Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT INITIAL DU CAMBODGE

14 Juillet 1999



HR/CT/99/10
14 juillet 1999





Les experts se penchent sur les mesures à prendre pour mettre fin à la culture d'impunité dans le pays



Le Comité des droits de l'homme a entamé ce matin l'examen du rapport initial soumis par le Cambodge en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

La délégation cambodgienne venue présenter le rapport est composée de M.Om Yentieng, Président du Comité des droits de l'homme du Cambodge, de M.OkVannarith, membre du Comité cambodgien, et de M.Ith Rady, Secrétaire permanent de la Commission de rédaction. M.Om a affirmé qu'après une période de grande souffrance où l'expression même de «droits de l'homme» était bannie, les élections de 1993 ont permis au Cambodge de franchir une étape décisive dans la promotion des droits de l'homme. Il a ajouté que de nouvelles élections organisées en 1998 ont permis d'aller plus avant dans cette voie. Répondant aux questions des experts sur ce point, il a indiqué qu'une loi est actuellement en préparation pour juger les responsables du génocide. À cet égard, il a précisé que son gouvernement souhaitait la mise en place d'un tribunal national auquel serait associée une présence internationale.

La question de l'impunité au Cambodge a été au centre du dialogue entre la délégation cambodgienne et les experts du Comité. Nombre d'experts ont attiré l'attention sur un certain nombre de faits impliquant les forces de police, et n'ayant, semble-t-il, pas donné lieu à poursuites. D'autre part, la question des mesures prises pour juger les principaux responsables du génocide cambodgien a été posée à maintes reprises par les experts.

Le Comité des droits de l'homme reprendra ses travaux à 15 heures pour entendre les réponses de la délégation cambodgienne aux questions posées ce matin par les experts.


Présentation du rapport initial du Cambodge

M.OM YENTIENG, Président du Comité des droits de l'homme du Cambodge, a présenté le rapport initial du Cambodge en précisant qu'à l'heure actuelle, quatre institutions sont chargées de la protection des droits de l'homme, au niveau du Sénat, de l'Assemblée nationale, du Gouvernement et de la société civile. Dix-huit organisations non gouvernementales oeuvrent dans le domaine des droits de l'homme, a-t-il ajouté. Il a indiqué qu'un projet de création d'une institution nationale suprême en matière de droits de l'homme est actuellement en cours.

M.Om a ensuite déclaré qu'il n'existait pas de discrimination à l'égard des femmes au Cambodge, tant en droit que dans les faits. Il a attiré l'attention, à cet égard, sur la présence de femmes ministres et secrétaires d'État au Gouvernement. Il a toutefois reconnu le faible nombre de femmes présentes à l'Assemblée nationale.

Le chef de la délégation cambodgienne a affirmé qu'il n'existait pas de «prisons secrètes» dans son pays. Il a cité le cas d'un policier militaire qui, ayant frappé un accusé, a été démis de ses fonctions. De même, un inspecteur de police a été condamné pour avoir prolongé une garde à vue au-delà de 48 heures.

Le rapport initial du Cambodge (CCPR/C/81/add.12) souligne qu'après une période sombre, le peuple cambodgien a soif de droits et de libertés. Le Gouvernement s'efforce désormais de protéger ces droits par tous les moyens, en surmontant de nombreuses difficultés. Le pays a adopté un régime politique de démocratie libérale pluraliste qui se développe progressivement. Le rapport précise que le Cambodge s'est doté d'une constitution qui ne contient pas de dispositions contraires ou restrictives des droits fondamentaux de l'homme définis par le Pacte. De plus, elle reconnaît la suprématie des conventions internationales et des pactes relatifs aux droits de l'homme sur la loi interne.

Un conseil constitutionnel et un conseil supérieur de la magistrature ont été institués. L'Assemblée nationale a créé une commission des droits de l'homme et de la réception des plaintes. Le gouvernement a, quant à lui, créé un secrétariat d'État aux affaires des femmes, chargé de la protection et de la promotion des droits des femmes. Le rapport note en outre qu'une loi de 1982 permet aux citoyens d'exercer des recours pour abus de pouvoir contre l'administration. Il est également noté qu'une trentaine d'organisations non gouvernementales, ainsi que le Centre des Nations Unies pour les droits de l'homme, sont autorisés à agir dans le domaine de la protection de ces droits.

En ce qui concerne la liberté et la sécurité personnelle, le rapport fait remarquer qu'il existe encore dans la pratique des cas de violations de ces droits, tels que l'arrestation de suspects sans mandat d'arrêt ou des cas de détention provisoire prolongées. Les violations les plus graves ont été le fait des forces armées des Khmers rouges. Le rapport précise que le Gouvernement élabore actuellement des projets de code pénal et de code de procédure pénale dans lesquels la répression de toute détention arbitraire sera aménagée. Le rapport souligne ensuite que les libertés d'expression et d'opinion se sont renforcées, ce processus s'étant accompagné de nombreux problèmes : fermeture de journaux, assassinats, attentats. Le rapport précise que de tels faits résultent d'une mauvaise interprétation de la liberté d'expression. Les restrictions à l'exercice de cette liberté devraient être définies de façon plus claire et détaillée, reconnaît le rapport préparé par le Gouvernement cambodgien.


Examen du rapport cambodgien

Plusieurs experts du Comité ont porté leur attention sur le problème de l'impunité, qui découle de l'article 51 de la loi de 1974 selon lequel un fonctionnaire ne peut être poursuivi ou arrêté sans l'autorisation préalable du Ministre dont il dépend. Cette loi, contraire au Pacte, sera-t-elle abrogée, a-t-il été demandé ? Un expert a fait état d'informations selon lesquelles aucune poursuite n'a été engagée à la suite du meurtre d'un militant des droits de l'homme en 1998, ni contre les auteurs d'assassinats de membres de l'opposition.

S'agissant des forces de sécurité militaires cambodgiennes, des membres du Comité ont souhaité savoir si elles étaient placées sous le contrôle du pouvoir politique et si la justice et l'administration étaient à l'abri d'éventuelles pressions de la part des responsables militaires ?

Les membres du Comité ont demandé pour quelles raisons le Cambodge n'avait pas donné suite aux propositions faites par le Secrétaire général des Nations Unies d'aider à la mise en place d'un tribunal pour juger les auteurs du génocide ? Que fait-on au Cambodge pour éviter l'impunité des responsables ? Des questions ont aussi été posées sur l'indépendance du pouvoir judiciaire. Le Ministère de la justice peut-il suspendre des magistrats, comme cela semble avoir été le cas en 1998 lorsque trois juges de la Cour d'appel ont été suspendus de leurs fonctions ? Des mesures ont-elles été prises pour prévenir la corruption des juges ? Des experts ont en outre demandé si la composition du conseil supérieur de la magistrature permettait de garantir l'indépendance véritable de l'ordre judiciaire, dans la mesure ou le Ministre de la justice lui-même fesait partie ?

Le droit à la vie a également retenu l'attention des experts. La délégation cambodgienne a été interrogée sur le recours à des mauvais traitements pendant les interrogatoires de police.

Les experts ont demandé si une véritable politique et des mesures concrètes sont mises en oeuvre pour promouvoir la condition de la femme. Enfin, les experts se sont interrogés sur l'égalité de droits entre citoyens khmers et les personnes appartenant à des minorités.

En fin de séance, M.Om a commencé à répondre aux questions posées sur les mesures prises pour juger les coupables du génocide. Il a reconnu, à cet égard, que l'on n’a pas encore rendu justice au peuple cambodgien. Il a affirmé qu'il y a une volonté réelle de mettre en place un tribunal pour juger les auteurs du génocide. Le représentant a toutefois souligné la difficulté de mettre en oeuvre cette volonté, si ferme soit-elle. Il a souligné l'urgence de commencer ce processus, dans la mesure où la détention provisoire d'un des principaux responsables du génocide, Ta Mok, qui dure depuis trois mois, ne peut pas excéder six mois. Le représentant a indiqué que son gouvernement était en faveur d’un procès par un tribunal national, auquel coopéreraient juges et procureurs étrangers.

VOIR CETTE PAGE EN :