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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE LA ROUMANIE

03 août 1999

APRÈS-MIDI
HR/CERD/99/35

3 août 1999



Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a entamé, cet après-midi, l'examen du rapport de la Roumanie sur les mesures prises par ce pays pour donner effet aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

La délégation roumaine est dirigée par MmeRomanita Vranceanu, Secrétaire générale adjointe au Ministère de la justice, accompagnée de représentants du Gouvernement roumain, dont M.Mircea Moldovan, Avocat du peuple adjoint. Présentant le rapport de son pays, MmeVranceanu, a expliqué que les dispositions de la Convention font partie du droit interne et ont la primauté sur la législation nationale. Elle a affirmé que la protection des droits des personnes appartenant aux minorités nationales représente l'un des principaux objectifs du Gouvernement de la Roumanie. MmeVranceanu a souligné le rôle des organisations non gouvernementales dans la promotion des dispositions de lutte contre la discrimination raciale dans son pays.

L'expert chargé de l'examen du rapport de la Roumanie, M.Mario Jorge Yutzis, a soulevé le problème de la définition des minorités dans la législation roumaine. Il a estimé que la minorité hongroise, qui représente 1,6 million de personnes, fait encore l'objet d'une discrimination. M.Yutzis a mis en doute l'explication fournie dans le rapport, attribuant à des raisons d'ordre social le fait que la criminalité touche surtout la minorité rom. D'autres membres du Comité se sont déclarés très préoccupés par le passage du rapport qui affirme que les Tsiganes ne sont pas intéressés par l'école et l'apprentissage d'un métier.

Les membres suivants du Comité sont également intervenus : M.Mahmoud Aboul-Nasr, M.Ivan Garvalov, M.Theodoor Van Boven, M.Rüdiger Wolfrum, M.Régis de Gouttes, M.Luis Valencia Rodríguez, M.Michael Parker Banton et M.Eduardo Ferrero Costa.

Le Comité achèvera l'examen du rapport de la Roumanie demain matin, à partir de 10 heures. Il procédera ensuite à l'examen de l'application des dispositions de la Convention à Antigua-et-Barbuda, qui est très en retard dans la présentation de son premier rapport au Comité.

Présentation du rapport de la Roumanie

Présentant le rapport de la Roumanie, MmeRomanita Vranceanu, Secrétaire générale adjointe au Ministère de la justice, a expliqué que les dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toute forme de discrimination raciale font partie du droit interne, et jouissent de la primauté lorsqu'un conflit survient entre ces dispositions et les normes internes.

Mme Vranceanu a affirmé que la protection des droits des personnes appartenant aux minorités nationales représente l'un des objectifs majeurs du Gouvernement de la Roumanie. Ainsi, le Département pour la protection des minorités nationales a été créé en 1997 afin, notamment, de rechercher des modalités d'application de la loi interne et internationale concernant la protection des minorités, la réception et l'examen des requêtes déposées contre des actions illégales des autorités locales, la promotion et l'organisation des programmes destinés à développer l'identité culturelle, religieuse et linguistique des personnes appartenant aux minorités. Il est prévu qu'un enseignement soit fourni dans la langue maternelle des minorités et que soit créées des universités multiculturelles. Les problèmes spécifiques de la minorité rom constituent le domaine d'activité d'un office national dépendant du Département pour la protection des minorités nationales, et d'une sous-commission relevant du Comité interministériel pour les minorités nationales.

La représentante roumaine a précisé qu'il n'existe pas d'accord avec l'Allemagne visant le rapatriement des citoyens roumains appartenant à des minorités ethniques. Il existe en revanche deux accords bilatéraux datant de 1992 et de 1998, visant à lutter contre les migrations illégales dans les deux pays. Elle a par ailleurs indiqué que les crimes liés à la discrimination raciale sont promptement punis. Une attention particulière est portée à l'aspect préventif de la lutte dans ce domaine. Ainsi, de nombreux programmes d'information et de prévention sont mis en place en collaboration avec les associations rom, les organisations non gouvernementales et les organisations internationales. De plus, les minorités nationales et les réfugiés jouissent d'un traitement favorable pour ce qui est de la liberté de pratiquer une religion et la liberté d'instruction religieuse des enfants. La représentante a souligné le rôle des organisations non gouvernementales dans la promotion des dispositions de lutte contre la
discrimination raciale dans son pays.

Le rapport de la Roumanie (CERD/C/363/Add.1) en date du 17 mai 1999, réunit les douzième, treizième, quatorzième et quinzième rapports périodiques. Il indique qu'en Roumanie, l'incitation à la haine raciale et le fait d'entraver l'exercice de l'activité d'un culte religieux sont punis par la loi. Afin de garantir le respect des droits et des libertés des citoyens, l'Institut de l'avocat du peuple a été créé en 1997; son but est d'agir au nom des citoyens qui estiment que leurs droits et libertés ont été violés par les autorités publiques. À titre de nouveauté législative intéressant l'application des engagements internationaux de la Roumanie, il convient aussi de mentionner l'adoption en 1996 d'une loi réglementant le statut et le régime des réfugiés en Roumanie. Par ailleurs, des mesures spécifiques ont été prises au niveau du système éducatif, visant la formation des jeunes et des fonctionnaires chargés de l'application des lois. De plus, toutes les facultés de droit enseignent les droits de l'homme, domaine prioritaire dans la formation des magistrats, des avocats et des fonctionnaires. Les programmes de formation des officiers de police contiennent comme objet d'étude obligatoire la problématique des droits de l'homme.

Depuis octobre 1993, date à laquelle elle est devenue membre de plein droit du Conseil de l'Europe, la Roumanie a ratifié ou adhéré à 47conventions et a signé 24 autres instruments juridiques. Du 23 au 26mai996, le Gouvernement roumain, en coopération avec le Conseil de l'Europe, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et l'Organisation des NationsUnies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco), a organisé à Bucarest un séminaire international sur la tolérance. En novembre 1996, de nouvelles élections parlementaires et présidentielles se sont déroulées, conduisant à la formation d'un gouvernement comportant plusieurs partis : la Convention démocrate, l'Union sociale démocrate et l'Union démocrate magyare de Roumanie (UDMR). Parmi les mesures institutionnelles prévues par le programme de gouvernement adopté en 1996, s'inscrit la création d'un Département pour la protection de minorités nationales. Ce Département est coordonné par un ministre chargé d'élaborer une politique, de préparer les projets de loi et d'en surveiller l'application, ainsi que d'établir, au sein du Département un office national pour les Roms. Actuellement, le poste de Ministre délégué auprès du Premier Ministre pour la protection des minorités nationales est détenu par un représentant de l'Union démocrate magyare de Roumanie.


Examen du rapport de la Roumanie

L'expert chargé de l'examen du rapport de la Roumanie, M.Mario Jorge Yutzis, a noté que le dernier dialogue du Comité avec une délégation roumaine remontait à 1995. La qualité de rapport a été remarquée, en particulier pour ses informations très complètes sur les minorités nationales. L'expert s'est félicité de la création d'une structure pour la protection des minorités, qui compte un Bureau particulier pour les Roms. Dans ce cadre, il a posé une question de nomenclature : Roms et tsiganes sont assimilés dans le rapport. Il serait intéressant de savoir ce qu'il en est de la situation dans le pays, car le mot «tsigane» peut être entendu de manière péjorative. M.Yutzis a également évoqué le passage du rapport (§ 100) qui laisserait entendre que le Comité se serait appuyé sur des sources officieuses et peu dignes de foi pour établir ses conclusions sur le précédent rapport de la Roumanie. Il a demandé que cela soit expliqué.

L'expert a en outre soulevé le problème de la définition juridique même des minorités, que le rapport néglige de préciser. Il a estimé que la minorité hongroise, qui représente 1,6 million de personnes, fait encore l'objet d'une discrimination regrettable. Un expert a ajouté que des sources dignes de foi rapportent en effet des actes de harcèlement de la part des autorités de police et judiciaires roumaines à l'égard des Hongrois. En même temps, des sources roumaines accusent les Hongrois de «nettoyage ethnique», ce qui mérite des explications.

M.Yutzis a noté que la police roumaine travaille mieux car elle dispose de moyens plus perfectionnés. Mais il s'est interrogé sur l'identité des criminels. Le rapport indique que la plupart des actes criminels ou violents sont commis par des individus appartenant à la minorité des Roms, mais estime que la nature de ce problème est sociale, et non raciale. L'expert a mis en doute cette affirmation, estimant que les Roms font l'objet d'une discrimination raciale, inscrite dans l'héritage historique de la Roumanie. Dans ce sens, un expert a cité un rapport de la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance daté de 1998 qui indique qu'il n'existe pas en Roumanie de législation visant à combattre la discrimination. Un expert a en outre contesté le terme de «discrimination positive» s'agissant des Roms auquel le rapport fait référence.

Les experts se sont déclarés très préoccupés par le contenu d'un passage du rapport (§ 133), qui attribue notamment le nombre plus élevé de Roms/Tsiganes parmi les sans-emplois au «manque d'intérêt de la part des Tsiganes pour l'école et pour l'apprentissage d'un métier...». La protection du droit au travail, protégeant contre un renvoi inéquitable, par exemple, a été évoquée par un expert. Il s'est interrogé sur l'existence d'un Code du travail en Roumanie, et sur son application.

Des renseignements plus précis ont en outre été demandés en ce qui concerne les autres minorités que compte le pays : Ukrainiens, Russes, Serbes, Polonais, Tchèques, Slovaques, Turcs, Bulgares et Grecs, répertoriés par le recensement de 1992. Au sujet du système de l'éducation en Roumanie, un expert a souhaité plus de renseignements sur l'éducation bilingue pour les enfants des minorités, dont il est fait mention dans le rapport.

M.Yutzis s'est inquiété de la résurgence de partis fascistes en Roumanie. Il s'est en outre interrogé sur les véritables raisons de l'absence de plaintes ayant eu comme substance les dispositions de cet l'article 4, interdisant la propagande raciste. Concernant les déclarations racistes à l'égard des Roms faites à la radio, un expert a demandé quel système est mis en place en Roumanie pour condamner de tels actes de discrimination. Par ailleurs, il a été demandé de préciser le contenu pratique des mesures préventives mises en place pour remédier aux actes de violences perpétrés par les forces de police et par la population contre les membres des minorités. Des informations plus approfondies ont également été requises sur le système de détention préventive, qui avait été dénoncée comme trop longue par le Comité.

Des experts se sont en revanche félicités de la création de l'institution de l'Avocat du peuple, qui constitue un succès indiscutable pour l'État partie. Un expert a demandé des exemples concrets de ses activités. Il a cependant été rappelé qu'il n'existe pas de démocratie véritable sans état de droit. Dans ce cadre, une politique plus vigoureuse a l'égard du racisme a été souhaitée.

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