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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE MAURICE

28 Avril 1999


MATIN
HR/CAT/99/4
28 avril 1999



La délégation fait état de lois récentes visant la promotion
des droits de l'homme et la création d'une
Commission nationale des droits de l'homme



Le Comité contre la torture a entamé ce matin l'examen du deuxième rapport périodique de Maurice soumis en application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

La délégation de Maurice, dirigée par M. D. K. Dabee, Procureur général de Maurice, ainsi que par M. Dhurmahdass Baichoo, Représentant permanent de Maurice à l'Office des NationsUnies à Genève, comprenait également MmeA.D.Narain, Première conseillère au Ministère de la justice.

M. D.K. Dabee, Procureur général de Maurice, a informé le Comité l'entrée en vigueur depuis le mois de février 1999 de la «Loi sur la protection des droits de l'homme» qui prévoit notamment la création d'une Commission nationale des droits de l'homme chargée d'examiner les plaintes émises contre des membres de la police. Tout en reconnaissant qu'aucune définition de la torture ne figure dans la législation interne, il a estimé que les pouvoirs conférés à la Commission de contrôler de tels abus ajoutés aux dispositions légales existantes, représentent une garantie appréciable contre les actes de torture. A cet égard, il a rappelé la contribution de 3000 dollars versée par Maurice au Fonds de contributions volontaires des NationsUnies pour les victimes de la torture.

M. Andreas Mavrommatis, rapporteur pour l'examen du rapport sur Maurice, a salué l'abolition de la peine de mort dans ce pays. Il s'est également félicité du projet de loi sur l'égalité des chances et contre la discrimination fondée sur le sexe. Il a en outre espéré que la future commission des droits de l'homme n'adopte pas une approche trop légaliste du fait que sa présidence sera assurée par un juge. M. Sayed El Masry, co-rapporteur pour l'examen du rapport de Maurice, a apprécié les efforts accomplis par Maurice pour s'acquitter de ses obligations internationales.

Des experts se sont félicités de l'honnêteté des informations contenues dans le rapport. Certains se sont cependant inquiétés des risques de collusion entre le ministère public et les forces de police dans les affaires de voies de faits contre des particuliers.

Le Comité rendra ses observations finales sur le rapport de Maurice lundi 9 mai. Il poursuivra ses travaux cet après-midi à 15 heures pour entendre les réponses de la délégation de l'ex-République yougoslave de Macédoine.


Présentation du rapport sur Maurice


M. D.K. KABEE, Procureur général de Maurice, a exposé les mesures prises en faveur des droits de l'homme depuis la transmission du rapport au Comité, en juin 1998. Soulignant que l'attribution de pouvoirs excessifs à la police conduit souvent à des abus, il a signalé l'entrée en vigueur depuis le mois de février 1999 de la «Loi sur la protection des droits de l'homme», qui prévoit notamment la création d'une Commission nationale des droits de l'homme chargée d'examiner les plaintes émises contre des membres de la police. La police aura en outre le devoir d'informer cet organe des mesures qu'elle prend suite aux plaintes la concernant. La Commission pourra aussi lancer une enquête de sa propre initiative. En outre, elle pourra se rendre dans tout poste de police ou lieux de détention pour examiner le traitement des personnes qui y sont détenues. Elle pourra également demander des mesures de réparation à l'égard des personnes lésées, éventuellement sous forme d'indemnisations. Elle est habilitée à adresser ses conclusions et recommandations au Ministère chargé des droits de l'homme.

Tout en reconnaissant qu'aucune définition de la torture ne figure pas dans la législation interne, M. Kabee a estimé que les pouvoirs conférés à la Commission de contrôler de tels abus ajoutés aux dispositions légales existantes représentent une garantie appréciable contre les actes de torture. Il a d'autre part évoqué les mesures prises pour faciliter l'accès de la population mauricienne aux tribunaux. Il a également mentionné l'adoption d'une loi sur l'administration de la justice prévoyant la recevabilité de toute preuve valable, sous forme visuelle ou sonore. Pour ce qui est de la nouvelle loi sur le handicap mental, elle prévoit une protection accrue des patients en leur garantissant notamment la possibilité d'intervenir auprès d'une commission spéciale, voire auprès des tribunaux. Par ailleurs, des mesures ont été prises pour garantir aux détenus un meilleur accès à la défense et pour veiller à ce qu'ils soient traités convenablement.

Faisant allusion au décès d'une personnalité connue dans le monde le la chanson au cours de sa détention provisoire, en février 1999, le représentant a souligné qu'une enquête est en cours pour faire la lumière sur cette affaire. Le représentant a regretté que son pays n'ait pas encore pu accomplir la réforme de ses lois d'extradition. Le manque d'expertise dans ce domaine ayant également été un obstacle, le Gouvernement mauricien se félicite d'avoir obtenu l'assistance du Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues (PNUCID). Le représentant a enfin rappelé la contribution de 3000 dollars versée par Maurice au Fonds des NationsUnies en faveur des victimes de la torture.

Le deuxième rapport périodique de Maurice (CAT/C/43/Add.1) souligne que la peine de mort à été abolie en décembre 1995. En outre, le Gouvernement qui a pris ses fonctions à la même époque a créé un département des droits de l'homme qui relève de l'Attorney-General et du Ministre de la justice. Le Gouvernement va également présenter à la prochaine session parlementaire un projet de loi sur la protection des droits de l'homme qui prévoit la mise en place d'une Commission des droits de l'homme. Un programme de formation des agents de police a d'ailleurs été mis en place avec les services de l'Attorney-General pour les sensibiliser aux normes internationales relatives aux droits de l'homme. Le rapport indique en outre que la loi sur l'extradition de 1970 fait actuellement l'objet d'un amendement visant à y incorporer l'article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Toutefois, la notion de compétence universelle telle que prévue à l'article 5 de la Convention ne s'applique pas, précise le rapport.

Le rapport rappelle que les textes de loi ne mentionnent pas de délit spécifique de torture (telle qu'elle est définie à l'article premier de la Convention). Les actes de torture par lesquels des souffrances mentales aiguës sont intentionnellement infligées à une personne ne sont pas qualifiés de délits par le droit pénal mauricien. En pareil cas, la victime a néanmoins la possibilité de se constituer partie civile en vue d'obtenir des dommages et intérêts appropriés pour violation de ses droits. Les victimes de la torture peuvent également adresser une plainte à l'ombudsman qui peut d'ailleurs ouvrir une enquête de sa propre initiative. Il y est également précisé que toute personne soupçonnée d'avoir commis, ou susceptible d'avoir commis, ou ayant l'intention de commettre un délit, y compris des violences physiques et des sévices qui relèvent de la torture telle que définie dans la Convention peut être privée de liberté. Les aveux obtenus sous la contrainte ne sont pas recevables devant les tribunaux.


Examen du rapport sur Maurice

M. ANDREAS MAVROMMATIS, Rapporteur pour l'examen du rapport sur Maurice, a souligné que le présent rapport présente de grandes améliorations par rapport au précédent. Il a en outre salué l'abolition de la peine de mort à Maurice et la loi contre la discrimination fondée sur le sexe. Il a espéré que la future Commission nationale des droits de l'homme n'adopte pas une approche trop légaliste du fait que sa présidence sera assurée par un juge. Il a également salué les mesures concernant les forces de police. Il a cependant regretté que la loi sur l'extradition n'ait pas été amendée.

Soulignant le fait que la torture peut être combattue efficacement par des mesures légales, l'expert a estimé que la définition de la torture devrait figurer dans le Code pénal de Maurice. Concernant l'extradition et l'amendement de la loi d'extradition, il a souhaité que les questions du refoulement et de l'expulsion d'une personne soient traitées par la législation mauricienne. Il a évoqué le cas de Pinochet pour souligner le rôle essentiel joué par la Convention contre la torture dans la lutte contre l'impunité des tortionnaires. Il a voulu savoir à quel moment une personne placée en détention administrative ou en garde à vue a pour la première fois accès à un avocat. Il a également demandé des précisions sur la durée de la période de détention avant le jugement, estimant que les périodes de 14 et de 10 jours pour la détention administrative et la garde-à-vue sont exceptionnellement longues.

M. SAYED KASSEM EL MASRY, co-rapporteur pour l'examen du rapport sur Maurice, a apprécié le fait que Maurice s'acquitte de ses obligations internationales. Il s'est félicité de la mise en vigueur de la loi sur la protection des droits de l'homme prévoyant la création d'une commission nationa23le des droits de l'homme. Au sujet de l'obtention d'aveux par la force, il a jugé nécessaire de mettre en place une institution neutre chargée d'effectuer les enquêtes rapidement et impartialement. Il a regretté qu'aucun policier n'ait été condamné ou n'ait fait l'objet de mesures disciplinaires ou de suspension suite aux 34 cas de voies de fait enregistrés de 1995 à mars 1998. Les actes de torture eux-mêmes ne font pas l'objet d'un texte de loi spécifique, a-t-il également regretté.

Au cours du débat, les experts ont insisté pour que Maurice permette l'engagement de poursuites contre les tortionnaires, notamment en autorisant leur extradition. À cette fin, ils ont suggéré un amendement de la loi sur l'extradition. Ils ont également regretté que la définition de la torture prévue dans la Convention contre la torture ne soit pas inscrite dans le Code pénal de Maurice. Saluant la loi sur la santé mentale, un expert a regretté l'absence de mesures concernant l'éducation du personnel médical concernant l'interdiction de la torture.

Un expert s'est dit préoccupé par les risques de «solidarité» entre la police et le ministère public face aux allégations de torture. À cet égard, il s'est étonné qu'aucune poursuite n'ait été entreprise dans les affaires de voies de fait auxquelles se seraient livrés des agents de police. En outre, un autre expert a souhaité savoir combien de poursuites à titre privé ont été engagées au cours des dernières années et quelle a été la pratique de l'Etat à cet égard. Des experts ont toutefois salué l'honnêteté dont a fait preuve Maurice dans l'élaboration de son rapport et un expert s'est félicité du «vent de liberté» qui semble souffler sur ce pays.

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