du pays et améliorer la gouvernance, notamment en luttant contre la corruption et l'impunité ».
Lien au rapport.
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