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Myanmar : des experts de l'ONU condamnent les persécutions persistantes des Rohingyas dans l'État de Rakhine
Atteintes aux droits de l’homme au Myanmar
26 septembre 2017
GENEVE (26 septembre 2017) – Sept experts des Nations Unies* se sont unis pour appeler le gouvernement du Myanmar à cesser toute violence contre la communauté musulmane minoritaire Rohingya et mettre fin aux persécutions constantes et aux graves violations des droits de l'homme que le Haut-Commissaire aux droits de l'homme a décrit comme un exemple classique manifeste de nettoyage ethnique.
L'appel a été lancé un mois après des attaques dans l'État de Rakhine contre trente postes de police et le quartier général du régiment dans le village de Taungala, qui déclenchèrent des opérations antiterroristes sans discernement.
" Il existe des allégations crédibles de graves violations des droits de l'homme et d'abus commis contre les Rohingyas – exécutions sommaires, recours excessif à la force, torture et mauvais traitements, violence sexuelle et sexiste et déplacements forcés – ainsi que d’incendies et de destruction de plus de 200 villages rohingyas et de dizaines de milliers de maisons ", ont déclaré les experts.
" Nous comprenons que la Conseillère d'Etat, Mme Aung San Suu Kyi, lors de son discours diplomatique du 19 septembre, ait encouragé la communauté internationale et le gouvernement du Myanmar à examiner les raisons possibles de l'exode actuel du Myanmar au Bangladesh ", ont-ils déclaré, remarquant que 430 000 personnes se seraient enfuies au Bangladesh au cours des dernières semaines.
Les experts ont souligné que " Personne, et certainement pas des centaines de milliers de personnes, ne choisit de quitter son foyer et ses terres ancestrales, quelle que soit sa situation de pauvreté, et de fuir vers une terre inconnue pour vivre sous des bâches et dans des circonstances très difficiles, à moins que sa vie ne soit en danger. Malgré les violences apparemment perpétrées par l'Armée du salut des Rohingyas de l'Arakan (ARSA), l'ensemble de la population Rohingya ne devrait pas en payer le prix ".
" Nous appelons Aung San Suu Kyi à rencontrer personnellement des Rohingyas dans l'État de Rakhine et dans la ville de Cox's Bazar afin de parler avec ceux qui ont fuit et avec ceux qui sont restés, puisqu'elle a déclaré que le Gouvernement du Myanmar en avait exprimé le souhait. "
Les experts ont en outre remarqué que même la Commission consultative sur l'État Rakhine, nommée par le gouvernement, et présidée par Kofi Annan, ancien Secrétaire-général des Nations Unies, avait conclu dans son rapport final que " l'apatridie prolongée et de profondes discriminations ont rendu la communauté musulmane [rohingya] particulièrement vulnérable aux violations des droits de l'homme ". Il a également constaté que les gouvernements qui se sont succédés depuis l'indépendance, en particulier après le coup d'état militaire de 1962, avaient " adopté des mesures juridiques et administratives qui ont progressivement sapé les droits politiques et civils des communautés musulmanes de l'État de Rakhine ".
" Bien qu'il soit louable que le gouvernement semble vouloir appliquer les recommandations de la Commission, y compris celles relatives aux droits de citoyenneté des Rohingyas, ce geste sera essentiellement vide de sens maintenant que les forces militaires et de sécurité du Myanmar ont expulsé près de la moitié de la population Rohingya du nord de l'État de Rakhine et que le gouvernement a indiqué qu'ils ne pourraient y retourner qu’avec une preuve de leur nationalité. En outre, en raison des incendies massifs des villages Rohingyas, nombreux sont ceux qui n'ont nulle part où aller, " ont déclaré les experts.
" Nous sommes également alarmés par la complaisance apparente du gouvernement vis-à-vis de l'incitation à la haine et son cautionnement de l’intimidation et des attaques à l’encontre de familles Rohingyas par d'autres groupes ethniques et religieux. Toutes les violences visant la population en général, y compris les personnes déplacées, doivent cesser immédiatement ", ont souligné les experts.
" Le Myanmar devrait fournir un accès humanitaire ininterrompu aux organisations internationales pour qu’elles puissent porter assistance aux dizaines, voire centaines, de milliers de personnes déplacées dans l'Etat de Rakhine. Il devrait également assurer un accès total et sans entrave aux observateurs des droits de l'homme, y compris à la Mission d'établissement des faits du Conseil des droits de l'homme, en vue d'une évaluation indépendante et impartiale de la situation sur le terrain.
" Le gouvernement du Myanmar devrait coopérer avec toutes les organisations d'aide internationales, plutôt que les accuser de soutenir le terrorisme alors qu’elles cherchent à s'acquitter de leurs responsabilités de faire parvenir une aide et une assistance humanitaires aux populations qui en ont besoin ", ont-ils ajouté.
" Les États membres de l'ONU doivent aller au-delà des déclarations d’intentions et commencer à prendre des mesures concrètes pour empêcher les forces armées et de sécurité d'accomplir leurs soi-disant `travail inachevé’ consistant à éliminer la minorité rohingya de l'État de Rakhine ", ont conclu les experts.
FIN
(*) Les experts: Mme Yanghee Lee, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Myanmar;Mme Agnès Callamard, Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires; M. Fernand de Varennes,Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités; Mme Leilani Farha, Rapporteuse spéciale sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant ainsi que sur le droit à la non-discrimination à cet égard; Mme Cecilia Jimenez-Damary, Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes déplacées dans leur propre pays ; M. Mutuma Ruteere, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, M. Ahmed Shaheed Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction
Les Rapporteurs spéciaux font partie de ce qu’on appelle les ‘procédures spéciales’ du Conseil des droits de l’homme. Le terme procédures spéciales, qui désigne le plus grand corps d'experts indépendants au sein du système onusien des droits de l'homme, est généralement attribué aux mécanismes indépendants d'enquête et de supervision mis en place par le Conseil des droits de l'homme. Les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales sont des experts des droits de l'homme indépendants nommés par le Conseil des droits de l'homme, qui s'occupent de la situation particulière d'un pays ou de questions thématiques dans toutes les régions du monde. Ils n'appartiennent pas au personnel de l'ONU et sont indépendants de tout gouvernement ou de toute organisation. Ils siègent à titre personnel et ne perçoivent pas de salaire pour leur travail.
Nations Unies Droits de l'homme, fiche pays: Myanmar
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