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Communiqués de presse Organe subsidiaire de la Commission des droits de l’homme

LA SOUS-COMMISSION OUVRE SON DÉBAT DE LA QUESTION DES VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME DANS LE MONDE

30 Juillet 2002



Sous-Commission de la promotion et
de la protection des droits de l'homme
54ème session
30 juillet 2002



Elle adopte son ordre du jour révisé, inscrivant un sous-point intitulé :
«Nouvelles priorités, en particulier le terrorisme»


La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a entamé, ce matin, son débat sur la question de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales, y compris la politique de discrimination raciale et de ségrégation, dans tous les pays, en particulier dans les pays et territoires coloniaux et dépendants. Elle a par ailleurs adopté son ordre du jour révisé auquel a été ajouté un alinéa intitulé «Nouvelles priorités, en particulier le terrorisme».

La Sous-Commission a d'autre part décidé d'établir, comme par le passé, un Groupe de travail de session sur l'administration de la justice qui tiendra deux séances de travail seront allouées durant la présente session. Elle a également décidé de consacrer deux séances de sa session à des réunions du Groupe de travail sur les méthodes de travail et les activités des sociétés transnationales, dont le mandat a été renouvelé pour trois ans l'an dernier.

Le Groupe de travail sur l'administration de la justice sera composé des six experts suivants: Mme Lalaina Rakotoarisoa, M. Soli Jehangir Sorabjee, Mme Antoanella-Iulia Motoc, Mme Florizelle O'Connor, Mme Françoise Jane Hampson, M. Yozo Yokota.

Le Groupe de travail sur les méthodes de travail et les activités des sociétés transnationales sera quant à lui composé des cinq experts suivants: M. El-Hadji Guissé, M. Soo Gil Park,
M. Vladimir Kartashkin, M. Miguel Alfonso Martínez et M. David Weissbrodt.

Ouvrant le débat sur la question de la violation des droits de l'homme dans tous les pays, Mme Halima Embarek Warzazi, experte de la Sous-Commission, a notamment noté que la guerre contre le terrorisme tend à faire passer les principes au second plan, derrière la sécurité et l'ordre. Elle a estimé que la lutte contre le terrorisme dépasse toute mesure et déploré qu'au prétexte de la défense des droits de l'homme, on bombarde des civils et on soumet des prisonniers à des atrocités. Une nouvelle impunité semble vouloir couvrir ces crimes de guerre et la Cour pénale internationale voit sa crédibilité sérieusement endommagée, a-t-elle ajouté. Mme Warzazi a également attiré l'attention sur la situation en Palestine : occupation du territoire, destructions massives d'habitations, utilisation d'une force démesurée contre la population civile, renforcement de l'utilisation de la torture, sont le lot quotidien des Palestiniens, a-t-elle rappelé.

M. Vladimir Kartashkin, expert de la Sous-Commission, a lui aussi souligné que si le terrorisme en lui-même est une grave violation des droits de l'homme, il n'en demeure pas moins qu'il est impossible d'accepter que, sous prétexte de lutte contre le terrorisme, les droits de l'homme soient violés. Aussi, la Sous-Commission devra-t-elle adopter sur toutes ces questions une résolution équilibrée qui réponde à la situation mondiale actuelle, a affirmé l'expert.

Les représentants de la Turquie, du Mexique, du Pakistan, de l'Azerbaïdjan, du Bahreïn ont également fait des déclarations. La plupart d'entre eux ont mis l'accent sur les mesures récentes prises par leur gouvernement en matière de promotion et de protection des droits de l'homme. Nombre d'intervenants ont condamné le terrorisme sous toutes ses formes. Il a néanmoins été rappelé que le droit international établit une distinction claire entre actes terroristes et droit légitime à l'autodétermination.

Les représentants des organisations non gouvernementales suivantes ont également pris la parole:
Dominicans for Justice and Peace ; Conseil des Innu de nitassinan ; Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale ; International Educational Development ; Association pour l'éducation d'un point de vue mondial ; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme ; L'union mondiale pour le judaïsme liberal ; Mouvement indien "Tupaj Amaru" ; Association américaine de juristes ; Association internationale des juristes démocrates ; Interfaith International ; Congrès du monde islamique.

Certains ont souhaité que la Sous-Commission, au-delà de l'actuel mandat de Mme Kalliopi Koufa, Rapporteuse spéciale sur le terrorisme et les droits de l'homme, examine les mesures prises pour lutter contre le terrorisme au regard de leur compatibilité avec les droits de l'homme. Parmi les situations sur lesquelles l'attention de la Sous-Commission a été particulièrement attirée, figurent la situation en Palestine, au Cachemire, la situation aux Molluques, et sur l'île de Vieques ainsi que la situation des Indiens du Canada.

La Sous-Commission poursuivra demain matin, à 10 heures, son débat sur la question de violation des droits de l'homme dans tous les pays. Le Groupe de travail sur l'administration de la justice se réunira cet après-midi à 15 heures.

Débat sur la question de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales, y compris la politique de discrimination raciale et de ségrégation, dans tous les pays

MME HALIMA EMBAREK WARZAZI, membre de la Sous-Commission, a déploré que l'année écoulée ait été particulièrement cruelle à l'égard des droits de l'homme. Violence, racisme, insécurité des libertés civiles, normes de procédure bafouées, sont les conséquences indirectes des attentats du 11 septembre dernier. Certains États ont renforcé leurs législations répressives. Les organisations non gouvernementales estiment quant à elles que les États profitent de l'horreur terroriste pour s'équiper d'un arsenal juridique pour réprimer toute forme de contestation politique.

La situation en Palestine dépasse l'entendement. Occupation du territoire, destructions massives d'habitations, utilisation d'une force démesurée contre la population civile, renforcement de l'utilisation de la torture, sont le lot quotidien des Palestiniens. Les organismes humanitaires de l'ONU ont dénoncé cet état de fait. Les autorités israéliennes poursuivent leur occupation sans plus d'états d'âme, bloquant vivres et médicaments, intimidant la presse si elle dénonce trop ouvertement les exactions.


Au milieu de l'indifférence qui semble entourer ces tragiques violations des droits de l'homme, il faut relever la prise de position courageuse de plusieurs centaines de soldats et officiers israéliens et celle des pacifistes israéliens qui s'opposent ouvertement à l'occupation, a déclaré Mme Warzazi.

Les droits de l'homme, après plus de cinquante ans de dialogue, de négociations, d'élaboration de mécanismes de suivi, sont néanmoins en danger, a poursuivi Mme Warzazi. Invoquer la guerre contre le terrorisme tend à faire passer les principes au second plan, derrière la sécurité et l'ordre. L'«axe du mal» est ressuscité, les États diabolisés. Cette lutte contre le terrorisme dépasse toute mesure : au prétexte de la défense des droits de l'homme, on bombarde des civils et on soumet les prisonniers talibans à des atrocités. Une nouvelle impunité semble vouloir couvrir ces crimes de guerre, et la Cour pénale internationale voit sa crédibilité sérieusement endommagée.

Le racisme fait aussi des ravages dans les sociétés occidentales. La presse occidentale met au pilori des pays et des peuples au seul motif qu'ils sont musulmans. Les véritables fléaux de l'humanité sont la faim, les conflits ethniques, la pauvreté, la tyrannie, la drogue. Ce sont ces fléaux qu'il faut combattre en priorité, au risque de les voir nous déborder tous.

M. DAVID LITTMAN (Association pour l'éducation d'un point de vue mondial) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur un problème crucial que son organisation avait déjà soulevé, il y a trois ans, concernant les efforts systématiques déployés au sein de plusieurs organes des Nations Unies par les représentants de certains Etats en vue de rendre confus les paradigmes fondamentaux des relations internationales tels qu'énoncés dans la Charte internationale des droits de l'homme. Ainsi, a-t-il rappelé la préoccupation exprimée par son organisation s'agissant des tendances visant à citer la Déclaration du Caire de 1990 comme s'il s'agissait d'un instrument international des Nations Unies, ce qui n'est pas le cas. Lorsqu'ils traitent des violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les organes des Nations Unies devraient toujours s'en tenir aux normes universelles, a estimé M. Littman.

M. ANTOINE MADELIN (Fédération internationale des Ligues des droits de l'homme) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur les attaques massives perpétrées au nom de la lutte contre le terrorisme à l'encontre des libertés civiles et les droits de l'homme. Face au terrorisme, la nécessité de faire prévaloir la justice doit l'emporter sur la tentation de vengeance. Or, la justice ne peut prévaloir sans un plein respect des normes internationales en matière de droits de l'homme et du droit humanitaire international. Le fait est qu'un grand nombre de pays se sont dotés d'un arsenal particulièrement sévère de mesures ayant pour effet de restreindre les libertés individuelles et collectives ainsi que les droits fondamentaux des citoyens. Aux États-Unis, la justice militaire spéciale fait fi de la nécessaire division des pouvoirs et l'exécutif s'est octroyé d'importants pouvoirs judiciaires. En Allemagne, le droit d'immigrer et de trouver asile peut être refusé sur simple suspiscion d'appartenance à un groupe terroriste. En Chine, la campagne «Frapper fort» permet de renforcer la répression, en toute impunité, à l'encontre des Ouïgours, des Tibétains et des Mongols, ainsi qu'à l'encontre des membres de Falun Gong. La coalition anti-terroriste a également permis au Président Poutine d'obtenir un soutien sans équivoque pour sa répression de la population tchétchène. C'est pourquoi la Sous-Commission devrait, au-delà du mandat actuel de la Rapporteuse spéciale sur le terrorisme, Mme Kaliopi Koufa, examiner la question des mesures prises pour lutter contre le terrorisme au regard de leur compatibilité avec les droits de l'homme.

M. DAVID LITTMAN (Union Mondiale pour le judaïsme libéral) a déclaré que certaines données historiques et statistiques doivent être connues pour évaluer correctement la situation actuelle au Proche-Orient. Historiquement, la définition même du territoire palestinien a été biaisée par les intérêts britanniques; la superficie du territoire israélien est dérisoire par rapport à celui des pays arabes; la population israélienne est aussi largement minoritaire. Un règlement du conflit doit passer par l'application du plan Mitchell. De fait, une solution à long terme ne pourra être obtenue
que par un traité de paix entre Israël, l'Autorité palestinienne et la Jordanie. Une garantie de
stabilité doit toutefois être assurée par des institutions véritablement démocratiques du côté arabe et palestinien en particulier, avec une rupture totale d'avec les agissements du passé, a estimé M. Littman.

M. PHILIPPE LEBLANC (Dominicans for Justice and Peace au nom également de Franciscain international), a évoqué la situation des droits de l'homme à Porto Rico, sur l'île de Vieques, où une base militaire sert de terrain d'essais pour des systèmes d'armes utilisés par la marine des États-Unis, les pays de l'OTAN et des fabricants d'armes pour des entraînements militaires, ainsi que pour des essais d'armes classiques et d'armes et de munitions spéciales. Le représentant a souligné que les effets de ces systèmes sont désastreux pour la santé et l'environnement locaux. Il a ajouté que des études montrent une augmentation, en dix ans, de 26% du nombre de personnes de la zone souffrant de cancers. Les enfants souffrent de leur côté de maladies rares. Quant à la situation économique, elle s'est également aggravée. La pêche est la seule industrie viable, mais la mer est rendue dangereuse en raison des navires de guerre qui y croisent. Les écosystèmes délicats de l'île ont été détruits par les bombardements, y compris les munitions à l'uranium appauvri. Le représentant a demandé à la Sous-Commission qu'elle se penche sur la situation des droits de l'homme à Vieques. Il a lancé un appel aux États-Unis et aux pays de l'OTAN pour qu'ils cessent leurs manœuvres militaires et les bombardements et procèdent à la décontamination des zones affectées. Il a enfin demandé que le Gouvernement des États-Unis respecte les droits et fondamentaux et les libertés de la population de Vieques.

M. VLADIMIR KARTASHKIN, expert de la Sous-Commission, a rappelé que le terrorisme en lui-même est une grave violation des droits de l'homme. Pour autant, il est impossible d'accepter que, sous prétexte de lutte contre le terrorisme, les droits de l'homme soient violés. La Sous-Commission, pour sa part, doit examiner toute violation des droits de l'homme et condamner toute personne, quelle qu'elle soit, qui viole ces droits. Aussi, devra-t-elle adopter sur toutes ces questions une résolution équilibrée qui réponde à la situation actuelle que connaît le monde.

M. ARMAND MCKENZIE (Conseil des Innu du Nitassinan) a dénoncé l'existence au Canada d'une loi fondée sur la séparation des races: la Loi sur les Indiens. Il a été reconnu qu'un changement constitutionnel s'avérait nécessaire mais les mesures proposées sont totalement insuffisantes, a déclaré M. McKenzie. La Loi sur la gouvernance, projet unilatéral imposé par le Gouvernement canadien, ne répondra en rien aux aspirations des peuples indiens du Canada et ne résoudra aucun des problèmes matériels auxquels ils sont confrontés: cela est dû à l'inspiration colonialiste qui anime les intentions du Gouvernement canadien, a estimé l'orateur. Le Canada doit se conformer aux instruments internationaux et abolir la Loi sur les Indiens. Il doit aussi collaborer avec l'Assemblée des Premières Nations de façon à mettre en application les conclusions de la Commission royale sur les peuples autochtones ainsi que les observations générales du Comité des droits de l'homme d'avril 1999.

M. ABDALLA SHARAFEDDINH (Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale) a rappelé qu'il y a quelques semaines, des intellectuels, dont des Prix Nobel, ont envoyé une lettre au Secrétaire général des Nations Unies dans laquelle ils mettaient l'accent sur le fait que la lutte sanglante en Palestine a atteint un tel niveau que tous les traités internationaux y sont violés. L'armement et la militarisation de la société israélienne se sont accrus et se sont accompagnés d'effets contre-productifs dévastateurs. Il faut absolument que soit reconnue la souveraineté des Palestiniens à l'intérieur des frontières du 4 juin 1967. Il faut également lutter contre l'injustice imposée par les grandes puissances et contre le système de deux poids deux mesures sur lequel cette injustice repose. L'opinion publique internationale n'est pas dupe et elle voit bien le jeu que jouent les grandes puissances alors que les résolutions du Conseil de sécurité restent lettre morte.

MME KAREN PARKER (International Educational Development, inc.) a déclaré que la situation au Cachemire était particulièrement grave, avec des attaques de l'armée indienne contre les populations civiles qui sont autant de violations des Conventions de Genève. Le nombre de militaires au Cachemire n'a fait que croître, avec un cortège d'arrestations arbitraires, d'expulsions, et autres violations. Il faut en outre déplorer que le référendum sur l'avenir de la province, demandé par le Conseil de sécurité, n'ait pas pu être organisé. Les organisations non gouvernementales ont déposé plus de quarante rapports, entre 1990 et 2002, qui prouvent les violations des droits de l'homme au Cachemire. L'absence de réaction de la communauté internationale est consternante. Seuls certains mouvements de libération du Cachemire peuvent être qualifiés de terroristes, l'essentiel de la résistance étant légitime, compte tenu du comportement des autorités indiennes. Il convient que le peuple cachemirien soit consulté sur son avenir, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité sur le referendum. La Sous-Commission doit établir un bilan des violations du droit humanitaire et des droits de l'homme dans la partie indienne du Cachemire, a conclu la représentante.

M. LAZARO PARY (Mouvement indien "Tupaj Amaru") a dénoncé la violence dont il vient d'être victime, ici même au Palais des Nations de Genève, de la part d'un fonctionnaire des Nations Unies - appartenant probablement au personnel de sécurité – qui lui a confisqué sa petite malette contenant tous ses documents, y compris le discours qu'il devait lire devant la Sous-Commission. Le représentant de Tupaj Amaru a affirmé que ce fonctionnaire le poursuit depuis longtemps, à la Commission déjà et lors des travaux en Groupe de travail. Le représentant a qualifié de «raciste» le comportement de cette personne.

M. ALEJANDRO TEITELBAUM (Association américaine des juristes) a dénoncé le chantage auquel a été soumis le Conseil de sécurité en ce qui concerne l'immunité qui pourrait couvrir certaines violations des droits de l'homme. D'autre part, et alors que la police argentine assassine la population qui proteste, les délinquants économiques continuent de jouir de l'impunité. En Colombie, les syndicalistes sont victimes d'un véritable génocide, alors que les paramilitaires tiennent le haut du pavé. Toute une série d'États européens promulguent des dispositions répressives, au motif de lutter contre le terrorisme et Israël poursuit imperturbablement son génocide du peuple palestinien. Selon le représentant de l'Association américaine de juristes, tous ces droits, qu'il s'agisse des droits humains, syndicaux, économiques ou culturels, sont sacrifiés aux intérêts du marché, c'est-à-dire aux intérêts d'une minorité privilégiée. Cette tendance se retrouve au sein même des Nations Unies, dans le cadre de l'initiative du «Pacte mondial» (Global Compact). Cette initiative pose le problème du contrôle des sociétés transnationales. Un projet soumis au Groupe de travail de la Sous-Commission parle d'«autocontrôle» facultatif, voire de pseudo-contrôle exercé par des entreprises extérieures et privées. S'agirait-il de couvrir les exactions de ces sociétés, s'est interrogé le délégué ? Quelle est la position de la Sous-Commission devant ces problèmes ?

MME PELPHINA SAHUREKA (Association internationale des juristes democrates ) a rappelé que tous les peuples ont le droit de se déterminer librement sans ingérence extérieure. Or, les droits fondamentaux du peuple des Molluques sont niés depuis 1950. Depuis 1999, le peuple des Molluques ne cesse de lancer au monde des appels au secours et ne comprend pas l'apathie de la communauté internationale. L'état d'urgence civile déclaré en 2000 par l'Indonésie est devenu dans la pratique une loi martiale qui permet aux Indonésiens d'exercer des violences contre les combattants pour la liberté des Molluques. Des mines sont même posées pour empêcher les villageois et les autochtones de retourner dans leurs terres ancestrales. Les Nations Unies devraient donc envoyer un rapporteur spécial ou une mission d'enquête internationale aux Molluques.

MME YOANNA CLAQUIN (Interfaith International) s'est déclarée inquiète de la violence endémique dans plusieurs États de l'Inde. Le droit à la vie est totalement ignoré dans ces provinces. Au cours de ces dernières années, des populations déjà très pauvres ont subi des épreuves terribles. Des centaines d'enfants ont été tués au Cachemire. La représentante a ajouté que la torture était très répandue dans toute l'Inde. Les femmes et les intouchables sont les principales victimes de la discrimination de la part des agents étatiques. Les défenseurs des droits de l'homme sont violemment réprimés quand ils tentent de faire valoir leurs opinions. La représentante a précisé que
la police a été dotée de pouvoirs étendus et attentatoires aux droits de l'homme, dans le cadre la lutte contre le terrorisme. La communauté internationale doit continuer à s'exprimer contre les violations des droits de l'homme et réaffirmer que leurs auteurs doivent être poursuivis et punis.

M. MURAT SUNGAR (Turquie) a affirmé que les effets des événements tragiques du
11 septembre dernier n'ont fait que renforcer la perception selon laquelle les questions de droits de l'homme soulevées devant plusieurs instances des Nations Unies sont de plus en plus politisées et exploitées par divers acteurs. Il s'agit là d'une tendance indésirable voire dangereuse. Aujourd'hui, le rôle de promotion et de protection des droits de l'homme dévolu à la Sous-Commission est d'autant plus crucial que cette tendance se poursuit. L'expertise et l'impartialité de la Sous-Commission figurent au nombre des piliers du système des droits de l'homme, a estimé le représentant turc.

Faisant part de l'évolution récente de la situation dans le domaine des droits de l'homme en Turquie, le représentant a mis l'accent sur la série d'amendements constitutionnels adoptés par le Parlement en octobre 2001. Ces amendements renforcent les garanties existantes en matière de liberté de pensée et d'expression, de prévention de la torture, de liberté et de sécurité des personnes, de respect de la vie privée, d'inviolabilité du domicile, de liberté de communication, de liberté de résidence et de mouvement, de liberté d'association et d'égalité entre les sexes. Le représentant turc a notamment précisé que, suite à l'adoption de ces amendements, la peine de mort ne peut désormais plus être imposée qu'en temps de guerre ou de menace imminente de guerre et en cas de crimes de terrorisme. Seules deux provinces restent soumises à un état d'urgence dans le pays, a par ailleurs indiqué le représentant, avant d'indiquer qu'il est envisagé de lever l'état d'urgence dans l'ensemble du pays à partir du 1er décembre 2002. À l'automne 2002, a par ailleurs indiqué le représentant, la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes devrait se rendre en Turquie.

M. ERASMO MARTÍNEZ (Mexique) a déclaré que l'amélioration des droits de l'homme dans un pays donné est le meilleur moyen d'y faire aboutir le processus démocratique. Il y a donc deux axes fondamentaux à la politique mexicaine en matière des droits de l'homme : l'adoption de mesures internationales, qui doivent être répercutées au niveau national, ainsi qu'une vigoureuse politique de promotion des droits de l'homme au niveau international.

Pour sa part, le Mexique a déjà instauré un Bureau des droits de l'homme; il a aussi signé un accord-cadre qui permettra la collaboration à long terme entre le Mexique et le Haut-Commissariat aux droits de l'homme. Dans une seconde phase, un diagnostic sera établi de la situation des droits de l'homme au Mexique. Une série de mesures à prendre seront alors définies et adoptées. Le représentant mexicain a ajouté que la ratification récente de nombreuses instruments dans le domaine des droits de l'homme confirme les bonnes intentions du Mexique. Enfin, le Mexique a invité les experts de l'ONU à procéder à des visites sur le terrain. Plusieurs visites de rapporteurs de la Commission ont déjà eu lieu, notamment sur les questions des droits des personnes déplacées, des droits de la femme, du droit à la nourriture, et de la détention arbitraire.

M. IMTIAZ HUSSAIN (Pakistan) a assuré que son gouvernement attache une grande importance à la promotion et à la protection des droits de l'homme. Il a rappelé que des élections générales devraient se dérouler dans le pays en octobre prochain. Le gouvernement a aboli le système d'électorat séparé pour les différentes communautés religieuses, a-t-il précisé. Ces trois dernières années, a précisé le représentant, le Gouvernement pakistanais a pris de nombreuses mesures pour améliorer la situation socioéconomique de tous les habitants. Plusieurs mesures ont également été adoptées afin de lutter contre la violence contre les femmes au foyer et sur les lieux de travail, a-t-il ajouté.

Le représentant pakistanais a par ailleurs assuré que le Pakistan condamne le terrorisme sous toutes ses formes. Il a rappelé que les actes terroristes sont commis non seulement par des groupes mais aussi par des États. Le droit international fait une distinction claire entre les luttes légitimes pour le droit à l'autodétermination et le terrorisme, a souligné le représentant. Il a mis l'accent sur la nécessité d'apaiser, en Asie du Sud, les tensions liées à l'accumulation de troupes aux frontières de son pays. Il faut mettre fin aux violations des droits de l'homme que subissent les habitants du Cachemire, a ajouté le représentant.

M. ISMAIL ASADOV (Azerbaïdjan) a déclaré que les menaces à l'intégrité des États sont malheureusement devenues monnaie courante à notre époque. En 1970 déjà, les Nations Unies précisaient que le territoire des États ne devait pas être sujet aux occupations militaires ni aux tentatives de mainmise par des pays tiers par le recours à la force. Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale précise quant à lui que l'agression par un État est l'un des crimes les plus graves qui puissent être commis. Le représentant a déploré que l'évolution de ces normes internationales n'ait pas permis d'empêcher la violation de leurs dispositions. Il est donc particulièrement déplorable de constater que certaines parties en conflit se saisissent de territoires ne leur appartenant pas, et ce en dépit de l'adoption de résolutions très précises du Conseil de sécurité.

Le Gouvernement de l'Azerbaïdjan estime que la résolution des problèmes humanitaires dépend en premier lieu du retrait des forces étrangères des territoires azerbaïdjanais qu'elles occupent, ce qui permettra le retour des populations déplacées dans leurs foyers et aidera à enrayer le trafic de stupéfiants et d'armes. Il appartient à la communauté internationale de promouvoir une résolution négociée et politique de cette situation.

M. SAEED MOHAMED AL-FAIHANI (Bahreïn) a noté que la présente session de la Sous-Commission se déroule dans un contexte très différent des années précédentes. En particulier, on constate que, dans certaines régions du monde, le respect des droits de l'homme progresse grâce à des réformes et à la modernisation des systèmes politiques, alors qu'ailleurs, le respect des droits de l'homme régresse en raison de toute une série de circonstances. En outre, par le passé, c'était les États qui étaient accusés de violations de droits de l'homme alors qu'aujourd'hui, il est de plus en plus fréquent de voir des acteurs non étatiques, tels que les sociétés transnationales et les institutions commerciales, violer ces droits, consciemment ou non. La Sous-Commission doit donc déterminer les causes de ces violations et faire des recommandations concernant les mesures à prendre pour assurer le respect des droits de l'homme. Pour sa part, le Royaume du Bahreïn s'est engagé sur la voie de la promotion d'un climat politique et juridique propice à la protection des droits de l'homme. Cette année, parallèlement à l'adoption de textes instituant une nouvelle monarchie constitutionnelle, le pays a connu ses premières élections municipales auxquelles les femmes ont pris part, à la fois comme électrices et comme candidates.

Le représentant du Bahreïn a affirmé que la communauté internationale ne doit pas oublier les souffrances du peuple palestinien ni la poursuite des violations des droits fondamentaux de ce peuple de la part des forces d'occupation israéliennes. Le Bahreïn demande à Israël, puissance occupante, de cesser immédiatement ses actes contre les Palestiniens, de se retirer du territoire de la Palestine, et de respecter le droit des Palestiniens à l'autodétermination.

M. ASHRAF SARAAF (Congrès du monde islamique), au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales) a déclaré que la situation au Jammu-et-Cachemire est très préoccupante. Les pertes en vies humaines y sont nombreuses, en particulier depuis le
11 septembre, dont les évènements ont servi de prétexte à l'Inde pour mettre en œuvre des mesures visant à légitimer son occupation de la région, notamment par des élections frauduleuses. Les conditions sur le terrain sont en effet les suivantes: occupation militaire indienne massive, répression systématique et intimidation du peuple cachemirien, arrestations arbitraires de militants par les forces de sécurité indiennes, parrainage de collaborateurs criminels cachemiriens, absence de véritable vérification du processus électoral, autant de facteurs qui témoignent clairement que l'Inde cherche à influencer le résultat du scrutin. Ceux qui estiment que des élections pourraient avoir un effet favorable doivent garder à l'esprit que la pseudo légitimité que pourrait ainsi obtenir l'Inde serait pour elle le prétexte pour accentuer encore sa répression contre la résistance. Le risque d'un conflit indo-pakistanais en serait encore augmenté. Un règlement pacifique doit être le fruit d'une négociation politique directe entre le Pakistan et l'Inde, avec la collaboration de la communauté internationale.

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