Communiqués de presse Organes conventionnels
Le Comité des droits de l'homme examine le rapport de Monaco
25 mars 2015
25 mars 2014
Le Comité des droits de l'homme a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport présenté par Monaco sur les mesures qui ont été prises pour assurer la mise en œuvre dans le pays des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
La délégation, dirigée par la Représentante permanente de Monaco auprès des Nations Unies à Genève, Mme Carole Lanteri, a souligné que la Principauté ne comptait que 36 900 habitants, dont 8800 ressortissants monégasques, et que plus de 125 nationalités y sont représentées. Elle a ensuite attiré l'attention sur la création d'un Haut-Commissariat à la protection des droits, des libertés et à la médiation, qui apparaît désormais comme le point focal du mécanisme de protection des droits dans leur ensemble. Elle a aussi indiqué qu'une loi de 2011 a adapté le droit monégasque pour répondre à de nouvelles situations familiales et éviter les cas d'enfants apatrides, notamment si la filiation paternelle n'est pas établie; elle permet en outre la transmission de la nationalité monégasque par les femmes l'ayant acquise par filiation ou par naturalisation. Le délai exigé comme condition de transmission de la nationalité par mariage a été porté à dix ans pour les hommes et pour les femmes. Mme Lanteri a aussi attiré l'attention sur la création d'un Centre de coordination prénatale et de soutien familial et précisé que la loi prévoit désormais trois cas spécifiques dans lesquels il est possible de recourir à une interruption médicale de grossesse, à savoir: la préservation de la vie de la femme enceinte, la détection chez l'enfant à naître d'une affection grave reconnue comme incurable au moment du diagnostic prénatal, et le viol, quel qu'en soit l'auteur. Enfin, une loi de 2011 sur «la prévention et la répression des violences particulières» renforce la protection des femmes, des enfants et des personnes handicapées.
La délégation monégasque était également composée de représentants du Département des affaires sociales et de la santé; de la Direction des Services judiciaires; de la Direction de la sûreté publique; du Service du droit international, des droits de l'homme et des libertés fondamentales; de la Direction des affaires internationales. Elle a répondu aux questions qui lui étaient posées par les membres du Comité s'agissant entre autres de la notion de «terrorisme écologique»; de la lutte contre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle; du respect du principe de non-discrimination en matière d'emploi; des délais de naturalisation par le mariage; des dispositions relatives à l'avortement; de la traite des personnes et de l'aide aux victimes; de l'application de la procédure du bannissement; des questions syndicales; de la liberté de conscience et de religion, en particulier face à d'éventuelles pratiques sectaires; du système de vidéosurveillance en place dans la Principauté. La délégation a notamment fait valoir que Monaco n'a pas eu à connaître de plainte ni de condamnation pour crime de torture. Elle a aussi indiqué qu'en aucun cas ni en aucune matière il ne peut y avoir à Monaco suspension des droits et libertés fondamentales consacrés par la Constitution, quelle que soit la gravité de la menace.
Dans leurs observations, des membres du Comité ont jugé encourageant et satisfaisant qu'il n'y ait aucune plainte pour torture à Monaco. L'État partie ne semble pas envisager, pour l'heure, le retrait des déclarations interprétatives et des réserves qu'elle a émises à l'égard de certaines dispositions du Pacte, ont en revanche regretté plusieurs membres du Comité. Il a par ailleurs été relevé que Monaco n'a toujours pas ratifié le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte par lequel est reconnue la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes de particuliers. Des préoccupations ont en outre été exprimées au sujet de la manière dont est appréhendée à Monaco la diffamation en tant que crime de lèse-majesté à l'encontre de la famille princière. Dans ses conclusions à l'issue du dialogue, le Président du Comité, M. Fabián Omar Salvioli, s'est réjoui que la délégation ait indiqué que la ratification par Monaco du Protocole facultatif au Pacte était programmée.
Le Comité a ainsi terminé l'examen de tous les pays au programme de cette session. Il présentera à la fin de la session, le 2 avril prochain, des observations finales sur l'examen de tous les rapports examinés.
Lors de sa prochaine séance publique, vendredi 27 mars, à 15 heures, le Comité se penchera sur ses méthodes de travail.
Présentation du rapport de Monaco
Le Comité est saisi du rapport périodique de Monaco (CCPR/C/MCO/3), soumis selon la procédure facultative d'établissement des rapports sur la base d'une «liste de points à traiter» établie par le Comité (CCPR/C/MCO/Q/3).
MME CAROLE LANTERI, Représentante permanente de Monaco auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a déclaré que la Principauté, d'une superficie de seulement 2,02 kilomètres carrés, est une monarchie héréditaire et constitutionnelle dont la norme suprême affirme la primauté du droit et assure la séparation des pouvoirs. La Principauté ne compte que 36 900 habitants, dont 8800 environ de nationalité monégasque, et plus de 125 nationalités y sont représentées, a poursuivi la Représentante permanente. La Principauté est très engagée dans la promotion et la protection des droits de l'homme, domaines qui constituent l'une des priorités de sa politique nationale et internationale. Cet engagement se traduit en particulier par des actions en faveur des personnes les plus vulnérables, à savoir les enfants, les femmes et les personnes souffrant d'un handicap, a souligné Mme Lanteri.
La Représentante permanente de Monaco a attiré l'attention sur la création, par l'Ordonnance souveraine n°4.524 du 30 octobre 2013, d'un Haut-Commissariat à la protection des droits, des libertés et à la médiation, qui apparaît désormais comme le point focal du mécanisme de protection des droits dans leur ensemble. Toute personne physique ou morale qui estime que ses droits ou libertés ont été méconnus par le Ministre d'État, le Président du Conseil national, le Directeur des services judiciaires, le Maire, les établissements publics, ou par le fonctionnement d'un service administratif relevant d'une de ces autorités ou d'un établissement public peut saisir le Haut-Commissaire, a précisé Mme Lanteri. «Le Haut-Commissaire peut être saisi de réclamations émanant de personnes physiques ou morales estimant avoir, dans la Principauté, été victimes de discriminations injustifiées», a-t-elle ajouté. Le Haut-Commissaire peut aussi être saisi de demandes d'avis ou d'études sur toute question relevant de la protection des droits et des libertés de l'administré dans le cadre de ses relations avec l'Administration, ainsi que de la lutte contre les discriminations injustifiées, a-t-elle poursuivi, soulignant que le Haut-Commissaire accomplit les missions qui lui sont dévolues avec neutralité, impartialité et de manière indépendante. Une association conventionnée d'aide aux victimes a été constituée à Monaco, qui a pour objet l'accueil, l'écoute, l'information, l'orientation et l'aide des victimes de violences, entendues au sens large (physiques, sexuelles, morales, etc..), a d'autre part fait valoir la Représentante permanente.
La loi du 19 décembre 2011 modifiant celle du 18 décembre 1992 a adapté le droit monégasque pour répondre à de nouvelles situations familiales et éviter les cas d'enfants apatrides, notamment si la filiation paternelle n'est pas établie, a par ailleurs indiqué Mme Lanteri. Cette loi permet en outre la transmission de la nationalité monégasque par les femmes l'ayant acquise par filiation ou par naturalisation, a-t-elle ajouté. Enfin, a-t-elle fait valoir, le délai exigé comme condition de transmission de la nationalité par mariage a été porté à dix ans pour les hommes et pour les femmes.
S'agissant de la santé génésique, Mme Lanteri a attiré l'attention sur l'adoption de la loi du 20 avril 2009 portant création d'un Centre de coordination prénatale et de soutien familial et modifiant les articles 248 du Code pénal et 323 du Code civil afin de prévoir trois cas spécifiques dans lesquels il est possible de recourir à une interruption médicale de grossesse, à savoir : la préservation de la vie de la femme enceinte, la détection chez l'enfant à naître d'une affection grave reconnue comme incurable au moment du diagnostic prénatal, et le viol, quel qu'en soit l'auteur. Dans le domaine de la lutte contre les violences domestiques, a poursuivi la Représentante permanente, a été adoptée en juillet 2011 la loi relative à la prévention et à la répression des violences particulières, qui a été instaurée à l'effet de renforcer la protection des femmes, des enfants et des personnes handicapées. Mme Lanteri a également attiré l'attention sur la loi sur la protection, l'autonomie et la promotion des droits et des libertés des personnes handicapées, adoptée le 2 décembre 2014 et dont le «dispositif énonce en particulier l'accès à l'emploi et l'aide par le travail de la personne handicapée, l'octroi de diverses allocations en vue de garantir à la personne handicapée des ressources suffisantes, l'accès facilité aussi bien dans la ville qu'aux moyens de transports urbains, ainsi que l'accueil et la scolarité de l'enfant handicapé». Par ailleurs, il convient de relever qu'un projet de loi sur l'accessibilité du cadre bâti et à bâtir pour les personnes handicapées a été déposé sur le bureau du Conseil national (Parlement) au mois de décembre dernier, a ajouté la Représentante permanente de Monaco.
Mme Lanteri a d'autre part indiqué que suite à l'adoption le 22 octobre 2014 de la loi portant modification de la loi de 1968 sur les élections nationales et communales, est prévue la possibilité pour les détenus d'exercer leur droit de vote par le biais d'une procuration. La Représentante permanente a enfin souligné qu'en dépit d'un contexte international particulièrement difficile, le Gouvernement Princier - qui mène depuis plus de vingt ans une politique de coopération internationale visant principalement l'éradication de la pauvreté, s'efforce de maintenir son engagement en matière de solidarité internationale en faveur des populations les plus défavorisées et à celles durement touchées par les conflits.
Examen du rapport
Questions et observations des experts
Saluant la création en 2013 d'un Haut-Commissariat à la protection des droits, des libertés et à la médiation, un membre du Comité s'est enquis des modalités de désignation du Haut-Commissaire et de la durée de son mandat. Cette institution est-elle appelée à publier un rapport annuel, a également demandé cet expert? Relevant que jusqu'ici, le Haut-Commissaire n'a pas fait appel au Comité international de coordination des institutions nationales de droits de l'homme (CIC) pour être reconnu comme institution nationale conforme aux Principes de Paris, l'expert a demandé si cette institution comptait présenter sa candidature au CIC. Il a par ailleurs relevé que la Principauté de Monaco ne semble pas envisager, pour l'heure, le retrait des déclarations interprétatives et des réserves qu'elle a émises à l'égard de certaines dispositions du Pacte. S'agissant des questions de terrorisme, l'expert a souhaité en savoir davantage au sujet de la notion très vaste et vague du «terrorisme environnemental», sur laquelle Monaco semble mettre l'accent. Ce membre du Comité a par ailleurs jugé encourageant et satisfaisant qu'il n'y ait aucune plainte pour torture à Monaco. Peut-on considérer qu'aucune liberté garantie au chapitre III de la Constitution, y compris celle relative à l'interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains et dégradants, ne saurait être suspendue, quelles que soient les circonstances, a par ailleurs demandé l'expert?
Évoquant la question de la discrimination sur la base de l'orientation sexuelle, un autre expert a jugé bien légère la peine de cinq jours d'emprisonnement assortie d'une amende prononcée dans une affaire de ce type. Ce même expert a ensuite attiré l'attention sur les pratiques associées au système de préférence à l'embauche en faveur des citoyens monégasques. Pourquoi la durée de résidence à Monaco requise pour la transmission de la nationalité (entre époux) est-elle passée de cinq à dix ans tant pour l'époux que pour l'épouse, a en outre demandé l'expert? L'IVG est-elle permise en cas d'inceste, s'est-il également interrogé? La loi impose un délai maximal de cinq semaines de grossesse pour qu'un avortement puisse être pratiqué, a-t-il affirmé, avant de s'enquérir des raisons expliquant la fixation d'un tel délai.
Un autre membre du Comité a souhaité connaître les raisons ou problèmes d'ordre juridique ou institutionnel ayant empêché jusqu'ici Monaco d'adhérer au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).
Relevant que Monaco n'a toujours pas ratifié le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte par lequel est reconnue la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes individuelles (communications), un membre du Comité s'est enquis de l'intention de Monaco de ratifier cet instrument.
Un membre du Comité a demandé si les autorités monégasques avaient l'intention de revoir la législation pénale afin de bien définir les délits de torture et de traitement cruel, inhumain ou dégradant.
Un expert s'est inquiété de la manière dont est appréhendée la diffamation en tant que crime de lèse-majesté à l'encontre de la famille princière à Monaco.
Sous quel délai est-il envisagé d'adopter le projet de loi sur les événements sportifs dont l'objectif est de lutter contre les manifestations d'intolérance dans le sport, a-t-il été demandé? Qu'en est-il en outre de l'incrimination de la motivation raciale d'un acte, a-t-il été demandé?
Un expert s'est enquis du statut migratoire des victimes de traite.
Monaco reçoit-elle des demandes d'asile et comment sont traitées ces requêtes, a-t-il également été demandé?
Un expert a insisté pour savoir ce qu'il en est de l'éventuelle intention du Haut-Commissariat à la protection des droits, des libertés et à la médiation de déposer une demande d'accréditation auprès du Comité international de coordination (CIC) des institutions nationales de droits de l'homme.
Évoquant une affaire de diffamation datant de septembre 2014 qui a vu une personne être condamnée pour insulte au Prince, un membre du Comité s'est demandé pourquoi il fallait avoir recours à la notion d'infraction contre la monarchie - en l'occurrence «insulte au Prince» - pour traiter d'une affaire qui concerne un abus contre des fonctionnaires: n'y a-t-il aucune disposition légale à Monaco qui défende les fonctionnaires contre la violence du public? La législation envisage-t-elle des peines différentes, dans des circonstances similaires – c'est-à-dire pour des faits similaires –, selon que les personnes s'attaquent à la monarchie ou à d'autres personnes, a demandé un autre expert?
Réponses de la délégation
La délégation monégasque a indiqué que le Haut-Commissariat à la protection des droits, des libertés et à la médiation est nommé pour une durée de quatre années, renouvelable une fois, par le Prince, après consultation du Conseil de la Couronne et d'autres autorités administratives monégasques. Conformément à l'Ordonnance portant création de cette institution, il peut être mis fin aux fonctions du Haut-Commissaire dans certains cas, en particulier pour faute grave, pour conflit d'intérêts ou par choix personnel, a précisé la délégation. Ce fut une préoccupation cardinale lors de la mise en place de cette institution que de veiller à ce qu'elle respecte les Principes de Paris, a par ailleurs souligné la délégation. Le nombre de saisines du Haut-Commissariat enregistrées depuis la création de cette institution s'établit à 65, a-t-elle d'autre part indiqué, précisant que 43 dossiers recevables sont en cours de traitement.
À ce stade, il n'est pas envisagé de retirer les déclarations et réserves formulées par le pays à l'égard du Pacte, a indiqué la délégation.
Régulièrement, le Pacte est directement invoqué devant les tribunaux monégasques, puisque Monaco est un État de tradition moniste, a en outre souligné la délégation.
S'agissant de la notion de «terrorisme écologique» et du champ d'application de la législation antiterroriste de Monaco, la délégation a souligné que le «terrorisme écologique» n'est qu'une forme particulière du terrorisme. Il convient donc avant tout de se pencher sur l'infraction terroriste elle-même avant d'appréhender la notion plus particulière de «terrorisme écologique». Ainsi, l'infraction terroriste renvoie-t-elle à un acte commis intentionnellement et dirigé contre l'État ou tout autre État ou organisation internationale, par le biais de l'intimidation ou de la terreur, dont la finalité est la commission d'un certain nombre d'infractions de droit commun. C'est à partir de cette définition générale de l'acte terroriste que peut être appréhendée la notion de «terrorisme écologique» qui, elle, renvoie au fait d'introduire ou de répandre sciemment, sur terre, dans l'air ou dans les mers, toute substance ou produit de nature à mettre en péril la santé de l'homme, des animaux ou la sauvegarde des milieux naturels. Monaco n'a eu à connaître à ce jour d'aucune affaire en rapport avec le terrorisme, a souligné la délégation.
Effectivement, Monaco n'a pas eu à connaître de plainte ni de condamnation pour crime de torture, a par ailleurs fait valoir la délégation. Le Code pénal fait de l'acte de torture une circonstance aggravante; il n'y a eu à Monaco qu'un seul cas où cette circonstance aggravante a été utilisée et reconnue, il y a une dizaine d'années, dans une affaire de meurtre.
Pour ce qui est de l'interdiction des châtiments corporels, la délégation a souligné que dès leur plus jeune âge, les enfants sont sensibilisés à leurs droits; on leur fait connaître la Convention relative aux droits de l'enfant, a-t-elle précisé.
En aucun cas ni en aucune matière il ne peut y avoir à Monaco suspension des droits et libertés fondamentales consacrés par la Constitution, quelle que soit la gravité de la menace, a d'autre part assuré la délégation.
Le 6 juillet 2010, une personne a été condamnée à une peine de cinq jours d'emprisonnement ferme assortie d'une amende de 5000 euros (de dédommagement à la victime) pour des injures à caractère homophobe proférées en public, a indiqué la délégation, avant de rendre compte des mesures prises aux fins de l'élimination de la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. La délégation a attiré l'attention sur l'élaboration d'un projet de loi relatif au statut des fonctionnaires de l'État, qui introduit dans la loi le principe de non-discrimination entre les fonctionnaires sur la base de plusieurs critères dont celui de leur orientation sexuelle; ce projet de texte se trouve actuellement sur le bureau du Conseil national, a précisé la délégation. Concernant l'appréhension pénale des discriminations fondées sur l'orientation sexuelle, la délégation a indiqué qu'a récemment été déposé un projet de loi sur la lutte contre la criminalité technologique qui prévoit comme circonstance aggravante la profération de menaces contre une personne en raison de son orientation sexuelle.
La délégation a en outre rappelé que les Monégasques sont minoritaires dans leur propre pays et bénéficient donc de certaines priorités qui leur sont accordées par la Constitution.
Dans le domaine de l'emploi, aucune discrimination ne saurait être admise sur la base de la race, du sexe ou de la religion, entre autres, a souligné la délégation. Les politiques d'emploi à Monaco ne peuvent être considérées comme discriminatoires car si elles visent à privilégier les citoyens monégasques, minoritaires dans leur propre pays, elles ne privent pas pour autant les non-Monégasques du droit d'occuper un emploi dans la Principauté.
Si le délai de naturalisation par le mariage a été porté à dix ans tant pour les femmes que pour les hommes, la délégation a souligné que ce délai ne s'applique pas pour les personnes qui étaient déjà mariées avant l'entrée en vigueur de la loi ayant porté ce délai à dix ans; ainsi, le délai de cinq ans continue de valoir pour les femmes qui étaient déjà mariées avant l'adoption de cette loi.
En ce qui concerne l'avortement, la délégation a rappelé, comme mentionné plus haut, qu'il est autorisé dans trois cas et notamment en cas de viol; or, l'inceste est considéré comme un viol aux termes de l'article 262.3 du Code pénal, a souligné la délégation. Par ailleurs, ce n'est pas un délai maximum de cinq semaines, mais un délai maximum de douze semaines qui est retenu par les différents textes en vigueur à Monaco pour l'autorisation de pratiquer un avortement.
La ratification par Monaco du Statut de Rome de la Cour pénale internationale exigerait la refonte de différents textes et notamment de la Constitution, a expliqué la délégation. Aussi, à ce stade, Monaco n'a pas ratifié ce Statut et n'envisage de le faire, a-t-elle indiqué. Néanmoins, Monaco a déjà coopéré avec le Procureur de la CPI et reste disposée à coopérer de nouveau avec la Cour, a-t-elle souligné.
À Monaco, a par ailleurs indiqué la délégation, l'infraction de la traite de personnes figure à l'article 8 de l'Ordonnance n°605 du 1er août 2006 portant application de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et de ses protocoles additionnels, article qui renvoie au recrutement, au transport, au transfert et à l'hébergement d'une personne par la menace, la force ou toute autre forme de contrainte. L'article 9 de cette ordonnance prévoit pour cette infraction une peine de 5 à 10 ans d'emprisonnement assortie d'une amende, a précisé la délégation, avant de souligner que pour l'heure, la jurisprudence n'est pas très développée sur ce point. La délégation a par ailleurs souligné que le droit monégasque prévoit un certain nombre de mesures en matière d'aide aux victimes de la traite, notamment en termes de recours et d'indemnisation. Les victimes ont droit à une aide judiciaire, mais aussi à une protection efficace en vue de les soustraire à tout contact direct avec l'auteur ou les auteurs de l'infraction; ainsi peuvent être prises des mesures d'hébergement d'urgence ou d'éloignement de l'auteur de l'infraction. Est également apportée aux victimes une assistance en vue de leur rétablissement physique, psychologique et social, en tenant compte de leur vulnérabilité, a ajouté la délégation.
Depuis 2008, le Gouvernement Princier réfléchit à l'abrogation du bannissement, a par ailleurs indiqué la délégation. Il n'y a aucun obstacle à cette abrogation en termes de volonté politique; la difficulté est d'ordre calendaire, a-t-elle précisé. Il n'y a aucun cas de bannissement à signaler et cette pratique est donc aujourd'hui obsolète, a souligné la délégation. Étant donné qu'il est difficile de déposer un projet de loi ayant trait spécifiquement à l'abrogation du bannissement, les autorités s'efforcent de trouver le véhicule législatif approprié en vertu duquel il pourrait être procédé à un toilettage législatif permettant l'abrogation de cette disposition obsolète, a expliqué la délégation.
S'agissant des questions syndicales, la délégation a indiqué qu'une réforme est en cours qui entend s'inscrire dans le cadre plus général d'une modification du statut des organisations syndicales.
Il n'y a pas en droit monégasque de définition juridique de la secte, pas plus qu'il n'y a de définition de la religion, afin de ne pas heurter la liberté de conscience et de religion, qui est garantie par la Constitution, a poursuivi la délégation. Il n'en demeure pas moins que tout n'est pas permis au nom de la liberté de conscience et de religion; ainsi, les autorités publiques peuvent-elles, par un faisceau d'indices non fixés par la loi mais par certaines commissions de type parlementaire, exercer un contrôle de l'objet sectaire. C'est donc l'appréciation des pouvoirs publics qui va permettre au cas par cas d'exercer un contrôle préventif de l'objet sectaire, a insisté la délégation. Aucun refus à ce jour n'a été opposé, au motif du caractère sectaire, à une demande d'autorisation d'une association, a-t-elle précisé.
En ce qui concerne la diffamation, la délégation a indiqué qu'en septembre 2014, une personne a été condamnée de manière particulièrement sévère pour insulte au Prince suite à une agression verbale très violente auprès des employés du service des accidents de travail du greffe du Palais de justice. La délégation a indiqué qu'il est pénalement interdit d'insulter une personne. Une circonstance aggravante de ce comportement renvoie à la personne de la victime, selon qu'il s'agit d'un particulier, d'un dépositaire de l'ordre public, d'un magistrat, etc. Les particuliers sont pénalement protégés contre toute insulte, mais l'outrage à la famille Princière est, lui, puni plus sévèrement que l'outrage à l'encontre des particuliers, a insisté la délégation. Il reste néanmoins qu'il existe un gouffre entre les peines encourues par l'auteur de cette infraction et les peines prononcées par les magistrats dans ce type - très rare - d'infraction, a-t-elle fait observer.
Interrogée sur les raisons du retrait du projet de loi n°818 concernant les délits relatifs aux systèmes d'information, la délégation a expliqué qu'initialement, ce projet avait pour ambition d'appréhender pénalement les systèmes d'information – les nouvelles technologies – comme objets (cibles) d'infraction ou comme moyens (outils) d'infraction. Quelques mois plus tard, le Gouvernement a élaboré un autre texte spécifiquement centré sur la protection pénale des mineurs et comportant tout une série d'infractions qui appréhendaient les nouvelles technologies comme facteurs d'infractions contre les mineurs, a ajouté la délégation. C'est la raison pour laquelle le premier projet de loi (n°818) a été retiré, a-t-elle expliqué. Néanmoins, en février dernier, un nouveau projet de loi consacré à la criminalité technologique a été déposé devant le Gouvernement qui vise spécifiquement à la protection des matériels informatiques contre toute intrusion ou tout piratage – une thématique de l'ancien projet de loi qui n'avait pas été reprise dans le texte spécifiquement centré sur la protection pénale des mineurs.
Interpellée sur le système de vidéosurveillance en place à Monaco et les garanties entourant l'utilisation de ce système, la délégation a expliqué que les autorités monégasques s'efforcent d'opérer une surveillance du territoire pour y garantir une sécurité maximale. Afin d'y parvenir, elles recourent à un maillage policier très dense mais aussi à un système de «vidéoprotection», a déclaré la délégation. En ce qui concerne le contrôle de ce dispositif de «vidéoprotection», a-t-elle poursuivi, tous les opérateurs et fonctionnaires de police suivent un module d'enseignement axé sur l'éthique qui leur rappelle l'obligation de réserve à laquelle ils sont soumis. Ces personnels peuvent en outre faire l'objet d'un contrôle a posteriori des autorités judiciaires ou administratives et, sur l'instruction de ces dernières, l'Inspection générale de la police peut diligenter une inspection.
Le refoulement d'une personne n'est pas une peine; ce n'est pas une mesure judiciaire, a souligné la délégation. Il s'agit d'une mesure administrative qui reste néanmoins susceptible de recours devant le tribunal suprême; cette mesure est prononcée à l'égard de personnes n'ayant aucune attache à Monaco.
Quant aux demandes d'asile dans la Principauté, elles sont extrêmement rares; les demandeurs d'asile potentiels ont d'ailleurs probablement conscience de l'exiguïté du territoire monégasque, le pays ayant la plus forte densité de population du monde.
Conclusion
Le Président du Comité, M. FABIÁN OMAR SALVIOLI, a jugé excellent le dialogue qui s'est noué entre les membres du Comité et la délégation monégasque. Les experts ont pris bonne note des progrès qui ont été réalisés à Monaco, a-t-il souligné. M. Salvioli a néanmoins souligné que les projets de loi (en cours d'examen dans le pays) ne sont pris en compte par le Comité qu'en tant que projets dont il faudra donc attendre qu'ils soient effectivement mis en œuvre. Le Président du Comité s'est par ailleurs réjoui que la délégation ait indiqué que la ratification du Protocole facultatif au Pacte était programmée à Monaco. Il a invité la Principauté à revoir les réserves et déclarations interprétatives qu'elle maintient à l'égard du Pacte. Pour ce qui est de la définition de la torture, le Comité contre la torture, le Conseil des droits de l'homme l'an dernier, ainsi que les membres du Comité des droits de l'homme aujourd'hui, ont fait part d'un certain nombre de préoccupations, a en outre rappelé M. Salvioli. Tout ce qui tourne autour des procédures d'avortement est un autre sujet important, notamment afin de s'assurer que les femmes qui souhaitent avoir accès à l'avortement ne subissent pas de pression dans leur prise de décision, a ajouté le Président du Comité. Des questions ont en outre porté sur la liberté d'expression et la question de la diffamation, a-t-il rappelé.
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