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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME OUVRE SA SESSION EXTRAORDINAIRE CONSACRÉE À LA SITUATION AU TIMOR ORIENTAL

23 Septembre 1999

.APRES-MIDI
HR/CN/99/67
23 septembre 1999



L'Indonésie annonce la mise sur pied d'une commission d'enquête indonésienne sur les violations des droits de l'homme après le scrutin au Timor oriental

La Commission des droits de l'homme a ouvert, cet après-midi, sa quatrième session extraordinaire, qui est consacrée à la situation au Timor oriental.

Mme Mary Robinson, Haut Commissaire aux droits de l'homme, a rappelé que, suite à la visite qu'elle a effectuée dans la région à la mi-septembre, elle avait conclu à l'existence de preuves accablantes attestant qu'au Timor oriental s'est déroulée une campagne brutale, délibérée et systématique de violations massives des droits de l'homme, et qu'une commission internationale d'enquête sur ces violations devrait être mise sur pied afin de traduire les responsables en justice. En coopération avec la Mission des Nations Unies au Timor oriental, le Haut Commissariat aux droits de l'homme est en train de mettre au point des services consultatifs et d'assistance technique à l'intention du Timor oriental.

La Commission a adopté son ordre du jour, dont la question de fond concerne la lettre demandant la convocation de la présente session extraordinaire, adressée au Haut-Commissariat aux droits de l'homme par le Portugal, qui a pris la parole, indiquant notamment que l'Union européenne présentera une résolution sur la question de la violation des droits de l’homme au Timor oriental .

L'Indonésie a pour sa part déclaré qu'elle considère avec préoccupation les allégations récentes de violations des droits de l'homme. Aussi, la Commission nationale indonésienne des droits de l'homme a annoncé hier soir, 22 septembre, qu'elle allait mettre sur pied une commission d'enquête sur les violations des droits de l'homme après le scrutin au Timor oriental.

Les représentants des pays suivants ont également participé au débat : Japon, Finlande (au nom de l'Union européenne et des pays associés), Allemagne, Chili, Afrique du Sud, Canada, Guatemala, Inde, Cuba, République de Corée, Bangladesh, Pakistan, Brésil et Saint-Siège. Les représentants de l'Inde et du Pakistan ont en outre exercé leur droit de réponse.

La décision de tenir la session extraordinaire a été prise le 20septembre dernier à l'issue de consultations entre les membres de la Commission suite à une demande présentée par le Portugal le 9septembre 1999. Les membres de la Commission avaient voté, par 27 voix contre 15 avec 4abstentions, de tenir la session extraordinaire. Un deuxième vote est intervenu, le 20 septembre, pour déterminer si le vote d'un membre de la Commission avait été communiqué dans le temps imparti. La Commission a décidé d'accepter le vote de ce membre par un vote de 28 voix contre 15. Deux membres ont envoyé des réponses dans lesquelles ils ne se prononcent pas.

À cet égard, la Présidente de la Commission, MmeAnne Anderson, de l'Irlande, a noté les difficultés qui ont entouré la convocation de cette session extraordinaire et a estimé que personne n'aurait pu prévoir les complications procédurales qui ont surgi. Elle a donc exprimé l'espoir que ces difficultés pourront être surmontées. Le SriLanka (au nom du Groupe asiatique), les Philippines (au nom de l'Association des Nations de l'Asie du Sud-Est), l’Indonésie, Cuba, la Chine et le Japon ont exprimé des réserves en ce qui concerne la procédure suivie pour convoquer la session extraordinaire, en particulier du fait que la réponse d'un État membre a été comptabilisée bien qu'elle ait été reçue par téléphone et non par écrit. Le Haut-Commissaire adjoint aux droits de l'homme, M.Bertrand Ramcharan, a déclaré que le Haut-Commissariat a veillé, tout au long du processus, au respect des procédures requises en toute objectivité et impartialité.

La Commission a par ailleurs décidé d'inviter MmeSadako Ogata, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, à s'adresser à la Commission au sujet de la situation au Timor oriental.

La Commission des droits de l'homme poursuivra demain matin, à dix heures, sa session extraordinaire sur la situation au Timor oriental.


Déclarations

MME ANNE ANDERSON, Présidente de la Commission des droits de l'homme, a souligné que la convocation d'une session spéciale de la Commission est un événement inhabituel et grave qui ne s'était produit qu'à trois reprises par le passé. Le fait qu'une telle session a aujourd'hui été convoquée reflète la gravité des événements au Timor oriental, a-t-elle déclaré. Elle a formulé l'espoir que les discussions qui se dérouleront durant ces deux jours de session seront à la hauteur de la gravité de la situation et se concentreront sur les questions de droits de l'homme. Se déclarant consciente des difficultés qui ont entouré la convocation de cette session spéciale, MmeAnderson a souligné que personne n'aurait pu prévoir les complications procédurales qui ont surgi. Elle a donc exprimé l'espoir que ces difficultés pourront être surmontées.


MME MARY ROBINSON, Haut Commissaire aux droits de l'homme, a rappelé que le 30 août dernier, la population du Timor oriental a participé à une consultation populaire qui s'est soldée par un vote massif en faveur de l'indépendance. Malheureusement, cette consultation n'a pas été suivie sur le terrain par une mise en oeuvre constructive des accords du 5 mai qui avaient initié le processus référendaire. Au lieu de cela, les différents groupes de milices se sont livrés à des actes d'une extrême violence dans lesquels des éléments des forces de sécurité étaient aussi impliqués. La violence qui s'est déchaînée a menacé les vies des Est-Timorais, en particulier ceux qui étaient en faveur de l'indépendance du Timor oriental, ainsi que les vies du personnel des NationsUnies et d'autres personnes, y compris les journalistes qui couvraient l'événement. Des milliers d'Est-Timorais furent expulsés ou ont fui le territoire et des milliers d'autres se sont réfugiés dans les collines. «Nous ne connaissons pas encore le nombre total des personnes qui ont été tuées, séparées de leurs familles ou déportées, ni l'ampleur réelle des destructions matérielles», a déclaré MmeRobinson. Néanmoins, les informations disponibles montrent clairement que des violations massives de droits de l'homme se sont produites au Timor oriental, affectant l'ensemble de la population sur tout le territoire, a-t-elle ajouté.

Mme Robinson a souligné que, dans son rapport sur la situation au Timor oriental, présenté le 17 septembre dernier, elle faisait état de l'effondrement de la loi et de l'ordre au Timor oriental. Dans ce rapport, je transmettais des informations faisant notamment état de membres des milices ayant terrorisé et assassiné des civils désarmés; d'exécutions massives ayant pris pour cible les militants pro-indépendantistes; d'expulsions et de déplacements forcés qui concerneraient près de 200000 personnes; de violences contre les femmes; de disparitions forcées ou involontaires. Les preuves sont accablantes qui attestent qu'au Timor oriental, s'est déroulée une campagne brutale, délibérée et systématique de violations massives des droits de l'homme. Le rapport conclut également qu'une commission internationale d'enquête sur ces violations devrait être mise sur pied afin de traduire les responsables en justice.

Il existe aujourd'hui un principe du droit international contemporain qui est largement accepté et selon lequel partout où les droits de l'homme sont massivement violés, la communauté internationale a le devoir de faire tout son possible pour contribuer à accorder une protection aux personnes en danger, pour faire la lumière sur ce qui s'est produit et pour traduire les responsables en justice. Pour l'heure, la priorité est de mettre un terme aux violations des droits de l'homme et d'assurer le retour des Est-Timorais, en toute sécurité, dans leurs foyers, afin que le long et douloureux processus de reconstruction puisse commencer, a déclaré MmeRobinson. Elle a souligné que la force multinationale présente sur le territoire assume la responsabilité d'apporter la paix au Timor oriental bien qu'au moment même où nous parlons, des informations nous proviennent selon lesquelles cette force opère dans des conditions extrêmement difficiles.

En coopération avec la Mission des NationsUnies au Timor oriental (MINUTO), le Haut Commissariat aux droits de l'homme est en train de mettre au point des services consultatifs et d'assistance technique à l'intention du Timor oriental. Avant d'appliquer un programme global de droits de l'homme, il convient d'accorder la priorité aux questions de législation, de création d'institutions et de promotion d'une culture de tolérance et de droits de l'homme. Il est essentiel de créer un conseil pour la loi traditionnelle afin d'assurer que des liens étroits sont établis entre la nouvelle législation, d'une part, et la culture et la législation locale, de l'autre, en particulier en ce qui concerne les questions ayant trait à la propriété de la terre. Il convient également d'apporter une assistance pour la création d'une institution nationale de droits de l'homme pour le Timor oriental, ainsi que d'une commission sur la propriété de la terre.

M. PALIHAKKARA (Sri Lanka, au nom du Groupe des pays d'Asie), a regretté que les procédures prévues pour convoquer une session extraordinaire n’ont pas été respectées. Le Groupe asiatique a également souligné qu'il n'y avait pas de procédure prévoyant un second vote afin de déterminer si la majorité a été obtenue. Le Groupe asiatique le regrette, ainsi que le fait qu'il n'y a pas eu de consultation préalable avec les États membres du Groupe, soulignant qu'une coopération de ces pays est essentielle dans le cas d'espèce. Le Gouvernement indonésien a déjà pris des mesures pour s'attaquer aux causes de la situation politique que connaît le pays. Le Groupe asiatique souhaite souligner son attachement au principe selon lequel, lorsqu'un gouvernement décide de coopérer avec les Nations Unies, aucune autre mesure ne doit être prise qui serait contraire à cette coopération. Les États appartenant au Groupe asiatique souhaitent déclarer que, en ce qui concerne la situation au Timor oriental, le Gouvernement indonésien a déclaré qu'il coopérerait avec les Nations Unies. Les NationsUnies ne doivent donc pas faire obstacle à ces efforts.

M.DENIS LEPATAN (Philippines, au nom de l'Association des Nations de l'Asie du Sud-Est) s'est associé à la déclaration que vient de faire le SriLanka au nom du Groupe des pays asiatiques et a préconisé que la Commission respecte strictement les règles et procédures qui la régissent afin d'éviter toute politisation des questions de droits de l'homme. Le Gouvernement indonésien s'est engagé à respecter l'accord du 5 mai 1999 et la présence de la Force internationale au Timor oriental (Interfet) est une manifestation de cet engagement. Le Gouvernement indonésien s'est engagé à apporter son soutien aux institutions internationales présentes sur le terrain pour venir en aide aux personnes déplacées. L'existence d'Interfet témoigne à elle seule de l'esprit d'ouverture du Gouvernement indonésien. Aussi, les Philippines ne voient pas très bien l'utilité d'une session spéciale de la Commission. La Charte des NationsUnies prévoit que lorsque le Conseil de sécurité s'est saisi d'une question, l'Assemblée générale doit s'abstenir de toute initiative sur cette même question sauf si le Conseil en fait la demande. La question du Timor oriental sera examinée cette année devant l'Assemblée générale, a souligné le représentant. Cette session spéciale ne peut que contribuer à ébranler l'esprit de confiance qui prévaut entre les membres de la Commission.

M. HASSAN WIRAJUDA (Indonésie) a déclaré que sa délégation est fermement convaincue que la convocation de cette session présente de graves vices de formes. La majorité requise n'a pas été recueillie conformément au règlement intérieur. Ceci laisse beaucoup à désirer en termes de transparence et d'objectivité de la part du Haut-Commissariat aux droits de l'homme. Il a souhaité que la Commission respecte les principes d'impartialité et de transparence, ainsi que le règlement intérieur. Néanmoins, la présence de l'Indonésie témoigne de sa volonté de coopération à cette session extraordinaire.

M.CARLOS AMAT FLORES (Cuba) a déclaré que son pays partage les préoccupations exprimées face aux événements déplorables qui se sont produits au Timor oriental. Toutefois, le Gouvernement cubain ne trouve aucune base juridique permettant de faire fi du règlement régissant la convocation de sessions spéciales de la Commission des droits de l'homme. Il a souligné que les réponses fournies par les États membres à la demande de convocation de la présente session extraordinaire de la Commission devaient être reçues par écrit avant 18heures, le jeudi 16 septembre. Or, l'absence de transparence dans l'action du Haut-Commissariat à cet égard a prêté le flanc à une controverse sur les questions de procédure. Cuba est solidaire des déclarations mettant en cause les procédures suivies dans le cadre de la convocation de cette session.

M.REN YISHENG (Chine) a déclaré que ce n'était qu'en respectant le règlement intérieur que les débats de la Commission peuvent s'inscrire dans la légalité. Il a déclaré que la majorité requise n'a pas été rassemblée pour la convocation d'une session extraordinaire et a estimé que la violation du règlement intérieur pourrait avoir un impact négatif. Les objectifs de transparence et de neutralité devraient être respectés dans le mandat du Haut-Commissariat aux droits de l'homme. Le 30 août, un référendum a été organisé par les Nations Unies au Timor. Une résolution du Conseil de Sécurité a été adoptée le 15 septembre. La Chine exprime l'espoir que, grâce à ces efforts communs de la communauté internationale, la stabilité sera bientôt rétablie au Timor oriental.

M.BERTRAND RAMCHARAN, Haut-Commissaire adjoint aux droits de l'homme, a déclaré qu'en traitant des différentes étapes qui ont mené à la convocation de cette session extraordinaire, le Haut-Commissariat a veillé au respect, en toute objectivité et impartialité, des procédures requises. Le Haut Commissariat a d'abord procédé au rassemblement de toutes les informations factuelles possibles et a informé le bureau de la Commission de toutes les étapes du processus qui a mené à cette session spéciale. M.Ramcharan a souligné que le Gouvernement rwandais a confirmé par écrit que, confronté à des problèmes techniques, il avait joint Genève par téléphone, à 5h30 le matin du jeudi 16septembre, afin de faire connaître sa position favorable à la convocation de cette session. Sollicité, l'avis du Conseil juridique des NationsUnies a été que la réponse du Rwanda était parvenue dans les délais. En outre, une majorité de 28 membres de la Commission s'est prononcée en faveur de la prise en compte de la réponse du Rwanda.

M.NOBUTOSHI AKAO (Japon) a déclaré qu'après avoir entendu le Haut-Commissaire adjoint aux droits de l'homme, il souhaitait souligner que sa délégation a connu quelques problèmes concernant la date butoir pour la soumission de son vote. Il a déclaré que le Haut-Commissariat avait parlé d'impartialité mais qu'il faudrait peut-être se pencher à nouveau sur cette question. La délégation japonaise n'a peut-être pas été la seule à avoir été sous pression pour fournir une réponse. Il a regretté que le Groupe asiatique n'ait été contacté qu'hier au sujet du dialogue sur la situation au Timor oriental. Il aurait peut-être fallu prendre cette initiative beaucoup plus tôt.


Débat sur la situation au Timor oriental

M.FRANCISCO SEIXAS DA COSTA (Portugal) a souligné que la signature de l'accord tripartite, le 5 mai à New York, était un pas dans la bonne direction. La communauté internationale ne pouvait pas rester indifférente aux barbaries commises au Timor et le Portugal se devait d'alerter la communauté internationale. En ce moment, le déploiement des forces internationales n'est pas terminé. Le représentant a rappelé que l'Indonésie était responsable du sort des personnes déportées et déplacées au Timor oriental. Le droit à la vie et les libertés fondamentales de l'homme ont été bafoués. La situation est tragique et si la Commission des droits de l'homme fais d’indifférence face à cette situation, cela reviendrait à nier une des tâches majeures de la Commission. La Commission doit analyser les causes de cette situation. À la veille du prochain millénaire, il est inacceptable que de telles situations et atrocités se produisent. Il a souligné que le Président Habibie lui-même avait publiquement déclaré que les responsables de la violence devraient être traduits en justice. Il s'est félicité de cette décision. L'Indonésie ne pourra que gagner à une coopération franche et active avec la communauté internationale, a souligné le représentant portugais. Il a déclaré que l'Union européenne présentera une résolution sur la question. Il s'agit d'un texte bien équilibré. En outre, il a félicité les efforts menés par la Haut-Commissaire aux droits de l'homme pour la résolution de ce conflit.

M.HASSAN WIRAJUDA (Indonésie) a souligné que les diverses phases du processus de consultation populaire au Timor oriental n'auraient pu se dérouler sans la protection des forces de sécurité indonésiennes, prévue par les accords de NewYork. Il a fait part de la tristesse de son gouvernement, qui déplore les violences qui se sont déchaînées au Timor oriental après l'annonce des résultats du scrutin. La police indonésienne n'avait que peu d'expérience pour faire face à la violence politique à grande échelle alors que les militaires étaient tenus d'agir en se conformant aux dispositions des accords de NewYork. Suite à ces violences, dont ont été victimes à la fois des communautés pro-indépendantistes et pro-intégrationnistes, des dizaines de milliers de résidents des deux camps sont devenus des déplacés internes. Qu'il y ait eu un grave problème humanitaire dans la période qui a suivi le scrutin ne fait aucun doute, a reconnu le représentant indonésien. Pour fournir aux personnes déplacées internes de la nourriture, des médicaments et des abris, le Ministère du bien-être social a lancé des opérations humanitaires de grande ampleur, a-t-il souligné. Il a noté que la Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés ne semble pas avoir constaté l'existence de famine dans les zones qu'elle a visitées. Le représentant a par ailleurs rappelé que le Président indonésien a garanti aux personnes déplacées internes qu'elles jouiront de leur droit à retourner dans leurs foyers au Timor oriental et pourront même, si elles le désirent, rester où elles se trouvent ou se rendre dans d'autres régions de l'Indonésie.

La période qui a suivi le scrutin a également été marquée par des allégations de violations des droits de l'homme. Il semble que certaines de ces violations aient été exagérées par les médias et les organisations non gouvernementales. Il n'en demeure pas moins que le Gouvernement indonésien considère avec préoccupation ces violations. Aussi, la Commission nationale indonésienne des droits de l'homme a annoncé hier soir, 22 septembre, qu'elle allait mettre sur pied une commission d'enquête sur les violations des droits de l'homme après le scrutin au Timor oriental. Cette commission d'enquête comprendra des membres de la Commission nationale des droits de l'homme, des personnalités indépendantes et des experts. Elle aura pour tâche de rassembler et évaluer les faits et les informations en ce qui concerne les violations des droits de l'homme au Timor oriental dans la période suivant le scrutin afin que les responsables soient traduits en justice et de publier un rapport final et des recommandations à l'intention du gouvernement. Le Président B.J. Habibie a immédiatement fait savoir qu'il apportait son soutien aux travaux de cette commission d'enquête. Aussi, la délégation indonésienne exhorte-t-elle la communauté internationale à appuyer les travaux de cette commission. Aucune paix ne sera possible au Timor oriental sans réconciliation entre les différents groupes d'Est-Timorais. Le Gouvernement indonésien a accepté la présence de la Force internationale pour le Timor oriental (Interfet) en dépit de l’incompréhension que ne manquerait pas de susciter, à travers le pays, cette décision. Récemment, le Président Habibie s'est adressé au Parlement et a lancé un appel afin que le Parlement examine rapidement les résultats du scrutin et entérine une transition en douceur de l'autorité au bénéfice des NationsUnies, dans un avenir proche.

M.NOBUTOSHI AKAO (Japon) a déclaré que le Gouvernement du Japon déplorait la détérioration de la situation au Timor. Il a rappelé la décision du gouvernement japonais, le 16 septembre, de faire une contribution de 2millions de dollars pour l'assistance humanitaire au Timor oriental et l'envoi, le 18 septembre, d'une mission humanitaire pour pouvoir mieux consulter les autres institutions internationales. Il a demandé que la violence cesse au Timor oriental et que les responsables de cette violence soient châtiés. Le Gouvernement du Japon espère que la sécurité sera rétablie le plus rapidement possible conformément à la résolution 1264 du Conseil de sécurité des Nations Unies. Il a encouragé la prise de mesures constructives par le Gouvernement indonésien pour améliorer les droits de l'homme dans ce pays.

M.PEKKA HUHTANIEMI (Finlande, au nom de l'Union européenne et des pays associés) a rappelé que tous les États ont le devoir de protéger les droits et libertés fondamentales. Aussi, le contrôle de la situation des droits de l'homme dans les pays pris individuellement fait partie des devoirs des NationsUnies et la Commission des droits de l'homme constitue à cet égard l’instance appropriée. L'indépendance du Timor oriental doit être accordée sans délai comme le prévoyaient les accords du 5 mai en cas de vote en ce sens lors de la consultation populaire. D'autre part, la situation des droits de l'homme au Timor oriental exige une attention urgente de la part de la communauté internationale. L'Union européenne est favorable à la création d'une commission internationale d'enquête pour rassembler toutes les informations relatives à d'éventuelles violations des droits de l'homme au Timor oriental depuis l'annonce, en janvier 1999, qu'un référendum se tiendrait sur le territoire.

Les événements qui se sont produits au Timor oriental mettent en relief la nécessité de l'entrée en fonction, le plus rapidement possible, de la Cour pénale internationale grâce à la ratification, dans les plus brefs délais, de ses statuts. Il faut que la Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, le Représentant spécial du Secrétaire général sur les personnes déplacées internes, le Rapporteur spécial sur la torture, la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes et le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires mènent des missions au Timor oriental et fassent rapport à la Commission lors de sa prochaine session et à l'Assemblée générale, à titre de rapport intérimaire, à sa présente session. L'Union européenne est gravement préoccupée par la situation qui prévaut au Timor oriental et au Timor occidental, à laquelle il convient de remédier de toute urgence. Il existe un besoin évident d'assistance technique dans le domaine des droits de l'homme, en mettant l'accent sur la création de capacités nationales et la réconciliation.

M.WALTER LEWALTER (Allemagne) a déclaré que sa délégation s'associait à la déclaration de la Finlande au nom de l'Union européenne. Il souscrit à l'appel de la convocation de cette session extraordinaire, comme lors de sessions extraordinaires précédentes. La délégation allemande se félicite de l'adoption de la résolution 1264 du Conseil de sécurité pour le déploiement d'une force internationale au Timor oriental, a-t-il ajouté. Il a également déclaré qu'il était convaincu que la crédibilité des NationsUnies requérait que la Commission des droits de l'homme agisse. Il a appelé à la création d'une commission d'enquête internationale et impartiale. Il a souhaité que soient traduits en justice les responsables de ces atrocités et a appelé les autorités indonésiennes à prendre des mesures efficaces pour mettre à terme à ces violations des droits de l'homme. Il a appelé le Gouvernement indonésien à respecter les accords du 5 mai dernier et les résultats du référendum du 30août dernier. L'assistance humanitaire est de la plus haute importance, a-t-il par ailleurs souligné. Le représentant allemand a remercié le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés de sa visite aux personnes déplacées et réfugiées du Timor oriental. L'Allemagne est prête à jouer son rôle dans le cadre de ces efforts, a-t-il déclaré.

M.FERNANDO LABBE (Chili) a rappelé que son gouvernement avait répondu favorablement à la demande du Portugal de convoquer la présente session spéciale de la Commission. En effet, les faits parlent d'eux-mêmes : ils sont tragiques et très graves. Le représentant chilien a rappelé que, dès les premières minutes de cette crise au Timor oriental, son gouvernement avait ouvertement fait part de ses préoccupations. Le Chili attend que cette session de la Commission se solde par un résultat consensuel qui pourrait prendre la forme d'une résolution adoptée par consensus. Un tel résultat ne manquerait pas d'avoir un impact important sur le terrain. Le Chili est disposé à prendre une part active aux efforts qui seront déployés pour parvenir à un résultat consensuel. Il est important de traduire en justice les coupables des crimes exécrables qui ont été commis au Timor oriental.

M.SIPHO NENE (Afrique du Sud) a rappelé le vote à la majorité en faveur de l'indépendance du Timor oriental le 30 août dernier. Mais, à ce jour, le peuple du Timor oriental n'a pas pu goûter à cette nouvelle indépendance, a-t-il déploré. Il a déclaré que l'Indonésie continue à être un acteur clé sur le plan régional et international. La communauté internationale doit continuer à aider le Gouvernement indonésien, a-t-il dit. Il s'est réjoui de la rapidité avec laquelle la communauté internationale a réagi à cette situation est espère que cela deviendra une norme à l'avenir. Son message est simple, a-t-il ajouté : la sagesse collective des membres de la Commission doit parvenir à mettre une fin immédiate à la violence au Timor oriental. En outre, les responsables de ces violences doivent être punis. Il a demandé que le Secrétaire général, en collaboration avec le Gouvernement indonésien, prenne d'urgence des mesures appropriées pour que les responsables de ces crimes soient traduits en justice.

M.CHRISTOPHER WESTDAL (Canada) a déclaré qu'il semble évident qu'il y a eu au Timor oriental une campagne systématique pour tuer de nombreux militants et dirigeants de la communauté pro-indépendantiste ainsi que des membres du clergé et pour terroriser la population. À l'heure actuelle, on ne sait où se trouvent bon nombre d'hommes au Timor oriental et l'on a rapporté des milliers de disparitions forcées au Haut Commissariat aux droits de l'homme. Le Canada appuie entièrement la position de la Haut-Commissaire selon laquelle il est nécessaire de recueillir des faits pour pouvoir faire la lumière sur ce qui s'est produit au Timor oriental, afin de traduire les responsables en justice. Le Canada salue l'engagement du Président Habibie à faire enquête sur les violations des droits de l'homme qui ont été commises. Mais la gravité des violations signalées indique clairement que la Commission des droits de l'homme de l'ONU se doit aussi d'agir. C’est pourquoi le Canada demande la nomination d'un rapporteur spécial ayant pour mandat de faire enquête et de présenter un rapport sur les violations au Timor oriental et occidental ainsi que de traiter de la question de la responsabilité individuelle. La Commission devrait aussi exhorter le Secrétaire général à créer une commission d'enquête sur les violations des droits de l'homme et du droit humanitaire qui serait également chargée de faire des recommandations en vue de traduire les responsables en justice.

Le représentant canadien a souligné que les actuels rapporteurs spéciaux de la Commission ont déjà signalé depuis plusieurs années des violations des droits de l'homme au Timor oriental. Face aux événements récents, ils devront renforcer leur examen de la situation au Timor oriental et occidental par l'entremise d'une mission conjointe dirigée par le rapporteur spécial qui, faut-il espérer, pourra être nommé par la Commission. Le représentant canadien a par ailleurs fait part de l'appui de son pays à une coopération technique accrue par le biais du Haut Commissariat aux droits de l'homme de façon à renforcer les valeurs liées aux droits de l'homme et afin de construire des institutions d'appui pour promouvoir la réconciliation dans la région. Le Canada encourage le Gouvernement indonésien à coopérer en vue d'atteindre cet objectif essentiel.

M. LUIS ALBERTO PADILLA(Guatemala) a rappelé que la souveraineté appelle aussi des devoirs, dont la protection des citoyens. Si un gouvernement manque à ses devoirs, il menace non seulement la paix et la sécurité nationale mais internationale également. Il ouvre la porte à l'intervention et aux sanctions internationales. Il s'est félicité de toutes les manifestations de bonne volonté du Président Habibie, dont la création d'une commission d'enquête pour traduire les responsables en justice. Cependant, la création d'une commission internationale est indispensable. Il faut par conséquent un mécanisme pour effectuer les enquêtes et établir les différentes responsabilités individuelles. L'idée de l'établissement d'un rapport, proposé par la Commission européenne, est tout à fait pertinente, a-t-il ajouté. Ceci permettrait d'obtenir une vision plus précise de ce qui s'est passé. Il faut prendre des mesures afin de dissuader d'autres foyers de tension dans le monde.

MME SAVITRI KUNADI (Inde) a rappelé que son pays s'est fermement engagé à protéger et promouvoir les droits de l'homme ainsi qu'à développer la coopération internationale en matière de droits de l'homme sur la base du dialogue. L'Inde a toujours été contre toute mesure qui pourrait remettre en cause l'impartialité des institutions chargées des droits de l'homme. L'Inde déplore les massacres et actes d'intimidation qui ont eu lieu au Timor oriental. Mais il faut reconnaître que, dès le départ, le Gouvernement indonésien a accordé sa coopération afin que la situation au Timor oriental soit sous contrôle. L'Inde émet des réserves quant à l'opportunité de convoquer la présente session de la Commission, estimant que toute action de la Commission pourrait être contre-productive et compliquer davantage une situation déjà complexe.

M. CARLOS AMAT FLORES(Cuba) a déclaré que son pays avait accueilli avec satisfaction les déclarations du gouvernement indonésien de respecter les accords tripartites du 5 mai. Cependant, Cuba sera tout à fait disposé, au moment opportun, à apporter son aide à la population du Timor tant que cela sera nécessaire, a-t-il ajouté. Mais il faut que le peuple du Timor oriental puisse accéder à son indépendance. Cuba estime que les actions de la communauté internationale doivent se centrer sur l'aide matérielle d'urgence pour répondre aux besoins de la population déplacée et veiller à l'établissement des conditions propices à leur retour au foyer. Il ne faut pas adopter de mesures qui mettraient en péril une réconciliation authentique et nécessaire du peuple du Timor oriental, a-t-il dit. Il appartient aux Timorais de déterminer sans ingérence extérieure leur forme de développement économique, sociale et culturelle, a-t-il ajouté. Une fois qu'un peuple est indépendant, il lui appartient de décider du type de coopération qu'il désire, à quel niveau et pour combien de temps.

M.MAN-SOON CHANG (République de Corée) a souligné que le référendum qui s'est tenu le 30 août dernier au Timor oriental a constitué un événement remarquable. Le Gouvernement indonésien a finalement accepté un accord auquel le pays s'était fermement opposé pendant longtemps. Malheureusement, après le référendum, des violations flagrantes des droits de l'homme ont été perpétrées par des milices anti-indépendantistes. La République de Corée a décidé de participer aux efforts déployés par les Nations Unies pour établir la paix dans le territoire. Il faut que la Commission des droits de l'homme de l'ONU définisse clairement un ensemble d'objectifs communs devant être atteints au Timor oriental, a souligné le représentant. À cet égard, il a souligné que la priorité devrait rester l'instauration de la paix et de la sécurité. Un autre objectif devrait être l'assistance humanitaire de base à l'ensemble de la population du Timor oriental. Un plan précis devrait être mis sur pied pour faciliter le retour des réfugiés dans leurs foyers et pour édifier une nation sur la base des résultats du référendum du 30 août. Les violations des droits de l'homme doivent faire l'objet d'enquêtes et être désormais prévenues.

M. IFTEKHAR AHMED CHOWDHURY(Bangladesh) a déclaré que son pays s'associait à la déclaration du représentant du groupe asiatique. Il a ajouté que le Bangladesh était toujours disposé à contribuer à la prévention de la violation des droits de l'homme. Il a tenu à souligner que le chevauchement des efforts des différentes institutions des Nations Unies pouvait être contre-productif. Nous sommes certains que les engagements pris par l'Indonésie seront respectés, a-t-il dit. À cette fin, l'Indonésie doit continuer de participer aux efforts déployés.

MME TEHMINA JANJUA (Pakistan) a rappelé que son pays avait clairement exprimé devant le Conseil de sécurité sa position en ce qui concerne la situation au Timor oriental. Le Gouvernement de l'Indonésie mérite d'être félicité par la communauté internationale pour son action au Timor oriental. Il a regretté les troubles qui ont suivi les résultats du scrutin du 30 août dernier. Le Conseil de sécurité continue de surveiller activement la situation au Timor oriental. Selon l'article 12 de la Charte des NationsUnies, lorsque le Conseil de sécurité s'occupe d'une situation particulière, l'Assemblée générale, et a fortiori tout autre organe de l'Organisation des NationsUnies, ne doit pas se saisir de la même question, sauf si le Conseil le demande. À ce stade, une décision de la Commission ne pourrait qu'aggraver la situation et rendre plus difficile encore la tâche du Gouvernement indonésien. La façon dont cette session de la Commission a été convoquée justifie les craintes du Pakistan en ce qui concerne le traitement des questions relatives aux droits de l'homme à travers le monde. S'il existe une question qui appelle une session extraordinaire de la Commission c'est bien la situation au Cachemire occupé par l'Inde où sont perpétrées d'importantes violations des droits de l'homme.

M.CELSO NUNES AMORIM (Brésil), s'est félicité de l'approche visionnaire de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, MmeMary Robinson. La violation des droits de l'homme au Timor oriental justifie la convocation de cette session extraordinaire, a-t-il estimé. Il y a une semaine, le représentant du Brésil au Conseil de sécurité s'est montré indigné des atrocités commises au Timor. Il faut respecter les résultats du scrutin du 5mai quels qu'ils soient, a-t-il ajouté. Les efforts pour garantir la sécurité sur l'île ont dégénéré. Le Brésil a pris une part active dans l'exercice de l'autodétermination du Timor oriental, a-t-il dit. Le Brésil appuie la cause du Timor oriental et souhaite un dialogue constructif avec les autorités indonésiennes, a-t-il dit. Il a ajouté que grâce à l'arrivée de la force internationale mandatée par le Conseil de sécurité, un processus positif pourra s'engager. Différents aspects doivent être étudiés comme la reconstruction économique du Timor oriental, a-t-il ajouté. Il a souhaité une transition stable, ce qui n'implique pas seulement le déplacement d'hommes en uniformes. La Haut-Commissaire aux droits de l'homme a un rôle à jouer dans la poursuite des coupables devant la justice. La communauté internationale a le droit et le devoir de permettre au Timor oriental de se développer harmonieusement, a-t-il conclu.

M.GIUSEPPE BERTELLO (Saint-Siège) a indiqué que le Saint-Siège a accueilli favorablement la décision de convoquer la présente session extraordinaire de la Commission. Il a rappelé que l'Église catholique n'a pas été épargnée par les événements qui se sont produits au Timor oriental. Elle a en effet payé un lourd tribut avec l'assassinat de prêtres, de religieuses et de responsables de ses communautés, ainsi qu'avec la destruction de ses églises et de ses structures. Quand la violence des milices anti-indépendantistes a éclaté, le Saint-Siège a insisté pour que les NationsUnies autorisent le déploiement d'une force internationale au Timor oriental parce que, dans les conditions actuelles, elle demeure le seul moyen d'arrêter les massacres et de rétablir un minimum d'ordre et de sécurité sur le territoire. Maintenant que la force internationale est sur place, il y a urgence à ce que l'aide humanitaire internationale puisse rejoindre rapidement les personnes déplacées et réfugiées qui risquent de mourir de faim et de maladie. La communauté internationale doit aussi veiller à leur protection et à leur retour dans des conditions de sécurité et de liberté. En outre, comme l'a souligné dans son rapport MmeMary Robinson, Haut-Commissaire aux droits de l'homme, l'établissement d'une commission d'enquête est une question prioritaire pour faire la lumière sur les événements et évaluer les responsabilités. Le dialogue et la réconciliation ne peuvent pas être solidement fondés sans la recherche sereine et impartiale de la justice et de la vérité.


Droit de réponse

Le représentant de l'Inde a noté que, même en cette session extraordinaire, le Pakistan n'avait pas été en mesure de renoncer à son attitude vis-à-vis de l'Inde. L'Inde a toujours estimé que le droit à l'autodétermination appartenait aux territoires sous tutelle. Le Pakistan a toujours recouru à la force et à la violence pour parvenir à ses desseins dans les territoires du Jammu-et-Cachemire. Il a demandé que le Pakistan renonce à ses comparaisons sans fondement avec le Timor oriental et procède à une réflexion sur son propre comportement.

Le représentant du Pakistan, en réponse à l'Inde, a déclaré que le règlement de la question du Timor oriental était un triomphe de la Charte de l'Organisation des NationsUnies. À part l'Inde, aucun pays au monde ne considère que le Cachemire fait partie intégrante de l'Inde. Le Cachemire est un territoire contesté reconnu comme tel par les Nations Unies. Ce qui est vrai pour le Timor oriental devrait être vrai pour le Cachemire, a-t-elle déclaré. Les prétendues élections au Cachemire ne devraient pas se substituer au droit à l'autodétermination du peuple cachemirien.

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