Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT PÉRIODIQUE DE L'ISLANDE

28 janvier 2003



CRC
32ème session
28 janvier 2003



Le Comité des droits de l'enfant a examiné aujourd'hui le deuxième rapport périodique de l'Islande sur l'application de la Convention relative aux droits de l'enfant. Présentant en fin de journée des observations préliminaires, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport islandais, M. Ibrahim Abdul Aziz Al-Sheddi, a notamment engagé le pays à poursuivre ses efforts en faveur de la promotion des droits de l'enfant. Peut-être l'Islande aurait-elle besoin de disposer d'une entité centrale chargée de coordonner l'ensemble de l'action en faveur de l'enfance dans le pays, a estimé M. Al-Sheddi. Beaucoup a été fait sur le plan législatif mais il reste au pays à adopter une démarche davantage fondée sur les droits des enfants, a-t-il ajouté.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l'Islande avant de les rendre publiques à la fin de la présente session, vendredi 31 janvier 2003.
Présentant le rapport de son pays, M. Stefan Haukur Johannesson, Représentant permanent de l'Islande auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que le bien-être des enfants est une priorité des autorités islandaises. Il a assuré que son gouvernement souhaite poursuivre ses efforts en faveur de l'enfance avec aide du Comité et des organisations non gouvernementales.
Mme Ragna Arnadottir, Directrice des affaires juridiques au Ministère de la justice et des affaires ecclésiastiques de l'Islande, a indiqué qu'une politique sur l'enfance a été élaborée en 2001 accordant la priorité aux soins de santé, aux services sociaux et à l'éducation. Depuis 1994, de nombreuses nouvelles lois ont été adoptées qui traitent notamment du système éducatif, de l'adoption et des étrangers, a-t-elle indiqué.
La délégation islandaise est également composée de représentants du Ministère de la santé et de la sécurité sociale; de l'Agence gouvernementale pour la protection de l'enfant; et de la Mission permanente de l'Islande auprès des Nations Unies à Genève. Elle a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant, notamment, de la nouvelle loi sur la protection de l'enfance; de l'âge du consentement sexuel; des abus sexuels et autre maltraitance à l'égard des enfants; de la pauvreté; des questions d'éducation et d'immigration; de l'administration de la justice pour mineurs; de la situation des enfants nés hors mariage; des questions de santé; ainsi que de la situation des handicapés.
Demain matin, à 10 heures, le Comité tiendra une réunion informelle avec les États parties à la Convention. L'Islande était le dernier pays dont le rapport est à l'examen au cours de la présente session du Comité, qui se termine vendredi 31 janvier.

Présentation du rapport de l'Islande
Présentant le rapport de son pays, M. STEFAN HAUKUR JOHANNESSON, Représentant permanent de l'Islande auprès des Nations Unies à Genève, a rappelé que le deuxième rapport périodique de l'Islande a été préparé sous les auspices du Ministère de la justice et en consultation avec d'autres parties concernées par les questions relatives à l'enfance telles que des ministères, des institutions publiques et des organisations privées. Il a exprimé l'espoir que cette journée d'examen fournira à l'Islande l'occasion de démontrer les changements significatifs intervenus dans ce pays en matière de prise de conscience des questions intéressant les droits de l'enfant depuis l'examen du rapport initial. Le Représentant permanent a par ailleurs souligné que le bien-être des enfants est une priorité des autorités islandaises. «Nous ne prétendons pas avoir résolu tous les problèmes auxquels est confrontée l'Islande mais nous sommes conscients de la nécessité de les traiter et espérons qu'avec votre aide et celle d'autres parties intéressées telles que les organisations non gouvernementales, nous serons en mesure de continuer à progresser», a déclaré M. Haukur Johannesson.
MME RAGNA ARNADOTTIR, Directrice des affaires juridiques au Ministère de la justice et des affaires ecclésiastiques de l'Islande, a pour sa part indiqué que les autorités islandaises ont retiré leur déclaration concernant l'article 9 de la Convention, qui porte sur la séparation des enfants de leurs parents. Il est désormais possible pour les tribunaux de se saisir d'affaires dans ce contexte. Une nouvelle loi sur la protection de l'enfance est entrée en vigueur depuis juin 2002 en vertu de laquelle la décision concernant la garde des enfants relève désormais du tribunal, a précisé Mme Arnadottir. Pour ce qui est de la deuxième déclaration faite par l'Islande au sujet de l'article 37 de la Convention, s'agissant de la séparation des détenus mineurs et des détenus adultes, Mme Arnadottir a indiqué que les jeunes prisonniers peuvent maintenant purger leur peine dans une maison de redressement.
Le Médiateur des enfants continue de faire un excellent travail, a par ailleurs affirmé Mme Arnadottir. Elle a ajouté qu'une politique sur l'enfance a été élaborée en 2001 qui cible huit domaines, la priorité étant accordée aux soins de santé, aux services sociaux et à l'éducation. Depuis 1994 de nombreuses nouvelles lois ont été adoptées qui traitent notamment du système de l'éducation, de l'adoption et des étrangers. Un nouvel hôpital pour enfants a également ouvert ses portes en Islande, a indiqué la représentante islandaise.
Le deuxième rapport périodique de l'Islande (CRC/C/83/Add.5) indique que la loi n°97 du 28 juin 1995 a modifié la Constitution du pays, qui protège désormais les droits de l'homme d'une façon beaucoup plus détaillée et plus claire. Il convient notamment de noter que le paragraphe 3 de l'article 76 de la Constitution dispose désormais que la loi garantit aux enfants la protection et les soins nécessaires à leur bien-être. Cette disposition constitue en fait une déclaration de politique générale, précise le rapport. Le Bureau du Médiateur pour les enfants a été institué en 1994 et a pour fonction de protéger les intérêts et les droits des enfants en Islande. Le Ministère des affaires sociales continue à assumer la responsabilité des questions relatives au bien-être et à la protection de l'enfance et à définir les politiques dans ce domaine. Le Bureau de protection de l'enfance, organisme distinct placé sous l'autorité du Ministère, s'occupe des questions administratives ordinaires. Cet organisme s'efforce de coordonner et de promouvoir toutes les activités entreprises dans le domaine de la protection de l'enfance. Les comités de protection de l'enfance ont l'obligation, dans certaines affaires, de rendre une décision, qui peut être renvoyée pour réexamen au Conseil islandais de protection de l'enfance. En 1998, le Bureau de protection de l'enfance a été saisi de 45 plaintes et recours concernant des décisions prises par les comités de protection de l'enfance, indique le rapport. Le Bureau a notamment pour fonction de prendre des mesures concrètes pour renforcer la protection de l'enfance.
Le rapport indique que les enfants âgés de moins de 18 ans représentent 28% de la population totale de 275 264 habitants. De 1995 à 1998, la Médiatrice pour les enfants a tenu des réunions avec environ 11 500 enfants dans 75 écoles primaires du pays, au cours desquelles elle a expliqué en quoi constituent ses fonctions et parlé des droits de l'enfant. En 2000, la Médiatrice lancera un programme hébergé sur un site web interactif et dont l'objectif est de donner la possibilité aux enfants islandais d'exprimer leur opinion, conformément à l'article 12 de la Convention. Parmi les multiples questions dont la Médiatrice pour les enfants est actuellement saisie figurent la promotion de la participation active des enfants aux affaires municipales, les services de transport scolaire, le travail des enfants, la reconnaissance légale de la langue des signes en tant que langue maternelle des sourds, et l'enseignement dans leur langue maternelle pour les enfants d'immigrés.
Le rapport indique par ailleurs qu'en 1998, le Code pénal a été modifié de manière à ce qu'il ne puisse y avoir prescription pour les délits sexuels tant que la victime n'a pas atteint l'âge de 14 ans. D'autre part, la nouvelle loi sur la majorité a porté de 16 à 18 ans l'âge auquel une personne acquiert la capacité d'agir. Un projet de loi sur les religions a été présenté au Parlement à l'automne 1999 qui envisage de porter de 16 à 18 ans l'âge auquel une personne est jugée capable de décider d'adhérer à une religion, conformément au relèvement de la limite d'âge dans d'autres domaines, indique en outre le rapport.

Examen du rapport
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Islande, M. Ibrahim Abdul Aziz Al-Sheddi, s'est félicité des indications fournies aujourd'hui par la délégation selon lesquelles les déclarations et réserves que l'Islande avait émises au sujet de la Convention étaient ou allaient être retirées. Il a relevé que l'Islande a répondu à nombre de recommandations que le Comité avait formulées à l'issue de l'examen du rapport initial, même si certaines d'entre elles n'ont toujours pas été suivies d'effet. M. Al-Sheddi a notamment souhaité obtenir davantage d'informations concernant le contenu de la loi sur l'adoption adoptée l'an dernier.
Un autre membre du Comité a souhaité obtenir des compléments d'information concernant la teneur exacte de la Loi sur la protection de l'enfant adoptée l'an dernier. Ce même expert s'est demandé si les ressources humaines et financières mises à disposition du Médiateur des enfants étaient satisfaisantes.
La délégation a indiqué que l'objectif central de la nouvelle loi sur la protection de l'enfance est d'assurer que les enfants qui vivent dans des circonstances inacceptables ou qui mettent en danger leur santé ou leur développement obtiennent l'aide nécessaire. Cette loi stipule que les enfants ont droit à une protection et à des soins. L'Islande s'efforce d'accorder aux enfants des droits qui soient conformes à l'évolution de leurs capacités, a souligné la délégation.
En vertu de la loi sur les organisations religieuses adoptée en 1999 et entrée en vigueur en 2000, c'est à partir de 16 ans que les individus sont déclarés aptes à adhérer à une organisation religieuse, a par ailleurs indiqué la délégation.
Interrogée sur l'âge du consentement sexuel, la délégation a indiqué qu'un groupe de travail spécial a été mis sur pied pour étudier cette question ainsi que d'autres questions dans ce domaine. La conclusion à laquelle est parvenue ce groupe de travail est qu'il ne fallait pas recommander au Parlement d'élever l'âge du consentement sexuel au niveau auquel il se situe dans d'autres pays nordiques, où il est généralement fixé à 15 ou 16 ans. Le groupe de travail en est venu à cette conclusion en constatant qu'un quart des enfants âgés de 14 à 15 ans ont déjà eu des expériences sexuelles. Un adulte ayant eu des rapports sexuels avec une jeune fille âgée de 14 à 16 ans peut être accusé d'abus de confiance, a toutefois précisé la délégation.
La délégation islandaise a par ailleurs indiqué que le taux de découverte des abus sexuels est très élevé en Islande ces derniers temps, du fait de la prise de conscience qui s'est accrue s'agissant de ce problème. Deux cas sur trois d'abus sexuels commis à l'encontre d'un enfant sont renvoyés devant la Maison de protection de l'enfance, a précisé la délégation. Vingt pour cent des délits sexuels sont commis par des jeunes de moins de 18 ans, a-t-elle ajouté. Plus de la moitié des pédophiles commencent à commettre leurs crimes dès l'adolescence. C'est pourquoi plus tôt les auteurs de ce type de délit sont pris en main, meilleurs sont les résultats des traitements, a souligné la délégation.
En vertu de la législation en vigueur dans le pays, si une personne ayant la garde d'un enfant le maltraite de quelque manière que ce soit, elle peut être punie d'une peine d'emprisonnement. La délégation a par ailleurs indiqué qu'une étude transnationale étendue à plusieurs pays nordiques et portant sur les problèmes liés à l'exploitation sexuelle est actuellement en cours de préparation.
La délégation a indiqué que le projet de politique nationale en matière d'enfance sera débattu en Islande vendredi prochain. L'une des questions fondamentales qui se posent dans ce contexte concerne les données, a-t-elle fait observer. En effet, dans certains domaines, l'Islande pâtit d'un manque d'informations concernant la situation des enfants.
En ce qui concerne les questions de pauvreté, la délégation a rappelé que l'Islande est un pays riche. Il n'en demeure pas moins que, comme dans d'autres pays riches, des poches de pauvreté subsistent. Ainsi, un certain nombre d'enfants vivent une existence pénible du fait de cette pauvreté et les autorités s'efforcent donc d'agir pour leur venir en aide, a-t-elle insisté.
S'agissant des questions d'éducation, la délégation a notamment indiqué que les autorités allaient procéder cette année à une évaluation de la mise en œuvre des programmes scolaires. Les écoles peuvent avoir leur identité propre mais elles se doivent de respecter le programme national, a insisté la délégation. Bien que cela n'ait pas encore été décidé politiquement, il est envisagé de faire passer de quatre à trois le nombre d'années du cycle secondaire, a fait savoir la délégation. Une enquête sur le phénomène du bizutage a été commandée, a-t-elle en outre annoncé.
Interrogée sur la politique d'immigration suivie par l'Islande, la délégation a indiqué que le pays commence à connaître un phénomène d'immigration, qui se produit plusieurs décennies après celui qu'ont connu les autres pays européens. La délégation a précisé que la population islandaise comporte aujourd'hui 3% d'immigrants. Les écoles ont prévu un programme spécial d'«Islandais-deuxième langue», a également indiqué la délégation. Un membre du Comité n'en a pas moins fait état d'information selon lesquelles seulement 10% des enfants d'immigrés achèvent leur scolarité.
L'Islande compte très peu de demandeurs d'asile, a par ailleurs indiqué la délégation. Quoi qu'il en soit, les autorités sont en train d'examiner la question de l'accès scolaires en ce qui concerne ces enfants. Elles entendent permettre à tout enfant se trouvant sur le territoire islandais d'être scolarisé au plus vite, a déclaré la délégation.
En ce qui concerne l'administration de la justice pour mineurs, la délégation a indiqué que l'Islande applique le principe selon lequel l'enfant âgé de moins de 15 ans est réputé irresponsable du point de vue pénal. Pour toute affaire intéressant un enfant de moins de 15 ans en conflit avec la loi, c'est le Service de protection de la jeunesse qui intervient. En cas de sentence ferme prononcée à l'égard d'un jeune, il peut y avoir négociation pour que ce jeune accepte d'aller dans un centre de traitement plutôt qu'en prison. Un membre du Comité a fait état d'informations selon lesquelles les détenus mineurs et adultes ne sont pas toujours séparés.
La délégation a par ailleurs reconnu qu'en Islande, le salaire moyen des femmes ne représente que 53% du salaire moyen des hommes. Cela s'explique notamment par le fait qu'en dépit d'une très forte présence sur le marché du travail, les femmes sont très souvent employées à temps partiel, a affirmé la délégation.
En ce qui concerne la situation des enfants nés hors mariage, la délégation a assuré que la cohabitation sans mariage, le concubinage, et l'arrivée dans le foyer d'enfants nés hors mariage sont socialement très bien acceptées, de sorte que ces enfants ne sont victimes d'aucune discrimination.
S'agissant des questions de santé, la délégation a notamment annoncé que le nombre de grossesses précoces est en déclin en Islande. Cela s'explique probablement par le fait que plusieurs centres de santé auxquels les jeunes ont accès ont été ouverts à travers l'île. En outre, plusieurs professionnels parmi le personnel de santé ont été spécialement formés pour répondre aux besoins dans ce domaine.
La délégation a indiqué que le pays compte chaque année 6 à 8 cas de décès dus au VIH/sida. Il n'y a eu en Islande qu'un seul cas d'enfant contaminé par le VIH/sida, a précisé la délégation. Elle a ajouté que le Directeur général de la santé a l'intention d'organiser une nouvelle campagne de prévention contre le VIH/sida, non pas parce que la maladie se propage mais parce que l'on observe encore des comportements irresponsables de la part de certains individus.
Pour ce qui est des enfants handicapés, la délégation a indiqué que le principe de base présidant à l'action des autorités dans ce domaine est que les services fournis doivent permettre à la famille de prendre soin de l'enfant grâce à toutes sortes d'aides, non seulement financières mais aussi sous forme de placement temporaire de l'enfant handicapé dans une famille d'accueil afin de réduire la pression sur les parents. En Islande, très peu d'enfants handicapés se trouvent placés en institution, a souligné la délégation. En la matière, les institutions sont réservées aux personnes gravement handicapées du point de vue physique, a-t-elle indiqué.
La délégation a par ailleurs reconnu que les autorités islandaises se doivent d'agir plus énergiquement dans le domaine des enfants ayant des problèmes psychiatriques et comportementaux.
Observations préliminaires
Présentant des observations préliminaires sur le rapport islandais, le rapporteur du Comité pour l'examen de ce rapport, M. Ibrahim Abdul Aziz Al-Sheddi, a jugé extrêmement fructueuse la discussion avec la délégation. Les membres du Comité connaissent désormais beaucoup mieux la situation des enfants de ce pays, a-t-il assuré. Les enfants islandais sont entre de bonnes mains pour la plupart, même si certains reçoivent davantage d'attention que d'autres, a-t-il dit. M. Al-Sheddi a engagé l'Islande à poursuivre ses efforts en faveur de la promotion des droits de l'enfant. Peut-être le pays aurait-il besoin de disposer d'une entité centrale chargée de coordonner l'ensemble de l'action en faveur de l'enfance, a estimé l'expert. Beaucoup a été fait sur le plan législatif mais il reste au pays à adopter une démarche davantage fondée sur les droits, a-t-il ajouté. À cet égard, le Comité pour le bien-être de l'enfant pourrait judicieusement être rebaptisé «Comité pour les droits de l'enfant», a estimé M. Al-Sheddi.
La délégation a indiqué avoir beaucoup appris de cette discussion et a assuré qu'il serait tenu compte de toutes les observations faites par les membres du Comité dans les délibérations que les autorités islandaises mèneront autour des questions relatives aux droits de l'enfant.



* *** *

VOIR CETTE PAGE EN :