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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité contre la torture entame l'examen du rapport de l'Irlande

23 Mai 2011

MATIN

23 mai 2011

Le Comité contre la torture a entamé, ce matin, l'examen du rapport de l'Irlande sur la mise en œuvre des dispositions de la Convention contre la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Après la présentation du rapport, les membres du Comité ont posé des questions complémentaires à la délégation, qui fournira ses réponses demain après-midi.

Présentant le rapport de son pays, M. Seán Aylward, Secrétaire général au Ministère de la justice et de l'égalité de l'Irlande, a tenu à réitérer publiquement que l'Irlande condamne sans réserve et sans équivoque la pratique de la torture. La loi de 2000 donnant effet à l'application de la Convention ne prévoit aucune circonstance exceptionnelle qui justifierait l'usage de la torture. M. Aylward a ajouté que l'Irlande dispose d'un solide système national d'inspection des lieux de détention et a annoncé que le Gouvernement irlandais venait d'approuver la préparation de la législation en vue de ratifier le Protocole facultatif (mécanisme de prévention de la torture). S'agissant des mesures prises pour remédier à la surpopulation carcérale, il a notamment attiré l'attention sur un programme qui a permis de construire et d'ouvrir près de 600 places supplémentaires pour prisonniers depuis 2008. Le Gouvernement irlandais s'engage en outre à traiter la question des sanitaires dans les cellules, dont ne disposent que 72% des prisonniers. L'Irlande prend aussi des mesures déterminées pour s'assurer qu'elle ne devient pas un pays de destination ou de transit pour le commerce du trafic d'êtres humains.

La délégation irlandaise était également composée du Représentant permanent de l'Irlande auprès des Nations Unies à Genève, M. Gerard Corr, ainsi que de représentants du Ministère de la justice et de l'égalité; du Ministère des affaires étrangères; du Ministère de la santé; et du Ministère de l'enfance.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Irlande, M. Luis Gallegos Chiriboga, a soulevé la question de la situation des prisonniers ayant des problèmes psychologiques; le consentement au traitement, qui figure dans la loi sur la santé mentale de 2001, n'est pas conforme aux normes internationales en la matière, a-t-il souligné. La question de la traite de personnes est également un sujet de préoccupation. Évoquant un manque de volonté politique au sujet des «vols secrets de la CIA», M. Gallegos Chiriboga a rappelé l'appel lancé par Amnesty International pour qu'une enquête indépendante soit menée sur les allégations selon lesquelles des avions étrangers opérant dans le contexte du programme de «transferts» de prisonniers par les États-Unis ont transité par l'espace aérien ou les aéroports irlandais. Mme Myrna Y.Kleopas, corapporteuse, a rappelé que plusieurs organes régionaux et nationaux de surveillance ont sévèrement critiqué les conditions de détention dans les établissements carcéraux irlandais, notamment s'agissant de la surpopulation carcérale et des conditions sanitaires et de l'hygiène jugées insuffisantes. Elle a par ailleurs jugé urgent que soit traitée la question de la violence entre les détenus. Elle s'est en outre inquiétée qu'il n'existe pas en Irlande de mécanisme indépendant de plaintes et d'enquête dans les prisons, pas plus qu'il n'existe de possibilité d'enquête indépendante sur les circonstances des décès en prison. Plusieurs membres du Comité ont recommandé à l'Irlande de prendre des mesures pour accorder réparation aux femmes victimes des pratiques qui avaient cours dans les blanchisseries irlandaises jusqu'en 1996.

Cet après-midi, le Comité entendra les réponses de la délégation de Monaco aux questions que les experts lui ont adressées vendredi dernier.

Présentation du rapport de l'Irlande

M. SEÁN AYLWARD, Secrétaire général au Ministère de la justice et de l'égalité de l'Irlande, a tenu à réitérer publiquement, étant donné qu'il s'agit de la première apparition du pays devant ce Comité, que l'Irlande condamne sans réserve et sans équivoque la pratique de la torture. Le recours à la torture, quelles que soient les circonstances, est totalement contraire au concept même d'une société civilisée; la torture est un affront à la démocratie. L'Irlande est totalement engagée en faveur des cadres et des mécanismes qui ont été établis par la communauté internationale afin d'éradiquer la pratique odieuse de la torture, a ajouté M. Aylward.

En Irlande, il a été donné effet à l'application de la Convention par le biais de la loi de 2000 sur la justice pénale (Convention des Nations Unies contre la torture), a poursuivi le Secrétaire général du Ministère de la justice et de l'égalité. Cette loi ne prévoit aucune circonstance exceptionnelle – état de guerre ou menace de guerre, instabilité politique interne ou quelque autre situation d'urgence publique – qui justifierait l'usage de la torture, a-t-il souligné. En vertu de cette loi, un agent de la fonction publique ou toute personne agissant à son instigation ou avec son consentement ou sa connivence, qui commet un acte de torture contre une autre personne peut être poursuivi en Irlande pour torture, quelle que soit sa nationalité et où qu'ait été commis l'acte de torture. En outre, les délits liés au crime de torture ont été définis dans cette même loi et sont soumis à une juridiction extraterritoriale totale. Cette loi prévoit aussi l'incrimination de tentative d'acte de torture ou de conspiration en vue de commettre un acte de torture, ou tout autre acte dans l'intention de faire obstruction ou obstacle à l'arrestation d'une personne, que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur du pays. Tous ces actes peuvent être poursuivis devant les tribunaux irlandais qu'ils constituent ou non un crime en vertu de la loi de l'État dans lequel ils ont été commis, a précisé M. Aylward.

L'Irlande dispose d'un solide système national d'inspection des lieux de détention, a poursuivi M. Aylward. Les organes statutaires qui opèrent à cette fin et procèdent à des inspections régulières et inopinées – Inspecteur des prisons, Inspecteur des services de santé mentale, Inspection des services sociaux – fonctionnent sous les auspices de divers ministères et en particulier du Ministère de la justice et de l'égalité; du Ministère de la santé; et du Ministère de l'enfance, a-t-il précisé.

Outre ce système national bien établi d'inspections, l'Irlande est engagée en faveur de la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, a ajouté M. Aylward. Toutefois, une législation sera nécessaire avant qu'il ne soit procédé à cette ratification, afin d'établir le mécanisme national de prévention qu'exige ce Protocole; cette législation précisera par ailleurs les pouvoirs du Sous-Comité de la prévention de la torture. «Je suis heureux d'annoncer aujourd'hui que le Gouvernement irlandais a approuvé mardi dernier (18 mai 2011) la préparation de la législation en vue de ratifier le Protocole facultatif», a indiqué M. Aylward. S'il n'est pas possible pour l'heure de fournir une date indicative pour l'adoption de cette législation, aucun effort ne sera épargné pour faire avancer aussi vite que possible cette adoption, a-t-il ajouté.

Relevant qu'un certain nombre d'informations soumises au Comité soulèvent des questions spécifiques ayant trait au système carcéral irlandais, M. Aylward a fait part des mesures concrètes que le pays a prises et continuera à prendre afin de traiter certaines de ces questions. Il a ainsi souligné que des mesures ont été prises pour augmenter les capacités carcérales, faisant à cet égard observer que le problème de la surpopulation carcérale n'est pas propre à l'Irlande. Le Gouvernement irlandais s'est par ailleurs engagé à assurer que les délinquants violents et autres délinquants coupables de crimes graves accomplissent des peines appropriées, tout en veillant à ce que les délinquants non violents et coupables de crimes moins graves soient tenus à l'écart des peines d'emprisonnement et soumis à des options moins coûteuses via des peines autres que la détention. Ces deux mesures se traduiront par la réduction de la population carcérale globale et contribueront à atténuer la surpopulation carcérale, a indiqué M. Aylward, ajoutant que l'État irlandais s'est engagé dans un programme qui, depuis janvier 2008, a permis de construire et d'ouvrir près de 600 places supplémentaires pour les détenus.

S'il ne sera pas possible de réduire en une nuit la question des sanitaires dans les cellules, le Gouvernement irlandais est engagé à traiter cette question, a poursuivi M. Aylward. Actuellement, a-t-il précisé, 72% des prisonniers disposent de sanitaires dans leurs cellules; cette proportion passera à plus de 80% avec l'extension, en 2012, de la prison de Midlands (300 places supplémentaires), actuellement en cours.

L'Irlande prend des mesures déterminées pour s'assurer qu'elle ne devient pas un pays de destination ou de transit pour le commerce du trafic d'êtres humains, a par ailleurs souligné M. Aylward. Ainsi, a-t-il précisé, une Unité de lutte contre le trafic d'êtres humains a été créée en 2008 au sein du Ministère de la justice et de l'égalité, afin de veiller à ce que la réponse de l'Irlande face au trafic soit coordonnée, globale et holistique. La loi pénale de 2008 sur le trafic des êtres humains prévoit des peines pouvant aller jusqu'à l'emprisonnement à vie et une amende illimitée pour le trafic de personnes à des fins d'exploitation sexuelle ou pour le travail voire pour le prélèvement d'organes; cette loi incrimine la vente, l'offre de vente et l'achat ou l'offre d'achat d'une personne, à quelque fin que ce soit.

L'engagement de l'Irlande à lutter contre la violence fondée sur le sexe a été considérablement renforcé par la mise sur pied, en juin 2007, d'un bureau spécifiquement consacré à cette question, le Cosc (Bureau national pour la prévention de la violence domestique, sexuelle et basée sur le sexe), dont l'objectif est d'apporter une réponse coordonnée de l'ensemble du Gouvernement à ce type de violence. Le Cosc, en consultation avec de nombreuses parties prenantes gouvernementales et non gouvernementales, a élaboré une Stratégie nationale sur la violence sexuelle domestique et la violence fondée sur le sexe pour les années 2010-2014.

Le rapport initial de l'Irlande (CAT/C/IRL/1) rappelle que le droit irlandais est fondé sur la common law, telle que modifiée par la législation ultérieure et par la Constitution de 1937. Les textes adoptés par le Parlement britannique avant 1921 ont force de loi à moins qu'ils n'aient été abrogés par le Parlement irlandais. Conformément à la Constitution, la justice est rendue en public dans des tribunaux consacrés par la loi. Il existe quatre niveaux de juridiction: le tribunal de district, le tribunal de circuit, la High Court et la Cour suprême, ainsi qu'une cour d'appel. Par ailleurs, la Constitution prévoit que des tribunaux pénaux spéciaux peuvent créés par la loi pour juger des infractions «dans des cas où il peut être établi, conformément à la loi, que les tribunaux ordinaires ne sont pas en mesure d'assurer une administration efficace de la justice, ou de préserver la paix et de maintenir l'ordre public». En conséquence, conformément à la cinquième partie de la loi de 1939 relative aux infractions contre l'État, des tribunaux pénaux spéciaux peuvent être établis une fois que le Gouvernement a déclaré que «les tribunaux ordinaires ne sont pas en mesure d'assurer l'administration de la justice ou de préserver la paix et de maintenir l'ordre public». Le tribunal créé en 1972 a toujours siégé en tant que juridiction comprenant trois juges en exercice, issus respectivement de la High Court, d'un tribunal de circuit et d'un tribunal de district, et il siège sans jury. La décision de poursuivre ou non une affaire particulière devant le tribunal pénal spécial est prise par le Procureur général, qui est statutairement indépendant du Gouvernement.

La Commission du Médiateur de la Garda Síochána (police nationale) est un organisme indépendant créé en vertu de la loi de 2005 sur la Garda Síochána et représente un modèle de surveillance indépendante des activités de la police dans l'État. Aucun membre ni ancien membre de la Garda Síochána ne peut être membre de la Commission qui est présidée par un ancien Directeur général du Ministère des affaires étrangères. Entre le 9 mai 2007 et le 31 décembre 2008, la Commission a reçu 4746 plaintes et 374 autres lui ont été transmises par le Directeur des services de police en vertu du paragraphe 1 de l'article 102 de la loi de 2005 sur la Garda Síochána; pour ces dernières il y avait des éléments donnant à penser que des actes de membres de la Garda avaient pu causer la mort de personnes ou des lésions graves. Au total, 1909 plaintes ont été déclarées irrecevables, indique le rapport. Il attire par ailleurs l'attention sur la décision du juge Costello dans l'affaire W v. Ireland (no 2) [1997] 2 IR 141, qui a déclaré que «Les droits garantis par la Constitution ne sont pas des droits absolus (à l'exception du droit implicite de ne pas être torturé, lequel doit être considéré comme un droit absolu qui ne peut jamais être limité) et leur exercice et leur jouissance peuvent être limités, et sont souvent limités par les exigences du bien commun.».

La Garda Síochána peut enquêter sur toute allégation de mauvais traitement ou de torture formulée contre un agent de l'État, précise le rapport. La décision d'engager une procédure pénale incombe au Procureur général, qui agit en toute indépendance du Gouvernement. La Commission du Médiateur de la Garda Síochána est habilitée à enquêter sur toute allégation recevable de manquement au devoir commis par des membres du Service de police.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. LUIS GALLEGOS CHIRIBOGA, Rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Irlande, a souhaité savoir si l'Irlande avait l'intention de ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention, qui prévoit la création d'un mécanisme national de prévention, étant donné qu'il n'existe à ce stade dans le pays aucun organisme centralisé de l'État qui soit chargé de la coordination des activités des différentes inspections menées dans les lieux de détention, prisons et autres institutions du pays.

M. Gallegos Chiriboga s'est également enquis des mesures éventuellement prises pour résoudre le problème de la coupure budgétaire de 32% qu'a subie la Commission irlandaise des droits de l'homme.

Le rapporteur a demandé quelles mesures ont été prises pour veiller à ce que puisse commencer son travail l'autorité d'information et de qualité de la santé qui est chargée d'enregistrer et d'inspecter les services résidentiels pour les personnes handicapées et les personnes âgées. Il convient de souligner qu'il existe des préoccupations importantes quant aux conditions des prisonniers ayant des problèmes psychologiques, a par ailleurs souligné M. Gallegos Chiriboga, avant de rappeler que le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) avait soulevé cette question des conditions dans lesquelles ces prisonniers sont traités dans les prisons irlandaises. Le consentement au traitement, qui figure dans la loi sur la santé mentale de 2001, n'est pas conforme aux normes internationales en la matière, a fait observer le rapporteur. Sur ce thème, il existe une grave préoccupation au sujet de l'internement des personnes handicapées mentales dans des institutions dans lesquelles elles ne disposent d'aucune voie de recours en appel.

La question de la traite de personnes est également un sujet de préoccupation, a poursuivi M. Gallegos Chiriboga, avant de préconiser que l'Irlande examine la possibilité de ratifier le Protocole visant la prévention, la suppression et le châtiment du trafic de personnes ainsi que le Protocole à la Convention relative aux droits de l'enfant qui traite de la vente d'enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants.

Évoquant un manque de volonté politique au sujet des vols secrets de la CIA, M. Gallegos Chiriboga a souligné qu'Amnesty International avait attiré l'attention sur une révélation du Wikileaks concernant la conversation que l'Ambassadeur des États-Unis avait eue avec le Ministre irlandais des relations extérieures dans laquelle l'Ambassadeur américain remerciait le Ministre d'avoir résisté à la recommandation de la Commission des droits de l'homme visant à ce que le Gouvernement irlandais inspecte les avions soupçonnés d'avoir été utilisés pour emmener des personnes vers des sites où elles ont été torturées. Amnesty International soutient qu'une enquête indépendante devrait être menée sur les allégations selon lesquelles des avions étrangers opérant dans le contexte du programme de «transferts de prisonniers» (rendition) des États-Unis ont transité par l'espace aérien ou les aéroports irlandais; cela permettrait en effet d'éclaircir d'éventuelles violations des droits de l'homme et d'assurer que soient prises des mesures afin d'empêcher, à l'avenir, que de tels «transferts» ou autres violations des droits de l'homme soient directement ou indirectement facilités.

M. Gallegos Chiriboga s'est par ailleurs enquis des mesures prises pour circonscrire les vastes pouvoirs – pouvant aller jusqu'à l'ordre d'expulsion – accordés au Ministère de la justice en vertu de la loi sur les migrations de 1993. Divers rapports d'organisations non gouvernementales font état de préoccupations selon lesquelles l'Irlande pourrait violer l'article 3 de la Convention contre la torture, notamment par manque de transparence susceptible d'exposer les réfugiés au risque d'être renvoyés dans un pays où ils pourraient être soumis à la torture, a fait observer le rapporteur. Il s'est en outre inquiété du faible taux de reconnaissance du statut de réfugiés, alors que pour 2010, 98,5% des décisions (réponses aux demandes d'asile) furent négatives. Il existe également des préoccupations face à la faculté octroyée par la loi de 2010 sur la protection, la résidence et la migration qui autorise un agent des migrations ou de la Garda Síochána (police nationale) à procéder à l'expulsion sommaire d'un ressortissant étranger sans papiers.

Enfin, M. Gallegos Chiriboga s'est inquiété que la prolifération de médiateurs en Irlande ne complique plus qu'elle ne facilite la défense et la promotion des droits de l'homme.

MME MYRNA Y.KLEOPAS, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de l'Irlande, s'est félicitée des mesures prises par l'Irlande pour réduire la durée de la garde à vue. Elle s'est toutefois enquise des mesures prises par le pays pour veiller à ce qu'aucune exception ne soit faite à l'enregistrement des interrogatoires, quelle que soit par exemple la nature de l'infraction dont la personne interrogée est soupçonnée. Mme Kleopas a en outre souhaité savoir ce qui est fait pour veiller à ce que les personnes gardées à vue plus de 24 heures puissent se livrer à des exercices physiques à l'extérieur.

Pour ce qui est de la situation des prisons, plusieurs organes régionaux et nationaux de surveillance, ont sévèrement critiqué les conditions de détention dans les établissements carcéraux irlandais, notamment au regard de la surpopulation carcérale et des conditions sanitaires et de l'hygiène jugées insuffisantes, a poursuivi Mme Kleopas, appelant l'Irlande à ne ménager aucun effort pour régler ce problème de surpopulation. Elle a notamment suggéré à l'Irlande d'envisager des mesures autres que les peines privatives de liberté. Elle a en outre attiré l'attention sur la difficulté qu'il peut y avoir à gérer de très grandes prisons comme l'une de celles que l'Irlande s'apprête à construire. Tout en prenant note de la volonté des autorités irlandaises de promouvoir les conditions sanitaires dans les prisons du pays, Mme Kleopas s'est demandé si, dans l'intervalle, l'Irlande allait autoriser les détenus qui souhaitent aller aux toilettes à le faire même pendant la nuit. En effet, les difficultés d'accès à des sanitaires peuvent être assimilées à une peine ou un traitement cruel, inhumain ou dégradant, a-t-elle souligné.

Une autre question qui doit être traitée de toute urgence est celle de la violence entre les détenus, a poursuivi Mme Kleopas, faisant observer que dans son rapport, le CPT souligne que la situation dans certaines prisons reste préoccupante et que les prisonniers comme le personnel doivent être protégés, alors que se produisent des attaques quotidiennes.

La détention des mineurs doit être utilisée comme mesure de dernier recours, a par ailleurs rappelé Mme Kleopas, avant de relever que selon une loi de 2001, les garçons âgés de 16 à 17 ans peuvent être placés en détention à la prison de Saint Patrick, ce qui est contraire aux engagements de l'Irlande.

Il n'y a pas en Irlande de mécanisme indépendant de plaintes et d'enquête dans les prisons, a d'autre part déploré la corapporteuse, avant de s'enquérir des intentions de l'Irlande dans ce domaine. En ce qui concerne les décès en prison, il n'y a pas de possibilité d'enquête indépendante sur les circonstances de ces décès, s'est en outre inquiétée Mme Kleopas; elle a demandé à l'Irlande comment elle avait l'intention de remédier à ce problème. Elle s'est aussi enquise de l'intention de l'Irlande de créer un organe indépendant pour veiller à la protection des enfants mineurs placés en détention.

Mme Kleopas a d'autre part déploré le manque de chiffres disponibles concernant les comportements des agents carcéraux, c'est-à-dire les éventuels cas de torture en prison, pas plus que ne sont disponibles des chiffres sur le nombre d'enquêtes et le nombre de poursuites engagées pour de tels faits. Le CPT, dans son rapport de 2010, indique que la majorité des détenus affirment être traités correctement par les fonctionnaires des prisons; cependant, dans certaines prisons, surtout celle de Cork, la délégation du CPT a reçu des allégations de violences verbales, en particulier de propos racistes, à l'égard des étrangers et des gens du voyage, a souligné Mme Kleopas.

La rapporteuse s'est en outre enquise de données ventilées concernant la violence conjugale et a souhaité savoir si l'Irlande avait l'intention de mettre sur pied un mécanisme indépendant d'enquête sur les violences perpétrées à l'encontre des femmes emprisonnées dans les blanchisseries entre 1922 et 1996, afin que celles-ci obtiennent réparation, conformément aux dispositions de la Convention.

À cet égard, plusieurs autres membres du Comité ont recommandé à l'Irlande de prendre des mesures pour accorder réparation aux femmes encore en vie qui avaient été victimes des pratiques qui avaient cours dans les blanchisseries du pays jusqu'en 1996. Une experte a souligné qu'on savait bien, même à l'époque, ce qui se passait dans ces «couvents de la Madeleine» et que montre le film Magdalena Sisters.

Un autre expert a souhaité savoir si le recours en habeas corpus en faveur d'une personne placée en détention peut être interjeté par la Commission irlandaise des droits de l'homme. Combien de temps le placement en isolement cellulaire peut-il durer, a en outre demandé l'expert? Il a aussi voulu savoir quelle était l'autorité chargée de demander à l'État concerné les garanties pour s'assurer qu'une personne renvoyée dans son pays n'y sera pas soumise à des actes de torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Une experte a relevé que ces dernières années, environ 6000 demandeurs d'asile sont arrivés en Irlande, dont plus de 2000 au titre du rapprochement familial. Néanmoins, s'est-elle inquiétée, plus de 500 d'entre eux auraient disparu; aussi, s'est-elle interrogée sur le type de centres dans lesquels ces requérants sont accueillis.

Une experte s'est inquiétée d'une sorte de «délit de faciès» en Irlande, alors que la police semble procéder à des contrôles d'identité sur cette base.

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