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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE EXAMINELA SITUATION AU TOGO ET EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE POPULAIRE LAO

08 Mars 2001



CERD
58ème session
8 mars 2001
Matin




Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, ce matin, la situation au Togo en ce qui concerne la mise en oeuvre des dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. La situation au Togo est examinée en l'absence de rapport, cet État partie ayant accumulé un important retard pour le soumettre.

Le Comité a également abordé la situation en République démocratique populaire lao dans le but d'aider ce pays à se préparer à l'examen de son rapport, qui devrait intervenir prochainement après un long retard.

M. Ion Diaconu, expert chargé de l'examen de la situation au Togo, a déclaré que les problèmes les plus graves sont liés à l'instabilité politique et au déficit démocratique ainsi qu'à la situation générale des droits de l'homme qui, selon diverses sources, serait caractérisée par des violations de toutes sortes, y compris des cas de torture, des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées et autres. Les membres suivants du Comité sont également intervenus s'agissant de la situation au Togo: M. Mahmoud Aboul-Nasr, M. Régis de Gouttes, M. Patrick Thornberry, Mme Patricia Nozipho January-Bardill et M. Mario Jorge Yutzis.

M. Régis de Gouttes, expert chargé de l'examen de la situation en République démocratique populaire lao, a attiré l'attention du gouvernement de ce pays sur la nécessité de fournir, dans son prochain rapport, des informations concernant, notamment, la situation de la minorité hmong et des minorités vietnamienne et chinoise, le sort des réfugiés ayant fui dans les pays voisins, les allégations de restrictions à la liberté religieuse. M. Aboul-Nasr, M. Marc Bossuyt et M. Yuri Rechetov sont également intervenus.


Le Comité a ensuite débattu des préparatifs de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée qui se tiendra à Durban (Afrique du Sud) du 30 août au 7 septembre prochain. Quatre experts ont dans ce cadre exposé au Comité le déroulement et les résultats des réunions régionales préparatoires à la Conférence mondiale qui se sont tenues à Dakar, à Téhéran, à Strasbourg et à Santiago-du-Chili.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport initial (CERD/C/350/Add.2).


Examen de la situation au Togo

M. ION DIACONU, expert chargé de l'examen de la situation au Togo, a rappelé que, dans une lettre envoyée au Secrétaire général des Nations Unies, le Ministre de la justice du Togo avait exposé les raisons du retard enregistré dans la présentation du rapport périodique de ce pays en invoquant l'inexistence de toute structure administrative chargée de l'élaboration de ce type de rapports ainsi que les problèmes matériels et financiers auxquels est confrontée la commission interministérielle mise sur pied en 1997 pour démarrer ses travaux. En conséquence de quoi le ministre togolais, sans promettre d'élaborer un rapport dans un délai approprié, disait dans sa lettre que «dès que la situation économique du Togo le permettra, les dispositions nécessaires seront prises pour soumettre le moment venu des rapports périodiques» et exprimait le souhait que ces considérations soient prises en compte par le Comité afin de permettre une meilleure collaboration dans l'application de la Convention.

M. Diaconu a rappelé que le Comité avait déjà examiné, en août 1996, la situation de la mise en oeuvre de la Convention par le Togo en l'absence de rapport périodique de ce pays et sans qu'aucun représentant togolais n'ait participé à cette séance pour engager un dialogue avec le Comité. Le dernier rapport présenté au Comité par le Togo date de 1991.

Sur la base des informations recueillies de diverses sources, M. Diaconu a notamment rappelé que la Constitution du Togo de 1992 interdit la discrimination fondée sur le groupe ethnique, l'origine régionale ou familiale et stipule que les droits et devoirs énoncés dans les instruments relatifs aux droits de l'homme ratifiés par le Togo on force de loi. La Constitution prévoit que tout acte ou toute manifestation à caractère raciste, régionaliste, xénophobe sont punis par la loi. Pourtant, a fait observer M. Diaconu, aucune loi n'a été adoptée pour punir de tels actes. En outre, selon les réponses apportées par le gouvernement au questionnaire des Nations Unies, le Togo ne connaîtrait pas de problème de minorité ou de groupe dominant et ce pays ne connaîtrait pas et n'aurait jamais connu de problèmes de racisme. Or, outre le fait que le cadre législatif de mise en oeuvre des dispositions de la Convention est très restreint, l'affirmation selon laquelle un pays ne connaîtrait pas de discrimination raciale n'a jamais été accepté par le Comité, a rappelé M. Diaconu. D'ailleurs, le document de base présenté par le Togo en 1996 faisait état de troubles interethniques pendant la période de transition et d'actions d'incitation à la haine tribale ayant occasionné des règlements de compte.

M. Diaconu a relevé que le Comité des droits de l'homme avait noté que les membres de l'armée étaient presqu'exclusivement recrutés parmi les membres d'un seul groupe ethnique et recommandait au gouvernement de remédier à cette situation. Selon des informations provenant d'organisations non gouvernementales, les membres du groupe ethnique du Nord domineraient l'essentiel du commerce et des autres professions. De plus, le rapport de la Commission internationale d'enquête pour le Togo établie en 2000 par les Secrétaires généraux de l'ONU et de l'OUA fait état d'exécutions extrajudiciaires et met en cause le Premier ministre comme encourageant les miliciens armés proches du pouvoir à commettre de tels actes. La Commission d'enquête recommande notamment la nomination d'un rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Togo.

M. Diaconu a précisé qu'aucun des faits mentionnés dans le rapport de la Commission d'enquête ne relève de la Convention donc de la compétence du Comité. Néanmoins, l'examen des documents provenant de sources diverses permet de constater que les problèmes les plus graves que rencontre le Togo sont liés à l'instabilité politique et au déficit démocratique; à la situation générale des droits de l'homme qui serait caractérisée par des violations de toutes sortes, y compris des cas de torture, des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées et autres.

Le Comité doit demander une fois de plus au Togo de renouer le dialogue avec lui et, éventuellement, de faire appel aux services consultatifs du Haut-Commissariat aux droits de l'homme pour l'aider dans l'élaboration de son rapport périodique, a conclu M. Diaconu. Les réponses données au questionnaire ainsi qu'au rapport de la Commission d'enquête montrent que le pays a la capacité d'élaborer un tel rapport, a ajouté l'expert.

Un autre membre du Comité a vivement regretté que le Togo n'ait pas, une fois de plus, présenté de rapport au Comité, alors même que le Centre pour les droits de l'homme (Haut-Commissariat) avait organisé un séminaire dans le pays il y a plusieurs années afin de l'aider dans le processus de préparation des rapports périodiques. La Commission nationale des droits de l'homme du Togo a-t-elle pu jouer un rôle dans le cadre de l'enquête concernant les incidents dont a été saisie la Commission internationale d'enquête mise sur pied par les Nations Unies, s'est par ailleurs enquis cet expert? Il a en outre insisté sur la nécessité d'assurer un suivi du rapport de la Commission d'enquête des Nations Unies.

M. Diaconu a souligné que le rapport de la Commission internationale d'enquête pour le Togo ne fait aucunement mention de la Commission nationale des droits de l'homme du Togo, de sorte que l'on peut en conclure qu'il n'y a pas eu la moindre consultation entre ces deux commissions dans le cadre de l'enquête menée par la Commission internationale.

Un membre du Comité a proposé que M. Diaconu rédige un texte bref dans lequel le Comité exprimerait notamment sa préoccupation face à la situation générale au Togo.


Situation en République démocratique populaire lao

M. RÉGIS DE GOUTTES, expert chargé de l'examen de la situation en République démocratique populaire lao, a rappelé que ce pays n'a pas présenté de rapport au Comité depuis son cinquième rapport périodique, daté de 1984 et examiné en mars 1985. Depuis cette date, la situation du pays a été examinée à deux reprises par le Comité en août 1992 et en août 1996. À chaque fois, le Comité n'a pu que constater l'absence de tout nouveau rapport et de délégation venue s'expliquer. Il appartient au Comité de rappeler à la République démocratique populaire lao les obligations qui découlent de la Convention et de l'inviter à présenter le plus tôt possible un rapport actualisé, a déclaré M. de Gouttes.


L'expert a déclaré qu'en se fondant notamment sur le rapport présenté par ce pays au Comité des droits de l'enfant en 1997, sur le rapport du Rapporteur spécial sur la vente et l'exploitation des enfants en date de 1999 ainsi que sur certaines informations émanant d'organisations non gouvernementales, il convient dès à présent d'attirer l'attention du Gouvernement lao sur un certain nombre de points qui revêtent une importance particulière pour le Comité. Ainsi, le prochain rapport périodique devra-t-il contenir des informations sur l'évolution politique et institutionnelle du pays depuis 1985. Des précisions devront notamment être fournies sur le contenu de la Constitution de 1991; sur la place de la Convention dans l'ordre juridique interne; sur les autres instruments internationaux de protection des droits de l'homme ratifiés par le pays. Le pays devrait en outre fournir des précisions s'agissant des compétences et de la composition du Bureau des droits de l'homme créé en 1997 au sein du Ministère des affaires étrangères. Il serait également intéressant de savoir si le Gouvernement lao a instauré un dialogue avec certaines organisations non gouvernementales.

M. de Gouttes a souligné la nécessité, pour le Comité, de disposer d'informations actualisées sur la composition ethnique de la population lao. Il a relevé, que selon le rapport de 1984, le pays comptait 68 ethnies réunies en 3 groupes alors que les nouveaux chiffres qui se dégagent du dernier recensement (1995) ne feraient plus apparaître que 47 groupes ethniques. L'expert a en outre exprimé le souhait que le prochain rapport lao fournisse des renseignements, déjà demandés en 1992 et 1996, sur les principaux indicateurs socioéconomiques et culturels du pays, notamment en ce qui concerne les différents groupes ethniques. À cet égard, la situation de la minorité hmong méritera une attention particulière, a souligné M. de Gouttes. En effet, selon les informations émanant de diverses organisations non gouvernementales, les Hmongs seraient encore victimes de discriminations sociales, a déclaré l'expert avant d'ajouter qu'il est notamment fait état d'une politique systématique de transferts des montagnards dans les vallées et de relocalisations «autoritaires». Il faut rappeler que la communauté hmong, venue de Chine et du Vietnam à partir du début du XIXe siècle et installée dans le Nord du pays, constitue la deuxième minorité ethnique du pays, représentant environ 10% de la population totale (soit 500 000 personnes environ).

M. de Gouttes a par ailleurs souhaité que le prochain rapport lao mentionne les dispositions législatives ou autres qui ont été prises pour interdire et réprimer les différentes formes d'actes de racisme. Des informations devront également être fournies sur la situation des minorités vietnamienne et chinoise installées dans le pays, le sort des réfugiés ayant fui dans les pays voisins et les dispositions prises pour faciliter leur rapatriement et les restrictions à la liberté religieuse qui sont dénoncées par diverses ONG et dont auraient été victimes en particulier des personnes appartenant à des groupes religieux minoritaires. En invitant le Gouvernement lao à présenter sans tarder son nouveau rapport, le Comité devrait lui suggérer de faire appel à l'assistance technique des services consultatifs du Haut-Commissariat aux droits de l'homme, a proposé M. de Gouttes.



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