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COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME: INTERVENTIONS DE MINISTRES DU DANEMARK, DU PÉROU ET DE LA RÉPUBLIQUE DU CONGO

03 avril 2002



Commission des droits de l'homme
58ème session
3 avril 2002
Matin


La Commission entend ses experts sur l'Iran et le Burundi
et les chefs de l'ONUSIDA et de la Fédération internationale des sociétés
de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge

La Commission des droits de l'homme a entendu, ce matin, les Ministres des affaires étrangères du Danemark et de la République du Congo ainsi que la Ministre péruvienne chargée de la promotion de la femme et du développement humain. Le Directeur exécutif du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) et le Président de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge se sont également adressés à la Commission. Au titre de la question de la violation des droits de l'homme où qu'elle se produise dans le monde, le Représentant spécial sur la situation des droits de l'homme en République islamique d'Iran et la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme au Burundi ont présenté leurs rapports.
M. Per Stig Møller, Ministre des affaires étrangères du Danemark, a réaffirmé la détermination du peuple danois de contribuer de façon significative au développement des moins nantis. La pauvreté est en effet la première des violations des droits de l'homme, car elle empêche l'homme de développer ses aptitudes. Le Ministre des affaires étrangères de la République du Congo, M. Rodolphe Adada, a pour sa part souligné qu'il est urgent que le droit au développement soit mis en œuvre car l'extrême pauvreté, la faim, la maladie et l'ignorance comptent parmi les causes de la violence. En outre, a-t-il ajouté, le droit au développement est un droit fondamental dont la réalisation favorise la jouissance de tous les droits de l'homme.
Mme Cecilia Blondet, Ministre chargée de la promotion de la femme et du développement humain du Pérou, a indiqué que son pays est heureux de présider les travaux du Groupe de travail des Nations Unies chargé de l'élaboration d'une déclaration sur les peuples autochtones ainsi que ceux du Groupe de travail chargé du même mandat au niveau interaméricain. Elle a par ailleurs lancé une invitation ouverte à tous les rapporteurs et représentants spéciaux de la Commission à se rendre dans son pays et s'est félicitée de la visite prochaine au Pérou de M. Abid Hussain, Rapporteur spécial sur la liberté d'opinion et d'expression.
Le Président de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, M. Juan Manuel Suárez del Toro Rivero, a pour sa part souligné que la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels est souvent conditionnée par la situation de sous-développement qui prévaut dans de nombreuses régions du monde. Aussi, a-t-il demandé à la communauté internationale de redoubler d'efforts pour promouvoir le développement et de placer la lutte contre l'extrême pauvreté au premier rang de l'ordre du jour international.
Le Directeur exécutif d'ONUSIDA, M. Peter Piot, a rappelé que la pandémie du VIH/sida touche plus de 60 millions de personnes dans le monde et a déjà coûté quelque 20 millions de vies humaines. En Afrique subsaharienne, le sida a fait chuter l'espérance de vie à 42 ans, a-t-il rappelé. Soulignant que l'expansion de la pandémie n'est pas inévitable, il a fait observer que la capacité des communautés à freiner l'expansion de la pandémie est proportionnelle à la réalisation de leurs droits économiques, sociaux et culturels.
Le Représentant spécial sur la situation des droits de l'homme en République islamique d'Iran, M. Maurice Copithorne, a affirmé qu'il existe des signes indiquant que l'incorporation des valeurs associées aux droits de l'homme dans la société iranienne progresse à un rythme accéléré. Pour autant, la mise en œuvre des droits de l'homme par le gouvernement reste en deçà des attentes de la population, a-t-il précisé. Dans l'Iran d'aujourd'hui, le combat essentiel oppose les élus aux détenteurs du pouvoir qui ne sont pas élus, a estimé M. Copithorne, qui a ajouté que ce sont clairement ces derniers qui conservent le contrôle.
Mme Marie-Thérèse Kéita-Bocoum, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme au Burundi, a déclaré que la situation économique du pays est toujours désastreuse et que les combats entre rebelles et forces gouvernementales se sont poursuivis, malgré quelques avancées constatées depuis le début du processus d'Arusha en 2001. Le représentant du Burundi a fait une déclaration suite à l'intervention de Mme Kéita-Bocoum.
La Commission devrait entamer demain matin, à 10 heures, son débat sur la question de la violation des droits de l'homme où qu'elle se produise dans le monde. Cet après-midi, elle devrait achever en privé l'examen des dossiers qui lui sont soumis au titre de la procédure confidentielle d'examen des situations qui semblent révéler des violations graves des droits de l'homme (procédure 1503).
Déclarations de dignitaires
M. PETER PIOT, Directeur exécutif du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), a souligné l'ampleur de la pandémie du VIH/sida qui touche plus de 60 millions de personnes dans le monde et a déjà coûté quelque 20 millions de vies humaines. Le sida a effacé cinquante ans de progrès accomplis dans l'allongement de l'espérance de vie, a-t-il regretté. En Afrique subsaharienne, le sida a fait chuter l'espérance de vie à 42 ans. Pourtant, l'expansion de la pandémie n'est pas inévitable, elle peut être enrayée lorsque les communautés se mobilisent, s'organisent et se défendent comme en témoignent la réaction des communautés homosexuelles dans les pays à hauts revenus dès le début des années 1980 et les actions menées dans les communautés urbaines et rurales en Ouganda et en Zambie, ou par les personnes travaillant dans «l'industrie du sexe» au Brésil et en Thaïlande. M. Piot a observé que la capacité des communautés à freiner l'expansion de la pandémie est proportionnelle à la réalisation de leurs droits économiques, sociaux et culturels. Il s'est félicité de la Déclaration adoptée par la session extraordinaire de l'Assemblée générale consacrée au VIH/sida, réunie à New York en juin 2001, et de la prise de conscience générale que l'accès aux médicaments est un élément fondamental du droit à la santé.
À cet égard, il a affirmé qu'il importe de trouver les moyens de garantir un accès universel aux médicaments tout en préservant les droits de propriété intellectuelle. Il a observé que le prix de la trithérapie antirétrovirale est passé de 12 000 dollars américains il y a deux ans à 350 dollars dans les pays les plus pauvres, un prix qui reste élevé pour la plupart des personnes vivant avec le sida dans ces pays. Il s'est ensuite félicité de la création d'un fonds mondial pour lutter contre de VIH/sida, la tuberculose et le paludisme qui a permis d'augmenter de 50% les fonds disponibles pour la lutte contre le VIH/sida. M. Piot a ensuite cité l'exemple du Brésil où, depuis 1996, l'accès universel et gratuit aux médicaments antirétroviraux a permis de réduire de 80% les hospitalisations et de 50% le taux de mortalité due au sida. Il a fait savoir que le l'ONUSIDA continuerait de fournir aux États une assistance technique et financière en vue de faciliter l'intégration des questions relatives aux droits de l'homme dans leurs plans nationaux de lutte contre le VIH/sida. Il a illustré son propos en citant l'exemple du plan national adopté par le Ghana qui intègre le principe de non-discrimination à tous les niveaux et interdit le dépistage obligatoire. À cet égard, il a souligné l'importance de l'action des institutions nationales de protection et de promotion des droits de l'homme. Il a précisé que les politiques générales décidées aux plans national ou international forment la base sur laquelle doivent se fonder les actions de la société civile et des organisations non gouvernementales, car, jusqu'à présent, seuls l'activisme et l'établissement de réseaux locaux ont offert une résistance décisive à la pandémie. Il a conclu en soulignant le caractère fondamental de droit à la santé pour l'avenir de toutes les sociétés--un droit qui se saurait être réalisé sans une politique de prévention, de traitement et de soins du VIH/sida.
M. PER STIG MØLLER, Ministre des affaires étrangères du Danemark, a réaffirmé la détermination du peuple danois de contribuer de façon significative au développement des moins nantis, en particulier par son intention de consacrer bien plus de 0,7% de son PIB en faveur de l'assistance au développement. La pauvreté est en effet la première des violations des droits de l'homme, car elle empêche l'homme de développer ses aptitudes. Sous ce rapport il faut envisager un politique qui vise aussi bien à intégration des pays en développement dans l'économie mondiale, qu'à la promotion du rôle de la femme et d'un processus démocratique fondé sur les droits de l'homme. Dans le cadre plus général des activités de la Commission, le Danemark souhaite apporter une contribution toute particulière en ce qui concerne la lutte contre la torture et la protection des droits des peuples autochtones. Le Danemark participera également de façon active à l'élaboration de la convention internationale sur les droits des personnes handicapées.
M. Møller a d'autre part confirmé le ferme soutien que son pays accorde à la lutte contre le fléau du terrorisme, notant au passage que cette lutte ne doit pas servir de prétexte à la mise en cause des principes des droits de l'homme. En période de conflit, le droit humanitaire doit malgré tout être respecté, tant par les occupants que par les résistants. En ce qui concerne particulièrement le Proche-Orient, le Danemark est d'avis que chacune des deux parties doit œuvrer pour aboutir à la paix, Israël, en levant les restrictions, le Président de l'Autorité palestinienne en luttant contre le terrorisme. Le ministre a estimé que la résolution 1397 constitue une bonne ouverture vers une résolution pacifique de la situation. Enfin, le Danemark accorde une importance extrême à la régularité des processus électoraux, qui sont le fondement de l'expression des peuples.
Le Ministre danois des affaires étrangères a souligné l'importance du rôle de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme dans les efforts déployés pour la protection internationale des droits de l'homme. Le ministre a ici appelé tous les États à soutenir cette action en entretenant un dialogue constructif avec les organes compétents des Nations Unies, et notamment avec les différents Rapporteurs de la Commission. Malheureusement, a constaté M. Møller, le travail de ces derniers est trop souvent entravé par certains États, lesquels, en définitive, ont plus à perdre qu'à gagner de cette mauvaise volonté. Le ministre a par contre salué l'engagement des organisations non gouvernementales, qui représentent directement les victimes des violations des droits de l'homme, et dont les activités sont importantes pour appuyer les travaux de la Commission.
M. JUAN MANUEL SUÁREZ DEL TORO RIVERO, Président de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, a souhaité que le débat soulevé par l'apparente contradiction entre la quête de meilleures conditions pour l'exercice des droits de l'homme et la nécessité de garantir la sécurité des gens s'inscrive dans le cadre du respect des droits fondamentaux et du cadre juridique international. Il a rappelé que les participants à la Conférence internationale de 1999 de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge – qui rassemblait tous les gouvernements des États parties aux Conventions de Genève de 1949 – se sont unanimement engagés en faveur de la protection des individus vulnérables et en faveur d'un plan d'action concret intégré dans notre Stratégie à l'horizon 2010. Nous ne pouvons ignorer le fait que la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels est souvent conditionnée par la situation de sous-développement qui prévaut dans de nombreuses régions du monde, a poursuivi M. Suárez del Toro. Aussi, la communauté internationale doit-elle redoubler d'efforts pour promouvoir le développement et placer la lutte contre l'extrême pauvreté au premier rang de l'ordre du jour international. De nombreuses sociétés nationales de la Fédération ont demandé d'inclure dans l'ordre du jour de la prochaine conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge un point intitulé «Pauvreté et vulnérabilité», a indiqué le Président de la Fédération.
M. Suárez del Toro a par ailleurs indiqué que les mesures visant à réduire la discrimination et la violence doivent figurer au cœur des conférences régionales des sociétés nationales que la Fédération internationale prévoit d'organiser dans un avenir proche. Il a rappelé que la prochaine conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge se tiendra à Genève en décembre 2003.
MME CECILIA BLONDET, Ministre de la promotion de la femme et du développement humain du Pérou, a retracé l'évolution démocratique de son pays depuis les élections libres d'avril 2001, qui ont porté au pouvoir M. Alejandro Toledo. Elle a rappelé que M. Toledo s'est engagé en faveur de la réalisation des droits de l'homme et du développement social. Dès son investiture en juillet 2001, le gouvernement a proposé à la communauté des nations andines d'adopter la Déclaration de Machu Pichu sur la démocratie, le droit des peuples autochtones et l'éradication de la pauvreté. L'expérience particulière du Pérou lui permet d'apporter une contribution nouvelle au renforcement de la démocratie et des droits de l'homme en Amérique latine, a-t-elle expliqué, faisant part de la participation de son pays à l'élaboration d'une charte démocratique interaméricaine, approuvée par l'Assemblée générale de l'Organisation des États américains, le 11 septembre 2001. Cette charte est l'unique instrument régional qui décrit les principes, les normes et les mécanismes d'action collective, y compris les sanctions diplomatiques, relatifs à la promotion et à la protection des droits de l'homme. Dans le même esprit, le Pérou présentera cette année à la Commission des droits de l'homme un projet de résolution sur le droit à la démocratie.
Mme Blondet a ensuite décrit diverses mesures adoptées par son pays en faveur de la réalisation des droits de l'homme. Elle a fait part des travaux de la Commission de vérité et de réconciliation chargée d'identifier les responsables de la violence et des violations des droits de l'homme qui ont été commises entre mai 1980 et novembre 2000, et de proposer des initiatives en vue de renforcer la paix et l'amitié entre les communautés. Elle a également mentionné la création d'une commission nationale chargée d'étudier l'application du droit international humanitaire et de formuler des recommandations en vue d'assurer la conformité de la législation nationale avec les normes internationales en vigueur. Après avoir rappelé que le Pérou s'était acquitté de ses obligations au regard des mécanismes internationaux relatifs aux droits de l'homme, Mme Blondet a appuyé le projet de création d'un groupe de travail de la Commission en vue de préparer l'élaboration d'une convention internationale sur les disparitions forcées, ainsi que les travaux du Groupe de travail chargé de préparer un Protocole facultatif à la Convention contre la torture. Riche de son expérience dans ce domaine, le Pérou est heureux de présider les travaux en vue de l'élaboration d'une déclaration des Nations Unies sur les peuples autochtones, a-t-elle déclaré.
Après avoir retracé brièvement les avancées de son pays en matière de développement et de respect des droits de l'homme, Mme Blondet a lancé une invitation ouverte à tous les rapporteurs et représentants spéciaux de la Commission et s'est félicitée de la visite prochaine dans son pays de M. Abid Hussain, Rapporteur spécial sur la liberté d'opinion et d'expression.
M. RODOLPHE ADADA, Ministre des affaires étrangères, de la coopération et de la francophonie de la République du Congo, a félicité Mme Mary Robinson, Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, pour le rôle déterminant qu'elle a joué dans la mise en place du centre sous-régional des droits de l'homme et de la démocratie à Yaoundé au Cameroun. Il a ensuite abordé les résultats de la Conférence mondiale contre le racisme, tenue à Durban (Afrique du Sud) du 31 août au 8 septembre 2001, et a estimé qu'en reconnaissant la traite négrière et l'esclavage comme crimes contre l'humanité, cette Conférence a sans doute marqué un pas décisif dans le sens de la réconciliation de l'humanité avec une partie de son histoire. Il a insisté, à cet égard, sur l'importance d'assurer le suivi de l'application de la Déclaration et du Programme d'action de Durban. Revenant ensuite sur les attentats terroristes du 11 septembre 2001 aux États-Unis, il a fait part de l'engagement de son pays dans la lutte contre le terrorisme. Dans cette optique, a-t-il expliqué, une commission d'éligibilité au statut de réfugié a été récemment créée et dotée du pouvoir de refuser ou de retirer ce statut aux personnes sur lesquelles pèsent de lourdes présomptions de compromission dans des actes terroristes.
Reconnaissant la nécessité de lutter contre la violence, M Adada a estimé urgent de s'employer à éradiquer ses causes. Ainsi, a-t-il déclaré, il est urgent que le droit au développement soit mis en application car il n'est un secret pour personne que l'extrême pauvreté, la faim, la maladie et l'ignorance comptent parmi les causes de la violence. Le droit au développement est un droit fondamental dont la réalisation favorise la jouissance de tous les droits de l'homme. C'est pourquoi, a-t-il poursuivi, la réalisation de ce droit est l'une des préoccupations majeures du Gouvernement congolais qui s'est doté d'une stratégie en vue de redresser la faiblesse de la croissance économique, particulièrement dans les secteurs agricoles et industriels, l'accès au crédit, l'aggravation du chômage et l'insuffisance d'infrastructures d'appui au développement. Dans ce contexte, il a souligné l'importance de la participation des femmes au développement et s'est indigné de leur marginalisation qui constitue une atteinte à la dignité humaine. Il a réitéré l'engagement de son pays, à travers sa stratégie de lutte contre la pauvreté, à assurer l'accès universel des filles à l'éducation et à promouvoir l'intégration des femmes à toutes les sphères de production. Le ministre a souligné l'importance des droits économiques, sociaux et culturels qui doivent bénéficier, au sein de la Commission, de la même attention que les droits civils et politiques.
Le Ministre congolais des affaires étrangères a ensuite fait part des initiatives de son pays dans le domaine des droits de l'homme et a insisté, notamment, sur le référendum constitutionnel de janvier 2002 qui a abouti à l'adoption d'une nouvelle Constitution fondée sur les principes de la démocratie et de la séparation des pouvoirs. Il s'est félicité des résultats de l'élection présidentielle de mars 2002 qui ont permis la victoire au premier tour de M. Sassou Nguesso et a souligné que ces élections s'étaient déroulées, sous observation internationale, dans le calme et la transparence.

Présentation de rapports au titre de la question de la violation des droits de l'homme où qu'elle se produise dans le monde
Présentant son rapport, M. MAURICE COPITHORNE, Représentant spécial sur la situation des droits de l'homme en République islamique d'Iran, a déclaré qu'il existe des signes indiquant que l'incorporation des valeurs associées aux droits de l'homme dans la société iranienne progresse à un rythme accéléré. Pour autant, la mise en œuvre des droits de l'homme par le gouvernement reste en deçà des attentes de la population, a ajouté le Représentant spécial avant d'ajouter que depuis l'achèvement de son rapport, la situation est restée largement inchangée. Dans l'Iran d'aujourd'hui, le combat essentiel oppose les élus aux détenteurs du pouvoir qui ne sont pas élus, a estimé M. Copithorne, qui a précisé que ce sont clairement ces derniers qui conservent le contrôle.
Le Représentant spécial a souligné que les élites puissantes continuent de recourir à la violence pour s'opposer à ceux qu'elles considèrent comme des ennemis de l'État ou de la religion. Des décès suspects et des exécutions continuent d'être rapportés dans ce pays, parfois à l'encontre de minorités ethniques telles que la minorité kurde, a poursuivi M. Copithorne. Il a ajouté que les professions juridiques continuent d'être confrontées à des actes d'intimidation et qu'en ce qui concerne les minorités, des informations récentes font état d'une interdiction de la langue azérie dans un journal provincial de la ville largement azérophone de Tabriz. En ce qui concerne la torture, le Représentant spécial a relevé que le chef du judiciaire a lui-même déclaré qu'elle est encore largement répandue dans l'enceinte de divers organes de sécurité. Le mois dernier, a fait observer M. Copithorne, le Majlis (parlement iranien) a adopté un projet de loi qui interdirait l'utilisation de la torture. Il reste à vérifier si ce projet va être approuvé, a ajouté le Représentant spécial.
Dans son rapport sur la situation des droits de l'homme en République islamique d'Iran (E/CN.4/2002/42), le Représentant spécial estime que les Iraniens sont de plus en plus conscients que, du point de vue moral et pratique, il va leur falloir avancer à un rythme plus soutenu que jusqu'ici vers la mise en place d'une société tolérante, diversifiée qui attribuera une valeur suprême à la dignité essentielle de la personne. Parmi les obstacles à l'évolution de la situation, il cite, entres autres, les interdictions qui frappent la presse réformiste, notamment l'emprisonnement de journalistes. Il indique que le statut des femmes ne s'est amélioré que dans la mesure où les revendications des femmes et de ceux qui les soutiennent sont désormais publiques. Il signale que les attitudes patriarcales prévalent toujours comme l'attestent la violence dans les familles et les barrières à l'accès des femmes à des fonctions de direction dans les secteurs publics et privés.
Le Représentant spécial observe que les réformes du système judiciaire restent particulièrement lentes et qu'il semble encore fréquent que les personnes placées en détention provisoire pour des motifs de nature politique subissent des mauvais traitements. En outre les normes acceptées en matière d'équité des procès sont fréquemment bafouées et bon nombre de châtiments violent de façon flagrante les normes internationales relatives aux droits de l'homme, en particulier les lapidations. Il s'inquiète du traitement réservé aux intellectuels et aux dissidents et observe qu'il n'est pas rare que le traitement infligé à ces personnes viole la constitution iranienne et les normes internationales généralement acceptées. Il relève également que la situation pour ce qui est de la discrimination officielle ou de fait que subissent les minorités ethniques ou religieuse n'a guère changé.
Dans la sphère économique, l'inflation, le chômage et la pauvreté comptent parmi les causes de la détérioration de la condition sociale et économique de nombreux iraniens, mais, indique le Représentant spécial, si les dirigeants iraniens semblent conscients de la gravité, ils ont tardé à en faire une priorité de leur politique économique et sociale. Parmi les nombreuses contradictions de l'Iran d'aujourd'hui, il relève d'une part la volonté clairement exprimée du peuple et d'autre part la résistance tenace opposée à celle-ci. Exprimant la conviction que le changement est inévitable, M. Copithorne note que l'intransigeance qui prévaut actuellement et n'a fait que croître constitue un obstacle qui coûte cher. Le Représentant spécial regrette de terminer son rapport sur un constat si peu représentatif des aspirations du Président Khatami pour son pays.
Présentant son rapport, MME THÉRÈSE KÉITA-BOCOUM, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme au Burundi, a souligné que, depuis la soumission de son rapport, la situation sur le terrain n'a que peu évolué : la situation économique est toujours désastreuse, les combats entre rebelles et gouvernement se sont poursuivis, malgré quelques avancées constatées depuis le processus d'Arusha en 2001. La situation des réfugiés a certes connu quelques changements. Toutefois, aussi longtemps que se poursuivront les combats à l'arme lourde, avec de nombreuses exactions contre les civils, il est exclu de voir des retours massifs. Pour que la situation se débloque, estime la Rapporteuse spéciale, il est impératif que les belligérants acceptent de négocier. Il faudra également que les soutiens financiers de la communauté internationale constatés soient maintenus. Au niveau interne, la Rapporteuse spéciale a demandé au Gouvernement burundais d'améliorer les programmes de formation et de sensibilisation à la bonne gouvernance, et de coopérer avec les organisations non gouvernementales locales.
Dans son rapport sur la question des droits de l'homme au Burundi (E/CN.4/2002/49), la Rapporteuse spéciale demande aux groupes armés actuellement en conflit de dépasser les égoïsmes individuels pour ne prendre en considération que la sauvegarde de l'intérêt du peuple burundais en négociant un arrêt immédiat du conflit. Elle les invite expressément à ne plus enrôler des enfants dans leurs forces armées. La Rapporteuse spéciale félicite d'autre part le Gouvernement burundais de l'installation des institutions de transition, de la nomination de femmes en son sein et des mesures de lutte contre le VIH/sida. Cependant, elle demande aussi, notamment, que le gouvernement prenne des mesures vigoureuses pour mettre fin à la pratique de la torture, qu'il confie la mission du maintien de la sécurité publique à des forces dûment constituées et juridiquement responsables, qu'il mette un terme effectif à l'incorporation d'enfants dans ses forces armées et qu'il garantisse la réinsertion matérielle, éducative et psychosociale de ceux qu'il aura démobilisés. À ce dernier égard, la Rapporteuse spéciale en appelle à la communauté internationale pour qu'elle assiste le Gouvernement burundais dans ses efforts.
M. ADOLPHE NAHAYO (Burundi) a remercié Mme Keita-Bocoum, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme au Burundi, pour les rapports équilibrés qu'elle a établis concernant le Burundi. Le représentant burundais a reconnu que, dans le contexte de guerre qui prévaut dans le pays, les droits de l'homme n'y sont pas totalement respectés. Le gouvernement tente donc d'arrêter le conflit interne par un dialogue avec les rebelles, lesquels manifestent malheureusement des réticences à engager un dialogue sincère. La Rapporteuse spéciale a elle-même pu constater l'intensification des violences qu'ils ont commises, notamment l'enlèvement d'écoliers, en décembre dernier. Cette guerre fratricide, a ajouté le représentant, affecte la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels. La destruction des infrastructures qu'elle engendre a d'autre part des répercussions sur l'éducation et la santé des Burundais, et empêche le retour des réfugiés.
Les allégations de violations des droits de l'homme qui auraient été commises par le Gouvernement du Burundi feront l'objet d'une enquête et les agents de l'État éventuellement impliqués feront l'objet des mesures qui s'imposent. Le gouvernement poursuivra ses programmes de promotion des droits de l'homme, notamment par la mise sur pied d'une commission nationale des droits de l'homme, qui intégrera les partenaires de la société civile.


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