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Communiqués de presse Conseil des droits de l’homme

LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE DES RAPPORTS DE MISSION AU LIBAN ET EN ISRAËL PAR SES EXPERTS

04 Octobre 2006

Conseil des droits de l'homme HR/HRC/06/58/Rev.1
MATIN

4 octobre 2006

Il examine aussi un rapport sur les droits de l'homme et la solidarité internationale


Le Conseil des droits de l'homme a entendu, ce matin, la présentation du rapport conjoint sur la mission récente au Liban et en Israël de quatre de ses experts chargés respectivement de la question des exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, du droit de jouir du meilleur état de santé possible, des personnes déplacées et du logement convenable. Le Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, M. Jean Ziegler, a également rendu compte de la mission qu'il vient d'effectuer au Liban.

Le rapport conjoint sur la mission au Liban et en Israël a été présenté par M. Philip Alston, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, qui a indiqué que le conflit qui a éclaté au Liban et en Israël en juillet et août 2006 a été inévitablement perçu par beaucoup comme une mise à l'épreuve de la capacité du Conseil des droits de l'homme à réagir rapidement et à formuler des recommandations. Les experts ont notamment conclu que des violations graves des droits de l'homme et du droit humanitaire ont été commises par Israël, qui n'a pas fait de distinction entre les objectifs militaires et civils, n'a pas appliqué le principe de proportionnalité et n'a pas pris toutes les mesures pour minimiser les dommages et les blessures occasionnés aux populations civiles. De son côté, le Hezbollah a violé à maintes reprises les principes applicables du droit humanitaire, dans certains cas en ciblant la population civile du nord d'Israël et en d'autres endroits en ne respectant pas le principe de distinction.

Les quatre experts des droits de l'homme appellent Israël à donner tous les détails sur l'emploi qui a été fait d'engins à sous-munitions afin de faciliter la destruction des munitions non explosées et de réduire au minimum les pertes civiles. La Commission israélienne chargée d'enquêter sur la conduite de la campagne doit aussi examiner la question de savoir si des crimes de guerre ont été commis. Les auteurs du rapport lancent un appel au Liban pour qu'il prenne des mesures en particulier dans le domaine du logement et pour aider les personnes déplacées. Enfin, les quatre experts exhortent le Hezbollah à affirmer publiquement qu'il est tenu par le droit international humanitaire et devrait renoncer à prendre pour cibles des civils en toutes circonstances. Le Conseil devrait veiller à ce qu'une enquête exhaustive soit réalisée sur les attaques du Hezbollah.

M. Alston a indiqué que le rapport n'est qu'un commencement et pas la fin. Le suivi des recommandations sera essentiel.

M. Ziegler, Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, a pour sa part indiqué avoir demandé l'autorisation d'effectuer une visite en Israël mais n'avoir reçu aucune réponse de la part du Gouvernement israélien. Il a rappelé que le Gouvernement israélien avait informé que tous les véhicules au sud du fleuve Litani seraient bombardés, ce qui a empêché l'acheminement de l'aide humanitaire; il s'agit là d'un précédent dangereux. Il y a eu ensuite un nombre de massacres délibérés de populations civiles que l'on ne peut pas qualifier de dommages collatéraux, a affirmé M. Ziegler. Il a par ailleurs attiré l'attention sur la catastrophe écologique qui a frappé la Méditerranée orientale, les bombes à fragmentation qui rendent impossible le retour dans les champs. De toute évidence, il y a eu violation grave du droit humanitaire, a-t-il conclu. Par ailleurs, le Gouvernement libanais doit absolument déclarer un moratoire voire une annulation de la dette des paysans, a affirmé M. Ziegler. La récolte de cette année a en effet été quasiment totalement détruite, a-t-il fait observer. Il faut en outre que le Gouvernement israélien donne immédiatement une carte indiquant où ont été posées les mines antipersonnel.

Plusieurs critiques ont été adressées s'agissant du rapport conjoint, notamment par le Pakistan au nom de l'Organisation de la Conférence islamique, et le Bahreïn au nom du Groupe arabe, estimant que les membres de la mission cherchaient à préjuger des conclusions de la Commission d'enquête que le Conseil a décidé de dépêcher dans la région.

Les représentants des pays suivants ont pris la parole: Israël, Liban, Pakistan (au nom de l'Organisation de la Conférence islamique), Barheïn (au nom du Groupe arabe), Égypte, Canada, Suisse, Iran, Arabie saoudite, Bangladesh, Malaisie, Émirats arabes unis, États-Unis, Syrie, Maroc, Koweït, Chine, Cuba, Indonésie, Algérie, Finlande (au nom de l'Union européenne), Azerbaïdjan, Libye, Palestine, Tunisie, Jordanie, Soudan, Fédération de Russie et Chili. Les cinq détenteurs de mandats ont répondu aux questions et fait des observations en fin de séance. Le Liban a exercé le droit de réponse.

En début de séance, le Conseil a entendu M. Rudi Muhammad Rizki, expert indépendant sur les droits de l'homme et la solidarité internationale. M. Rizki a rappelé que la solidarité internationale est un élément vital pour assurer le plein développement de tous les pays dans le monde et la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels de tous. Il a cité les trois domaines qu'il se propose de développer, soit la coopération internationale, les réponses mondiales aux catastrophes naturelles, et la «troisième génération de droits», à savoir les droits collectifs. Cuba, l'Argentine, la Finlande, l'Indonésie et l'Équateur sont intervenus au cours du débat qui a suivi, ainsi que le Service international des droits de l'homme et Pax Romana.


Le Conseil reprendra ses débats à 15 heures afin de conclure le débat sur les missions effectuées au Liban et reprendre un débat général sur des question diverses intéressant ses travaux.


Examen du rapport sur la solidarité internationale et les droits de l'homme

M. MUHAMMAD RIZKI, expert indépendant sur la solidarité internationale et les droits de l'homme, a déclaré que la solidarité internationale est un élément vital pour assurer le plein développement de tous les pays dans le monde et la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels de tous. Le document de travail sur la question présenté en 2003 à la Sous-Commission concluait que, dans le contexte actuel de mondialisation favorisant l'élargissement du fossé entre pays pauvres et pays riches, le renforcement de la solidarité internationale est nécessaire pour établir un ordre mondial plus juste, favorable à la réalisation des droits de l'homme. L'expert a indiqué que sa préférence allait à l'utilisation du terme «solidarité mondiale» et que c'est ce terme qu'il emploierait désormais.

Présentant les principaux éléments de son rapport, il a précisé que le rapport final serait fondé sur une recherche théorique prenant en compte, notamment, la notion du droit au développement. Il a cité les trois domaines qu'il se propose de développer, soit la coopération internationale, les réponses mondiales aux catastrophes naturelles, et la troisième génération de droits - généralement considérés comme des droits collectifs.

M. Rizki s'est dit conscient des divergences de vues qui prévalent concernant son mandat et a indiqué que son approche et le choix des domaines sur lesquels il souhaite porter son attention vise à éviter tout double emploi. Il a conclu en disant que le bon exercice de son mandat ne sera possible qu'avec la collaboration des États membres et du soutien du Haut Commissariat et des autres organisations onusiennes et internationales.

Le rapport sur les droits de l'homme et la solidarité internationale (E/CN.4/2006/96) Le présent rapport comprend un aperçu de la façon dont l'expert indépendant conçoit son mandat, y compris les objectifs et les méthodes retenus pour le mener à bien. Il prévoit notamment que ses principaux domaines d'étude porteront sur la coopération internationale, notamment dans le contexte de la mise en œuvre de la Déclaration du Millénaire et des objectifs du Millénaire pour le développement, la question des interventions mondiales face aux catastrophes naturelles, et les «droits de la troisième génération». Ces droits, étroitement liés à la valeur fondamentale de solidarité, doivent être progressivement précisés au sein du mécanisme des Nations Unies en faveur des droits de l'homme, en vue de faire face aux défis croissants de la coopération internationale dans ce domaine. Les droits de la troisième génération, qui font encore l'objet de discussions dans les milieux universitaires et dans les instances internationales, renvoient essentiellement à la notion de fraternité et pourraient être désignés sous le terme générique de «droits solidaires». L'expert indépendant souhaite insister sur la nécessité d'apporter une contribution constructive et fédératrice au débat sur le sujet et de mettre l'accent sur les thèmes qui méritent plus d'attention sous la forme d'études et de travaux de recherche approfondis. Il souligne enfin qu'il ne pourra s'acquitter efficacement de sa mission qu'avec la pleine coopération des États Membres, des organisations internationales et des organisations non gouvernementales, ainsi qu'un appui suffisant du Haut-Commissariat aux droits de l'homme.

Dialogue interactif

M. YURI ARIEL GALA LÓPEZ (Cuba) a remercié l'expert indépendant et a réitéré le ferme appui de son pays à son mandat. La solidarité est l'une des valeurs reconnues dans la Déclaration du Millénaire, a-t-il rappelé. Le représentant a demandé quelles mesures pourraient être prises pour transformer cette valeur de la société internationale en norme claire du droit international ? Comment qualifier cette valeur dans une convention sur le droit au développement ou dans un autre instrument international, a également demandé le représentant?

M. SERGIO CERDA (Argentine) a indiqué qu'il fallait bien mettre l'accent sur les droits de l'homme dans la base théorique, il faut donc tenir compte des deux Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme. La tâche déjà accomplie par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels fournit déjà suffisamment d'éléments à cette base théorique. Les instruments régionaux existants en matière de droits économiques, sociaux et culturels doivent également servir de base. Au-delà d'un débat théorique, il faudra déterminer des éléments d'application concrète, a souligné le représentant.


MME ANN MARI FROBERG (Finlande, au nom de l'Union européenne), indiquant que la solidarité internationale est effectivement importante, a estimé que la réalisation des droits de l'homme relève toutefois en premier chef de la responsabilité des États qui doivent assurer la protection de leur population. Elle a demandé à l'expert indépendant de développer son point de vue sur ce sujet.

M. DEDE A. RIFAI (Indonésie) a indiqué avoir apprécié la présentation de ce rapport et de la façon dont l'expert indépendant à l'intention de s'acquitter de son mandat en prenant en considération le droit au développement. Il faut une contribution de tous acteurs dans cette étude pour essayer de rapprocher pays développés et en voie de développement. L'Indonésie appuie cette initiative et pense qu'il est particulièrement utile d'insister sur la réalisation du droit au développement. L'Indonésie souhaite voir se développer une étude détaillée de cette question complexe. Les pays doivent collectivement garantir le respect de ces droits pour tous.

M GALO LARENAS SERRANO (Équateur), rappelant que la Charte des Nations Unies consacre le lien entre la coopération internationale et la résolution des problèmes économiques, sociaux et humanitaires, a déclaré que le développement des pays non industrialisés ne réside pas seulement entre leurs mains. À cet égard, il a demandé quelles sont les moyens à mettre en œuvre pour que ce principe soit rapidement intégré dans le droit international.

M. CHRIS SIDOTI (International Service for Human Rights) a souligné que la solidarité internationale est un droit individuel des peuples et des personnes et non pas un droit des États. Il a souhaité qu'il soit demandé à la communauté internationale d'agir lorsque des droits fondamentaux sont bafoués. Il faut affirmer le droit des peuples de faire appel à la communauté internationale lorsque leurs droits sont violés.

M. BUDI TJAHJONO (Pax Romana) a demandé si l'expert indépendant pouvait expliquer plus en détail le rôle du droit au développement dans le cadre de la question de la solidarité internationale.

M. RUDI MUHAMMAD RIZKI, expert indépendant sur les droits de l'homme et la solidarité internationale, a indiqué qu'il tiendrait compte dans son prochain rapport des questions soulevées et des observations faites ce matin. Il a rappelé qu'il s'est efforcé d'établir une base théorique aussi exhaustive que possible pour son travail. Il s'est dit reconnaissant pour les contributions soumises à ce jour par les différentes parties prenantes. M. Rizki a indiqué avoir l'intention de poursuivre un dialogue ouvert et transparent avec toutes les parties concernées.


Examen de rapports sur la situation des droits de l'homme au Liban en Israël et suite au conflit de juillet-août 2006

M. PHILIP ALSTON, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, a présenté le rapport conjoint sur la mission au Liban et en Israël qu'il a effectuée du 7 au 14 septembre dernier avec trois autres experts: le Rapporteur spécial sur le droit de jouir du meilleur état de santé possible, le Représentant du Secrétaire général pour les droits de l'homme des personnes déplacées et le Rapporteur spécial sur le logement convenable.

M. Alston a indiqué que le conflit qui a éclaté au Liban et en Israël en juillet et août 2006 a été inévitablement perçu par beaucoup comme une mise à l'épreuve de la capacité du Conseil des droits de l'homme à réagir rapidement et à formuler des recommandations. La mission a bénéficié de l'entière coopération des Gouvernement libanais et israélien et de larges consultations avec la société civile, a précisé M. Alston. Les principales conclusions de l'enquête sont les suivantes: des violations graves des droits de l'homme et du droit humanitaire ont été commises par Israël, et le Hezbollah a violé les principes applicables du droit humanitaire. Le rapport précise les bases de cette conclusion générale.

Le rapport met l'accent sur la population civile pendant et après le conflit, a poursuivi M. Alston. Il traite aussi du rôle d'un acteur non étatique qu'est le Hezbollah mais qui occupe une place centrale dans la vie sociale et politique du Liban. Enfin, les possibilités de procéder à une enquête approfondie ont été limitées par la taille de la mission, son caractère d'urgence et sa durée. Le rapport n'est qu'un commencement et pas la fin, a souligné M. Alston. Le suivi des recommandations sera essentiel.

Détaillant les principales conclusions du rapport conjoint, M. Alston a déclaré que des violations graves des droits de l'homme et du droit humanitaire ont été commises par Israël qui n'a pas fait de distinction entre les objectifs militaires et civils et qui n'a pas appliqué le principe de proportionnalité et n'a pas pris toutes les mesures pour minimiser les dommages et les blessures occasionnés aux populations civiles. De son côté, le Hezbollah a violé le droit humanitaire dans de nombreux cas en prenant pour cible les populations civiles et en ne prenant pas en compte le principe de distinction.

Les auteurs du rapport conjoint appellent Israël à fournir tous les détails sur l'emploi qui a été fait d'engins à sous-munitions afin de faciliter la destruction des munitions non explosées et de réduire au minimum les pertes civiles. Les membres de la mission admettent que le Gouvernement a consacré des ressources considérables à une détermination des cibles soucieuse du respect du droit international humanitaire. Toutefois, il est impossible d'admettre la validité de l'affirmation selon laquelle chaque cible était un objectif militaire légitime et que le principe de distinction a été respecté. Israël devrait aussi enquêter sur les allégations de traitement discriminatoire à l'égard des citoyens arabes d'Israël, en particulier en ce qui concerne l'indemnisation des biens endommagés ou détruits et l'accès à des services médicaux gratuits. Israël doit également officialiser une politique qui consiste à ne pas prendre pour cible les installations d'eau et d'électricité durant les conflits armés.

La mission lance un appel au Liban pour qu'il crée un Ministère du logement pour mettre en place une stratégie coordonnée et de revoir sa politique consistant à utiliser des logements préfabriqués. En matière de santé, il existe des inégalités frappantes pour l'accès au système de santé. Une stratégie d'ensemble doit être adoptée pour aider les personnes déplacées. Cette stratégie doit tenir compte des services de base.

Les auteurs du rapport exhortent le Hezbollah à affirmer publiquement qu'il est tenu par le droit international humanitaire et devrait renoncer à prendre pour cibles des civils en toutes circonstances. Le Hezbollah devrait inculquer à ses combattants les règles du droit international humanitaire et informer ses combattants de la possibilité de poursuites pénales. Le Conseil devrait veiller à ce qu'une enquête exhaustive soit réalisée pour déterminer si l'utilisation de roquettes chargées roulements à billes antipersonnel meurtriers dirigées sur des zones densément peuplées de constitue une violation manifeste du droit humanitaire.

La Commission d'enquête doit aussi déterminer si les attaques d'Israël ont toujours été ciblées vers des zones militaires et l'utilisation des missiles à fragmentation doit aussi faire l'objet d'une enquête.

Enfin, la communauté internationale doit veiller à soutenir les activités de reconstruction libanaise et accorder une attention prioritaire aux efforts pour remédier aux conséquences du conflit sur la santé mentale et physique de la population. Les défis consistent à rétablir rapidement les droits fondamentaux des femmes, des hommes et des enfants qui ont terriblement souffert. Le Conseil doit agir pour éviter que cela se reproduise et encourage la reconstruction.

Le rapport conjoint sur la mission au Liban et en Israël (A/HRC/2/7) rappelle que les quatre Rapporteurs spéciaux se sont rendus au Liban du 7 au 10 septembre et en Israël du 10 au 14 septembre 2006 à l'invitation des deux gouvernements. Les quatre titulaires de mandat ont entrepris la mission de leur propre initiative en réponse à une suggestion du Président du Conseil des droits de l'homme et la mission était totalement indépendante de la Commission d'enquête instituée par la résolution adoptée lors de la deuxième session extraordinaire du Conseil.
Le rapport conclut qu'Israël a commis de graves violations tant des droits de l'homme que du droit humanitaire. Dans de nombreux cas, Israël a violé l'obligation juridique lui incombant d'établir une distinction entre objectifs militaires et objectifs civils, de pleinement respecter le principe de proportionnalité et de prendre toutes les précautions possibles pour réduire au minimum le risque de toucher des civils et d'endommager des objectifs civils. Le rapport conclut que le Hezbollah a violé à maintes reprises les principes applicables du droit humanitaire dans certains cas en ciblant la population civile du nord d'Israël et dans d'autres en ne respectant pas le principe de distinction.

La mission recommande au Gouvernement israélien de fournir tous les détails sur l'emploi qui a été fait d'engins à sous-munitions afin de faciliter la destruction des munitions non explosées et de réduire au minimum les pertes civiles. La mission appelle aussi le gouvernement à fournir, au sujet de toutes les attaques sur des cibles de prime abord civiles, une déclaration exposant la nature supposée de la cible et les effets collatéraux ou non intentionnels possibles. Le rapport note également que l'absence de consultations avec les personnes sinistrées constitue une carence majeure dans les activités de reconstruction après-conflit dans les secteurs du logement, de la santé et autres. Il faudrait concevoir des mécanismes propres à remédier à cette situation.

Parmi les recommandations adressées au Gouvernement libanais, le rapport note que le Gouvernement, en coopération avec la communauté internationale, devrait mettre au point une stratégie globale d'aide aux personnes déplacées et aux rapatriés qui tienne compte des groupes les plus vulnérables. Cette stratégie devrait adopter une approche fondée sur les droits et traiter d'urgence les problèmes de protection suivants: accès aux services de base, accès à des moyens d'existence, accès aux tribunaux et autres mécanismes de règlement de conflit. Dans le cadre du processus de reconstruction, le Gouvernement devrait mettre en place un Ministère du logement chargé de toutes les questions liées au logement et devrait reconsidérer soigneusement sa politique consistant à fournir un grand nombre d'unités d'habitation préfabriquées aux personnes touchées par le conflit, qui peut avoir des effets néfastes sur les solutions optant pour les logements durables. Le Gouvernement est instamment prié d'engager une action énergique pour mettre en place un système de santé efficace, intégré et adapté qui soit accessible à tous, notamment aux enfants, aux femmes, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et aux pauvres.

La mission adresse également des recommandations au Hezbollah, qui devrait affirmer publiquement qu'il est tenu par le droit international humanitaire et devrait renoncer à prendre pour cibles des civils en toutes circonstances. Le Hezbollah devrait inculquer à ses combattants les règles du droit international humanitaire, informer ses combattants de la possibilité de poursuites pénales pour violations graves de ces règles et prendre toutes les autres mesures nécessaires pour en garantir le respect à l'avenir.

S'agissant de la commission d'enquête insitutée par le Conseil, la mission recommande que le mandat de cette commission soit interprété de manière à y inclure la question de savoir si des violations des droits de l'homme et du droit humanitaire, ainsi que des crimes de guerre ont été commis. Au Conseil des droits de l'homme, la mission recommande qu'il veille à ce que les attaques du Hezbollah fassent l'objet d'enquêtes approfondies en raison de leurs conséquences graves pour la population civile du nord d'Israël. Le Conseil devrait se demander si l'utilisation par le Hezbollah de des habitations et d'autres sites civils pour cacher ou dissimuler des activités militaires violait les règles du droit humanitaire et si elles ont dans certains cas été assimilables à l'emploi de boucliers humains.

M. JEAN ZIEGLER, Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, a rendu compte de la mission qu'il a effectuée au Liban du 11 au 16 septembre dernier sur invitation du Gouvernement libanais. Il a précisé avoir également demandé l'autorisation d'effectuer une visite en Israël mais n'avoir reçu aucune réponse de la part du Gouvernement israélien. Ce rapport ne porte donc que sur le droit à l'alimentation du point de vue de la situation au Liban, a affirmé M. Ziegler.

M. Ziegler a rappelé qu'à compter du 7 août, le Gouvernement israélien avait informé chacun que tous les véhicules qui se trouveraient au sud du fleuve Litani seraient bombardés, ce qui a empêché l'acheminement de l'aide humanitaire; il s'agit là d'un précédent dangereux. Il y a eu ensuite un nombre de massacres délibérés de populations civiles que l'on ne peut pas qualifier de dommages collatéraux, a affirmé M. Ziegler. Il a par ailleurs attiré l'attention sur la catastrophe maritime qui a frappé la Méditerranée orientale, où des tonnes de mazout se sont répandues sur 180 km de côtes libanaises et une partie de la côte syrienne, affectant directement le secteur des pêcheries. Maintenant, après la guerre, restent 1,2 millions de bombes à fragmentation, jetées essentiellement durant les 72 dernières heures de la guerre, ce qui rend impossible le retour dans les champs des personnes qui reviennent dans leurs foyers en ruine. Les équipes des Nations Unies font certes un travail de déminage magnifique; mais elles n'interviennent pas dans les champs, a indiqué M. Ziegler. Le Gouvernement israélien a refusé de donner aux Nations Unies les cartes qui auraient permis de localiser et de déminer les champs, canaux et collines concernés.

«Toutes les affirmations que je fais dans mon rapport demandent à être vérifiées», a précisé M. Ziegler, soulignant qu'un rapporteur individuel ne peut à lui seul présenter les faits de manière définitive. Mais de toute évidence, il y a eu violation grave du droit humanitaire, a-t-il conclu. Il a rappelé que le premier Protocole additionnel aux Conventions de Genève prévoit un comité humanitaire international d'établissement des faits. Il a également rappelé la jurisprudence de la Cour internationale de justice, en particulier l'avis rendu le 9 juillet 2004 qui rend responsable un gouvernement qui s'attaque délibérément aux infrastructures de la population civile. Autrement dit, a précisé M. Ziegler, les entreprises libanaises ou présentes au Liban qui ont souffert des bombardements peuvent demander remboursement et dédommagement individuel devant la Cour internationale de justice.

Par ailleurs, le Gouvernement libanais doit absolument déclarer un moratoire voire une annulation de la dette des paysans, a affirmé M. Ziegler. La récolte de cette année a en effet été quasiment totalement détruite, a-t-il fait observer. Il faut en outre que le Gouvernement israélien donne immédiatement une carte indiquant où ont été posées les mines antipersonnel. Selon le droit international, ces cartes doivent être remises aux autorités libanaises et aux Nations Unies par le Gouvernement israélien.

Le rapport sur la mission au Liban du Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation (A/HRC/2/8) rappelle que cette mission a eu lieu au lendemain de la guerre ayant opposé le Hezbollah à Israël, du 12 juillet au 14 août 2006. Durant la guerre, la destruction des routes et autres infrastructures de transport, s'ajoutant au refus répété des forces armées israéliennes d'accorder un libre passage, a fait que les organismes humanitaires ont éprouvé d'énormes difficultés à transporter de la nourriture et autres secours. Obligées de quitter leurs maisons et leurs terres agricoles, un grand nombre de personnes ont vu leur accès à l'alimentation compromis, des dizaines de milliers d'entre elles devenant dépendantes à l'égard de l'aide alimentaire. La plupart des terres agricoles ont été affectées par les bombardements et continueront d'être affectées par les bombes non explosées qui restent une entrave à l'accès à un grand nombre de champs. La principale préoccupation aujourd'hui concerne les conséquences durables de la guerre sur les moyens d'existence. En effet, il est erroné de croire que le droit à l'alimentation renvoie avant tout à l'aide alimentaire; il s'agit plutôt du droit d'être capable de se nourrir en s'appuyant sur des moyens d'existence suffisants.

Il faudrait mener des enquêtes approfondies sur les violations du droit à l'alimentation en vertu du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire, afin de déterminer, notamment, si elles constituent de graves violations des Conventions de Genève et du Protocole additionnel I y relatif ou, éventuellement, des crimes de guerre en vertu du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, recommande le rapport. En outre, les Gouvernements israélien et libanais devraient accepter que la Commission internationale d'établissement des faits, instituée conformément au Protocole additionnel I, enquête sur les violations du droit à l'alimentation en vertu du droit humanitaire international. Selon la jurisprudence internationale, le Gouvernement israélien devrait être tenu responsable, en vertu du droit international, de toute violation du droit à l'alimentation de la population civile libanaise. En vertu du droit international, le Gouvernement israélien a l'obligation de veiller à ce que toutes les victimes reçoivent une réparation et une indemnisation suffisantes pour les préjudices subis durant la guerre, ainsi que pour les pertes subies du fait de la perturbation de leurs moyens d'existence.


Déclarations

M. ITZHAK LEVANON (Israël), a déclaré que, pendant quatre semaines consécutives, des milliers de missiles remplis de roulements à billes ont été lancées sur Israël par le Hezbollah, avec pour intention de tuer le plus possible d'Israéliens. Il s'est dit troublé par le fait que le rapport ne se réfère pas à la responsabilité du Liban pour des attaques commises depuis son territoire. Il s'est étonné du fait qu'il n'y a pas eu d'enquête de la part du Liban sur les violations commises par le Hezbollah et que le Conseil n'a pas réagi à l'absence de mesures prises par le Liban pour désarmer le Hezbollah. Il a cité un expert militaire qui a accompagné la mission et qui aurait déclaré dans la presse: «du fait que le Hezbollah est essentiellement invisible, il n'est pas précisément jugé, et on ne lui demande pas de comptes pour les crimes de guerre qu'il a commis».

Le représentant israélien a invité le Conseil à brosser un tableau précis du conflit, mentionnant la responsabilité de toutes les parties impliquées. Il a aussi demandé au Conseil de lancer un appel pour que soient relâchés immédiatement les soldats israéliens enlevés, notant qu'Israël avait quitté le territoire du Sud-Liban quelques heures avant le début de Yom Kippour - le jour du pardon.

Se référant au rapport du M. Ziegler, M. Levanon a attiré l'attention, «pour donner une idée plus claire de sa prise de position en la matière», sur une interview accordée par le Rapporteur spécial à un quotidien libanais, Al Akhbar, le 18 septembre 2006, le jour même de l'ouverture de la présente session du Conseil, dans laquelle M. Ziegler aurait affirmé: «Je refuse de décrire le Hezbollah comme une organisation terroriste; pour moi c'est un mouvement de résistance nationale. Quand tous les efforts diplomatiques pour libérer les prisonniers échouent, moi je comprends bien le Hezbollah qui kidnappe des soldats pour les échanger». M. Levanon a déclaré qu'il laissait aux membres du Conseil le soin de juger par eux-mêmes quelle pertinence donner à un rapport dont l'auteur, contrairement à la majorité de la communauté internationale, nie l'existence d'un groupe terroriste tout en défendant ses actes illégaux.

M. GHASSAN MOUKHEIBER (Liban) s'est pour sa part dit déçu du rapport conjoint. Même en tenant compte des différentes contraintes, le rapport est incomplet et empreint de préjugés, a-t-il déclaré. Le rapport ne met pas suffisamment en lumière le principe de proportionnalité et les actes de discriminations et ne tient pas compte d'autres violations importantes du droit international qui peuvent être considérées comme des crimes de guerre. Qu'en est-il du transfert forcé des populations, de l'utilisation des armes par Israël, notamment des bombes au phosphore et des graves dommages causés à l'environnement marin? Le rapport contient des préjugés en faveur d'Israël en évitant toute accusation directe. Dans le rapport, le Hezbollah est directement à tort accusé de viser des civils alors que le rapport note seulement qu'Israël semble ne pas avoir utilisé le principe de proportionnalité et ne pas avoir pris toutes les précautions possibles à l'égard des civils. Le rapport inclue des faits et des déclarations erronées et va bien au-delà du mandat des rapporteurs quand il considère que la capture des deux soldats israéliens a déclenché le conflit alors qu'il ne s'agissait que d'un prétexte. Le rapport essaye aussi de voiler les crimes de guerre d'Israël au moyen de subtilités.

Le représentant libanais a indiqué que son pays réaffirme son intention de défendre le droit international et les normes de droit humanitaire international de la façon la plus totale, une enquête approfondie sur la guerre a d'ailleurs été entamée par le Liban et par le Comité national des droits de l'homme. Le Liban rejette ce rapport et demande au Conseil de ne pas le recevoir.

Un autre membre de la délégation libanaise, M.GEBRAN SOUFAN, s'est félicité que, dans ses conclusions, le Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation a osé dire ce qu'il avait constaté sur les graves violations des droits de l'homme commises au Liban. Ce rapport est clair et transparent et montre bien toutes les violations qui ont été commises. Les cultivateurs et les pêcheurs sont empêchés de gagner leur vie. Le représentant a salué les recommandations du rapport alors que le Liban est «sur le chemin cahoteux de la renaissance».

M. MASOOD KHAN (Pakistan, au nom de l'Organisation de la Conférence islamique) a déclaré que le rapport présenté oralement par M. Alston est bien meilleur que le rapport écrit de la mission des quatre experts. L'OCI n'accorde pas de crédit à l'affirmation selon laquelle la mission était indépendante de la Commission d'enquête instituée par le Conseil le 11 août. En fait, les quatre experts semblent avoir étendu leur mandat afin de couvrir le mandat de la Commission d'enquête et donc d'en préjuger les conclusions. Leur rapport n'a pas de cohésion interne, a insisté le représentant pakistanais. Les analyses se rapportant à la santé, au logement adéquat et aux déplacements internes semblent assez justes mais elles sont peu reflétées dans les recommandations. En outre, les experts attribuent la responsabilité de la guerre au Hezbollah, sans faire référence à l'opinion contraire largement diffusée durant et après la guerre. L'accusation contre le Hezbollah est directe alors qu'Israël se voit accorder la grâce de l'utilisation de la voix passive.

Le document des quatre experts s'efforce de comprendre le raisonnement militaire et juridique des actions des forces de défense israéliennes contre des cibles civiles. Il n'accorde pas le même traitement au Liban. Il utilise le réductionnisme pour atténuer les préoccupations en rapport avec la perte de vies. Les conclusions et recommandations du rapport ne répondent pas aux attentes, a affirmé le représentant pakistanais, ajoutant que ce rapport cherche à créer un équilibre artificiel. Ce rapport est déférent à l'égard d'Israël, condescendant à l'égard du Liban et accusatoire à l'égard du Hezbollah. Il manque donc d'objectivité. Les prétendues opinions juridiques avancées par les quatre rapporteurs spéciaux sont sujettes à interprétation et ne sont ni impartiales ni définitives, a souligné le représentant pakistanais. L'OCI estime que dans le cas du Liban, les principes de distinction entre civils et combattants, d'interdiction des attaques aveugles et de proportionnalité ont été violés; aussi, l'équilibre ne saurait être créé là où il n'existe pas. L'OCI et ses membres ont décidé de se distancer des conclusions du rapport, a insisté le représentant pakistanais. Il a en revanche affirmé que le rapport présenté par M. Ziegler était bien ancré dans le droit.

M ABDULLA ABDULLATIF ABDULLA (Bahreïn, au nom du Groupe arabe) s'est félicité du rapport très objectif de M. Ziegler. Il a demandé qu'Israël, en vertu de droit international, dédommage les victimes civiles pour les dégâts commis volontairement. Au nom du Groupe arabe, il s'est dit stupéfait des conclusions du rapport conjoint présenté par M. Philip Alston qui, a-t-il estimé, préjugent de celles de la Commission internationale d'enquête et font preuve de partialité en faveur d'Israël. Le Groupe arabe, a-t-il dit, ne peut accepter les conclusions du rapport conjoint qui n'est ni objectif, ni indépendant.

MME MAHY ABDEL LATIF (Égypte) a dénoncé le caractère non objectif du rapport conjoint. L'immensité des destructions causées par Israël au Liban n'est pas reconnue. Israël a détruit de façon délibérée des infrastructures critiques. L'Égypte remercie M. Ziegler de l'avoir clairement dénoncé dans son rapport.
M. PAUL MEYER (Canada) a rappelé que son pays a toujours soutenu le principe d'indépendance et de liberté d'action des procédures spéciales. Le rapport des quatre rapporteurs spéciaux contient des recommandations s'adressant à toutes les parties, y compris au système des droits de l'homme des Nations Unies, a-t-il relevé. Il a rappelé que le Canada demeure attaché aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies ayant lancé un appel au désarmement de tous les groupes armés au Liban. Il a également rappelé que le Canada a créé un fonds de secours pour le Liban dont les ressources viendront s'ajouter à l'aide déjà fournie par le pays par le biais des Nations Unies et de la Croix-Rouge.

M JEAN DANIEL VIGNY (Suisse), remerciant les quatre experts pour un rapport qu'il a jugé équilibré, a demandé à M. Hunt, Rapporteur spécial sur le droit à la santé, de préciser comment se formule la complémentarité entre droit international dans le domaine des droits de l'homme et droit humanitaire, dans le contexte spécifique du droit à la santé.

M. SEYED KAZEM SAJJADPOUR (Iran) a déclaré que le rapport conjoint contient des déficiences majeures, notamment quant au mandat. Le rapport est aussi tendancieux, sélectif et ne tient pas véritablement compte des évènements qui se sont produits au cours du conflit. Sur la base de ces lacunes, l'Iran rejette le rapport mais se félicite en revanche du rapport présenté par M. Ziegler.

M. ABDULWAHAB A. ATTAR (Arabie saoudite) a rappelé que le Conseil des droits de l'homme avait adopté au mois d'août une résolution condamnant Israël pour les massacres perpétrés par ce pays durant 33 jours de guerre au Liban. Il s'est dit consterné par les conclusions du rapport présenté ce matin par les quatre détenteurs de mandat suite à leur mission dans la région, qui met sur un pied d'égalité l'agresseur et l'agressé. Dans ce rapport, les quatre procédures spéciales vont au-delà de leur mandat, a-t-il estimé.

M. MUSTAFISUR RAHMAN (Bangladesh) a exprimé sa déception à l'égard des conclusions et recommandations de l'équipe de rapporteurs spéciaux qui, a-t-il estimé, ont outrepassé leur mandat. Il a demandé pourquoi le Rapporteur spécial sur l'alimentation n'avait pas participé à la mission et pourquoi son rapport n'a pas été intégré dans le rapport conjoint. Par qui, a-t-il demandé, la mission conjointe a-t-elle été financée? Il a regretté, dans le rapport conjoint, de nombreuses mentions vagues et sujettes à interprétation et demandé à l'équipe de rapporteurs d'éclaircir ces points.

MME HSU KING BEE (Malaisie) a estimé que les Rapporteurs spéciaux semblent avoir outrepassé leurs mandats. La Malaisie est préoccupée par le sens général du rapport. Il y a deux approches différentes utilisées pour juger les actes d'Israël et du Liban. S'agissant du rapport de M. Zieggler, la Malaisie s'associe à ce rapport.

MME NAJLA AL QASSIMI (Émirats arabes unis) a rappelé qu'Israël a agressé le Liban pendant plus d'un mois en menant campagne contre le Hezbollah parce qu'il avait enlevé deux soldats. Ce n'était pas une action équilibrée ni proportionnée. Le bombardement du Liban par Israël, pendant 33 jours, n'a pas entraîné la libération des deux soldats enlevés et n'a pas non plus amélioré la situation au Sud-Liban. Israël est responsable d'avoir pris pour cibles des civils et des infrastructures essentielles et d'avoir empêché l'acheminement de l'aide humanitaire. Israël doit dédommager les victimes.

M WARREN W. TICHENOR (États-Unis), soulignant qu'il y a eu des victimes et des innocents des deux côtés, a indiqué que le président Bush avait envoyé une équipe d'enquête au Liban il y a deux semaines. Il a aussi informé le Conseil qu'un soutien financier important a été octroyé par son pays au Liban pour aider à la reconstruction. Il a déclaré que la crise au Liban avait été précipitée par les attaques perpétrées par le Hezbollah contre Israël et s'est dit déçu que le Conseil n'ait pas abordé ce sujet. Il a noté aussi que les mandats des quatre experts n'ont pas été respectés puisque Israël et le Hezbollah sont considérés sur un pied d'égalité.

M. KHALIT BITAR (Syrie) a déclaré que beaucoup de souffrances ont été causées au Liban. Des destructions de bâtiments ont été causées par des armes dévastatrices. Israël savait qu'il y avait des civils innocents dans les zones attaquées et continue de tuer encore aujourd'hui avec les armes qu'il a laissées sur place. Il est temps d'exiger réparation pour ces actes d'agression. Le représentant a également tenu à préciser qu'il est faux que le Hezbollah a utilisé des missiles syriens. Il a demandé aux experts de la mission quelles étaient les sources de ces informations et s'est dit convaincu que ces informations provenaient de l'une des sources liées à l'une des parties.

M. MOHAMMED LOULICHKI (Maroc) a félicité M. Ziegler pour la clarté de son rapport qui témoigne de la gravité de ce qu'a enduré le peuple libanais suite aux opérations militaires israéliennes au sud du Liban. Les recommandations de M. Ziegler sont courageuses et pertinentes. En ce qui concerne le rapport des quatre experts sur leur mission en Israël et au Liban, et tout en appréciant l'initiative de ces quatre procédures spéciales, le Maroc regrette l'approche de ce rapport ainsi que certaines de ses conclusions. Le peuple libanais a été endeuillé et ses infrastructures détruites par la machine de guerre israélienne, a rappelé le représentant marocain. Il faut espérer que la Commission d'enquête que le Conseil a dépêchée dans la région pourra établir les responsabilités pour les violations des droits de l'homme qui ont entaché les opérations militaires israéliennes au sud Liban, a-t-il ajouté.

M. NAJEEB AL-BADER (Koweït), se référant au rapport du Rapporteur spécial sur l'alimentation, a souligné qu'on y lisait toutes les violations commises par Israël au Liban. Il a déclaré que le Gouvernement israélien doit offrir réparation et dédommagement aux victimes et particulièrement à celles privées de leurs moyens de subsistance. Il a par contre estimé que le rapport conjoint n'a pas suffisamment insisté sur les souffrances amères infligées par Israël à la population libanaise.

M. LA YIFAN (Chine) a estimé que le conflit du mois de juillet a causé au Liban d'irréparables dommages pour le tourisme et l'environnement, et que des dégâts continuent d'être causés par les bombes et les explosifs encore non explosés. Des solutions militaires n'existent pas pour le problème de la région, a souligné le représentant chinois, qui a appelé de ses vœux une paix durable pour cette région.

M. JUAN ANTONIO FERNANDEZ PALACIOS (Cuba) a affirmé que son pays éprouve le plus grand respect pour les quatre experts qui ont présenté leur rapport ce matin. Mais ce rapport n'a pas répondu à nos espoirs puisqu'il s'est efforcé de traiter sur un pied d'égalité toutes les parties, a poursuivi le représentant cubain. Or, on ne peut pas chercher un équilibre là où il n'y en a pas, là où il y a un agresseur et un agressé. Le Hezbollah est d'un certain point de vue un instrument de libération qui résiste à une agression étrangère, a déclaré le représentant cubain. Pourquoi le Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation n'a-t-il pas été incorporé à la visite des quatre autres détenteurs de mandats, a-t-il demandé ? Cuba tient à cet égard à saluer l'objectivité qui caractérise l'excellent travail de M. Ziegler.

MME WIWIEK SETYAWATI (Indonésie) s'est dite préoccupée par les recommandations concluant le rapport conjoint. Ces recommandations, a-t-elle estimé, ne donnent pas une vision équilibrée des responsabilités réciproques des parties au conflit. Après des semaines d'attaques qui ont détruit l'essentiel de ses infrastructures, le Liban est un pays à genoux et ne peut donc être traité sur le même pied qu'un pays dont le territoire a été préservé par une armée puissante. Elle a ajouté que le rapport conjoint ne répondait pas aux attentes du Conseil et a espéré qu'il puisse être complété par un rapport de la Commission d'enquête. Elle a, enfin, réaffirmé la nécessité pour toutes les procédures spéciales de respecter le principe d'impartialité.

M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie) a regretté que les deux rapports présentés ce jour arrivent à des conclusions complètement contradictoires. Cela porte à se poser des questions sur les critères employés par les experts. Le Conseil doit adopter des approches normalisées pour toutes les procédures spéciales afin que les détenteurs de mandats n'arrivent pas à des positions contradictoires. Le rapport conjoint n'était pas objectif, ni juste. Peut être a-t-on voulu trop minimiser les responsabilités d'Israël? Par contre, on a été très précis dans les accusations du Hezbollah. L'Algérie rejette les conclusions de ce rapport. Elle appuie par contre les recommandations faites par M. Ziegler. L'Algérie espère que la commission d'enquête pourra adopter une approche objective et éthique.

M. TAPANI KIVELA (Finlande, au nom de l'Union européenne) a félicité les quatre rapporteurs spéciaux ainsi que M. Ziegler pour leurs rapports. Il s'est dit catastrophé par le nombre de victimes et de personnes déplacées qu'a fait ce conflit. Il faut maintenant œuvrer à la reconstruction, a-t-il souligné. Il a également évoqué l'intention de l'Union européenne de contribuer à l'action de lutte contre les mines antipersonnel et contre la marée noire qui a touché la Méditerranée orientale. Le représentant finlandais a souhaité savoir comment, de l'avis des experts ayant présenté leurs rapports ce matin, pourraient être évalués les efforts de reconstruction du point de vue des droits économiques, sociaux et culturels de la population libanaise. Quelles sont, selon eux, les priorités qui devraient être suivies s'agissant de la promotion de ces droits en faveur du peuple libanais?

M. SEYMUR MARDALIYEV (Azerbaïdjan) a jugé déséquilibrées les conclusions du rapport conjoint. Le rapport, a-t-il dit, n'a pas tenu compte du principe de distinction entre la population civile et les combattants, ni du principe de proportionnalité. Il a regretté, par ailleurs, que le Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation n'ait pas été autorisé à se rendre en Israël.

M. IDRISS JAZAÏRY (Libye) a déclaré que le rapport de M. Ziegler était objectif et respectait son mandat. Israël doit réparer ses torts. Il est donc nécessaire aussi d'indemniser ses victimes. La Libye appuie également les interventions qui ont souligné les défauts du rapport conjoint, clairement empreint de préjugés. Ce rapport outrepasse les mandats des détenteurs de mandats, a-t-il estimé.

M. MOHAMMAD ABU-KOASH (Palestine) a souligné que ceux qui résistent à l'occupation sont des héros et leurs noms demeureront toujours dans les livres d'histoire; ceux qui infligent l'occupation sont des terroristes, quel que soit le nom qu'on leur donne, a-t-il déclaré. Il faut veiller à rétablir la légalité internationale. Si Israël veut la paix, il doit cesser son occupation du territoire libanais et libérer les prisonniers libanais, après quoi il n'aura plus de problème de ce côté là. Il en va de même pour le Golan syrien et pour la cause palestinienne.

M SAMIR LABIDI (Tunisie) a insisté sur la nécessité d'établir des normes et objectifs clairs concernant la mission des Rapporteurs spéciaux. Il a fait référence au principe d'impartialité, en regrettant que celui-ci n'ait pas été appliqué en l'espèce. Le rapport conjoint est partial et déséquilibré, a-t-il dit, contrairement à celui de M. Jean Ziegler. Il a exprimé son espoir que le rapport de la Commission d'enquête sera en mesure d'équilibrer le rapport conjoint.

M. MOUSA BURAYZAT (Jordanie) a rappelé que le mandat des rapporteurs était initialement de constater les conséquences sur la population civile des conduites d'Israël et du Hezbollah. Or, le rapport fait une large place à la question de la responsabilité des deux parties, et demande si des crimes de guerre ont été commis par les deux parties. Cette responsabilité relève-t-elle du Conseil, s'est interrogé le représentant de la Jordanie ?

MME ILHAM AMHED (Soudan) a dénoncé le refus d'Israël de coopérer avec le Conseil, comme en témoigne son refus d'accepter une visite du Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation. Le Conseil des droits de l'homme représente la conscience humaine, laquelle refuse notamment le largage de millions de tonnes de bombes à fragmentation contre des populations civiles comme l'a fait Israël au Liban. Le rapport conjoint présenté ce matin par quatre procédures spéciales n'est pas objectif, a estimé la représentante soudanaise. Elle a rappelé que la Charte des Nations Unies est basée sur le principe du droit de réagir à toute agression.

M. SERGEY CHUMAREV (Fédération de Russie) a estimé que les quatre experts s'efforcent de comparer des situations qui ne peuvent pas l'être. Il a y a, a-t-il déclaré, un manque d'objectivité dans le rapport conjoint, qui affaiblit ses conclusions. Il a reconnu, par contre, l'objectivité du rapport présenté par le Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation. Il a rappelé que la paix dans la région ne pourra être obtenue que moyennant des efforts de toutes les parties concernées, avec l'aide de la communauté internationale.

M. JUAN MARTABIT (Chili) a rappelé que la guerre au Liban a eu d'importantes répercussions au Chili, qui compte un nombre important de citoyens d'origine libanaise et palestinienne. Le Gouvernement a lancé des appels répétés au cessez-le-feu et a condamné le recours excessif à la force et les morts parmi les hommes, les femmes et les enfants. Le Chili se félicite de la présentation du rapport conjoint.

M. PHILIP ALSTON, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a déclaré qu'une analyse juridique soigneuse d'une situation complexe telle que celle qui s'est créée en Israël et au Liban cet été n'avait guère de chance de remporter un concours de popularité au sein du Conseil des droits de l'homme; mais tel n'était de toute façon pas le propos de la mission entreprise par les quatre détenteurs de mandats auteurs du rapport conjoint présenté ce matin. Il s'est dit déçu de constaté que très peu de commentaires ont été faits sur les faits et recommandations concrètement énoncés dans ce rapport. Les commentaires ont en effet été très généraux. Il a par ailleurs jugé sans fondement les allégations selon lesquelles les quatre détenteurs de mandats au titre des procédures spéciales ayant présenté le rapport conjoint ont cherché à préjuger des conclusions de la Commission d'enquête instituée par le Conseil au mois d'août dernier.

M. PAUL HUNT, Rapporteur spécial sur le droit à la santé, s'est dit troublé face à la réaction de certaines délégations alors que le rapport conjoint et le rapport du Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation présentent de nombreux points communs. Se référant à l'intervention du représentant du Liban qui a fait état de lacunes, il a fait valoir au contraire qu'il est bien fait mention, dans le rapport conjoint, à la fois des attaques israéliennes visant des hôpitaux et des bombardements visant la centrale électrique et ayant causé le déversement de pétrole en Méditerranée. S'adressant au représentant de la Suisse, il a expliqué que le droit international humanitaire complète les dispositions relatives aux droits de l'homme sur des points comme la protection des convois humanitaires. À l'inverse, les instruments dans le domaine des droits de l'homme abordent des aspects comme la discrimination ou l'égalité qui sont absents du droit international humanitaire.

M. WALTER KÄLIN, Représentant spécial du Secrétaire général pour les droits de l'homme des personnes déplacées, a exhorté les délégations à ne pas se fonder sur des projets de rapport qui auraient pu être distribués mais à consulter la version définitive de ce rapport car plusieurs délégations ont cité des informations qui ne figurent pas dans la version finale. Face aux critiques des délégations sur le traitement insuffisant de la question des personnes déplacées, M. Kälin a indiqué qu'en Israël, la plupart des personnes déplacées ont pu réintégrer leur foyer. En ce qui concerne le Liban, six ou sept recommandations contenues dans le paragraphe 104 se rapportent toutes aux questions de déplacement interne.

M. MILOON KOTHARI, Rapporteur spécial sur le logement convenable en tant qu'élément du droit à un niveau de vie adéquat, a lui aussi fait part de sa déception face au fait que, dans leur grande majorité, les délégations qui sont intervenues ce matin n'ont pas évoqué les faits et recommandations concrets présentés dans le rapport conjoint. Du point de vue du logement, il y a beaucoup à faire au Liban, a par exemple souligné M. Kothari; il y a aussi des choses à faire pour faire face aux problèmes de discrimination dont souffrent les citoyens arabes d'Israël.

M. JEAN ZIEGLER, Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, s'adressant en premier lieu à l'Union européenne a déclaré qu'il était indispensable, pour protéger le droit à l'alimentation de la population libanaise, que les organisations internationales liées aux Nations Unies, de même que les autres organisations d'aide, ne quittent pas le Liban maintenant, comme certaines s'apprêtent à le faire, mais demeurent pour assister la population libanaise. La situation humanitaire est grave, a-t-il déclaré, et il n'y aura pas de récoltes cette année.

S'adressant à l'ambassadeur d'Israël, et se référant à l'interview que celui-ci a mentionnée, il a rappelé que les Rapporteurs spéciaux sont autorisés à répondre à la presse démocratique au terme de leur mission. En ce qui concerne ses rapports avec le Hezbollah, il a indiqué qu'il avait rencontré le Ministre de l'agriculture qui se trouve être un membre de Amal, précisant que ce parti était tout à fait légal. Il revient au Liban, a-t-il dit, d'établir les relations qu'il juge utiles avec le Hezbollah. Il a finalement encouragé le Liban à demander réparation pour les dommages causés par les attaques israéliennes.

Droit de réponse

GEBRAN SOUFAN (Liban) a indiqué que son pays est désormais habitué aux stéréotypes. Les experts et le représentant d'Israël ont parlé de roquettes, citant des chiffres. Or, a rappelé le représentant libanais, il y a eu plus de 2,8 millions de mini-bombes utilisées contre le Liban dont un grand nombre n'ont pas explosé. Aucune organisation internationale n'a condamné certains bombardements illégaux qui ne relevaient pas d'actions contre le Hezbollah mais constituaient simplement un châtiment de la population libanaise. Un autre représentant libanais a rappelé la définition des crimes de guerre telle qu'énoncée dans le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

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