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Le Comité pour l'Élimination de la discrimination raciale examine le rapport du Suriname
11 août 2015
11 août 2015
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport présenté par le Suriname sur les mesures qui ont été prises dans le pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
Présentant le rapport de son pays, le Représentant permanent du Suriname auprès des Nations Unies à New York, M. Henry McDonald, a indiqué que la Constitution surinamaise garantissait que personne ne sera soumis à une discrimination sur la base de sa naissance, de son sexe, de sa race, de sa langue, de sa religion, de son éducation, de ses opinions politiques, de sa situation économique ou de tout autre critère. Tous les groupes ethniques sont représentés dans tous les domaines de la vie publique. Des représentants des peuples autochtones et tribaux ont également été élus au Parlement et aux niveaux locaux de gouvernement. Si le Gouvernement est certes confronté au défi d'apporter toute la gamme des services publics dans chaque partie du pays, eu égard à l'éloignement de certaines populations et au manque de ressources financières et humaines, il n'en demeure pas moins que toutes les mesures nécessaires sont prises afin d'assurer que chacun ait accès à l'éducation, aux soins de santé et aux services sociaux. Le Gouvernement poursuivra par ailleurs le processus visant à consulter les communautés autochtones et tribales au sujet de la question des droits fonciers, toute solution devant s'inscrire dans la structure constitutionnelle du pays, en tenant compte de son caractère multi-ethnique et de l'indivisibilité du territoire. Enfin, M. McDonald a indiqué qu'aucune plainte n'avait été déposée devant les tribunaux surinamais en rapport avec des délits racistes ou xénophobes.
La délégation surinamaise était également composée de Mme Jornell Vinkwolk, Coordonnatrice du Bureau des droits de l'homme au Ministère de la justice et de la police du Suriname, et de Mme Miriam Mac Intosh, Première Secrétaire à la Mission permanente auprès des Nations Unies à New York. Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, entre autres, des questions de genre; du fonctionnement du système judiciaire; de la situation des peuples autochtones et tribaux, notamment pour ce qui a trait à la reconnaissance de l'autorité traditionnelle et aux droits fonciers et des questions concernant les réserves naturelles proclamées sur leurs terres; des questions linguistiques; de l'existence d'un système de castes dans le groupe des «Hindoustanis».
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport surinamais, M. Alexei Avtonomov, a insisté sur la nécessité de reconnaître les peuples autochtones et leurs droits. Un autre expert a jugé préoccupant le traitement encore réservé aux peuples autochtones et aux Marrons. L'exploitation de zones minières par des sociétés étrangères continue en outre de poser des problèmes, notamment environnementaux. L'État a saisi près de 45% des territoires traditionnels des peuples autochtones et les a notamment consacrés à des réserves naturelles, se sont inquiétés les experts qui ont craint pour la survie de ces populations. Les peuples concernés doivent avoir des droits sur les terres ancestrales, des droits qui ne semblent pas être effectivement reconnus ni respectés. Un expert a rappelé les tueries qui ont eu lieu en 2007 entre les différentes communautés, ainsi que les différentes affaires portées devant la Cour interaméricaine des droits de l'homme, estimant que le Suriname ne pouvait affirmer qu'il n'y avait pas de discrimination raciale dans le pays.
Les observations finales du Comité sur tous les rapports examinés au cours de la session seront rendues publiques à la clôture des travaux, le vendredi 21 août.
Le Comité entamera, cet après-midi à 15 heures, l'examen du rapport de l'ex-République yougoslave de Macédoine (CERD/C/MKD/8-10).
Présentation du rapport du Suriname
Le Comité est saisi du rapport du Suriname (CERD/C/SUR/13-15), ainsi que de la liste des thèmes à traiter établie par le rapporteur pour le pays (CERD/C/SUR/Q/13-15).
M. HENRY MAC DONALD, Représentant permanent du Suriname auprès des Nations Unies à New York, a souligné que suite aux élections générales et libres qui se sont tenues le 25 mai dernier, le processus de formation de la nouvelle administration avait été engagé. Il a précisé que l'entrée en fonction du Président (réélu) sera effective dans deux jours, c'est-à-dire à compter du 12 août 2015, après quoi les membres du Cabinet prêteront serment. C'est pour cette raison que le Gouvernement du Suriname n'a pas été en mesure d'être représenté au niveau ministériel pour le présent dialogue avec le Comité, a expliqué le représentant du Suriname auprès de l'ONU.
M. Mac Donald a ensuite réitéré le soutien sans faille de son pays à la primauté du droit, à la démocratie et à la promotion et la protection de tous les droits de l'homme. La ratification ou l'accession du pays à de nombreux instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme, ainsi qu'à des instruments régionaux tels que ceux de l'Organisation des États américains, témoignent de cet engagement. Le Suriname est une démocratie parlementaire fondée sur les libertés et les droits de l'homme fondamentaux figurant dans la Constitution. La Constitution surinamaise garantit en son article 8 que personne ne sera soumis à une discrimination sur la base de sa naissance, de son sexe, de sa race, de sa langue, de sa religion, de son éducation, de ses opinions politiques, de sa situation économique ou de tout autre critère, a fait valoir M. Mac Donald. En outre, selon l'article 18 de la Constitution, chacun a droit à la liberté de religion et de philosophie de vie.
Le Suriname est une société véritablement multiethnique, multiculturelle, multilinguistique et multireligieuse d'un demi-million d'habitants comportant au moins sept différentes traditions ethnoculturelles constituées par les Hindoustanis (27,4%), les créoles (15,7%), les Javanais (13,7%), les Marrons (21,7%), les Chinois (1,5%), les peuples autochtones (3,8%), les Afro-Surinamais (0,7%), les métis (13,4%) et les personnes d’ascendance européenne (0,3%), le reste représentant 1,9%. Depuis 1989, le Conseil interreligieux du Suriname a mené des consultations et des dialogues entre les principales religions du pays. Les membres du Conseil se réunissent au moins deux fois par mois.
Tout cela ne signifie pas que tout est parfait dans le pays, a reconnu M. Mac Donald, des défis persistent, mais les autorités sont engagées à faire tout le nécessaire pour renforcer le respect et la compréhension mutuels au sein de la population. Le Gouvernement surinamais reste en outre engagé à assurer à tous ses citoyens la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels. Dès son entrée en fonction en 2010, le Président du Suriname avait annoncé un contrat social qui s'est désormais en partie matérialisé par l'adoption d'un corpus législatif majeur couvrant la garantie d'un salaire minimum, la couverture santé pour chaque citoyen et l'octroi d'une retraite aux personnes âgées.
S'agissant des préoccupations exprimées par le Comité au sujet de la discrimination à l'encontre des enfants des groupes autochtones et tribaux en matière d'accès à l'éducation, à la santé et aux services publics, M. Mac Donald a notamment renvoyé aux parties du rapport qui comportent des informations relatives aux écoles qui, y compris à l'intérieur du pays, dispensent des enseignements primaires et secondaires dans les différents districts administratifs. Il a en outre souligné que des programmes ont été engagés afin de rendre les soins de santé accessibles à tous les segments de la société par le biais, notamment, de la construction de nouveaux hôpitaux et de la décentralisation des centres de santé. Le Suriname a mis en place une prestation d'allocation familiale qui s'élève désormais à 50 dollars surinamais par enfant et à laquelle peut prétendre tout citoyen, quels que soient son appartenance ethnique ou son lieu de résidence, à partir du moment où il remplit les conditions. Au nombre des autres services fournis par le Gouvernement, figurent l'aide financière aux personnes handicapées et l'assistance financière aux foyers socialement défavorisés, ainsi que l'assistance en matière de soins aux personnes âgées, a ajouté M. Mac Donald.
Tous les groupes ethniques sont représentés dans tous les domaines de la vie publique, a ensuite fait valoir le chef de la délégation. Des représentants des peuples autochtones et tribaux ont également été élus au Parlement et aux niveaux locaux de gouvernement. Ainsi, 15 des 51 parlementaires sont d'ascendance autochtone ou tribale, de même que 5 des 17 ministres du gouvernement entré en fonction en 2010. Des personnes d'ascendance autochtone ou tribale comptent également parmi la population étudiante. Si le Gouvernement est certes confronté au défi d'apporter toute la gamme des services publics dans chaque recoin du pays, eu égard à l'éloignement de certains endroits et au manque de ressources financières et humaines, il n'en demeure pas moins que toutes les mesures nécessaires sont prises afin d'assurer que chacun ait accès à l'éducation, aux soins de santé et aux services sociaux, a souligné M. Mac Donald. Le Gouvernement du Suriname tient à souligner qu'il n'existe aucune discrimination fondée sur la race ou l'origine ethnique en ce qui concerne l'accès aux services. Il reconnaît toutefois que les taux de scolarisation dans les zones urbaines sont légèrement plus élevés que dans les zones intérieures mais a attiré l'attention sur les mesures prises pour remédier à la situation en termes d'accès à l'éducation, notamment par le biais de la construction d'écoles et d'incitations visant à amener les enseignants à enseigner dans les zones intérieures pour une période minimale de trois ans. M. Mac Donald a également attiré l'attention sur les défis associés à la fourniture d'une éducation bilingue dans un système déjà mal doté en effectifs.
Le Gouvernement a soumis au Parlement un projet de loi visant la création de la cour constitutionnelle et le chef de la délégation surinamaise a indiqué que la nouvelle administration devrait sérieusement examiner cette question en temps voulu.
En ce qui concerne la question d'une définition claire du racisme dans la législation nationale, M. Mac Donald a renvoyé à l'article 126 du code pénal qui définit la discrimination. Ses articles 175 et 176 comportent pour leur part des dispositions qui sanctionnent l'insulte contre une personne en raison de son appartenance à un groupe ethnique et l'incitation à la haine ou à la violence, a-t-il indiqué.
M. Mac Donald a ensuite rappelé qu'un décret avait été adopté fin 2014 visant la création d'un institut national des droits de l'homme et a précisé que les définitions du mandat et de la structure de cette institution ainsi que les processus de recrutement et de sélection de ses membres étaient en cours de préparation. Cet Institut garantira la transparence de ses travaux et sera indépendant, a-t-il ajouté.
«Le Gouvernement du Suriname poursuivra le processus visant à consulter les communautés autochtones et tribales au sujet de la question des droits fonciers», a ensuite déclaré le chef de la délégation. «Un important aspect de la résolution de ce problème réside dans la nouvelle approche que le Suriname est en train d'adopter et qui consiste à exposer le point de vue de la République du Suriname tant au niveau national qu'au niveau international», a-t-il précisé. «Toute solution trouvée devra s'inscrire dans la structure constitutionnelle de la République du Suriname, en tenant compte du caractère multi-ethnique de notre nation», a-t-il insisté, évoquant l'indivisibilité du territoire surinamais. «Un autre élément est que les peuples autochtones et les Marrons sont considérés comme des partenaires dans cette question nationale et en aucune manière comme des opposants au gouvernement», a ajouté M. Mac Donald. «Nous travaillerons donc avec toutes les parties concernées afin d'assurer que toute solution concernant les questions de droits fonciers préserve l'unité de la nation», a-t-il déclaré, soulignant notamment que «les membres de l'autorité traditionnelle sont en train d'être reconnus comme partenaires officiels du gouvernement».
En ce qui concerne la conclusion, dans toute la mesure du possible, d'accords avec les peuples concernés avant l'octroi de concessions, M. Mac Donald a assuré qu'il y avait eu des consultations régulières entre le Gouvernement et les communautés autochtones et tribales lorsque l'implication locale dans la formulation de la politique publique était garantie s'agissant de l'utilisation des ressources, de la planification du développement et de la réinstallation éventuelle, entre autres dans les zones qui sont traditionnellement habitées par les communautés autochtones et tribales. Eu égard aux nombreux aspects qui restent à traiter s'agissant de la garantie des droits fonciers collectifs aux communautés autochtones et tribales, l'amélioration des mécanismes de consultation revêt une grande importance tant pour l'État que pour ces communautés. Le Gouvernement surinamais est en train d'élaborer un modèle qui reflétera de manière claire le principe du consentement préalable libre et informé au sein des structures traditionnelles existantes.
Toute personne au Suriname, y compris les personnes appartenant aux peuples autochtones et tribaux, a droit de faire appel aux autorités compétentes. Pour ce qui est de la question des concessions, il n'existe plus d'obstacle juridique empêchant la protection du droit de propriété des autochtones et des Marrons. L'État surinamais n'a pas connaissance de cas impliquant la réinstallation forcée de communautés autochtones, a en outre déclaré M. Mac Donald.
Le Représentant permanent du Suriname auprès de l'ONU à New York a ensuite indiqué que le Gouvernement surinamais avait déjà appliqué certains éléments de l'arrêt rendu par la Cour interaméricaine des droits de l'homme dans les affaires Saramaka People vs Suriname et Moiwana Village vs Suriname. Dans les semaines à venir, des membres de la Cour interaméricaine des droits de l'homme vont se rendre au Suriname dans le contexte de l'affaire Kali'na and Lokono Peoples vs Suriname.
Enfin, M. Mac Donald a indiqué qu'aucune plainte n'avait été déposée devant les tribunaux surinamais en rapport avec des délits racistes ou xénophobes.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
M. ALEXEI AVTONOMOV, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Suriname, a relevé que, chose inédite pour un pays du continent américain, le Suriname est un État membre de l'Organisation de la coopération islamique. Il a voulu savoir de quelle manière le pays coopère avec la Commission permanente indépendante des droits de l'homme de l'OCI.
Alors que la langue officielle du Suriname est le néerlandais, beaucoup de ses habitants continuent de parler dans leur propre langue, a ensuite fait remarquer le rapporteur, qui a demandé quels efforts étaient déployés pour préserver et promouvoir les différentes langues parlées dans le pays.
M. Avtonomov a ensuite souhaité savoir si les taux de scolarisation étaient homogènes sur le territoire national ou s'il y avait des zones, notamment à l'intérieur du pays, qui étaient défavorisées en la matière. Relevant que l'éducation bilingue est qualifiée d'officieuse, il a en outre voulu savoir si cela signifie qu'elle n'est pas obligatoire.
Le rapporteur a par ailleurs insisté sur la nécessité de reconnaître les peuples autochtones et leurs droits. Il a aussi voulu savoir ce qui empêche le pays d'accepter et d'appliquer les décisions de la Cour interaméricaine des droits de l'homme.
Le rapporteur a ensuite souhaité en savoir où en était le processus de création de la cour constitutionnelle. Il a en outre recommandé au pays de reconnaître la compétence du Comité, en vertu de l'article 14 de la Convention, pour examiner des plaintes individuelles.
Évoquant enfin la situation des migrants et étrangers au Suriname, il s'est réjoui que le Gouvernement ait amendé sa loi de 1975 afin d'assurer l'égalité entre hommes et femmes en ce qui concerne la transmission de la nationalité. Mais la nouvelle loi en la matière a-t-elle été définitivement adoptée et est-elle entrée en vigueur, a-t-il demandé ?
Parmi les autres membres du Comité, un expert a estimé que le rapport soumis par le Suriname ne répondait pas de manière satisfaisante aux questions et préoccupations du Comité. Ce qui est préoccupant dans ce pays, c'est le traitement qui est encore réservé aux peuples autochtones, d'une part, et aux Marrons de l'autre. Le problème vient de ce que les peuples autochtones ne sont pas reconnus comme tels par le Gouvernement, a insisté l'expert. L'exploitation de zones minières par des sociétés étrangères continue en outre de poser des problèmes, notamment environnementaux, a également souligné l'expert. L'État a saisi près de 45% des territoires traditionnels des peuples autochtones pour en faire, notamment, des réserves naturelles, or, priver ainsi ces peuples du droit de subsister, c'est le priver du droit à exister, a rappelé l'expert. D'autres experts ont souhaité savoir si le Suriname avait l'intention de ratifier la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail (OIT), relative aux peuples indigènes et tribaux, une experte faisant remarquer que le pays mettait déjà en œuvre par certains aspects.
S'il y a des terres ancestrales dans le pays, comme semble le reconnaître le paragraphe 45 du rapport, les peuples concernés doivent avoir des droits sur ces terres, a fait observer un autre membre du Comité; or, au Suriname, ces droits ne semblent être reconnus ni respectés. L'enseignement en langue maternelle – non pas en tant que langue officielle mais en tant que deuxième langue – est essentiel, a par ailleurs souligné cet expert. «On ne peut pas nous dire qu'il n'y a pas de discrimination raciale au Suriname», a-t-il d'autre part déclaré, rappelant qu'il y avait eu des tueries en 2007 entre les différentes communautés et que plusieurs affaires ont été portées devant la Cour interaméricaine des droits de l'homme.
Un expert a fait observer que le code pénal surinamais ne comportait plus de référence à la peine capitale; il a demandé si le Suriname comptait devenir partie au Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort. Il s'est en outre enquis de la place des instruments internationaux dans l'ordre juridique interne du Suriname.
Après qu'un expert eut expliqué que la notion d'Hindoustani renvoie aux langues hindi et ourdou parlées dans le sous-continent indien, un membre du Comité a relevé que la discrimination de caste au sein de cette communauté semble persister au Suriname sans que l'État n'intervienne car il la considère comme une pratique traditionnelle.
Un expert a souhaité savoir si toute la population du Suriname parlait et comprenait le néerlandais, qui est la langue officielle du pays.
Un autre membre du Comité s'est réjoui que la délégation ait qualifié le Suriname de nation multiculturelle et multiethnique, ce qui implique la reconnaissance des différentes composantes de la population. Il a ensuite souhaité savoir si les autochtones qui ont été contaminés au mercure ont eu accès aux services de santé. Quels types de terres sont-ils accordés aux populations autochtones déplacées et réinstallées, a en outre demandé l'expert. Il a rappelé à cet égard que la Déclaration sur les droits des peuples autochtones prévoit que ces nouvelles terres doivent être d'une qualité au moins égale à celles que possédaient auparavant ces personnes.
Aucun État ne peut affirmer qu'il n'existe pas de racisme sur son territoire: si les tribunaux d'un pays ne connaissent pas d'affaires de racisme, c'est soit parce que les gens ne connaissent pas leurs droits, soit parce que les gens n'ont pas confiance dans la justice, soit parce que les tribunaux ne permettent pas d'engager des poursuites pour racisme et discrimination, a souligné le même expert. Il a en outre attiré l'attention sur la distinction qui existe entre peuples autochtones et groupes autochtones.
Un membre du Comité souligné la gravité du problème de la pollution au mercure, mentionnée par plusieurs experts, cette pollution ayant touché nombre de sources d'eau.
Un membre du Comité a souligné que s'il est certes utile de disposer d'informations sur les groupes autochtones et Marrons, comme s'engagent prioritairement à en fournir les autorités surinamaises, il convient également de disposer d'informations sur tous les autres groupes ethniques du pays.
L'expert s'est par ailleurs inquiété d'informations indiquant que les migrants illégaux en provenance d'Haïti seraient victimes de discrimination mais que l'État ne se préoccuperait pas. Qu'en est-il réellement de la situation des migrants illégaux, du nombre d'apatrides et du nombre d'expulsions au Suriname, a demandé l'expert?
Une experte a relevé que le Suriname ne reconnaissait pas la personnalité juridique des peuples autochtones mais seulement celle des particuliers ou des ONG. Elle a plaidé pour l'adoption par le Suriname de mesures spéciales en faveur des peuples autochtones et tribaux.
Relevant que, selon l'article 106 de la Constitution surinamaise, les dispositions des instruments internationaux directement applicables prévalent sur le droit interne, un expert a encouragé le Suriname à adopter davantage de lois visant à assurer la pleine application de la Convention dans le pays. En effet, l'article 4 de la Convention, par exemple, n'est pas directement applicable, puisqu'il requiert l'adoption de lois. Les langues orales sont toujours en danger, menacées de disparition, a en outre souligné cet expert; aussi, les autorités surinamaises devraient-elles veiller à transcrire ces langues par écrit.
Sur les questions de définition, un expert a expliqué à la délégation qu'il ne s'agissait pas pour le Suriname de définir le terme de «race» mais bien de définir la notion de discrimination raciale; et pour cela, le pays dispose de la définition fournie à l'article premier de la Convention.
Un membre du Comité s'est enquis de la stratégie adoptée par le Suriname pour lutter contre la traite de personnes.
Réponses de la délégation
La délégation a rappelé que l'un des objectifs principaux du développement durable était d'éliminer la pauvreté dans un délai de 15 ans. Cet objectif ne saurait être atteint sans s'attaquer aux questions de genre, a souligné la délégation. Elle a fait observer que le Suriname, en ce qui le concerne, n'a eu de cesse de promouvoir l'égalité entre hommes et femmes et de mettre un terme à la violence contre les femmes. L'écrasante majorité de la population étudiante au Suriname est composée de femmes, a par ailleurs fait observer la délégation, avant d'attirer l'attention sur l'augmentation de la présence des femmes parmi les parlementaires.
S'agissant de la création de la cour constitutionnelle, la délégation a réitéré qu'avec le projet de loi transmis au Parlement à cette fin et la mise sur pied d'une commission chargée de mener les consultations sur ce sujet, le pays est certainement entré dans une nouvelle phase de mise en œuvre de l'engagement pris par le Gouvernement en la matière. Pour autant, eu égard au principe de la séparation des pouvoirs, le Gouvernement ne peut donner aucune instruction au Parlement s'agissant de l'approbation de ce projet de loi, a souligné la délégation.
En ce qui concerne la Commission permanente indépendante des droits de l'homme de l'Organisation de la coopération islamique qui a été créée récemment, la délégation a indiqué que cette Commission avait mené plusieurs visites d'orientation à New York, Genève et Washington et rencontré à deux reprises le Représentant permanent du Suriname afin de discuter des moyens d'institutionnaliser plus avant cet organe.
Pour ce qui est du pouvoir judiciaire, la délégation a indiqué que les juges sont nommés par le Président après consultation auprès de la Cour de justice. Les juges sont indépendants, a-t-elle ajouté.
S'agissant des peuples autochtones et tribaux, la délégation a expliqué que le Suriname n'établit aucune distinction entre les peuples autochtones et les peuples tribaux et les considère comme faisant partie du même groupe. Il existe dans le pays une situation unique où les deux communautés ont des caractéristiques similaires du point de vue de leur mode de vie et du lien qu'elles entretiennent avec la terre sur laquelle elles vivent, a expliqué la délégation. Il n'y a pas de chevauchement important de territoires de ces deux types de peuples car les peuples autochtones vivent davantage dans les parties occidentale et méridionale du pays alors que les peuples tribaux se concentrent largement dans la partie orientale. Les peuples autochtones sont les Amérindiens et seuls les Marrons, répartis en six tribus, sont considérés comme des peuples tribaux, a ensuite précisé la délégation.
Le Suriname et le Guyana ont une composition ethnique semblable, à l'exception des Marrons qui sont absents du Guyana, a ensuite indiqué la délégation. Les Marrons, que l'on rencontre également dans d'autres pays tels que la Jamaïque, sont les descendants d'esclaves qui s'étaient échappés et cachés à l'intérieur des terres et avec lesquels les colons avaient été obligés, au XVIIIe siècle, de signer un traité de paix pour mettre fin aux attaques régulières dont ils étaient la cible. Les autochtones vivent sur leurs terres depuis 4000 ans et les Marrons depuis 400 ans, a ajouté la délégation.
En réponse aux nombreuses préoccupations exprimées par les membres du Comité au sujet de la résolution de la question des droits fonciers, la délégation a réitéré que, le Gouvernement considérant cette question comme cruciale, des consultations se poursuivraient avec les peuples autochtones et tribaux en tant que partenaires et non pas en tant qu'opposants du Gouvernement.
Pour ce qui est des questions environnementales, et plus précisément de la question des réserves naturelles, la délégation a souligné que la conservation de la nature relève, tant dans une perspective internationale que dans une perspective nationale, de l'intérêt public. Les trois réserves du pays ont été créées sur la base d'une législation interne préexistante et sont strictement nécessaires pour préserver des espèces, habitats et écosystèmes uniques et menacés, a précisé la délégation. Les activités minières sont interdites dans les réserves naturelles, a-t-elle souligné, ajoutant qu'en revanche, les peuples autochtones et tribaux y conservent le droit de maintenir et poursuivre leurs modes de vie traditionnels.
S'agissant du problème de la pollution au mercure, la délégation a assuré que les autorités surinamaises étaient conscientes de la gravité de cette question, qui suscite l'attention du Gouvernement au plus haut niveau. Récemment, une campagne a été menée pour amener les petits orpailleurs à recourir à d'autres méthodes pour mener leurs activités minières, a indiqué la délégation.
Les Haïtiens sont très appréciés au Suriname; ils ont une bonne réputation, notamment en tant que travailleurs acharnés, et ne se livrent pas à des activités criminelles, a d'autre part indiqué la délégation. Nous n'avons aucune difficulté avec les Haïtiens, a-t-elle insisté. Pour le reste, le Suriname connaît également une immigration brésilienne, tant légale qu'illégale, en provenance du Nord du Brésil, a ajouté la délégation.
Tout Surinamais parle le néerlandais puisque c'est la langue d'enseignement, a indiqué la délégation, avant d'ajouter qu'il existe en outre une langue véhiculaire, le sranang tongo, un créole qui remonte aux premières heures de l'esclavage et avait été créé pour faciliter la communication entre les propriétaires d'esclaves et les esclaves. Cette langue emprunte au néerlandais, au portugais et à l'anglais et comporte des éléments africains.
Au Suriname, chaque groupe ethnique parle sa propre langue et les enfants apprennent donc cette langue en premier chez eux, qu'il s'agisse des enfants autochtones et tribaux ou de ceux qui vivent dans les zones rurales. Les enseignants à la maternelle et durant les premières années de l'enseignement primaire aident les élèves qui maîtrisent mal la langue officielle, a-t-elle ensuite précisé, expliquant qu'il ne s'agit pas d'une éducation bilingue officielle mais d'une méthodologie visant à aider les enfants à poursuivre leur éducation officielle dans la langue officielle en les amenant à mieux comprendre le programme et les procédures de la classe.
S'agissant des questions de santé, la délégation a fait valoir que les soins de santé primaire sont gratuits - financés par l'État - pour les enfants âgés de 0 à 16 ans et pour les personnes âgées de plus de 60 ans.
Il n'est pas exclu qu'il existe un système de castes dans le groupe des Hindoustanis, a admis la délégation, tout en soulignant ne pas disposer de suffisamment d'informations à ce sujet. Mais il ne s'agit aucunement d'un système institutionnalisé au niveau du Gouvernement, a-t-elle assuré.
Si les partis politiques au Suriname ont originellement, en 1954, été organisés sur la base de l'appartenance ethnique, la situation a fortement changé depuis cette date et plusieurs partis comprennent désormais des représentants de différents groupes ethniques.
S'agissant enfin de la place des traités internationaux dans l'ordre juridique interne, la délégation a indiqué que les instruments juridiquement contraignants ont primauté sur les lois nationales.
La législation surinamaise propose une définition de la discrimination mais ne comporte aucune définition du terme de «race», a précisé la délégation en réponse à une question, ajoutant qu'elle allait transmettre aux autorités les suggestions du Comité à cet égard.
Conclusion du rapporteur
M. AVTONOMOV a remercié la délégation pour les efforts qu'elle a déployés dans le cadre de ce dialogue et a indiqué que le Comité était satisfait du caractère constructif de ce dialogue, dont il a espéré qu'il se poursuivrait. Il a indiqué attendre avec impatience le prochain rapport du pays ainsi que les informations de suivi qu'il fournira. Le Comité adoptera des observations finales sur le Suriname, qui aborderont notamment les questions ayant trait aux droits fonciers et à la situation des peuples tribaux. D'autres questions, comme celles se rapportant à l'intégration des migrants et des réfugiés, seront également évoquées.
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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
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