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Communiqués de presse Conseil des droits de l’homme

Le Conseil des droits de l'homme tient un débat de haut niveau à l'occasion de son dixième anniversaire

Le CDH tient un débat de haut niveau à l'occasion de son 10ème anniversaire

13 juin 2016

APRES MIDI 

GENEVE (13 juin 2016) - Le Conseil des droits de l'homme a tenu, cet après-midi, un débat de haut niveau pour célébrer le dixième anniversaire de sa création.  Il a, dans ce cadre, entendu les neuf précédents présidents du Conseil ainsi que plusieurs hauts-représentants des Nations Unies et de la société civile.

Dans une déclaration liminaire, M. Jan Eliasson, Vice-Secrétaire général des Nations Unies, a rappelé qu'à la première session du Conseil, il y a dix ans, la communauté internationale entrait en terrain inconnu après des mois d'intenses et difficiles négociations.  Les espoirs et les attentes étaient élevés; les incertitudes et les réserves, également.  Dix ans plus tard, beaucoup a été réalisé, s'est réjoui M. Eliasson, citant notamment la création de l'Examen périodique universel (EPU), qui donne, pour la première fois, un instantané de l'état mondial des droits de l'homme.  Il s'est également félicité du rôle crucial joué par les procédures spéciales, précisant que le nombre s'élève aujourd'hui à 55, soit vingt de plus qu'à la création du Conseil.  Dans l'époque troublée actuelle, le Vice-Secrétaire général a préconisé de profiter de tous les outils à disposition et notamment de mobiliser la volonté de prévenir plutôt que de réagir face aux violations des droits de l'homme. 

S'exprimant également en ouverture de ce débat, le Haut-Commissaire aux droits de l'homme, M. Zeid Ra'ad Al Hussein, a observé que le Conseil avait mis en place des processus inédits pour veiller au respect des droits de l'homme, en y incluant la société civile.  Cependant, face aux reculs dans le respect des droits de l'homme, le Conseil doit faire davantage pour la pleine mise en œuvre de ces droits, en particulier dans le cadre du Programme de développement durable à l'horizon 2030.  Cette responsabilité incombe aussi aux États, a souligné le Haut-Commissaire, précisant à ce propos que le Haut-Commissariat allait publier un recueil de «bonnes pratiques» en matière de respect des droits de l'homme.  Suite à ces déclarations liminaires, une vidéo présentant certaines des réalisations du Conseil dans plusieurs régions du monde a été projetée.

Onze panélistes ont ensuite pris la parole dans le cadre de ce débat, animé par Mme Kate Gilmore, Haut-Commissaire adjointe des Nations Unies aux droits de l'homme.  Parmi les panélistes figuraient les neuf derniers Présidents du Conseil*, ainsi que l'ancienne Rapporteuse spéciale sur le droit à l'eau potable et à l'assainissement, Mme Katarina de Albuquerque et une représentante de Human Rights Watch

Les anciens Présidents du Conseil ont répondu aux questions de la modératrice concernant les succès enregistrés et les défis rencontrés au cours de leurs mandats.  Ils ont évoqué à ce propos la création de l'examen périodique universel – l'une des réussites majeures du Conseil – ainsi que le rôle fondamental joué par les procédures spéciales.  Ils ont également reconnu que la création du Conseil avait été un défi, notamment pour rompre avec les pratiques de politisation qui avaient miné le travail de la Commission.  L'ancienne Rapporteuse spéciale, Mme Catarina de Albuquerque, a pour sa part fait observer que l'expérience d'une titulaire de mandat peut se révéler frustrante, lorsqu'elle n'est pas invitée ou n'a pas accès au pays.  Enfin, Mme Laila Matar, de l'organisation non gouvernementale Human Rights Watch, a déploré que les actes d'intimidation et de représailles à l'encontre des défenseurs des droits de l'homme persistent.  Plus généralement, elle a fustigé la tendance globale de harcèlement à l'encontre de la société civile.

Dans le cadre du débat interactif qui a suivi ces présentations, plusieurs délégations ** et des organisations non gouvernementales *** se sont félicitées des succès du Conseil et en particulier de l'examen périodique universel, mécanisme qui compte «100 pour-cent de participation».  D'autres ont constaté avec préoccupation la persistance de pratiques héritées de la Commission: politisation, pressions ou encore recours au prétexte des droits de l'homme pour s'ingérer dans les affaires des États souverains.  Ces délégations ont réaffirmé l'importance du respect des principes d'universalité et de non-sélectivité au sein du Conseil.  Au cours du débat, il a par ailleurs été suggéré que le Conseil œuvre davantage pour une approche préventive de la protection ainsi que pour l'État de droit.  En outre, certains pays ont estimé important de réagir aux lacunes dans l'application des décisions et des recommandations du Conseil. 

 

Le Conseil poursuivra demain matin, à 10 heures, son débat général sur le rapport du Haut-Commissaire, entamé aujourd'hui, avant de tenir un dialogue interactif groupé avec le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants et le Rapporteur spécial sur l'extrême pauvreté et les droits de l'homme.

 

Débat de haut niveau à l'occasion du dixième anniversaire du Conseil, axé sur les réalisations obtenues et les défis à relever

Remarques liminaires

M. CHOI KYONG-LIM, Président du Conseil des droits de l'homme, s'est dit honoré d'occuper le rôle de Président du Conseil en cette année très spéciale.  Il a constaté que le Conseil avait, depuis sa création en 2006, enregistré des résultats significatifs en matière de promotion et de protection des droits de l'homme.  Le Président a profité de cette occasion pour rappeler aux membres que les discussions et les actions du Conseil ont indéniablement un impact sur le terrain.  «Il faut être fier de ce que le Conseil a réalisé lors de ses dix premières années», a-t-il poursuivi, avant d'ajouter que beaucoup restait à faire pour que ce jeune organe atteigne son plein potentiel.  «Les personnes vulnérables et les victimes attendent une protection de la part du Conseil; le monde attend de nous que nous trouvions des solutions à des situations difficiles», a conclu M. Choi.

M. JAN ELIASSON, Vice-Secrétaire général des Nations Unies, a rappelé qu'à la première session du Conseil, il y a dix ans, la communauté internationale entrait en terrain inconnu après des mois d'intenses et difficiles négociations.  Les espoirs et les attentes étaient élevés; les incertitudes et les réserves, également.  Toutefois, la communauté internationale savait qu'elle disposait là d'une opportunité de dynamiser la Commission des droits de l'homme, principal organe de droits de l'homme de l'Organisation, et de dépasser les dysfonctionnements qui avaient sapé ses activités et son statut depuis quelques années.  Dix ans plus tard, beaucoup a été réalisé, s'est réjoui M. Eliasson, citant notamment la création de l'Examen périodique universel (EPU), qui donne, pour la première fois, un instantané de l'état mondial des droits de l'homme.  Il s'est également félicité du rôle crucial joué par les procédures spéciales, précisant que leur nombre s'élève aujourd'hui à 55, soit vingt de plus qu'à la création du Conseil. 

Le Vice-Secrétaire général a ensuite attiré l'attention sur la capacité du Conseil à sonner l'alerte en cas de crise, se félicitant des sessions extraordinaires convoquées par le Conseil ces dernières années.  Il a fait remarquer que le Conseil s'est montré capable de répondre également aux crises prolongées: ses commissions d'enquête et d'établissement des faits se sont révélées très utiles pour rassembler des témoignages, montrer l'importance de la reddition des comptes et souligner la nécessité de combattre l'impunité.  Le Vice-Secrétaire général s'est en outre réjoui que le Conseil ait permis d'amplifier la voix de la société civile.

M. Eliasson a relevé que le monde vit toutefois une époque troublée.  Les tensions et les conflits s'intensifient; le nombre de réfugiés et de personnes déplacées atteint des chiffres inégalés; le terrorisme et l'extrémisme violent constituent une menace à la paix et la sécurité internationales, à l'heure où des groupes cherchent à saper les valeurs communes de la communauté internationale que sont la démocratie et l'inclusion, les libertés individuelles, les droits de l'homme et l'État de droit; enfin, le rétrécissement du champ d'action de la société civile et des médias est également préoccupant. 

Pour le Vice-Secrétaire général, il faut renverser ces tendances négatives et mobiliser tous les outils à disposition.  En particulier, il faut mobiliser la volonté de prévenir plutôt que de réagir face aux violations des droits de l'homme.  Selon M. Eliasson, le Programme de développement durable à l'horizon 2030 sera un outil important à cet égard.  Parmi les autres outils figure aussi l'initiative «Human Rights Up Front» (Les droits avant tout) du Secrétaire général,  axée sur l'alerte rapide, l'action coordonnée des Nations Unies et un engagement plus ferme de la part des États membres. 

Le Vice-Secrétaire général a conclu son intervention en soulignant que le Conseil avait donné un nouvel élan au renforcement des droits de l'homme au sein du système des Nations Unies et qu'il est désormais une enceinte incontournable pour traiter d'enjeux que d'autres organes des Nations Unies n'auraient jamais abordés.  Le Conseil rappelle enfin aux États qu'ils doivent être dignes de leur mission, qui est de servir les peuples, a conclu M. Eliasson. 

M. ZEID RA'AD AL HUSSEIN, Haut-Commissaire aux droits de l'homme s'est réjoui de la présence aujourd'hui du Vice-Secrétaire général, de neuf anciens présidents du Conseil et des 193 États Membres des Nations Unies, y compris les petits États insulaires et les pays les moins avancés qui n'ont pas de mission à Genève.  Cette présence témoigne de l'influence croissante du Conseil et vaut pour reconnaissance du rôle essentiel joué par les droits de l'homme dans les nations.  Les droits de l'homme permettent de construire des sociétés au sein desquelles les peuples sont capables de faire leurs propres choix, de saisir des opportunités, de résoudre pacifiquement leurs conflits et d'affronter les menaces avec confiance et unité.  Chaque État présent ici s'est engagé à protéger ces droits, sachant que les gouvernements existent pour servir les peuples et non l'inverse, a également rappelé M. Zeid. 

Le Haut-Commissaire a observé que le Conseil avait mis en place des processus inédits pour veiller au respect des droits de l'homme, en y incluant la société civile.  Cependant, face aux reculs dans le respect des droits de l'homme, le Conseil doit faire davantage pour la pleine mise en œuvre de ces droits, en particulier dans les prochaines années et dans le cadre du programme de développement durable à l'horizon 2030.  Cette responsabilité incombe aussi aux États, a souligné le Haut-Commissaire, précisant à ce propos que le Haut-Commissariat allait publier un recueil de «bonnes pratiques» en matière de respect des droits de l'homme. 

Débat

Animatrice du débat de haut niveau, MME KATE GILMORE, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, a indiqué que la présence de 193 États à cette commémoration est un précédent en soi, de même que la présence de tous les présidents du Conseil depuis que celui-ci a vu le jour.  Elle a souligné que les procédures spéciales sont les «oreilles du Conseil sur le terrain» et a mis l'accent sur l'importance de la coopération avec la société civile, à laquelle cet organe a largement ouvert ses portes. 

M. LUIS ALFONSO DE ALBA GONGORA, premier Président du Conseil des droits de l'homme, dans un message par visioconférence, s'est félicité du rôle novateur du successeur de la Commission des droits de l'homme, rôle centré sur l'objectivité et la non-sélectivité.  M. de Alba a mis l'accent sur l'élément particulièrement moderne que sont les procédures spéciales, et exhorté à une coopération plus étroite avec l'Assemblée générale et d'autres organes clés des Nations Unies.  M. de Alba a enfin appelé les États individuels à s'ouvrir davantage aux organisations non gouvernementales. 

M. SIHASAK PHUANGKETKEOW, Président du Conseil des droits de l'homme de juin 2010 à juin 2011, a évoqué certains des souvenirs de son mandat et remercié le travail effectué par le Secrétariat du Conseil et les services de conférence.  M. Phuangketkeow a expliqué que le processus de révision des méthodes de travail du Conseil n'avait pas été aisé, surtout s'agissant des situations d'urgence.  Les outils à la disposition du Conseil pour ce faire sont limités, en particulier si on aspire à une participation accrue des États Membres.  D'un côté, on cherche à recueillir le consentement des États membres du Conseil; mais, de l'autre côté, certaines exigences sont inhérentes aux principes même des droits de l'homme. 

M. DORU COSTEA, Président du Conseil des droits de l'homme de juin 2007 à juin 2008, a pour sa part estimé que l'examen périodique universel était l'un des plus grands succès du Conseil. 

En tant que première femme ayant présidé le Conseil des droits de l'homme, MME LAURA DUPUY LASSERRE, qui a officié de juin 2011 à décembre 2012, a espéré que d'autres femmes occuperaient aussi cette fonction.  Elle a tout particulièrement salué le rôle joué par le Conseil pour sortir les personnes de la pauvreté et soutenir le développement durable.

M. MARTIN UHOMOIBHI, Président du Conseil des droits de l'homme de 2008 à 2009, a constaté que la Commission des droits de l'homme avait failli par son manque de représentativité.  Heureusement, cela n'est pas le cas du Conseil, dont les présidences tournantes respectent la diversité régionale.  L'implication de la société civile est également une réussite de ce Conseil, s'est-il félicité. 

M. JOACHIM RÜCKER, Président du Conseil des droits de l'homme de 2015 à 2016, a déclaré qu'avec l'Examen périodique universel, le Conseil dispose d'un instrument unique, même s'il devra être amélioré.  Il faudra également évaluer l'efficacité du Conseil, dont l'ordre du jour ne cesse de grandir, avec de plus en plus d'initiatives.  La pertinence de ces initiatives sur le terrain doit aussi être examinée. 

M. REMIGIUSZ ACHILLES HENCZEL, Président du Conseil des droits de l'homme de 2013 à 2014, a lui aussi souligné l'importance de l'Examen périodique universel, soulignant cependant que le suivi des recommandations issues de cet exercice reste problématique.

MME LAILA MATAR, de l'organisation Human Rights Watch, a déploré que les actes d'intimidation et de représailles à l'encontre des défenseurs des droits de l'homme persistent.  Plus généralement, elle a fustigé la tendance globale de harcèlement à l'encontre de la société civile.

M. BAUDELAIRE NDONG ELLA a déclaré que le Conseil, en tant qu'organe, est lui-même un défi en soi.  Au cours de son mandat de Président du Conseil des droits de l'homme en 2014, il n'a cessé de planer un climat de politisation du Conseil, notamment à cause de la présence des cinq membres permanents du Conseil de sécurité qui étaient également membres du Conseil des droits de l'homme à ce moment-là, de même que nombre de pays émergents.  Les questions non consensuelles au Conseil de sécurité se retrouvaient transbordées au Conseil des droits de l'homme, a observé M. Ndong Ella.

L'un des autres défis pour le Conseil est la nomination des titulaires de mandats, qui a connu des ratés en raison de la pression qui pèse sur cette question.  Cela a souvent conduit à des entretiens de recrutement bâclés, a regretté l'ancien Président, ajoutant que cette pression peut mettre en cause le travail des procédures spéciales.  L'efficacité du Conseil est également menacée par la charge de travail qui pèse sur son personnel à chaque session.  La question financière aussi est un difficile: en 2014, les incidences programmatiques et budgétaires ont atteint trente millions de dollars, soit des ressources dont ne disposait pas le Haut-Commissariat et qu'il a fallu aller plaider devant la Commission chargée des questions administratives et budgétaires (Cinquième commission de l'Assemblée générale). 

M. ALEX VAN MEUWEEN, Président du Conseil des droits de l'homme de 2009 à 2010, a noté que cet organe est tributaire du contexte politique international dans lequel ses sessions se tiennent.  Il a aussi mis en avant l'importance de la recherche du consensus. 

MME KATARINA DE ALBUQUERQUE, ancienne Rapporteuse spéciale sur le droit à l'eau potable et à l'assainissement, a fait part de son expérience «mi-figue mi-raisin» avec le Conseil.  Elle a ainsi signalé que la visite de pays est à la fois gratifiante, lorsqu'elle a lieu, et frustrante, lorsque le rapporteur n'est pas invité ou n'a pas accès.  Elle a souligné qu'elle n'a cessé de réfléchir à l'impact de son travail sur les individus et les populations, et déploré le manque d'appui par certains membres de la famille des Nations Unies. 

Pour la Sous-Secrétaire d'État aux droits de l'homme et à la justice du Honduras, le Conseil a démontré sa capacité à surmonter les écueils de la Commission.  Il est cependant victime de son succès, sa charge de travail augmentant alors même que les ressources qui lui sont allouées sont de plus en plus insuffisantes.

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) s'est félicité des succès du Conseil et en particulier de l'examen périodique universel, mécanisme qui compte 100 pour-cent de participation.  L'importance de ce Conseil n'est plus remise en question, ce qui est un succès en soi, a observé le CICR.  Constatant que le Conseil et le Haut-Commissariat aux droits de l'homme fonctionnent selon un cadre normatif, des modalités et des principes différents, le CICR s'est dit fermement convaincu qu'un équilibre entre complémentarité et coopération entre les deux organes sera bénéfique au système international en entier. 

L'Islande, au nom des pays nordiques, s'est demandé comment traduire dans les faits les résolutions adoptées par le Conseil.  Le Costa Rica, au nom d'un groupe de pays, a souligné que la formation et l'éducation aux droits de l'homme étaient des outils primordiaux pour la promotion et la protection des droits de l'homme.  La République dominicaine, au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes, a assuré que les membres de ce groupe continueraient de participer sans faiblir aux travaux du Conseil.  Le Brésil, au nom de la communauté des pays lusophones, a indiqué avoir pour priorités la protection de l'enfance, des femmes et des minorités, entre autres.  Le  Portugal a  demandé l'avis des panélistes sur la mise en œuvre du principe de responsabilisation

Le Qatar, au nom du Groupe arabe, a constaté avec préoccupation que le travail du Conseil se dirige vers une pratique de politisation et de sélectivité à l'encontre des pays en développement.  Le Groupe arabe a aussi regretté le déséquilibre entre le traitement des droits civils et politiques et le traitement des droits économiques, sociaux et culturels au sein du Conseil.  La diversité des cultures est une réalité dont il faut tenir compte dans l'approche des droits de l'homme, a-t-il souligné.  La Chine, au nom d'un groupe de pays, s'est inquiétée de la poursuite de pratiques héritées de la Commission, telles que la politisation, les pressions et le recours au prétexte des droits de l'homme pour s'ingérer dans les affaires des États souverains.  L'Égypte, au nom d'un groupe de pays, a également estimé que des signes inquiétants montrent que le Conseil pourrait s'engager sur la même voie que la Commission.  Dans ce contexte, ces pays, à l'instar aussi du Viet Nam – au nom de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE) – ont réaffirmé l'importance du respect des principes d'universalité et de non-sélectivité au sein du Conseil.

L'Afrique du Sud, au nom du Groupe africain, a regretté que certains pays entendent réformer le Conseil en dehors du cadre institutionnel et des résolutions qui l'ont créé, notamment la résolution 60/251.  Du même avis, l'Équateur a souligné qu'aucune initiative ne doit se faire en dehors du cadre multilatéral.  Le manque de respect du cadre et du «paquet institutionnel», la politisation que certains pays imposent au Conseil risquent de le fragiliser, a prévenu le Pakistan au nom de l'Organisation de la coopération islamique.  Il importe absolument de respecter le code de conduite des procédures spéciales, ont ajouté les Émirats arabes unis.

L'Arabie saoudite, membre fondateur du Conseil, s'est félicitée du travail accompli depuis 2006.  Mais des efforts doivent être faits en matière de non-ingérence dans les affaires des autres États, au risque d'accroitre les tensions entre les différentes cultures et civilisations présentes au sein du Conseil.  L'universalité ne signifie pas que l'on impose aux autres des pratiques et valeurs contraires aux cultures et religions, a déclaré le représentant saoudien.  Le Bangladesh a demandé à tous les États de respecter leurs obligations, surtout en ce qui concerne le droit au développement.

L'Union européenne a fait observer que le mandat du Conseil est aussi pertinent aujourd'hui qu'il l'était il y a dix ans.  Aujourd'hui toutefois, de nombreuses victimes ne bénéficient pas de la protection préventive qu'elles attendent du Conseil, de nombreuses situations ne faisant l'objet de discussion qu'après l'éclatement de la crise.  Un avis partagé par le Rwanda qui, s'exprimant au nom d'un groupe de pays, a estimé que la prévention des crimes est essentielle.

Le Royaume-Uni, au nom d'un autre groupe de pays, a insisté sur l'importance de garantir l'État de droit.  Tout le monde a le droit d'être protégé sur un pied d'égalité, a-t-il fait valoir, l'État de droit étant une garantie contre l'exercice arbitraire du pouvoir.  Pour le Royaume-Uni, il faudrait développer plus avant l'État de droit au sein du Conseil.  La Suisse, au nom d'un groupe de pays, a estimé important de réagir aux lacunes dans l'application des décisions du Conseil.  Elle a souhaité connaître l'avis des panélistes sur les moyens d'assurer la mise en œuvre concrète des décisions et recommandations du Conseil. 

Le Maroc, au nom des pays membres de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), a reconnu la contribution positive du Conseil qui s'est positionné comme un organe incontournable du système des Nations Unies.  Le Maroc a souligné le travail important réalisé par l'OIF en appui aux États membres saisis par les divers mécanismes du Conseil et a insisté sur l'importance du respect du multilinguisme au sein du Conseil.  Cuba, au nom d'un groupe de pays, s'est dit convaincu que le Conseil a un rôle fondamental à jouer dans la promotion et la protection des droits de l'homme.  Le dialogue et la coopération doivent rester au cœur de ses travaux.  Pour Cuba, toutefois, davantage d'attention devrait être accordée au soutien de la mise en œuvre des politiques de développement des pays. 

S'exprimant au nom d'un groupe transrégional de pays, l'Irlande a dit que la participation de la société civile était une pratique admise et reconnue par les résolutions de l'Assemblée générale.  Dans ce contexte, le groupe de pays s'est dit en faveur d'un renforcement de la participation des institutions nationales des droits de l'homme.

La Global Alliance of National Human Rights Institutions  a demandé que les institutions nationales des droits de l'homme puissent participer davantage aux travaux du Conseil et que leurs représentants soient préservés des actes d'intimidations et des représailles lorsqu'ils coopèrent avec le Conseil et ses mécanismes. 

S'agissant des organisations non gouvernementales, la Commission arabe pour les droits de l'homme a demandé aux anciens présidents quelles solutions ils proposent contre la politisation du Conseil et pour régler la question de la Palestine, qui n'est toujours pas résolue en dépit des nombreuses résolutions adoptées sur le sujet.  Le Service international pour les droits de l'homme, au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales1 a appelé le Conseil à répondre de manière efficace aux situations préoccupantes des droits de l'homme.  Mais cela implique les États membres placent les droits de l'homme au-dessus de tout.  Il faudrait que ces États s'engagent vraiment à respecter les droits de l'homme, a plaidé le Service. 

CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens, au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales2, s'est félicitée de l'élargissement des travaux du Conseil aux représentants des organisations non gouvernementales et en défendant leurs droits.  Cependant, au vu des tentatives visant à limiter les activités et à affaiblir les prérogatives de la société civile, la représentante a encouragé le Conseil à demeurer vigilant et à mettre en place une politique globale contre les actes d'intimidation et de représailles.  La Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme a déclaré qu'à dix ans, le Conseil fait sa mue et ce malgré la fragilisation qui guette cet organe.  Il a aussi invité les États Membres qui ont des difficultés à comprendre le rôle de la société civile à consentir davantage d'efforts pour s'ouvrir à elle.

Conclusions

MME GILMORE s'est félicitée des encouragements adressés au Conseil, et rappelé les propositions visant à l'élargissement des partenariats, au renforcement de la formation et l'éducation aux droits de l'homme, et le caractère indivisible de ces derniers. 

MME DUPUY LASSERRE a insisté sur la nécessité d'aborder la problématique de la diversité culturelle.  Il faut agir à titre préventif et veiller au renforcement des capacités nationales de protection des droits de l'homme, qui est le mandat même du Secrétaire général des Nations Unies selon les termes de la Charte, a-t-elle suggéré. 

Pour M. HENCZEL, il conviendrait d'éviter d'aborder les questions bilatérales au cours de l'examen périodique universel.  Il importe aussi d'examiner la pression exercée par la charge de travail croissante, au détriment en particulier des petites délégations qui se voient dans l'impossibilité de suivre toutes les activités du Conseil. 

M. UHOMOIBHI s'est demandé s'il existe une alternative au Conseil et a jugé que cet organe, tout vulnérable qu'il est, doit se distinguer en tant que dernier bastion de défense de tous les droits de l'homme.  Il ne doit en aucun cas être soumis à des intérêts politiques étriqués qui lui feraient perdre sa crédibilité.

Les droits de l'homme ont une dimension horizontale, a rappelé quant à lui M. VAN MEEUWEN.  Le Conseil jouit désormais d'une très bonne base, s'est félicité l'ambassadeur belge, et fait l'objet de fortes attentes de l'extérieur auxquelles il faudra répondre, surtout dans les situations de crise.  La véritable contribution du Conseil est d'avoir promu la présence et l'efficacité sur le terrain, a-t-il affirmé.  A ce propos, la société civile doit jouer son rôle le plus possible pour multiplier les dividendes de l'efficacité sur le terrain. 

Pour M. NDONG ELLA, il est primordial non seulement de préserver le rôle de la société civile qui donne l'alerte sur place, mais aussi prévenir toute intimidation ou représailles contre ses membres.  Il a invité à une réflexion sur les moyens de juguler les nouvelles formes de violations des droits de l'homme, telles que perpétrées par exemple par l'État islamique. 

M. BAUDELAIRE a insisté sur l'importance de l'éducation aux droits de l'homme dans les situations d'après conflit, à l'intention des militaires en particulier.  D'une manière générale, avant de dépêcher une procédure spéciale, le Conseil devrait adopter une approche pédagogique avec l'État concerné.  L'ancien président a aussi plaidé pour une réelle synergie entre les diplomates en poste à Genève et à New York pour que le Conseil puisse effectivement devenir un organe totalement indépendant. 

MME DE ALBUQUERQUE a suggéré au Conseil de se doter d'une sorte de système signalétique (feux vert, jaune et rouge), et de se consacrer davantage aux droits économiques, sociaux et culturels et à leurs violations, qui sont des causes profondes de conflit et d'instabilité.  Elle a préconisé à cet égard la création, par exemple, d'une Commission indépendante sur les violations des droits économiques, sociaux et culturels de certaines catégories de personnes. 

M. COSTEA a trouvé fascinant l'évolution du Conseil dix années après sa mise en place en 2006.  Il dispose désormais d'une «boîte à outils» complète dont il n'a pas encore exploité toutes les possibilités, a-t-il remarqué.  M Costea a préconisé l'étude de mesures de renforcement de la confiance entre le Conseil et la société civile. 

MME MATAR a salué les excellentes propositions formulées pour que le Conseil puisse surmonter son caractère essentiellement politique.  Elle a souligné que certains des membres du Conseil font tout leur possible pour résoudre les questions litigieuses avec la société civile: les pays qui souhaitent adhérer au Conseil devraient, à l'heure de défendre leur candidature, faire connaître clairement leurs vues sur cette question. 

«Nous sommes préoccupés à juste titre par la politisation, mais le Conseil est composé d'États», a noté M. PHUANGKETKEOW, ajoutant que le respect mutuel est déterminant dans un tel contexte.  Il faut aussi faire participer les organisations non gouvernementales aux délibérations sur les résolutions et faire montre d'une persistance soutenue dans l'action, notamment dans les situations d'urgence comme ce fut le cas lors des soulèvements populaires dans le monde arabe.  M. Phuangketkeow a observé que si le nombre de conflits armés dans le monde avait diminué, parallèlement, la gravité des atrocités et des violations des droits de l'homme s'était exacerbée. 

M. RÜCKER a encouragé le Conseil à régler les problèmes d'ordre technique pouvant surgir lors de ses réunions, et à tirer pleinement parti de l'atout que représente l'Examen périodique universel.  M. Rücker a attiré l'attention des États membres sur le registre d'information mis à disposition en ligne par le Haut-Commissariat.  L'Assemblée générale devrait envisager de faire du Conseil des droits de l'homme, en 2021, un organe principal du système des Nations Unies, a-t-il conclu.

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* Les anciens Présidents du Conseil étaient M. Joachim Rücker (Allemagne), Président en 2015; M. Baudelaire Ndong Ella (Gabon), Président en 2014; M. Remigiusz Achilles Henczel (Pologne), Président en 2013; Mme Laura Dupuy Lasserre (Uruguay), Présidente en 2011-2012; M. Sihasak Phuangketkeow (Thaïlande), Président en 2010-2011; M. Alex Van Meeuwen (Belgique), Président en 2009-2010; M. Martin I. Uhomoibhi (Nigéria), Président en 2008-2009; M. Doru Costea (Roumanie), Président en 2007-2008; et M. Luis Alfonso de Alba Góngora (Mexique), premier Président du Conseil pour la période juin 2006 – juin 2007 (message vidéo).

** L'Union européenne, la Secrétaire d'état adjointe aux droits de l'homme du Honduras, le Comité international de la Croix-Rouge ainsi que les pays suivants ont participé à ce débat de haut niveau: Afrique du sud (au nom du Groupe africain); Arabie Saoudite; Bangladesh; Brésil (au nom des pays lusophones); Chine (au nom d'un groupe de pays); Costa Rica (au nom d'un groupe de pays); Cuba (au nom d'un groupe de pays); Égypte (au nom d'un groupe de pays); Émirats Arabes Unis; Équateur; Irlande (au nom d'un groupe de pays); Islande (au nom des pays Nordiques); Maroc (au nom de l'Organisation internationale de la Francophonie); Pakistan (au nom de l'Organisation de la coopération islamique); Portugal; Qatar (au nom du Groupe arabe); République dominicaine (au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes); Royaume-Uni (au nom d'un groupe de pays); Rwanda (au nom d'un groupe de pays); Suisse (au nom d'un groupe de pays); et Viet Nam (au nom de l'ANASE).

*** Liste des ONGs ayant participé au débat interactif: Commission arabe des droits de l'homme; Service international pour les droits de l'homme (au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales1); CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens (au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales2); et la Rencontre Africaine pour la défense des droits de l'homme.

1Déclaration conjointe: Service international pour les droits de l'homme; Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement; Commission internationale de juristes; Institut du Caire pour les études sur les droits de l'homme; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme -(FIDH); Asian Legal Resource Centre; Global Initiative for Economic, Social and Cultural Rights;  Article 19 - Centre international contre la censure; et Centro de Estudios Legales y Sociales (CELS) Asociación Civil.

2Déclaration conjointe: CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme -(FIDH); Commission internationale de juristes; Communauté internationale bahá'íe; Asian Legal Resource Centre; Global Initiative for Economic, Social and Cultural Rights;  Article 19 - Centre international contre la censure.

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