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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'Élimination de la discrimination à l'égard des femmes examine le rapport de l'Afrique du Sud

21 Janvier 2011

Comité pour l'élimination de la discrimination
à l'égard des femmes

21 janvier 2011

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné, aujourd'hui, le rapport périodique présenté par l'Afrique du Sud sur les mesures prises par le pays pour mettre en œuvre des dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Présentant le rapport, Mme Marytheresa Xingwana, Ministre des femmes, des enfants et des personnes handicapées, a indiqué que l'autonomisation des femmes et la parité entre les sexes sont des priorités absolues pour l'Afrique du Sud. Le Ministère entend contribuer à la réalisation progressive des droits des femmes au cours des prochaines années, en parvenant à un équilibre entre culture, droits et égalités entre les sexes. Mme Xingwana a précisé que son gouvernement adopte des politiques destinées à répondre aux besoins des femmes en ce qui concerne l'accès aux fonctions politiques; la loi fixe un objectif de représentation paritaire dans les instances gouvernementales et électives. Aujourd'hui, 43% des ministres sont des femmes, qui représentent par ailleurs 40 % des élus au niveau local. Face au problème des violences sexuelles, les services de police ont réactivé leurs unités spécialisées dans les affaires de violence familiale, la protection de l'enfance et les cas de violence sexuelle; 175 unités sont maintenant pleinement opérationnelles.

L'importante délégation de l'Afrique du Sud était également composée d'autres représentants du Ministère des femmes, des enfants et des personnes handicapées, ainsi des Ministères de la santé, de l'éducation de base, de la justice et du renforcement constitutionnel, des services et de l'administration publique, du développement social, des affaires traditionnelles et de la gouvernance coopérative ainsi que des relations et de la coopération internationales. La Commission pour l'égalité entre les sexes était également représentée. La délégation a répondu aux questions du Comité portant sur le mandat du Ministère des femmes, des enfants et des personnes handicapées; sur l'adoption de la nouvelle loi sur l'égalité entre les sexes; sur les mesures que le Gouvernement a prises pour protéger les femmes et les filles contre la violence, la violence sexiste et les agressions sexuelles; sur l'ampleur de la traite des êtres humains en Afrique du Sud; et sur la représentation des femmes dans la fonction publique et sur le marché du travail.

En conclusion, la Vice-Présidente du Comité, Mme Zohra Rasekh, a félicité le Gouvernement de ses nombreuses démarches en faveur de la lutte contre la discrimination à l'encontre des femmes. Elle a indiqué aussi que le Comité est alarmé par la prévalence de violences et de violences sexuelles contre les femmes en Afrique du Sud. Il est préoccupé, en outre, par le problème de la traite des êtres humains et par la situation des femmes rurales dans ce pays.

Le Comité adoptera en séance privée ses observations finales sur les rapports de tous les pays examinés et les rendra publiques ultérieurement.

À sa prochaine séance publique, lundi 24 janvier à partir de 15 heures, le Comité tiendra une réunion informelle avec des institutions nationales de droits de l'homme et des organisations non gouvernementales du Bangladesh, de Sri Lanka et du Bélarus, trois pays dont les rapports seront examinés la semaine prochaine.

Présentation du rapport de l'Afrique du Sud

MME MARYTHERESA XINGWANA, Ministre des femmes, des enfants et des personnes handicapées de l'Afrique du Sud, a déclaré que son gouvernement attachait la plus grande importance aux activités du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, dont il a étudié avec intérêt les recommandations adressées à l'Afrique du Sud à l'issue de l'examen de son rapport initial. Ces recommandations ont guidé la formulation de la politique nationale en faveur des femmes. En effet, l'autonomisation des femmes et la parité entre les sexes sont des priorités absolues pour l'Afrique du Sud. C'est pourquoi le Président Jacob Zuma a décidé la création du Ministère des femmes, des enfants et des personnes handicapées, dont le mandat est de promouvoir la réalisation de ces deux objectifs, de donner la priorité aux progrès en faveur des femmes rurales et handicapées grâce à une action de coordination et de contrôle. Le Ministère entend contribuer à la réalisation progressive des droits des femmes au cours des prochaines années, en parvenant à un équilibre entre culture, droits et égalité entre les sexes.

Le Gouvernement de l'Afrique du Sud s'est particulièrement engagé en faveur de la réalisation de l'accès des femmes à la terre par le biais d'une réforme agraire. Le Gouvernement encourage dans ce contexte les initiatives visant à aider les femmes à se constituer un revenu et à accéder aux prestations sociales. L'Afrique du Sud a en outre décidé de donner la priorité à l'éradication de la pauvreté, surtout de la pauvreté des femmes. La campagne «Guerre à la pauvreté» a déjà permis de faire diminuer les taux de pauvreté, même s'il est vrai que les femmes sont toujours plus pauvres que les hommes et que la pauvreté urbaine a tendance à s'aggraver.

Mme Xingwana a en outre précisé que son gouvernement adoptait des politiques destinées à répondre aux besoins des femmes en ce qui concerne l'accès aux fonctions politiques. Ainsi, la loi fixe un objectif de représentation paritaire dans les instances gouvernementales et élues. Quarante-trois pour-cent des ministres sont aujourd'hui des femmes; elles représentent par ailleurs 40 % des élus au niveau local. Dans le domaine judiciaire, un quart des juges des tribunaux cours supérieures sont des femmes, et 40 % dans les cours inférieures. Cependant, malgré ces avancées, des progrès restent à faire s'agissant de la présence des femmes dans le secteur privé, où les femmes sont toujours victimes de discrimination.

Abordant le problème des violences sexuelles, la Ministre a indiqué que suite à l'adoption d'une nouvelle loi en 2007, les autorités sont autorisées à établir des registres d'auteurs de violences sur des enfants, permettant aux employeurs de faire en sorte que ces personnes ne soient pas employées dans des postes qui les mettent en contact avec la jeunesse. Les services de police ont pour leur part réactivé leurs unités chargées des situations de violence familiale, de la protection de l'enfance et des cas de violence sexuelle, qui mènent des enquêtes spécialisées en cas de violations graves à l'appui de l'action de la justice; 175 unités sont pleinement opérationnelles, dotées d'un encadrement à tous les niveaux capable de leur insuffler l'élan requis. Par ailleurs, la Commission nationale de réforme législative envisage l'adoption d'une loi permettant aux autorités de criminaliser la pratique traditionnelle de l'enlèvement des jeunes filles en vue d'un mariage. Enfin, une Direction des enquêtes pénales a été créée pour renforcer les capacités en matière d'enquêtes sur des cas de traite d'êtres humains.

Le rapport périodique de l'Afrique du Sud (CEDAW/C/ZAF/2-4) indique notamment que l'application de la Convention en Afrique du Sud a bénéficié, en particulier, de l'importance que les programmes du Gouvernement sud-africain post-apartheid ont accordée aux droits de l'homme. Un accomplissement clé dans cet égard a été l'apparition d'un consensus national consistant à considérer la violence contre les femmes comme une violation flagrante des droits de l'homme et une menace à la pleine participation des femmes et à leur la contribution à la démocratie. De plus, pendant la période à l'examen, l'Afrique du Sud a réalisé un progrès sans précédent dans la promotion des femmes en matière de représentation et de prise de décisions politique. La représentation des femmes aux postes supérieurs de direction de la fonction publique a dépassé l'objectif minimum de 30 % que le Gouvernement avait fixé pour 2005, et la nouvelle cible qui a été établie est celle de la parité avant mars 2009. Le Gouvernement est sur le point d'atteindre la parité aux échelons supérieurs de la fonction publique. Aux dernières élections des administrations locales, l'Afrique du Sud a enregistré une représentation historique de 40 % de femmes, principalement en raison de l'application du système de la représentation proportionnelle

Le Gouvernement s'est particulièrement intéressé au problème de la violence contre les femmes et a consacré l'essentiel des ressources. La plupart de celles-ci ont été consacrées à l'application de la Loi de 1998 sur la violence domestique, à la lutte contre les délits sexuels, à la sensibilisation du public, au renforcement des capacités des prestataires de services et à la mise au point d'une réponse intégrée à ce fléau social. L'accent a été mis, en particulier, sur la violence contre les petites filles notamment sur la répression des viols, de la violence domestique, de la pédopornographie, de la traite des femmes et des petites filles ainsi que sur toutes les mesures de sensibilisation du public ainsi que sur les programmes relatifs aux droits de l'homme. L'approche intégrée et multisectorielle que le Gouvernement a adoptée pour lutter contre la violence à l'égard des femmes comprend les mesures suivantes: le Plan national d'action de 365 jours visant à mettre fin à la violence fondée sur le sexe; une campagne annuelle de 16 jours contre la violence à l'égard des femmes et des enfants; la participation des hommes et des garçons en tant que partenaires dans la lutte contre la violence à l'égard des femmes et dans la modification des attitudes et des comportements des garçons et des hommes; la création de tribunaux de l'égalité des sexes et de tribunaux de délits sexuels, parmi d'autres; et les programmes d'autonomisation des victimes et les centres permanents de soins Thuthuzela où les victimes ont accès à des services tels que la protection policière, l'assistance, l'aide médicale, la préparation aux tribunaux et l'action en justice.

Les programmes gouvernementaux de réduction de la pauvreté et de développement des compétences ont ouvert aux femmes de nombreuses possibilités d'entrer sur le marché de la main-d'œuvre et ont aussi élargi leurs possibilités en matière de changement de carrière. Les plus importants à cet égard ont été le Programme d'expansion des travaux publics et les stages d'apprentissage. Les possibilités d'emploi des femmes ont été aussi renforcées par les lois relatives à l'équité en matière d'emploi et les autres lois relatives à l'emploi et à la main-d'œuvre qui, entre autres choses, ont consolidé le maintien des femmes dans la main-d'œuvre, notamment en cas de grossesse, et leur ont permis de concilier leur travail avec leur maternité. Le programme de réduction de la pauvreté s'efforce également de créer des activités rémunératrices pour les femmes. À ce jour, la meilleure pratique la plus positive de l'Afrique du Sud a consisté dans la mise en place d'un filet de sécurité sociale par le versement de subventions sociales à un nombre croissant de bénéficiaires, dans leur majorité des femmes. Le rapport souligne par ailleurs que des progrès notables ont été réalisés dans les efforts tendant à garantir un accès équitable aux services de santé comme ceux qui visent à réduire la mortalité maternelle et les tueurs silencieux comme l'hypertension, le diabète, la tuberculose, le paludisme et le VIH/sida. Des mesures ont aussi été prises pour garantir l'accès des femmes aux services de santé reproductive dans l'ensemble du pays.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

Une experte a observé que la violence contre les femmes a pris, en Afrique du Sud, des proportions quasiment épidémiques, un problème compliqué par le taux de condamnation extrêmement faible des auteurs d'actes violents. Il revient à l'État d'expliquer ce qu'il entend réaliser concrètement pour faire valoir les droits des femmes conformément aux dispositions de la Convention.

Un autre membre du Comité s'est félicité de la qualité du rapport présenté par l'Afrique du Sud, qui rend compte de progrès importants depuis 1998. Ce rapport ne dit cependant rien, malheureusement, de l'adoption de plusieurs projets de loi particulièrement importants pour la réalisation des droits des femmes. L'experte a aussi voulu connaître les modalités de la traduction dans les lois du principe d'égalité entre hommes et femmes posé par la Constitution.

Le Comité encourage l'application exhaustive par les États des dispositions de la Convention, a-t-il été souligné, et il faut se féliciter de la volonté de l'Afrique du Sud de placer la femme au cœur des décisions concernant la nation. Comment le droit international peut-il appuyer les démarches dans ce sens, a-t-il été demandé.

Une experte a dit craindre la dilution de l'objectif de lutte pour l'égalité entre les sexes dans un Ministère aux attributions très vastes (femmes, enfants, personnes handicapées). Elle a voulu savoir par quels moyens les autorités entendent associer les organisations de la société civile à sa propre action. La Présidente du Comité a suggéré la création d'un Ministère consacré exclusivement aux droits des femmes.

Des membres du Comité ont demandé par ailleurs s'il existe en Afrique du Sud un mécanisme d'examen systématique des effets de l'application des lois contre la discrimination. Ils ont suggéré que cette tâche soit confiée à une institution autonome. Plusieurs se sont interrogés sur les financements disponibles pour les programmes et projets en faveur de l'égalité et de l'autonomisation des femmes.
Fin 02
Une experte a voulu connaître l'action du Gouvernement pour adapter ses mesures temporaires spéciales aux besoins des femmes les plus marginalisées. De telles mesures pourraient être appliquées en vue d'une présence renforcée des femmes dans le secteur judiciaire, de telle sorte que la voix des femmes victimes de violences et de violences sexuelles soit mieux entendue.

La violence semble omniprésente en Afrique du Sud au point de devenir la norme et de pervertir les jugements, a-t-il été observé. Une experte a demandé quelles mesures étaient prises par le Gouvernement pour protéger les femmes et les filles contre la violence sexiste. Elle a aussi voulu savoir quel était le taux de viols faisant l'objet d'inculpations par les tribunaux spéciaux mis sur pied pour réprimer cette violence. D'autres experts ont insisté sur la nécessité d'éradiquer les stéréotypes et préjugés sexistes qui expliquent la violence contre les femmes et les jeunes filles. Il a été recommandé que l'Afrique du Sud accorde à la lutte contre le sexisme la même priorité qu'à la lutte contre le racisme, et que les autorités et corps constitués fassent passer le message qu'ils seront intransigeants à cet égard.

Une experte a insisté sur l'importance de disposer de données chiffrées sur l'ampleur de la traite des êtres humains en Afrique du Sud, un phénomène qui risque de conduire à une nouvelle forme d'esclavage: l'esclavage des femmes. L'experte a demandé s'il existe des dispositifs pour aider les familles les plus pauvres à envoyer leurs enfants à l'école, afin de contrecarrer le «marché des êtres humains», plus rentable que celui de la drogue ou des armes.

Abordant les questions relatives aux dispositions de la Convention qui portent sur la famille, une experte du Comité a demandé comment les autorités sud-africaines entendent procéder pour réaliser l'enregistrement systématique des mariages coutumiers, une démarche prévue par la nouvelle loi. L'experte a demandé dans quelle mesure les tribunaux civils protègent les droits (en particulier les droits à la propriété) des femmes mariées dans le cadre d'unions polygames. Une autre experte a voulu savoir si la même loi s'applique aux mariages musulmans. Il a été rappelé que le Comité est d'avis que la polygamie est un acte sexiste par excellence. D'autres questions ont porté sur les discriminations administratives dont sont victimes les femmes lesbiennes en Afrique du Sud.

La forte persistance en Afrique du Sud du viol et du viol marital en dépit des lois existantes, a-t-il été relevé, ce qui laisse supposer qu'une action plus ferme de l'État est nécessaire. À cet égard, une experte a demandé des précisions chiffrées relatives aux poursuites contre les auteurs de ces crimes, et les peines infligées. Une autre experte a souligné l'impunité dont semblent bénéficier les auteurs de viols, du fait de la clémence des tribunaux à leur égard: 40 % des cas ne sont jamais résolus. Cela pose la question de la représentation des femmes dans le pouvoir judiciaire et de la compétence des magistrats. Une meilleure présence des femmes au sein du pouvoir judiciaire permettrait une meilleure prise en compte du problème.

Une experte a dit son désaccord avec l'affirmation selon laquelle il appartient aux femmes d'être plus vigilantes dans l'application de leurs droits: il faut aussi rendre les hommes plus attentifs à l'importance du respect de ces droits.

Dans une nouvelle série d'observations et de questions, des experts du Comité ont souligné les nombreuses agressions sexuelles commises sur des jeunes filles scolarisées par des enseignants et par le personnel des écoles. Or, ce «problème social majeur», pour reprendre les termes d'une déclaration officielle, n'est pas inéluctable, a souligné une experte, estimant que ces infractions doivent être réellement sanctionnées, en vertu de la loi. Il faut notamment appliquer les mesures de licenciement prévues et assurer le contrôle des enseignants condamnés, pour éviter qu'ils ne changent d'établissement pour y commettre de nouveaux crimes. Une autre préoccupation du Comité concerne les jeunes filles condamnées à la prostitution pour subvenir aux besoins de leurs familles.

Le Gouvernement entend-il rendre obligatoire le paiement des quatre mois de congé maternité également dans le secteur privé? Une experte a souligné la dangerosité des «tests de virginité» pratiqués sur des jeunes filles. Elle a demandé quelles mesures sont prises pour abolir ces pratiques et donner des réponses adéquates aux besoins de santé des jeunes filles victimes d'autres pratiques néfastes, telles les mutilations génitales féminines.

Une experte a observé qu'un très grand nombre de femmes en Afrique du Sud sont atteintes du VIH/sida. L'utilisation des préservatifs est considérée comme «indécente», tandis que les attitudes vis-à-vis de la violence sexuelle, en particulier du viol, sont marquées par une inquiétante mansuétude. Dans ces conditions, il appartient aux autorités de faire preuve de fermeté dans la condamnation des comportements néfastes pour les femmes.

Une experte a salué un certain nombre de pratiques en Afrique du Sud qui ont suscité l'intérêt du Comité, s'agissant notamment des mesures spécifiques de lutte contre la pauvreté des femmes et d'intégration des femmes rurales au système de sécurité sociale et au circuit économique. Elle a demandé si ces femmes bénéficient de microcrédits.

Réponses de la délégation

La délégation de l'Afrique du Sud a répondu aux questions du Comité en insistant d'abord sur la jeunesse de la démocratie sud-africaine, qui a contrainte, depuis 1994, de faire des progrès importants dans un arrière-fond marqué par le paternalisme, le racisme et la discrimination. Les organisations non gouvernementales du pays ont pris part aux travaux des mécanismes nationaux en vue de l'égalité des sexes et de la formulation des politiques de l'État en faveur des femmes.

Fournissant des renseignements complémentaires sur le cadre d'application général de la Convention, le chef de la délégation a notamment reconnu que le mandat du Ministère des femmes, des enfants et des personnes handicapées est très vaste, une situation qui s'explique par l'urgence des problèmes. L'action du Ministère se divise en deux volets: l'égalité entre les sexes et la défense des intérêts des personnes handicapées. L'action en faveur de l'égalité sera contrôlée et évaluée par un mécanisme interne, la création d'un organe externe n'étant pas à l'ordre du jour. Le budget de la Commission pour l'égalité entre les sexes s'inscrit dans un cadre de dépenses à moyen terme, a-t-on expliqué: son insuffisance probable exigera des fonctionnaires qu'ils fassent un important travail de lobbying.

Le projet de loi sur l'égalité entre les sexes fait encore l'objet de débats au sein de la Commission des réformes juridiques. La Constitution sud-africaine définit uniquement la notion d'égalité, et non d'«égalité entre les sexes». La loi comblera les lacunes s'agissant des questions de définitions mais aussi pour fixer des objectifs concrets en vue de l'égalité entre les sexes; elle assurera la transposition des dispositions de la Convention et fixera des quotas dans plusieurs domaines. Cette loi «gravera dans le marbre» la volonté du parti actuellement au pouvoir de donner une plus grande place aux femmes dans la société.

Le mécanisme national chargé de contrôler la réalisation du principe d'égalité entre les sexes travaille en coopération étroite avec la société civile. Il est envisagé d'autre part qu'il signe un protocole d'accord avec le Ministère. Ce dernier est en train de créer un Fonds pour l'autonomisation des femmes.

L'adoption d'un Code de la famille unifié n'est pas à l'ordre du jour, a fait savoir la délégation en réponse à une demande du Comité. En effet, après le régime de l'apartheid, les communautés ont exigé de voir leurs particularités reconnues. Les autorités s'efforcent donc de légiférer compte tenu des contextes dont sont issus les femmes, pour protéger les femmes et assurer leur égalité. Ainsi, si une femme décide de s'engager dans un mariage polygame, la loi veillera à la protection de ses droits au regard des dispositions de la coutume.

Le Ministère des femmes, des enfants et des personnes handicapées a rédigé une brochure d'information à l'intention des magistrats sur les dispositions juridiques en faveur de la protection des droits des femmes, notamment en matière d'égalité. Cette brochure sera modifiée pour tenir compte de la ratification du Protocole facultatif. La délégation a précisé que les juges sont déjà en mesure d'invoquer les dispositions de la Convention. Des séminaires de formation en cours d'emploi sont aussi dispensés aux échelons national et provincial à l'intention des coordinatrices et coordinateurs des politiques en matière d'égalité entre les sexes.

La délégation a aussi attiré l'attention sur l'adoption de mesures de protection, d'aide et d'autonomisation des victimes de violences et de violences sexuelles, qui figurent dans une «Charte des victimes». Les femmes y sont informées de leurs droits – par exemple le droit de ne pas subir de mutilations génitales, qui sont interdites par la loi, le droit de saisir les tribunaux et le droit d'obtenir réparation. La prise de conscience de leurs droits par les femmes est la première étape de l'évolution progressive de l'Afrique du Sud vers une société moins patriarcale, qui est elle-même à l'origine de certaines pratiques traditionnelles néfastes très difficiles à éradiquer, a ajouté la délégation.

En dépit de l'introduction de quotas - à l'insistance des militantes - il semble que la participation des femmes à la vie publique et au marché du travail soit de nouveau sur le déclin, a regretté la chef de la délégation. Ceci appelle un renouveau de l'engagement féministe, non seulement pour défendre les droits acquis mais aussi pour susciter l'apparition de nouvelles cadres et leaders. Les prochaines élections locales doivent à cet égard être l'occasion d'approcher les partis politiques pour leur faire comprendre la nécessité d'inscrire des femmes sur leurs listes. La promulgation du projet de loi sur l'égalité contribuerait de manière décisive aux progrès en matière de participation des femmes.

La délégation sud-africaine a aussi fait état des efforts couronnés de succès du Gouvernement en vue de l'augmentation de la représentation des femmes au Parlement et dans l'exécutif. Les autorités entendent de plus enrôler davantage encore de femmes dans le pouvoir judiciaire, en particulier parce que cette démarche améliorera la lutte contre la violence à l'égard des femmes. Dans le privé, par contre, on ne compte que 10 % des femmes dans les conseils d'administration.

La violence est un fléau au même titre que le VIH/sida. Elle requiert la mobilisation de ressources pour une lutte efficace. Le Gouvernement compte lancer un Plan d'action national de sensibilisation de l'opinion publique sur les questions relatives à la violence contre les femmes. Des campagnes d'information sont menées dans les écoles et à l'échelle nationale, avec la participation d'organisations non gouvernementales, de chefs religieux ainsi que d'hommes.

Répondant à d'autres questions, la délégation a précisé que le Gouvernement travaille avec des chefs traditionnels, notamment pour leur faire comprendre qu'ils n'ont pas de compétence en matière de justice pénale.

Les services de police accordent la priorité aux délits commis contre les femmes et les enfants, a assuré une représentante des forces de l'ordre. Quant au problème de la traite des êtres humains, il s'agit d'un délit aux ramifications nombreuses qui exige la collaboration de l'Afrique du Sud avec les instances internationales concernées, policières et autres. Les autorités travaillent aussi avec les organisations de la société civile sud-africaine, en particulier pour répondre aux besoins des enfants victimes, ainsi que pour les réintégrer dans la société. Les femmes victimes de la traite sont accueillies dans des foyers où elles ont la possibilité d'apprendre un métier. La délégation a ajouté que la loi sur la prostitution est en voie d'être réformée; on ne sait pas encore si le texte actuel, qui incrimine à la fois le client, la prostituée et le proxénète, sera assoupli dans le sens d'une libéralisation.

Les stéréotypes persistent en Afrique du Sud, surtout dans les campagnes, a admis la délégation. Les autorités travaillent avec les autorités locales, policières et traditionnelles à l'éradication des comportements violents qui découlent des préjugés contre les femmes. La délégation a précisé que la presse est sollicitée pour contribuer à la conscientisation de la population.

La délégation a encore précisé que le Gouvernement a mis en œuvre des programmes de prévention de la criminalité des jeunes. Quant aux mesures de protection des femmes et des filles contre la traite des êtres humains, il a été indiqué qu'une étude officielle a montré que ce problème ne concerne que quatre cas avérés, contre un demi-million évoqué par une experte du Comité. La sensibilisation aux droits des femmes est un processus permanent, a assuré la délégation.

La délégation a rappelé que son pays a, en son temps, mené une guerre internationale contre le racisme et contre l'apartheid, et a souligné que les pays africains et les pays progressistes ont fait preuve d'une véritable solidarité avec le pays de Nelson Mandela. L'Afrique du Sud, jeune démocratie, entend poursuivre ses combats avec l'appui des pays amis.

Au plan interne, l'Afrique du Sud encourage les hommes à s'engager en faveur de l'autonomisation des femmes et d'une société exempte de violence sexiste. L'Afrique du Sud mettra tout en œuvre d'autre part pour encourager les femmes à prendre la place qui est la leur dans la vie publique. Pour ce faire, les autorités ont pris et prennent encore en leur faveur des mesures temporaires spéciales.

L'Afrique du Sud a adopté un système de sécurité sociale axé sur les femmes, les enfants, les personnes séropositives et les personnes handicapées, a indiqué la délégation. Des exemples de réussite économique et d'autonomisation de femmes rurales ont été donnés. Des microcrédits sont accordés par les départements gouvernementaux concernés (industrie, agriculture) mais aussi par des institutions privées telle la banque Grameen. D'autres mesures portent sur l'accès physique aux marchés. Un nouveau département du développement rural a été créé en 2009. Il est chargé en particulier d'aider les femmes des campagnes, en collaboration avec des organisations non gouvernementales.

La délégation a d'autre part indiqué que les services publics de santé couvrent désormais toute la population. L'Afrique du Sud manque cependant toujours de médecins. Elle compte sur l'aide de pays amis, notamment de Cuba, qui offre des formations aux jeunes sud-africains et met à disposition des médecins. L'Afrique du Sud bénéficie aussi d'un phénomène de «retour des cerveaux», soit, dans le contexte de la crise économique, le retour de médecins sud-africains établis à l'étranger. Le système de santé est aujourd'hui engagé dans une réforme: il sera désormais axé en priorité sur les soins de santé primaires et la prévention des maladies, la lutte contre le VIH/sida et les maladies non-contagieuses. Des mesures sont prises en outre pour améliorer l'efficacité générale du système.

Les efforts de réduction du taux de mortalité maternelle s'inscrivent dans le cadre de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. Une commission est désormais chargée d'enquêter sur tous les décès en couches, afin d'en déterminer les raisons. Les constatations de la commission alimentent les décisions et stratégies du Département de la santé. Celui-ci agit notamment pour améliorer les compétences des praticiens de santé génésique. Le rapport sur les activités 2005-2007 dans ce domaine montre qu'une part importante de la mortalité maternelle est imputable au VIH/sida. Les femmes enceintes sont encouragées à se rendre dans les établissements de santé où elles recevront des traitements empêchant la transmission du virus à l'enfant. L'accès généralisé aux médicaments (y compris les antirétroviraux) et aux soins relatifs au VIH/sida est garanti par le biais d'un réseau de dispensaires et de cliniques mobiles couvrant l'ensemble du territoire.

Répondant à une experte qui s'inquiétait du nombre important de femmes atteintes par le VIH/sida en Afrique du Sud, la délégation a notamment précisé que le Gouvernement était très conscient du lien entre la propagation du sida et la violence sexuelle. En cas de viol, les autorités offrent systématiquement des traitements prophylactiques aux victimes.

Le taux d'accès à l'électricité, à l'eau et à l'assainissement dans les zones rurales et les townships atteint aujourd'hui environ 85%, a par ailleurs indiqué la délégation. L'objectif du Gouvernement est d'assurer l'accès universel en 2014.

Répondant à des questions sur la situation dans le système éducatif, la délégation a notamment affirmé que les enseignants qui se rendent coupables de violences sexuelles contre des élèves sont immédiatement licenciés et interdits d'enseignement. Ils sont placés sur une liste de contrôle. Les enfants sont encouragés à dénoncer les abus dont ils sont victimes. Des manuels de sensibilisation au problème sont destinés aux parents et aux enseignants, la non-dénonciation d'un tel crime constituant un délit punissable.

La scolarisation des enfants issus de foyers sans adultes est gratuite, l'État leur versant des bourses et subventions.

Par ailleurs, le Gouvernement agit auprès des chefs traditionnels pour les encourager à renoncer aux pratiques traditionnelles préjudiciables aux femmes. Nombre de ces chefs sont désormais acquis aux arguments de l'État dans ce domaine, a assuré la délégation.

La plupart des femmes sud-africaines sont contre la polygamie, a assuré la délégation. Elle a précisé que la loi sur les mariages coutumiers n'a pas pour objectif de promouvoir la polygamie, mais bien de préserver les droits des premières épouses et des enfants concernés par ce type d'union. Les mariages coutumiers sont placés sous le régime de la communauté des biens, ce qui empêche la dépossession de la première épouse lorsque le mari contracte une nouvelle union. La campagne contre les enlèvements de jeunes filles à des fins de mariage a été couronnée de succès, ce qui s'explique par les efforts que le gouvernement a consentis pour sensibiliser les chefs traditionnels du caractère néfaste de cette pratique. S'agissant de la discrimination contre les femmes lesbiennes évoquée par le Comité, les autorités ont pris des mesures correctives nécessaires.

La délégation a observé que les pratiques coutumières sont particulièrement difficiles à combattre. La seule adoption de lois n'est pas suffisante à cet égard, une importante action de sensibilisation est nécessaire auprès des femmes mais aussi des hommes. La loi sur les mariages coutumiers est une étape dans la lutte contre la polygamie, a assuré la délégation. Le mariage musulman est une autre question épineuse, puisqu'il met en jeu la foi et les croyances religieuses d'une partie de la population. Les droits religieux sont protégés par la Constitution, ce qui explique que la Cour suprême ait récemment jugé anticonstitutionnel le projet de loi sur les mariages musulmans; l'examen du projet sera repris par le Parlement.

Conclusion

MME MARYTHERESA XINGWANA, Ministre des femmes, des enfants et des personnes handicapées de l'Afrique du Sud, a remercié tous les experts qui ont posé des questions et fait des commentaires dans le cadre d'un dialogue franc et utile. Cet exercice facilite les démarches du Gouvernement en vue de la préparation du prochain rapport, qui sera soumis en 2015 et dont la rédaction engagera les mouvements de femmes en Afrique du Sud. Le Gouvernement accordera la plus grande attention aux observations et recommandations du Comité, s'agissant notamment de la lutte contre la violence à l'égard des femmes et contre les stéréotypes. La Ministre s'est engagée à insister auprès de son Gouvernement pour qu'il mette l'accent sur l'instauration de la parité entre les sexes dans toutes ses politiques.

MME ZOHRA RASEKH, Vice-présidente du Comité, a remercié les représentants du Gouvernement sud-africain des réponses qu'ils ont apportées aux questions du Comité. Elle a félicité le Gouvernement de ses nombreuses démarches en faveur de la lutte contre la discrimination à l'encontre des femmes. Le Comité est cependant alarmé par la prévalence de violences et de violences sexuelles contre les femmes en Afrique du Sud. Il est préoccupé, en outre, par le problème de la traite des êtres humains et par la situation des femmes rurales dans ce pays.

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