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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE ACHÈVE L'EXAMEN DU RAPPORT DE LA SUISSE

05 Mars 2002



CERD
60ème session
5 mars 2002
Matin




Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a achevé, ce matin, son dialogue avec la délégation suisse, qui a fourni des compléments d'information s'agissant, notamment, du rôle et du fonctionnement de la Commission fédérale contre le racisme; de la situation des gens du voyage et des membres de la communauté noire en Suisse; des questions relatives à l'immigration et à la naturalisation; des pratiques de renvoi forcé d'étrangers en situation irrégulière; de la politique d'asile et du respect du principe de non-discrimination dans le domaine de l'éducation.

À l'issue de ce dialogue, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Suisse, M. Tang Chengyuan, s'est dit satisfait, dans l'ensemble, par les réponses apportées par la Suisse au Comité, mais a souligné que sur certains points - notamment la question du port du foulard islamique - le Comité n'est pas d'accord avec le point de vue exprimé par la délégation. Il a par ailleurs noté certaines incompatibilités entre la loi fédérale et les lois cantonales.

Le Comité présentera ultérieurement, avant la fin de la présente session, ses conclusions et recommandations concernant la Suisse.

La délégation suisse, dirigée par M. Nicolas Michel, Directeur de la Direction du droit international public au Département fédéral des affaires étrangères, a notamment reconnu qu'une forme de rejet des membres de la communauté noire s'est récemment manifestée en Suisse. Aussi, la Commission fédérale contre le racisme a-t-elle entrepris d'organiser pour le 20 mars prochain une journée nationale consacrée aux préjugés contre les membres de cette communauté.

La délégation a également indiqué que les autorités suisses examinent actuellement un projet visant à créer un nouveau statut qui accorderait des droits plus larges aux personnes relevant du domaine de l'asile que les autorités ne pourraient renvoyer dans leur pays d'origine pour une raison ou une autre.

Le Comité entamera cet après-midi, à 15 heures, l'examen du rapport initial de la Lituanie (CERD/C/369/Add.2).


Fin de l'examen du rapport de la Suisse

Répondant aux questions soulevées hier après-midi par les membres du Comité s'agissant du rôle et du fonctionnement de la Commission fédérale suisse contre le racisme, la délégation a notamment souligné que cette Commission n'est pas un organe judiciaire. Il s'agit d'une commission extraparlementaire, nommée par le gouvernement et rattachée au Ministère de l'intérieur, qui comprend des membres de la société civile. Sa mission est de conseiller le gouvernement sur toutes les questions liées au racisme et aux minorités. La Commission fédérale contre le racisme entreprend également des activités de sensibilisation. La délégation a indiqué que le gouvernement souhaiterait voir élargi le mandat de la Commission afin qu'elle soit dotée de pouvoirs d'enquête et puisse ester en justice.

En ce qui concerne les gens du voyage, la délégation a indiqué que la communauté des gens du voyage compte environ 30 000 membres en Suisse et comprend des Yinnish (tziganes indépendants des Roms) ainsi que des Manouches (qui sont des Sintis donc des Roms). Conformément à la Convention-cadre du Conseil de l'Europe sur les minorités nationales, les gens du voyage sont considérés comme des membres d'une minorité nationale, a précisé la délégation. Il y a quelques années, a-t-elle rappelé, le Conseil fédéral s'est excusé pour sa part de responsabilité dans la politique de sédentarisation forcée menée à leur encontre. Aujourd'hui, le Conseil fédéral apporte son soutien à la Fondation «Assurer l'avenir des gens du voyage en Suisse», a précisé la délégation. Désormais, le pays doit incontestablement concentrer ses efforts sur les problèmes associés aux places de stationnement et de transit, d'une part, et à l'éducation, de l'autre.

La délégation a également indiqué qu'une forme de rejet des membres de la communauté noire s'est récemment manifestée en Suisse. Aussi, la Commission fédérale contre le racisme a-t-elle entrepris d'organiser pour le 20 mars prochain une journée nationale consacrée aux préjugés contre les membres de cette communauté.

Pour l'heure, il n'existe pas d'ombudsman ni d'instance nationale de même nature en Suisse, a reconnu la délégation, qui a toutefois ajouté qu'il se manifeste actuellement dans le pays un intérêt accru pour la mise en place d'une telle institution.

En ce qui concerne les questions relatives à l'immigration et à la naturalisation, la délégation a rappelé que la Suisse est passée d'une politique d'immigration dite des «trois cercles» à une politique de deux cercles. La politique d'immigration suivie par la Suisse ne comporte aucune disposition discriminatoire car elle se fonde sur des critères liés aux besoins en matière de main-d'œuvre. En outre, les mesures d'intégration visent de la même manière les ressortissants de l'Union européenne et ceux de pays non européens.

La délégation a indiqué que 65% des étrangers en Suisse bénéficient d'un permis d'établissement, ce qui permet de jouir d'un statut très sûr. En cas de chômage, ce permis ne peut être retiré que dans des cas exceptionnels, lorsque toutes les tentatives de réinsertion ont échoué, a précisé la délégation avant d'ajouter qu'il est très rare que cela se produise.

Pour ce qui est de la naturalisation, la délégation a rappelé que la révision en cours de la politique suisse dans ce domaine entend ramener de 12 à 8 ans la durée pendant laquelle les candidats doivent être domiciliés en Suisse. Il est également prévu d'accorder le droit à la nationalité à un enfant apatride après 5 ans de résidence dans le pays.

La délégation a indiqué que le dernier renvoi forcé d'étranger en situation irrégulière avec utilisation du bâillon remonte à 1999. Le dernier renvoi forcé remonte à 2000, a-t-elle précisé. Depuis, les autorités compétentes ont renoncé à la pratique des renvois forcés.

En ce qui concerne les questions relatives à l'asile en Suisse, la délégation a indiqué que les autorités suisses examinent actuellement un projet visant à créer un nouveau statut – associé à un «permis H» – qui accorderait des droits plus larges aux personnes relevant du domaine de l'asile que les autorités ne pourraient renvoyer dans leur pays d'origine pour une raison ou une autre.

Répondant aux préoccupations exprimées par certains face à l'absence en Suisse de loi-cadre contre la discrimination, la délégation a souligné que certains cantons, à l'instar de Genève, sont en train de se doter d'une loi cantonale qui, entre autres, instaure un mécanisme de plainte auquel peut recourir toute personne se plaignant d'avoir été victime d'une discrimination.

En ce qui concerne le respect du principe de non-discrimination dans le domaine de l'éducation, la délégation a rappelé que la Constitution suisse énonce le droit de chacun à l'éducation, ce qui n'a pas empêché certains politiciens de demander la création de classes séparées pour les enfants d'étrangers. La scolarisation distincte des enfants d'immigrés à été jugée contraire au principe de l'égalité des chances par la Commission fédérale contre le racisme et le Conseil fédéral, suivant cet avis, a tout fait pour décourager la création de telles écoles.

En ce qui concerne l'affaire de l'enseignante genevoise à qui le canton de Genève avait interdit le port du foulard islamique, la délégation a expliqué que le tribunal fédéral, qui a dû intervenir, a insisté sur la distinction qu'il convient d'opérer entre libertés et convictions intérieures (qui ne sauraient faire l'objet de restrictions) et les manifestations extérieures de ces mêmes libertés et convictions qui, elles, sont susceptibles de faire l'objet de restrictions, notamment sur la base de l'intérêt public. Or en l'espèce, il s'agissait de protéger les convictions religieuses des enfants et des parents. L'objectif était aussi d'assurer la paix religieuse en faisant prévaloir le principe de neutralité confessionnelle de l'école. Ce sont donc tous ces aspects de la question qui ont été pris en compte par le tribunal fédéral et qui l'ont amené à restreindre la liberté religieuse de cette enseignante.

Certains experts ont fait part de leur souhait de voir la Suisse retirer la réserve qu'elle a émise à l'égard de l'alinéa a) du premier paragraphe de l'article 2 de la Convention. La délégation suisse a assuré que le pays continuera à examiner la possibilité de retirer cette réserve sitôt que les circonstances législatives le permettront.

À l'issue de ce débat, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Suisse, M Tang Chengyuan s'est dit satisfait, dans l'ensemble, par les réponses apportées par la délégation suisse aux questions des membres du Comité. Sur certains points toutefois - notamment sur la question du port du foulard islamique - le Comité n'est pas d'accord avec le point de vue exprimé par la délégation. M. Tang a par ailleurs souligné qu'en raison du caractère fédéral du système politique suisse, certaines incompatibilités peuvent surgir entre la loi fédérale et les lois cantonales. Aussi, en ce qui concerne la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, serait-il nécessaire d'accroître la coopération entre les niveaux fédéral et cantonaux.





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