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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale examine le rapport du Viet Nam

22 Février 2012

22 February 2012

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport du Viet Nam sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant le rapport de son pays, le chef de la délégation vietnamienne, M. Ha Hung, Vice-Président du Comité chargé des questions relatives aux minorités ethniques du Viet Nam, a rappelé que, nation pluriethnique et pluriculturelle, le Viet Nam est composé de 54 groupes ethniques qui vivent ensemble, les Kinhs constituant le groupe majoritaire. M. Ha a attiré l'attention sur «l'harmonie dans laquelle vivent depuis longtemps les différents groupes ethniques du pays et qui est devenue une spécificité historique et culturelle», ajoutant que l'égalité des droits de ces groupes est consignée dans la législation. Précisant que la plupart des minorités ethniques vivaient dans des régions montagneuses ou reculées, où le développement socioéconomique était difficile, il a souligné qu'elles bénéficient donc d'un traitement préférentiel pour rattraper le retard pris par rapport au reste de la population. Les minorités religieuses peuvent librement exercer leur culte, a par ailleurs assuré M. Ha. En dépit des efforts et progrès considérables réalisés par le Viet Nam, de nombreux problèmes d'ordre socioéconomique subsistent, en particulier pour ce qui a trait au développement durable, au retard pris dans la mise en œuvre des nouvelles lois visant à une protection accrue des minorités ethniques, à la lutte contre la pauvreté, au faible niveau de revenu par habitant et à la proportion élevée de gens qui tombent à nouveau dans la pauvreté, en particulier dans les régions montagneuses, reculées et économiquement défavorisées.

La délégation vietnamienne était également composée de représentants du Bureau du Gouvernement; du Ministère des affaires étrangères; du Ministère de la justice; du Ministère de la sécurité publique; du Ministère de l'intérieur; du Comité des affaires ethniques; et du Conseil de l'Assemblée nationale chargé des affaires ethniques. Elle a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant, entre autres, de la place de la Convention dans l'ordre juridique interne; de l'absence d'une définition de la discrimination raciale dans la législation vietnamienne; des mariages mixtes; des questions relatives à l'adoption et à la lutte contre la traite de personnes; et, surtout, de la situation des différentes minorités ethniques et religieuses.

Présentant des observations préliminaires à l'issue de ce dialogue, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Viet Nam, M. Huang Yong'an, a tenu à rappeler que la promotion et la protection des droits de l'homme dépendaient, dans une large mesure, de la stabilité politique et économique de l'État partie et des efforts qu'il déploie à cette fin. Le Gouvernement vietnamien doit s'efforcer de faire tout ce qui est en son pouvoir pour protéger les droits fondamentaux de toutes les populations vivant sur son territoire, a-t-il souligné. Il a par ailleurs relevé qu'aucune disposition de la législation vietnamienne ne traite spécifiquement de discrimination raciale. D'autre part, le Viet Nam ne dispose toujours pas d'institution nationale de droits de l'homme conforme aux Principes de Paris.

Le Comité rendra publiques ses observations finales sur le rapport du Viet Nam à la fin de la session, le vendredi 9 mars prochain.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport du Canada.

Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays (CERD/C/VNM/10-14), M. HA HUNG, Vice-Président du Comité chargé des questions relatives aux minorités ethniques et chef de la délégation du Viet Nam, a indiqué qu'un groupe de travail interinstitutions avait été constitué aux fins de l'établissement de ce rapport et que le Comité dont il assume la vice-présidence avait été désigné comme organe de liaison pour l'établissement de ce document. Comme l'illustre ledit rapport, la garantie des droits fondamentaux des minorités ethniques est le résultat de l'application de la Convention sur l'élimination de toutes formes de discrimination raciale.

Nation pluriethnique et pluriculturelle, le Viet Nam est composé de 54 groupes ethniques qui vivent ensemble, les Kinhs constituant le groupe majoritaire (85,7 % de la population). Les 53 autres groupes ethniques comptent 12 253 000 personnes, soit 14,3 % de la population totale. La communauté que forment les divers groupes ethniques vietnamiens s'est formée et s'est développée au fil d'une histoire de plusieurs milliers d'années d'édification et de défense de la nation qui a contribué à forger un pays uni, a-t-il indiqué en substance.

Certains des 53 groupes ethniques comptent plus d'un million de personnes, tandis que cinq groupes ont moins de 1000 membres, a précisé M. Ha. Les minorités ethniques sont réparties sur l'ensemble du territoire, la plupart d'entre elles vivant dans les régions montagneuses aux côtés d'autres ethnies. Cependant, aucune région/territoire ne correspond à une ethnie particulière. «Cette situation témoigne de l'harmonie dans laquelle vivent depuis longtemps les différents groupes ethniques du pays, et qui est devenue une spécificité historique et culturelle», a affirmé M. Ha, ajoutant que l'égalité des droits de ces groupes est consignée dans la législation.

Le chef de la délégation a également indiqué que la plupart des minorités ethniques vivaient dans des régions montagneuses ou reculées, où le développement socioéconomique était difficile. Il en résulte qu'elles bénéficient d'un traitement préférentiel en vue de la promotion des ressources et pour rattraper le retard pris par rapport au reste de la population.

Partant de la devise vietnamienne d'égalité, d'unité et de respect mutuel pour un développement commun à tous les groupes ethniques, des politiques ont été élaborées et mises en œuvre pour garantir les droits civils et politiques de tous les citoyens, y compris les minorités ethniques, qui ont vu leur représentation s'accroître dans le système politique du pays, a poursuivi M. Ha. A l'heure actuelle, a-t-il précisé, 48 minorités ethniques sont représentées au sein de l'Assemblée nationale. Au cours de la dernière décennie, l'Assemblée nationale a promulgué quelque 151 lois dont 38 concernent directement les droits et obligations des minorités. Ainsi, hormis le Comité chargé des questions relatives aux minorités ethniques, de niveau ministériel, il existe dans les provinces à forte population ethnique une agence spécialisée ayant pour mandat d'assister les autorités locales dans la mise en œuvre des politiques faveur desdites minorités.

Au plan international, a rappelé M. Ha, le Viet Nam a adhéré aux principaux instruments relatifs aux droits de l'homme et a activement participé à des réunions d'envergure contre le racisme et la discrimination raciale, telles que la Conférence de Durban de 2001 et sa Conférence d'examen tenue en 2009. Le Viet Nam a également appuyé des initiatives et résolutions visant à combattre le racisme.

La Constitution, le Code de procédure pénale et d'autres codes juridiques garantissent les droits civils et politiques de tous les citoyens, y compris des membres des minorités ethniques, a indiqué le Vice-Président du Comité chargé des questions relatives aux minorités ethniques. Les droits associés aux libertés de mouvement, de résidence, de changement du lieu de résidence et de voyage à l'intérieur et à l'extérieur du pays sont reconnus et protégés, de même que le droit du mariage –sur le principe du consentement mutuel –, ainsi que le droit de procréer et de donner naissance. Les minorités ethniques ont également droit à la propriété des biens et des capitaux.

Par ailleurs, a poursuivi M. Ha, toutes les religions au Viet Nam sont placées sur un pied d'égalité et les minorités religieuses peuvent librement exercer leur culte, conformément à la politique sur les minorités et à celle sur la religion. La région du Nord-Ouest compte plus de 100 000 protestants d'origine Hmong et Da'o, a-t-il précisé. Dans cette même région, le nombre d'églises est passé de 29 en 2010, à 258 en 2011, a-t-il fait valoir. Environ 38 000 catholiques appartenant aux minorités ethniques vivent dans les régions montagneuses du nord du pays, alors que dans les régions centrales, 185 congrégations et 1268 églises ont été reconnues, pour 400 000 protestants. Enfin, l'Eglise évangéliste du Viet Nam a publié 30 000 bibles en langues Bana, Gia rai et Ede dans le but de répondre aux besoins religieux de la minorité religieuse protestante. Les Khmers du Sud peuvent, quant à eux, utiliser des livres de prières bouddhistes en langue pali.

M. Ha a indiqué qu'en mai 2010, le Premier Congrès national des minorités ethniques vietnamiennes s'était déroulé avec la participation de 1750 délégués représentant les 53 groupes ethniques.

S'agissant de la presse, le chef de la délégation a indiqué qu'à la fin 2009, le Viet Nam comptait 706 publications, réparties entre 178 journaux et 528 revues, ainsi que 67 stations de radio et télévision, 21 journaux électroniques, 160 sites Internet de journaux imprimés et des milliers de sites en lignes. Parallèlement, a-t-il précisé, les minorités ethniques ont eu chaque fois plus accès aux techniques de l'information et de la communication (TIC), Internet en particulier. En octobre 2010, le pays comptait 26 millions d'internautes et 94% des écoles ainsi que la totalité des universités disposaient d'une connexion Internet.

Concernant la liberté d'assemblée et d'association, M. Ha a cité le décret 45/2010/ND-CP du Gouvernement relatif à la création, l'organisation et la gestion des associations qui stipule que tous les citoyens, y compris les membres des minorités ethniques, avaient le droit de créer une association et d'être membre d'une association, conformément à la loi.

Enfin, M. Ha a déclaré qu'en dépit des efforts et progrès considérables réalisés par son pays, de nombreux problèmes d'ordre socioéconomique subsistent, en particulier pour ce qui a trait au développement durable, au retard pris dans la mise en œuvre des nouvelles lois visant à une protection accrue des minorités ethniques, à la lutte contre la pauvreté, au faible niveau de revenu par habitant et à la proportion élevée de gens qui tombent à nouveau dans la pauvreté, en particulier dans les régions montagneuses, reculées et économiquement défavorisées. Le taux de pauvreté reste en effet élevé avec un revenu par habitant de 200 dollars américains en 2010 dans les régions éloignées, a-t-il précisé. Des efforts sont également nécessaires pour l'amélioration de l'éducation et de la formation dans ces régions, de même qu'en termes d'accès à l'information et aux services publics, à la sécurité sociale et aux services de santé, a conclu le chef de la délégation vietnamienne.

Examen du rapport

Questions et observations des experts

M. HUANG YONG'AN, rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport du Viet Nam, a fait observer que le Viet Nam s'est reconstruit très rapidement sur les ruines d'une guerre terrible et a connu un succès remarquable dans les domaines économique et social. Ce pays s'est également efforcé d'appliquer progressivement la primauté du droit, en dépit des difficultés posées par le problème de la dette extérieure et par les crises économiques et financières. Il convient en outre de se réjouir que le Viet Nam ait adhéré à la Convention contre la torture et envisage de ratifier la Convention sur les droits des personnes handicapées.

Le rapporteur du Comité a toutefois demandé au Viet Nam de fournir des données ventilées concernant toutes les minorités, surtout lorsqu'il organise un recensement. Il a en outre relevé que la législation vietnamienne ne contient pas explicitement l'expression «discrimination raciale» et se contente, dans le Code pénal, de traiter de ségrégation. Aucune loi spécifique n'existe sur la discrimination raciale, a insisté M. Huang. D'autre part, le Viet Nam ne dispose toujours pas d'institution nationale de droits de l'homme conforme aux Principes de Paris, alors que la création d'une telle institution avait pourtant déjà fait l'objet d'une recommandation de la part du Comité. Tout en prenant bonne note du fait que, aussi bien dans la loi sur la nationalité que dans la loi électorale ou dans les codes pénal et de procédure civile voire dans d'autres lois, le principe de l'égalité entre les groupes ethniques est cité, le rapporteur a déploré que le Viet Nam ne précise pas comment ce principe est appliqué dans la pratique. Il serait bon que la délégation indique les difficultés rencontrées à cet égard.

Relevant par ailleurs que l'élimination de la pauvreté et de la faim faisait partie de la Stratégie décennale de développement socioéconomique pour 2001-2010, M. Huang a souligné que là encore, manquent des données quant aux résultats obtenus.

Les dispositions figurant dans les nouvelles lois sont significatives mais comment s'occuper concrètement de la préservation et de la transmission culturelle du patrimoine des minorités ethniques, s'est ensuite interrogé le rapporteur, faisant observer que des disputes récentes avaient éclaté autour de la question des droits fonciers? Des mesures concrètes doivent donc être adoptées par le Gouvernement pour régler les différends fonciers entre les minorités ethniques et les autorités locales, a-t-il insisté. Il a souligné que l'Experte indépendante sur les questions relatives aux minorités (qui a effectué une mission au Viet Nam en juillet 2010) avait fait état de manifestations pacifiques ayant suscité l'usage excessif de la force de la part des autorités.

Les mesures prises jusqu'ici par le Gouvernement semblent insuffisantes, a poursuivi M. Huang, plaidant en particulier en faveur des femmes et des fillettes des minorités ethniques et posant le problème du bilinguisme, surtout dans les zones frontalières. Le Viet Nam doit encore faire des efforts en matière d'éducation précoce dans la langue maternelle, comme cela est fait pour les Kinhs, a-t-il ajouté. Il a également plaidé en faveur de l'éducation aux droits à l'intention des fonctionnaires judiciaires, des agents des forces de l'ordre, des militaires et autres agents travaillant ou intervenant auprès des minorités ethniques.

La franchise dont fait preuve le Viet Nam a été relevée par plusieurs experts, certains d'entre eux ajoutant qu'ils auraient néanmoins aimé voir figurer dans le rapport davantage de données concrètes sur la mise en œuvre des politiques visant l'élimination de la discrimination ou de pratiques discriminatoires, surtout du point de vue des minorités ethniques. Un expert s'est inquiété des risques de stéréotypes associés aux populations les plus défavorisées; c'est là le grand défi auquel est confronté le Viet Nam, a-t-il insisté, mettant l'accent sur le fossé existant entre régions urbaines, d'une part, et régions rurales ou reculées où vivent les groupes ethniques, de l'autre.

L'interdiction des stéréotypes dans les textes n'implique pas leur absence sur le terrain, a souligné un membre du Comité.

Quel suivi a été accordé aux visites effectuées par l'Experte indépendante sur les questions relatives aux minorités et par le Rapporteur spécial sur l'extrême pauvreté, a demandé un membre du Comité? Il a également été demandé à la délégation de réagir aux allégations des ONG concernant les exactions et violations de droits de l'homme dont seraient victimes les minorités ethniques, notamment la violence, la persécution religieuse, les harcèlements et les arrestations arbitraires à leur encontre. Qu'en est-il du «permis d'enregistrement des familles», ainsi que de la double discrimination – ethnique et religieuse – à l'encontre des Montagnards, majoritairement chrétiens, ou des Hmong, a-t-il été demandé? Qu'en est-il également des mesures positives prises en faveur de ces minorités, à savoir les politiques préférentielles dont le rapport fait état, notamment en matière de formation scolaire et professionnelle?

Des détails ont également été demandés sur les plaintes déposées pour discrimination raciale. A aussi été demandée la liste des organisations de la société civile qui ont pris par aux consultations durant la phase de préparation du présent rapport.

Un membre du Comité a soulevé la question de la consultation des communautés ethniques dans le contexte des grands projets d'exploitation industrielle les affectant. Qu'en est-il du consentement de ces communautés aux déplacements et réinstallations dont elles peuvent faire l'objet? Ce même expert a souhaité en savoir davantage au sujet des droits fonciers de ces minorités et de la prise en compte de leur désir dans ce contexte.
Une experte a critiqué la classification des minorités ethniques en fonction de la date de leur présence sur le territoire et a suggéré au Gouvernement de faire reposer leur classification sur le concept d'auto-identification.

L'article 87 du Code pénal pourrait être utilisé pour justifier l'arrestation de manifestants pacifiques qui chercheraient à défendre les droits des minorités, s'est inquiété un expert, souhaitant que cet article soit amendé pour protéger toutes les minorités contre la discrimination raciale.

Le Gouvernement vietnamien ne pourrait-il envisager de revoir sa position afin de reconnaître à certains la qualité de «groupes autochtones», comme le revendiquent par exemple les Montagnards, a demandé un expert?

Un autre expert a souhaité savoir si une communauté musulmane était présente au Viet Nam et, le cas échéant, si elle était en mesure de pratiquer sa religion.

Un autre membre du Comité a souhaité en savoir davantage sur la notion de castes inférieures au Viet Nam et sur les mesures prises pour lutter contre ce phénomène.

Un expert a salué les efforts significatifs déployés par le Viet Nam pour prévenir les abus en matière d'adoption d'enfants originaires des régions les plus défavorisées et pour y remédier.

Un membre du Comité a demandé si le Viet Nam envisageait de faire la déclaration prévue à l'article 14 de la Convention (concernant la reconnaissance de la compétence du Comité pour examiner des plaintes - ou communications).

D'autres experts ont relevé des contradictions entre les informations fournies par le Gouvernement, d'une part, et par les organismes des Nations et les ONG, y compris vietnamiennes, de l'autre.

Un expert a prié le Gouvernement vietnamien d'adopter la définition de la discrimination raciale figurant dans la Convention, soulignant que cela faciliterait la mise en place de politiques plus pertinentes à l'égard des 53 minorités ethniques autres que les Kinhs, au cœur des priorités actuelles du Gouvernement.

Un autre expert a relevé que selon ce qu'indique le rapport, les minorités, les femmes, les enfants et les personnes âgées sont en train de payer le tribut de l'ouverture aux marchés économiques mondiaux et s'est donc enquis de l'impact de cette ouverture sur ces groupes vulnérables. Une experte a pour sa part critiqué le parti pris du Gouvernement vietnamien actuel qui, à l'exception des Kinhs, considère tous les autres groupes comme des minorités ethniques, alors que l'appellation «autochtones» serait plus appropriée. Cette même experte a rappelé l'engagement pris par le pays, lors de son examen périodique universel, de mettre sur pied une commission nationale des droits de l'homme dotée des moyens humains et financiers nécessaires à un mandat indépendant et conforme aux Principes de Paris.

Le Viet Nam fait la guerre à la pauvreté et à l'injustice, mais il doit aussi la faire contre les disparités et les injustices faites aux groupes vulnérables, a souligné un membre du Comité.

Un expert s'est enquis de l'éventuelle existence de mariages mixtes entre une personne d'une minorité ethnique et un Kinh. Comment de tels mariages mixtes, s'ils existent, sont-ils perçus?

Y a-t-il des immigrés au Viet Nam et quel est leur statut, a demandé un expert?

Réponses de la délégation

La délégation vietnamienne a souligné que l'être humain était au centre de la politique du développement du Gouvernement.

Au Viet Nam, les dispositions du droit international prévalent sur celles de la légalisation interne, a par ailleurs rappelé la délégation. Les instances exécutive, législative et judiciaire pertinentes entendent veiller à la suppression de toute contradiction entre le droit national et le droit international, a-t-elle souligné.

S'agissant de la définition de la discrimination raciale, la délégation a indiqué qu'au Viet Nam la discrimination s'entend de toute limitation ou préférence fondée sur la race, la religion ou le sexe; la Constitution interdit catégoriquement cette forme de discrimination, a-t-elle précisé. La haine raciale et l'incitation à la violence ou à la haine entre les groupes ethniques sont également interdites et pénalisées, a poursuivi la délégation.

La législation nationale vietnamienne interdit formellement toute discrimination, tout stéréotype et toute stigmatisation, a insisté la délégation, indiquant prendre bonne note de l'allégation d'une organisation non gouvernementale selon laquelle il existerait au Viet Nam une certaine forme de stigmatisation verbale.

L'article 87 du Code pénal (qui incrimine l'incitation à la haine ethnique, les actes de discrimination et de ségrégation ethnique et les atteintes au principe de l'égalité dont jouissent les groupes ethniques du Viet Nam) n'a pas pour but de jouer contre les minorités mais, bien au contraire, de consolider la liberté d'expression et de comportement, la paix nationale étant le but ultime de toute la législation dans ce domaine, du fait de la nature pluriethnique du Viet Nam – le pays cherchant à prévenir et à condamner les divisions ethniques, a expliqué la délégation.

Un certain nombre d'étrangers s'installent au Viet Nam et jouissent pleinement de tous leurs droits et libertés, tandis que des millions de touristes visitent le pays tous les ans et il n'y a aucun traitement discriminatoire ni dans la loi ni dans les faits, a par ailleurs déclaré la délégation.

Le terme «nationalité» a deux acceptions au Viet Nam: l'une en rapport avec la notion de nation et l'autre en rapport avec l'appartenance à un groupe ethnique, a poursuivi la délégation.

L'auto-identification, la langue et la culture sont les principaux critères permettant d'identifier les groupes ethniques, lesquels n'ont pas de territoire assigné, a par ailleurs souligné la délégation, précisant qu'il arrive que l'on trouve dans un seul et même district dix groupes ethniques différents. La cinquantaine de groupes ethniques que compte le pays appartiennent à deux grands groupes anthropologiques, mais il n'existe pas de distinction raciale, a ajouté la délégation. En conséquence, en dépit des distinctions culturelles et économiques, il ne peut y avoir de discrimination raciale, a-t-elle affirmé.

La délégation a ensuite fait valoir que la politique nationale ethnique vise à combler le fossé économique entre certains groupes par le truchement d'un renforcement des capacités et de l'égalité des chances.

Quant au concept de «peuples autochtones», il est méconnu dans le pays car tous les Vietnamiens viennent d'ailleurs, a expliqué la délégation. Après la réunification et l'indépendance, le terme «autochtone» n'a plus été employé mais il n'empêche qu'une réflexion sur la question s'avère sans doute nécessaire, a-t-elle ensuite admis.

S'agissant de l'origine et de l'ancienneté des différentes ethnies sur le territoire vietnamien, la délégation a répondu que l'ethnie Kinh, majoritaire, se trouvait dans le pays depuis des milliers d'années et qu'à ce titre, elle était tout aussi «autochtone» que les autres. La délégation a néanmoins reconnu, une fois de plus, la nécessité de recherches plus poussées sur le sujet. Peu importe le nom donné aux groupes ethniques, l'essentiel est qu'ils soient reconnus et bien traités, a-t-elle toutefois souligné.

Le système de caste n'a jamais existé au Viet Nam, si ce n'est il y a très longtemps chez certains groupes ethniques où il y avait les nobles, d'un côté, et les roturiers, de l'autre, a souligné la délégation.

S'agissant des questions religieuses, la délégation a admis que certains fonctionnaires ne comprennent pas toujours les termes et l'esprit de la législation sur les religions. Dans le Nord-Ouest du pays, 250 paroisses ont été reconnues par le Gouvernement, a-t-elle notamment souligné.

La délégation a évoqué une affaire, associée à une minorité ethnique Hmong, où des missionnaires ont embrigadé des personnes, les amenant à vendre tous leurs biens au profit de certaines communautés ethniques et où des chefs de clans ou de tribus ont incité au séparatisme et à la haine ethnique, suscitant une intervention du Gouvernement car il fallait protéger les victimes contre les fraudes et la coercition, fournir des soins médicaux aux populations et les encourager à revenir dans leurs villages. Certains éléments ont alors résisté et le Gouvernement a été forcé de prendre des mesures et de les arrêter, a indiqué la délégation. Elle a également évoqué les événements violents intervenus sur les plateaux centraux, où il a aussi fallu procéder à des arrestations en raison des destructions et de la violence.

L'explication de la délégation sur la situation de certains Hmong dans une région montagneuse rappelle l'existence d'une secte, comme la secte du révérend Sun Myong Moon, aux Etats-Unis, où un chef spirituel a quasiment le droit de vie ou de mort sur les membres de la secte, a déclaré un expert, qui a jugé que l'intervention des autorités dans un tel contexte était sans doute justifiée. Toutefois, cet expert a recommandé aux autorités de prévenir de telles escalades tragiques par le biais de l'éducation de la population en général, et des minorités en particulier, pour éviter que des personnes soient abusées par les prôneurs d'une «vision apocalyptique de l'existence humaine».

Pour ce qui est de la recommandation visant à ce que soit promulguée une loi spécifique sur les droits des minorités ethniques, la délégation a fait valoir que tous les documents et textes législatifs existants contiennent des dispositions qui incitent à une politique de discrimination positive aux fins de réduire l'écart entre ces groupes minoritaires et le reste de la population.

S'agissant du développement des minorités, la délégation a indiqué fonds spécial avait été mis en place pour associer ces populations au développement et au progrès du pays. Les activités dans ce cadre se focalisent sur la création d'infrastructures nécessaires au développement humain, sur les services d'éducation et de santé, sur la création d'emplois et sur l'accès aux ressources, a-t-elle précisé. Une journée nationale des minorités ethniques est organisée chaque année, a-t-elle ajouté. En outre, des programmes de renforcement des capacités sont également exécutés.

Les écoles sont des établissements étatiques qui prennent en charge toutes les dépenses, notamment celles liées aux fournitures scolaires et des bourses sont accordées aux garçons et filles qui souhaitent étudier dans des établissements privés, a indiqué la délégation. Un enseignement bilingue est dispensé, notamment grâce à une collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), a-t-elle ajouté.

La délégation a par ailleurs indiqué qu'il existe des conseillers juridiques spécialisés dans la participation des minorités ethniques aux prises de décisions politiques, afin que celles-ci appréhendent mieux leurs droits et puissent les exercer en toute connaissance de cause. Le Conseil des minorités, quant à lui, agit comme organe de liaison entre les autorités centrales et locales.

Les pauvres, les minorités ethniques, les enfants et les populations rurales des régions reculées sont au cœur des priorités de la politique d'État vietnamienne, a souligné la délégation.

S'agissant des droits fonciers, la délégation a expliqué que la loi sur la compensation et celle sur la construction prévoient que les nouveaux sites d'installation (pour les personnes déplacées) doivent être de qualité au moins égale, voire supérieure, aux précédents.

La délégation a ensuite fait état des politiques préférentielles menées à l'intention des minorités ethniques dans les domaines de l'emploi, de la fiscalité (réduction des obligations fiscales) et de l'éducation (octroi de nombreuses bourses d'études à l'université et dans les écoles professionnelles). Une politique de soutien a également été mise en place en faveur des entreprises dirigées par des membres des minorités. Grâce à l'application de ces dispositions préférentielles, le sort d'environ 4500 travailleurs a été amélioré, a précisé la délégation.

La délégation a par ailleurs fait observer que le taux de natalité des minorités comptant moins de 10 000 personnes est inférieur à la moyenne nationale. Elle a indiqué que ces communautés minoritaires bénéficient de services préférentiels – cinq d'entre elles bénéficiant d'investissements directs. La délégation a ainsi attiré l'attention sur un site de réinstallation mis en place au bénéfice de l'une de ces communautés, avec construction d'une route et d'infrastructures et autres projets de développement lui permettant de subsister à ses besoins.

Les Musulmans se trouvent dans les régions où vit l'ethnie Cham; ils représentent environ 10 000 personnes qui pratiquent leur culte dans 78 sites religieux répartis dans plusieurs provinces. Ils disposent d'associations musulmanes, organisent des pèlerinages et se rendent dans d'autres pays islamiques, a indiqué la délégation.

Concernant le mariage, la délégation a déclaré que celui-ci n'est soumis à aucune condition, financière ou de quelque autre nature, y compris pour ce qui est des mariages mixtes entre un membre de la communauté Kinh et un membre d'une minorité. Un enfant issu d'un mariage mixte sera élevé selon les paramètres d'une culture ou de l'autre, en fonction du bon vouloir de ses parents, qui peuvent aussi se ré-identifier. En matière d'adoption, les membres des minorités ont les mêmes droits que les autres, a ajouté la délégation.

Un programme de prévention et de lutte contre la traite des personnes vise à la sensibilisation de l'opinion publique contre ce fléau, a poursuivi la délégation.

S'agissant des questions liées à la traite de personnes et aux abus en matière d'adoption, la délégation a souligné que l'une des solutions à ces trafics réside dans la mise en œuvre de programmes de sensibilisation dans les régions concernées, de lutte contre la pauvreté, de création d'emplois et de promotion de l'égalité des chances. L'autre volet de la politique à suivre face à ces trafics consiste à coopérer avec les forces de l'ordre pour démanteler les filières de traite de personnes et d'adoption illégale de nouveau-nés. A cet égard, il convient de rappeler que le Viet Nam est co-auteur du Plan d'action mondial des Nations Unies contre la traite des personnes. Aucune personne coupable de traite n'a bénéficié d'une quelconque forme d'amnistie, a souligné la délégation.

Certains textes législatifs sont en cours d'amendement, comme ceux sur la presse et sur le droit d'association, a en outre indiqué la délégation.

Elle a par ailleurs souligné qu'une commission nationale des droits de l'homme existe d'ores et déjà au Viet Nam, même si elle ne répond pas entièrement aux Principes de Paris.

En conclusion, la délégation vietnamienne a invité les membres du Comité à se rendre dans le pays sur place et a réitéré le souci constant du Gouvernement vietnamien de s'activer afin de garantir les droits des minorités dans tous les domaines de la vie, dans le cadre de l'application des dispositions de la Convention. Ce faisant, le Viet Nam se heurte à des difficultés d'ordre financier, mais surtout à des problèmes d'accès aux régions les plus reculées du pays, a précisé la délégation.

Observations préliminaires

Présentant ses observations préliminaires à l'issue de ce dialogue, M. HUANG YONG'AN, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Viet Nam, a tenu à rappeler que les membres du Comité ne s'érigeaient nullement en juges et que leur but était de faire avancer les États parties dans la mise en œuvre de la Convention. Il a rappelé que la promotion et la protection des droits de l'homme dépendaient, dans une large mesure, de la stabilité politique et économique de l'État partie et des efforts qu'il déploie à cette fin. Le Gouvernement vietnamien doit s'efforcer de faire tout ce qui est en son pouvoir pour protéger les droits fondamentaux de toutes les populations vivant sur son territoire, a-t-il souligné.

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