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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels examine le rapport du Guatemala

18 Novembre 2014

Comité des droits économiques,
  sociaux et culturels 

18 novembre 2014

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport présenté par le Guatemala sur les mesures qu'il a prises pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

M. Antonio Arenales Forno, Président de la Commission de coordination de la politique de l'exécutif en matière de droits de l'homme, a souligné que l'histoire du Guatemala explique en grande partie sa situation actuelle et la difficulté des autorités à garantir à tous les citoyens le plein exercice des droits économiques, sociaux et culturels.  Il a notamment rappelé que la démocratie au Guatemala est née voici à peine 18 ans: les progrès importants réalisés depuis lors n'ont pas suffi à éliminer les obstacles qui empêchent transition d'une démocratie formelle vers une démocratie effective et participative.  Cela étant, l'action des autorités au niveau juridique et la création d'institutions spécialisées ont permis de mettre en place un cadre juridique propice au respect des droits de tous, notamment la commission présidentielle contre la discrimination et le racisme, le fonds de développement des autochtones du Guatemala et une politique de développement rural intégral, dont l'un des objectifs est de rendre sa cohérence au découpage territorial, une tâche titanesque qui bénéficiera à 1,3 million de familles.

La délégation guatémaltèque était également composée de représentants du Ministère des affaires étrangères, du Ministère du travail et de la protection sociale, du Secrétariat d'État au développement rural intégral, du Secrétariat de la présidence à la planification et à la programmation et du Secrétariat à la sécurité alimentaire et nutritionnelle.  La délégation a répondu aux questions des experts du Comité, qui portaient notamment sur la mise en œuvre de la politique nationale de développement rural intégral, la lutte contre la discrimination à l'égard des peuples autochtones et la consultation des peuples autochtones dans les décisions qui les concernent, l'indépendance du système judiciaire, la répression des féminicides ou encore l'efficacité du plan contre la malnutrition chronique, qui touche la moitié des enfants guatémaltèques.  La délégation a précisé que le Guatemala s'était décidé, depuis quelques années, à renforcer le rôle de l'État en tant que moteur et garant du développement.

Le rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport du Guatemala, M. Renato Zerbini Ribeiro Leão, a constaté que si la Constitution guatémaltèque reconnaissait formellement les droits des peuples autochtones, des précisions devaient être apportées s'agissant du respect de l'obligation de consulter les peuples autochtones lors de la réalisation de projets d'infrastructure et industriels les concernant.  Le rapporteur a observé que l'État guatémaltèque n'était pas parvenu, ces dernières années, à accroître ses recettes fiscales ni à augmenter ses dépenses sociales.  L'expert a également demandé des explications sur les raisons pour lesquelles une grande partie de la population ne bénéficie toujours pas du salaire minimum.  M. Ribeiro Leão a relevé en conclusion que le dialogue avait bien rendu compte des difficultés rencontrées par le Guatemala dans l'application du Pacte.

Le Comité adoptera en séance privée des observations finales sur le Guatemala, qui seront rendues publiques à la fin de la session, le 28 novembre prochain.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de la Slovénie (E/C.12/SVN/2).


Présentation du rapport
 
Présentant le rapport du Guatemala (E/C.12/GTM/3), M. ANTONIO ARENALES FORNO, Président de la Commission de coordination de la politique de l'exécutif en matière de droits de l'homme, a déclaré que l'histoire de son pays explique en grande partie sa situation actuelle et la difficulté des autorités à garantir à tous les citoyens le plein exercice des droits économiques, sociaux et culturels.  Le Guatemala a en effet été dirigé pendant une bonne partie des XIXe et XXe siècles par des gouvernements conservateurs et par des dictatures peu soucieux de modifier l'ordre juridique et économique ou d'éliminer la discrimination et l'exclusion issues de la colonisation.  Malheureusement, les réformes libérales déployées au milieu du siècle dernier dans le cadre d'un régime notarial formel et rigide n'ont pu que renforcer le phénomène de la concentration des terres au détriment des peuples autochtones et des métis les plus pauvres, a déclaré M. Forno.  Puis, dans le contexte de la guerre froide, le pays a connu un conflit armé interne long de 36 ans qui s'est terminé, en 1996, avec la conclusion d'accords de paix complets visant notamment la constitution d'une société basée sur le droit et garantissant à tout un chacun la jouissance des droits civils et politiques et des droits économiques, sociaux et culturels, sans discrimination ni exclusion.

La démocratie au Guatemala est donc née voici à peine 18 ans: les progrès importants réalisés depuis lors n'ont pas encore éliminé les obstacles qui entravent encore la transition de la démocratie formelle prévue par la Constitution de 1985 vers une démocratie effective et participative.  Les progrès peuvent être évalués à l'aune d'avancées ponctuelles qui ne rendent cependant pas compte du retard dont souffre la population rurale, autochtone et paysanne. 

Le chef de la délégation a expliqué que le gouvernement actuel avait tenté, l'an dernier, de mettre en place une réforme sur l'identité et les droits des peuples autochtones, intégrant des efforts accomplis précédemment – entre autres une modification du système électoral – en vue d'améliorer la légitimité et la représentativité au plan national, seule manière de donner pleinement effet au principe d'autodétermination des peuples autochtones.  Cette réforme est en discussion au Parlement a indiqué M. Forno, qui a précisé que les intérêts conservateurs prévalent encore à cet égard.  Cela étant, l'action juridique des autorités et la création d'institutions spécialisées ont permis de créer un cadre juridique propice au respect des droits de tous, notamment la commission présidentielle contre la discrimination et le racisme, le fonds de développement des autochtones du Guatemala et l'adoption d'une politique de développement rural intégral (K'atun Nuestra Guatemala 2032).

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. RENATO ZERBINI RIBEIRO LEÃO, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Guatemala, a constaté que le pays avait signé en 2009 le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, mais qu'il ne l'avait pas encore ratifié, ce à quoi M. Ribeiro Leão l'a encouragé.  Le rapporteur a constaté, de plus, que si la Constitution reconnaît formellement les droits des peuples autochtones, des précisions doivent être apportées s'agissant du respect de l'obligation de consulter les peuples autochtones s'agissant de la réalisation de projets les concernant.

Le rapporteur a constaté que l'État guatémaltèque n'est pas parvenu, ces dernières années, à augmenter ses recettes fiscales ni à augmenter ses dépenses sociales.  Des explications doivent aussi être données sur les raisons pour lesquelles une grande partie de la population ne bénéficie toujours pas du salaire minimum, sur le renforcement de l'inspection du travail, sur les pratiques antisyndicales, sur les raisons pour lesquelles le Guatemala n'a pas ratifié la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail relative aux peuples indigènes et tribaux et enfin sur les effets du pacte «faim zéro» (Pacto Hambre Cero), dont il semble qu'il n'atteigne pas toutes les municipalités du pays. 

Parmi les autres membres du Comité qui ont pris la parole, un expert a cité des constatations publiées par de la Banque mondiale selon lesquelles le Guatemala est le pays dont les dépenses sociales sont les moins élevées au monde par rapport à l'importance du secteur économique.  Cette situation explique sans doute une grande partie des problèmes récurrents du Guatemala, de même que l'insuffisance de ses recettes fiscales, qui limitent fortement son action.  C'est ainsi que près de 6% des habitants du Guatemala vivent dans la pauvreté ou l'extrême pauvreté, un problème qui touche de manière disproportionnée les peuples autochtones. 

La discrimination au Guatemala est manifeste dans la faible participation des peuples autochtones et des femmes dans la fonction publique, a poursuivi le même expert.  L'analphabétisme pose également problème: il concerne surtout les zones rurales dans lesquelles vivent les autochtones.  Ce problème est d'autant plus aigu que les peuples autochtones ne bénéficient pas de l'accès à la terre en raison des carences juridiques dans ce domaine.  Autre manifestation de la discrimination, seules 29% des femmes autochtones accouchent dans des structures médicales, contre 70% pour les femmes en général au Guatemala.  D'une manière générale, le modèle économique prévalent dans la région, fortement orienté sur l'exportation, ne tient pas suffisamment compte du développement social et est source de conflit au Guatemala, a enfin relevé l'expert.

Une autre experte a elle aussi souligné le niveau très bas de dépenses sociales au Guatemala, alors que les dispositions du Pacte demandent aux États de consentir les investissements nécessaires à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels.  L'experte a demandé des informations sur le processus de consultation des peuples autochtones dans le cadre des procédures d'autorisation de projets industriels ou miniers, par exemple dans le cadre de l'exploitation de la mine d'or de Marlín.

Un expert a constaté que l'accès au système judiciaire guatémaltèque est restreint, pour des raisons tant géographiques que culturelles.  La délégation a été priée de dire quelle suite avait été donnée au projet de réforme dans ce domaine, visant notamment la mise à disposition d'interprètes pour les justiciables autochtones.  Un autre expert a indiqué que le Comité avait reçu, ces derniers mois, des informations préoccupantes concernant le manque d'indépendance de la justice guatémaltèque.

Une experte a voulu connaître les objectifs à long terme de la politique de développement du Guatemala, et de quelle manière ces plans pourront réduire les inégalités sociales.  Un expert a demandé des statistiques sur la part du budget national consacrée aux droits économiques, sociaux et culturels.

Plusieurs experts ont demandé des renseignements sur la protection dont peuvent bénéficier les défenseurs des droits de l'homme au Guatemala.  Des membres du Comité ont exprimé leur préoccupation face à la persistance au Guatemala du problème du féminicide, malgré sa criminalisation dans le Code pénal.  Une experte a prié la délégation d'expliquer comment les autorités combattent le problème du féminicide et le machisme qui en est à la racine.

Des membres du Comité se sont interrogés également sur la prise en compte, lors de la signature d'accords internationaux de commerce par le Guatemala, des obligations du pays en matière de droits économiques, sociaux et culturels.  Une experte s'est enquise de l'amélioration des pratiques de travail dans les zones franches d'exportation et sur l'action des inspecteurs du travail dans ces zones.

Plusieurs experts ont demandé des détails sur les effets des programmes de création d'emploi et d'aide à la création d'entreprises mentionnés dans le rapport, ainsi que sur l'évolution du montant du salaire minimum ces dernières années en comparaison avec l'augmentation du coût de la vie.

D'autres questions ont porté sur l'ampleur du chômage parmi la population autochtone, sur la protection des droits des travailleurs et travailleuses domestiques et sur les intentions du Gouvernement s'agissant de la ratification de la Convention de l'Organisation internationale du travail sur la sécurité sociale.

Des experts ont relevé des statistiques très alarmantes concernant la dénutrition des enfants au Guatemala et la mortalité maternelle, demandant ce que faisait l'État pour remédier à ces problèmes.  D'autres observations ont porté sur l'accès à la santé génésique, sur le taux élevé de grossesses chez les adolescentes et sur les conditions très restrictives auxquelles l'avortement est autorisé.  Un expert, constatant que le sida progressait au Guatemala, a voulu savoir quelles mesures le Gouvernement comptait prendre à cet égard. 

Un expert a demandé à la délégation d'expliquer le manque de progrès réalisés dans le domaine de la réduction de la pauvreté.  Une autre question a porté sur la progression des monocultures, par opposition à l'agriculture familiale.

Un expert a demandé si la réforme constitutionnelle mentionnée par la délégation permettrait de reconnaître les autochtones comme un peuple et non plus seulement comme un groupe ethnique.
Un membre du Comité a souligné l'importance de protéger les droits des peuples autochtones, auxquels les États sont tenus de donner effet sans délai.  Les dispositions de la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail - relative aux peuples indigènes et tribaux - doivent, à ce titre, être appliquées directement par les administrations concernées.  L'expert s'est étonné que le rapport ne mentionne qu'à une seule reprise la question importante de la préservation des savoirs ancestraux des peuples autochtones.  Un autre expert a demandé si l'État avait prévu une ligne budgétaire relative à la protection des peuples autochtones.

Réponses de la délégation

Répondant aux questions des experts, la délégation a indiqué que, pour résoudre l'accumulation de ses problèmes structurels, le Gouvernement avait poursuivi, avec le soutien de la communauté internationale, la politique de développement rural lancée par les accords de paix de 1996.  Le développement rural doit passer par l'amélioration des conditions de la vie de la majorité de la population vivant dans les campagnes, par le biais de politiques sectorielles complémentaires pilotées par un cabinet de développement rural dirigé par le président de la République.  Validé par la Cour suprême, un plan de mise en œuvre de la politique de développement rural a été initié voici quelques mois, concernant 117 communautés (sur 330).  Les interventions à caractère réaliste, basées sur la situation réelle et les objectifs visés, seront encadrées par un modèle de gestion intégrant les collectivités locales et les organisations de la société civile.  La politique de développement rural contient en particulier un programme prioritaire d'agriculture familiale, dont l'un des objectifs est de rendre sa cohérence au découpage territorial.  Cette tâche titanesque profitera à 1,3 million de familles.  Elle a déjà entraîné une forte augmentation de la valeur de la production agricole.  Dans un pays comme le Guatemala, il est impossible d'envisager le développement sans une action au niveau du développement rural, reflet des inégalités historiques dont il souffre, a résumé la délégation. 

S'agissant de la progression des monocultures au détriment des cultures vivrières, la délégation a confirmé une tendance encore maîtrisée mais qui risque, à terme, d'accentuer encore le phénomène de concentration des terres.  Les autorités ont autorisé récemment la répartition près de 10 000 hectares de terres à des familles de paysans.  Les Ministères de l'agriculture et du développement social ont créé une «plateforme sociale» destinée à canaliser les programmes de soutien à l'agriculture familiale, qui sont au cœur des politiques publiques de développement et de lutte contre la pauvreté. 

Répondant à des questions de suivi, la délégation a précisé que les priorités nationales de développement sont définies en collaboration avec les parties concernées.  C'est particulièrement vrai pour les plans de développement, élaborés en consultation avec les premiers intéressés par le développement économique et rural: femmes, coopératives, militants des droits de l'enfant, notamment.

La délégation a admis que le fait que la Constitution ne les reconnaisse pas en tant que tels explique la discrimination dont sont victimes les peuples autochtones et qui se manifeste, notamment, par leurs difficultés d'accès à la fonction publique, à la magistrature ou dans les organes élus.  On envisage à ce propos de modifier les lois électorales de même que les dispositions régissant l'utilisation des langues officielles dans le fonctionnement de la justice et celles relatives à l'administration du cadastre et de l'état civil, notamment.

Le Gouvernement ne pénalise ni ne sanctionne les défenseurs des droits de l'homme, a assuré la délégation, il respecte le droit de la société civile de manifester et de protester.  Les arrestations pour des motifs justifiés sont le fait des autorités de police, tandis que les poursuites sont engagées par le parquet indépendant.  La délégation a indiqué, en réponse à des questions du Comité, que la procureure générale avait bien accompli son mandat jusqu'à son terme.  Pour changer en profondeur le système judiciaire, il faudra également amender la Constitution, a aussi expliqué la délégation. 

Les effectifs de l'armée ont été réduits après les accords de paix, a indiqué la délégation en réponse à d'autres questions.  Mais, dans un contexte de forte criminalité due aux gangs et au trafic de drogue, il est nécessaire d'engager des militaires en renfort aux forces de l'ordre, a-t-elle précisé.

S'agissant des consultations avec les peuples autochtones exigées par la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail, elles ont été initiées de manière systématique voici trois ans et ont nécessité l'adoption de modalités normalisées dont l'élaboration a été confiée au Ministère du travail.  Ce dernier a tenu compte des avis de l'OIT, consulté la jurisprudence nationale et organisé des colloques avec les parties concernées au niveau national.  Une commission tripartite a été chargée d'organiser des débats avec les communautés autochtones, aboutissant à un premier projet de modalités de consultations.  Ce document est révisé par le Ministère du travail et servira de base à un règlement qui pourrait être adopté ces prochains mois.  Le processus sera couronné par l'adoption d'une loi.  Le processus a été beaucoup plus long que prévu, «le temps des peuples autochtones n'étant pas le temps de l'administration», a souligné la délégation.

Le Guatemala s'est, depuis quelques années, décidé à renforcer le rôle de l'État en tant que moteur et garant du développement, après une décennie 1990 marquée par un désengagement de l'État.  Le Gouvernement a donc adopté des mesures d'intégration des droits de l'homme dans les affaires publiques, tenant compte des aspirations de la société civile et de la nécessaire collaboration avec ce secteur.  Il a été ainsi possible de concevoir des politiques d'inclusion citoyenne visant la réalisation d'objectifs sociaux dans les villes et dans les campagnes.  Le système de développement social est doté de cibles à court, moyen et long termes.  La planification peut s'appuyer sur des données statistiques dont la qualité s'est considérablement améliorée.  Le cadre des droits de l'homme a aidé les autorités à mettre en place les institutions juridiques nécessaires à la consolidation des organes chargés de prendre en charge les besoins spécifiques des femmes, des jeunes, des peuples autochtones, notamment.

Le Guatemala est un pays à revenu moyen, a précisé la délégation, qui a reconnu que le pays a besoin de mieux canaliser les ressources à sa disposition et de faire preuve de davantage de transparence dans ses dépenses.  La lutte contre la corruption joue un rôle très important à cet égard, surtout dans le domaine de l'adjudication des marchés publics.  Le Gouvernement tente également de faire passer une réforme complète du code fiscal visant l'élimination de la fraude et de la contrebande et participe aux initiatives internationales d'échange automatique des données fiscales.

Le Guatemala collabore avec des institutions des Nations Unies et bénéficie encore de l'aide au développement de plusieurs pays, dont l'Espagne, qui a accepté d'aligner son aide sur les objectifs du Guatemala.  Les politiques d'investissement du Guatemala sont conformes aux recommandations de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement.  L'État adopte les politiques nationales pour respecter ses obligations dans ce domaine et investit près de la moitié de ses ressources dans le développement social.  L'investissement dans l'infrastructure – notamment dans le secteur éducatif – est considéré comme un facteur de développement économique et social.  L'État considère par ailleurs que la lutte contre la pauvreté est une responsabilité partagée par les pouvoirs publics et la société civile.

Le Guatemala, signataire des instruments internationaux et régionaux de droits de l'homme, ne ménage aucun effort dans la lutte contre la discrimination sous toutes ses formes.  Les autorités ont établi un mécanisme de consultation pour mieux protéger les droits de l'homme des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres.  L'objectif institutionnel est double: créer une institution de protection et enraciner une politique de lutte contre les discriminations fondées sur l'identité sexuelle.

Le problème de l'enregistrement des naissances s'est posé tout au long de l'histoire du Guatemala, a indiqué la délégation.  L'introduction de sous-registres résulte d'une initiative d'urgence du Parlement pour combler les lacunes de l'état-civil.  La procédure imparfaite témoigne peut-être du manque de prise de conscience quant à l'importance de cette démarche.  Aujourd'hui, les jeunes de moins de 18 ans doivent se voir remettre une nouvelle carte d'identité infalsifiable, alors que près d'un millions de citoyens ne sont pas en mesure d'exercer leurs droits faute de documents d'identité.

Signataire de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, de son Protocole facultatif et d'autres instruments internationaux de même nature, le Guatemala a pris les mesures nécessaires au plan interne pour lutter contre la discrimination et la violence contre les femmes.  Le Code pénal a été expurgé des dispositions discriminatoires envers les femmes qu'il contenait, ce qui, dorénavant, permet en particulier de poursuivre en justice les auteurs de violence domestique. 

La loi contre le féminicide et les autres violences faites aux femmes a notamment permis la création de chambres judiciaires spécialisées.  En 2013, plusieurs dizaines de condamnations ont été prononcées en vertu de cette loi.  Mais la réponse des autorités n'est pas que judiciaire: un ministère est chargé de coordonner les mesures de protection et de prise en charge des femmes victimes de violence dans les autres départements concernés, notamment la santé.  Une experte ayant relevé la multiplication des féminicides au fil des ans, la délégation a précisé que l'augmentation s'explique par les dénonciations et poursuites désormais plus nombreuses, grâce à la sensibilisation de la population.

Une experte ayant observé que le registre d'état-civil est centralisé dans la capitale et estimé qu'il faudrait permettre aux ruraux de se rendre à la mairie la plus proche, la délégation a précisé que les conditions de l'enregistrement des naissances avaient été assouplies.

Les politiques relatives à l'emploi et aux conditions de travail visent le respect des normes en matière de travail décent, la formalisation des employés du secteur informel, l'intégration progressive des travailleurs dans le système de sécurité sociale et le respect des droits syndicaux.  Pour atteindre le premier de ces objectifs, le budget du Ministère du travail a été augmenté.  On a ainsi pu densifier la couverture du système d'inspection du travail, dont les agents mettent désormais l'accent sur les visites inopinées d'entreprises appartenant à différents secteurs jugés prioritaires: trente-six mille d'entre elles - employant 500 000 travailleurs - ont été inspectées en 2013.  Depuis le renforcement du système d'inspection du travail, le taux du travail informel a baissé de 5 points de pourcentage, tandis que 50 000 travailleurs supplémentaires sont désormais couverts par le système de sécurité sociale. 

Seuls 20% des travailleurs au Guatemala bénéficient d'un emploi décent, a reconnu la délégation.  La politique nationale pour un emploi décent adoptée en 2012 prévoit notamment des incitations fiscales pour les entreprises.  Le Gouvernement assure une partie du salaire minimum des jeunes en formation, afin précisément de favoriser leur formation professionnelle.  Également en 2012, les autorités ont introduit un train de mesures pour favoriser le dialogue social tripartite en renforçant les syndicats et en institutionnalisant les négociations collectives.  Le ministère public a ouvert une section chargée de poursuivre les auteurs d'actes de violence contre des syndicalistes; la police a désigné 22 enquêteurs à cette fin.  Toutes ces démarches s'inscrivent dans le cadre des engagements du Guatemala à donner effet aux dispositions des instruments internationaux de droits de l'homme, notamment du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, a indiqué la délégation.

Le pacte «faim zéro» (Pacto Hambre Cero) a été adopté pour répondre aux besoins des nombreux enfants souffrant de la malnutrition chronique (plus de 50% des enfants).  Au plan juridique, le système de sécurité alimentaire a été adopté en 2005, date à partir de laquelle les progrès sont mesurés en collaboration avec l'Office national de statistiques.  Une troisième enquête de suivi sera bientôt publiée.  Les autorités visent la réduction de la malnutrition chronique et de la malnutrition aigüe (c'est-à-dire entraînant le décès des enfants).  L'objectif en matière de malnutrition aigüe est atteint; la grande majorité des cas traités à l'hôpital aboutissent à la survie des patients.  Dans 166 municipalités (la moitié du pays), le taux de malnutrition chronique baisse depuis quelques années de 1,5 point de pourcentage par an environ, pour tomber à 58% environ, ce qui est un progrès important par rapport aux périodes précédentes.  Le programme «faim zéro» poursuit également des objectifs qualitatifs pour lutter contre l'obésité.

Un expert du Comité ayant demandé des précisions chiffrées sur les effets de la lutte contre la pauvreté absolue depuis 2006, la délégation a indiqué que le taux de pauvreté absolue s'élevait, l'année de référence, à 18% environ de la population et à un peu plus de 13% en 2013.  La délégation a indiqué que les personnes vivant avec moins de 1 dollar par jour vivent surtout dans les campagnes.  Pour y remédier, les autorités misent sur des stratégies d'intégration par l'emploi et d'intégration au système de sécurité sociale.  Mais pour ce faire, l'État devra d'abord renforcer sa présence dans certaines zones rurales, actuellement insuffisante.

Le Guatemala considère que le débat sur l'avortement doit porter sur les grossesses résultant d'un viol ou d'un inceste.  Ce débat s'inscrit dans un climat très conservateur marqué par l'influence de l'église, a souligné la délégation.  Le Code pénal a été modifié pour aggraver les peines encourues pour relations sexuelles avec des mineurs.  Un «cabinet pour la jeunesse» organise des campagnes de sensibilisation au problème des grossesses de mineures.  Une experte du Comité ayant ajouté qu'il importe, à cet égard, de cibler les garçons et les hommes.

Le Guatemala a été l'un des premiers États à mettre en cause les stratégies actuelles de guerre contre les drogues, pour lesquelles il cherche des solutions alternatives au niveau international. 

L'accès à l'instruction publique est difficile au Guatemala, a admis la délégation.  Les autorités ont donc débloqué des aides financières et en nature pour améliorer le taux de fréquentation et limiter l'abandon scolaire.  Le budget du Ministère de l'éducation représente environ 6% du budget national.  Dans un contexte de complexification du marché de l'emploi, le Guatemala se détourne progressivement du modèle d'enseignement traditionnel, basé sur l'accumulation des connaissances, pour se tourner vers des modèles et méthodes plus ouverts et bilingues. 

L'État octroie des aides directes aux familles défavorisées pour qu'elles puissent trouver ou construire un logement.  L'État a investi plus de 370 millions de quetzals dans ce secteur, en dépit de la crise.

La délégation a précisé, pour conclure, que son gouvernement avait adopté un règlement en matière de consultation préalable des peuples autochtones, règlement inspiré du modèle péruvien.

Le chef de la délégation a enfin rejeté certaines observations de membres du Comité, qui tendraient à faire croire que son gouvernement aurait une connaissance imparfaite de la teneur du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

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