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Examen de la République de Corée au CAT : la définition de la torture, l’application de la Loi sur la sécurité nationale, la situation dans les prisons, ainsi que celle des transfuges nord-coréens figurent au nombre des préoccupations des experts
12 juillet 2024
Le Comité contre la torture (CAT, selon l’acronyme anglais) a examiné, hier matin et cet après-midi, le rapport présenté par la République de Corée au titre de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradant.
Rappelant que dans ses précédentes observations finales, le Comité avait recommandé au Gouvernement d'apporter les modifications nécessaires à la législation nationale afin d'y incorporer une définition du crime de torture conformément à la Convention, une experte a regretté que, sept ans plus tard, il n'y ait pas eu de progrès à cet égard. Il n’existe en République de Corée aucune loi ou amendement législatif qui prévoie des sanctions pour l'acte de torture défini à l'article 1 de la Convention, a-t-elle déploré.
S’agissant des garanties juridiques fondamentales, l’experte a par ailleurs relevé que, d'après certaines informations portées à l’attention du Comité, l'accès à un avocat pour les transfuges nord-coréens qui entrent en République de Corée est très difficile, voire inexistant. Elle s’est par ailleurs inquiétée du manque d’accès rapide aux soins médicaux pour les personnes détenues par la police.
La même experte a ensuite relevé que les articles 2 et 7 de la Loi relative à la sécurité nationale restent préoccupants compte tenu de leur formulation vague et de leur potentiel d'application arbitraire, ainsi que des allégations persistantes de la société civile concernant l'application arbitraire de cette Loi. Elle a en outre regretté que la République de Corée n’ait toujours pas ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention qui prévoit des inspections de sites et la mise en place de mécanismes nationaux de prévention.
En 2018, ont été signalés 2934 cas de violations des droits humains dans des bureaux d'enquête, des établissements correctionnels, des centres d'immigration et des centres de détention pour mineurs, mais seuls 71 cas, soit 2,4% du total, ont fait l’objet d’un suivi, a par ailleurs fait observer l’experte. Elle s’est en outre inquiétée que, selon certains rapports, le taux de reconnaissance des demandeurs d'asile [octroi du statut] soit faible. De nombreux migrants originaires de la République populaire démocratique de Corée, de la Chine et d'autres pays ont dénoncé des discriminations sociétales et n'ont pas toujours accès aux services de base, a-t-elle ajouté.
La situation des transfuges nord-coréens est une préoccupation particulière pour le Comité ainsi que pour d'autres organes de défense des droits de l'homme, a-t-il été souligné.
Un autre membre du Comité a relevé que la surpopulation carcérale est un problème de longue date en République de Corée ; il s’est notamment inquiété du peu d’espace accordé par détenu dans les cellules à occupation multiple, et a fait observer que selon plusieurs sources, le nombre officiel de décès en prison est sous-évalué. Cet expert s’est par ailleurs inquiété de la durée du recours à l'isolement cellulaire comme punition disciplinaire et a regretté le manque de soins médicaux appropriés dans les prisons, notamment pour les détenus atteints de maladie mentale.
Ce même expert a en outre déploré qu'un grand nombre de personnes souffrant de handicaps mentaux et psychosociaux − qui ne représentent pas une menace pour elles-mêmes ou pour autrui − soient placées contre leur gré dans des établissements psychiatriques. Les patients séjournant dans les institutions résidentielles pour personnes handicapées vivent dans des conditions très dures et déplorables, et le personnel les expose à la violence, à la négligence et aux mauvais traitements, a-t-il ajouté.
L’expert a ensuite indiqué que le Comité reconnaît et salue le moratoire de facto sur l'application de la peine de mort observé par l'État partie depuis 1997. Toutefois, les tribunaux continuent d'imposer la peine de mort et 59 personnes sont toujours condamnées à mort, a-t-il constaté.
Présentant le rapport de son pays, M. Jea Hyen Soung, Directeur général du Bureau des droits de l’homme du Ministère de la justice de la République de Corée, a déclaré que depuis l'examen du précédent rapport en 2017, le Gouvernement de la République de Corée a déployé des efforts concertés pour mettre en œuvre fidèlement les recommandations du Comité. En conséquence, des politiques efficaces aux niveaux législatif, exécutif, judiciaire et autres ont été mises en place pour prévenir les actes de torture, a-t-il affirmé.
S’agissant des garanties judiciaires fondamentales et de l'accès aux procédures judiciaires, M. Soung a indiqué que grâce à la mise en place du système d'information coréen des services de justice pénale [système KICS], la transparence de l'ensemble de la procédure judiciaire pénale a été renforcée et l'accès du public aux procédures judiciaires, amélioré.
Pour remédier à la surpopulation dans les établissements pénitentiaires, le Gouvernement a augmenté la capacité d'accueil des établissements pénitentiaires en construisant de nouveaux centres et en rénovant les installations vétustes, a par ailleurs fait valoir M. Soung.
Le chef de délégation a ensuite souligné qu’en 2018, le Gouvernement a modifié le décret d'application de la Loi relative à l’aide, à la protection et à l’installation des transfuges nord-coréens à l’effet de raccourcir la période de protection temporaire des transfuges nord-coréens de 180 à 90 jours à compter de leur entrée dans le pays.
Afin de lutter contre la violence à l'égard des travailleurs migrants, le Gouvernement effectue régulièrement des inspections de travail spéciales sur les lieux de travail afin de prévenir les violations des droits de l'homme à l'encontre des travailleurs étrangers, et il fournit des services de conseil, d'interprétation et d'éducation, a également fait valoir M. Soung. Il a en outre souligné que le Gouvernement a complètement révisé la précédente loi sur la santé mentale pour en faire la Loi sur l'amélioration de la santé mentale et le soutien aux services sociaux pour les malades mentaux, renforçant ainsi les conditions d'hospitalisation. En outre, le Gouvernement a créé la Commission d'examen de la légitimité de l'admission afin d'évaluer la pertinence du traitement effectué au cours du processus d'admission et d'hospitalisation d'office.
S’agissant des mesures visant à prévenir les actes de torture, le chef de la délégation a souligné que le Gouvernement garantit le droit des suspects de recevoir l'assistance d'un avocat pendant toutes les procédures d'enquête, qu'ils soient ou non en détention. M. Soung a par ailleurs fait valoir que le Gouvernement assure plusieurs mécanismes institutionnels pour le signalement et le dépôt de plaintes concernant les violations des droits de l'homme commises dans les centres de détention.
M. Soung a d’autre part fait savoir qu’afin d'éviter des périodes de filtrage prolongées pour les demandeurs d'asile, le Gouvernement a notamment augmenté le nombre d'agents dédiés au processus de filtrage ; ont en outre été publiées en 2023 des Lignes directrices sur la réception et le traitement des appels en matière de demande d'asile, afin d'améliorer la transparence et l'équité du processus.
La délégation de la République de Corée était également composée, entre autres, de nombreux représentants du Ministère de la justice, du Ministère de l’éducation, du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de la défense nationale, du Ministère de l’emploi et du travail, et du Ministère de la santé et du bien-être.
Au cours du dialogue, la délégation a notamment fait savoir que le Gouvernement est d’avis que tous les transfuges nord-coréens doivent être acceptés sur le sol de la République de Corée et les délits dont ils sont coupables être jugés par la justice nationale. Les autorités souhaitent qu’il n’y ait plus de renvoi [de transfuge] à l’avenir pour quelque motif que ce soit, a insisté la délégation.
La délégation a par ailleurs déclaré qu’il n’y avait aucune raison d’amender la Loi relative à la sécurité nationale. Les définitions figurant dans cette Loi ne sont ni trop vagues ni trop larges, a-t-elle affirmé, avant de souligner que la Cour suprême et la Cour constitutionnelle avaient reconnu la constitutionnalité de cette Loi. Cette Loi ne saurait être mal utilisée pour mettre à mal les libertés démocratiques ou pour museler les partis d’opposition, a assuré la délégation, avant d’ajouter qu’il n’y a pour l’heure aucune personne détenue en vertu de cette Loi.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la République de Corée et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 26 juillet prochain.
Le Comité entamera mardi 16 juillet, à 10 heures, l’examen du rapport de la Côte d’Ivoire.
Examen du rapport de la République de Corée
Le Comité est saisi du sixième rapport périodique de la République de Corée (CAT/C/KOR/6), établi sur la base d’une liste de points à traiter qui avait été soumise au pays par le Comité.
Présentation
Présentant le rapport de son pays, M. Jea Hyen SOUNG, Directeur général du Bureau des droits de l’homme du Ministère de la justice de la République de Corée, a déclaré que depuis l'examen des troisième à cinquième rapports périodiques en 2017, le Gouvernement de la République de Corée a déployé des efforts concertés pour mettre en œuvre fidèlement les recommandations du Comité. En conséquence, des politiques efficaces aux niveaux législatif, exécutif, judiciaire et autres ont été mises en place pour prévenir les actes de torture, a-t-il affirmé.
S’agissant des garanties judiciaires fondamentales et de l'accès aux procédures judiciaires, M. Soung a indiqué que grâce à la mise en place du système d'information coréen des services de justice pénale [système KICS], les informations relatives à la justice pénale sont partagées entre les organismes à chaque étape du processus de justice pénale, et les informations nécessaires sont fournies aux personnes liées à une affaire, telles que les suspects, les représentants légaux et les avocats. Cela renforce la transparence de l'ensemble de la procédure judiciaire pénale et améliore l'accès du public aux procédures judiciaires, a-t-il souligné.
S’agissant des conditions de détention, M. Soung a indiqué que pour remédier à la surpopulation dans les établissements pénitentiaires, le Gouvernement a augmenté la capacité d'accueil des établissements pénitentiaires en construisant de nouveaux centres et en rénovant les installations vétustes.
S’agissant des droits des transfuges nord-coréens, le chef de la délégation a souligné qu’en 2018, le Gouvernement a modifié le décret d'application de la Loi relative à l’aide, à la protection et à l’installation des transfuges nord-coréens à l’effet de raccourcir la période de protection temporaire des transfuges nord-coréens de 180 à 90 jours à compter de leur entrée dans le pays.
En outre, M. Soung a indiqué que suite à la construction des nouveaux centres de détention, toutes les cellules de substitution ont été abolies à partir de 2020.
Le chef de la délégation a par ailleurs indiqué que la disposition de la loi civile relative au droit à des mesures disciplinaires a été supprimée afin de clarifier l'interdiction des châtiments corporels infligés aux enfants.
En 2020, a poursuivi M. Soung, le Gouvernement a modifié la loi relative à la gestion du personnel militaire afin d'abolir le système de « détention au poste de garde », qui était une forme de mesure disciplinaire.
Afin de lutter contre la violence à l'égard des travailleurs migrants, le Gouvernement effectue régulièrement des inspections de travail spéciales sur les lieux de travail afin de prévenir les violations des droits de l'homme à l'encontre des travailleurs étrangers, et il fournit des services de conseil, d'interprétation et d'éducation, a fait valoir M. Soung.
Il a également souligné que le Gouvernement a complètement révisé la précédente loi sur la santé mentale pour en faire la Loi sur l'amélioration de la santé mentale et le soutien aux services sociaux pour les malades mentaux, renforçant ainsi les conditions d'hospitalisation. En outre, le Gouvernement a créé la Commission d'examen de la légitimité de l'admission afin d'évaluer la pertinence du traitement effectué au cours du processus d'admission et d'hospitalisation d'office.
S’agissant des mesures visant à prévenir les actes de torture, le chef de la délégation a souligné que le Gouvernement garantit le droit des suspects de recevoir l'assistance d'un avocat pendant toutes les procédures d'enquête, qu'ils soient ou non en détention.
Concernant les plaintes faisant état de torture et de mauvais traitements dans les lieux de privation de liberté, M. Soung a indiqué que le Gouvernement assure plusieurs mécanismes institutionnels pour le signalement et le dépôt de plaintes concernant les violations des droits de l'homme commises dans les centres de détention, notamment un centre d'assistance téléphonique pour les violations des droits de l'homme au sein du Ministère de la justice.
En outre, la Commission nationale des droits de l'homme, en tant qu'institution nationale indépendante des droits de l'homme, reçoit les plaintes des détenus ou effectue d'office des inspections sur place dans les centres de détention, et elle peut recommander aux agences gouvernementales des améliorations ou des corrections aux politiques existantes, a précisé M. Soung.
En juillet de cette année, le Gouvernement a lancé le Centre national pour la guérison des traumatismes issus de la violence d'État, afin de guérir la souffrance psychologique des victimes de la violence d'État et de leurs familles et de les aider à retrouver une vie saine, a d’autre part indiqué le chef de la délégation.
Il a ensuite fait savoir qu’afin d'éviter des périodes de filtrage prolongées pour les demandeurs d'asile, le Gouvernement a augmenté le nombre d'agents dédiés au processus de filtrage et a établi et publié, en 2023, les Lignes directrices sur la réception et le traitement des appels en matière de demande d'asile, afin d'améliorer la transparence et l'équité du processus.
M. Soung a par ailleurs souligné que le Gouvernement s'attaque à de nouveaux types de crimes contre les femmes et les enfants en modifiant les lois pertinentes et applique strictement la loi pour lutter contre la violence sexiste.
Il a également fait état d’un certain nombre d’améliorations concernant le système de demande d'asile et les centres de détention pour étrangers, afin d'assurer notamment un traitement plus humain des étrangers hébergés dans ces centres.
Depuis le 1er janvier 2023, le Gouvernement applique la Loi contre la traite des personnes afin d'éradiquer la traite des personnes et d'assurer une réponse globale et systématique dans ce domaine, a également souligné M. Soung.
Enfin, le chef de la délégation a indiqué que le Gouvernement s'efforce en permanence de promouvoir une culture militaire saine en s'efforçant d'éradiquer la violence et la violence sexuelle dans l'armée et en mettant en place des systèmes de protection des droits de l'homme.
Questions et observations des membres du Comité
MME ANA RACU, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de la République de Corée, a rappelé dans ses dernières observations finales, le Comité avait recommandé au Gouvernement d'apporter les modifications nécessaires à la législation nationale afin d'y incorporer une définition du crime de torture conformément à la Convention. Or, sept ans plus tard, il n'y a pas eu de progrès à cet égard, a-t-elle regretté. Elle a ainsi relevé qu’il n'existe aucune loi ou amendement législatif qui prévoie des sanctions pour l'acte de torture défini à l'article 1 de la Convention contre la torture.
Mme Racu a d’autre part demandé des informations sur un projet de loi spécifique concernant l'imprescriptibilité de certains crimes qui est actuellement en cours d'examen à l'Assemblée nationale.
L’experte a ensuite posé une série de questions sur la mise en œuvre des garanties juridiques fondamentales, notamment pour ce qui concerne l’accès à un avocat. D'après certaines informations portées à l’attention du Comité, l'accès à un avocat pour les transfuges nord-coréens qui entrent en République de Corée est très difficile, voire inexistant, a-t-elle relevé. Elle a en outre observé que les informations qui figurent dans le rapport du pays concernant l'accès à un médecin lors de la garde à vue sont assez pauvres. Elle s’est par ailleurs inquiétée du manque d’accès rapide aux soins médicaux pour les personnes détenues par la police. Elle a également relevé un manque d’information sur le nombre de détenus ayant reçu une aide médicale et présenté des blessures ou des signes de torture. Dans ce contexte, elle a demandé combien de cas de blessures, d'exactions, de mauvais traitements et de torture ont été signalés au cours des quatre dernières années.
Mme Racu a ensuite relevé que les articles 2 et 7 de la Loi relative à la sécurité nationale restent préoccupants compte tenu de leur formulation vague et de leur potentiel d'application arbitraire, ainsi que des allégations persistantes de la société civile concernant l'application arbitraire de cette Loi. Elle s’est aussi inquiétée que les institutions nationales des droits de l’homme ou les ONG de défense des droits de l'homme n'aient pas accès aux lieux de détention où sont détenues les personnes arrêtées en vertu de la Loi relative à la sécurité nationale.
Bien que la Commission nationale des droits de l'homme ait obtenu depuis 2004 le statut « A » d’accréditation auprès de l'Alliance mondiale des institutions des droits de l'homme (GANHRI), certaines préoccupations subsistent, s’agissant notamment du fait que cette Commission n’a pas accès à tous les lieux de détention, a poursuivi l’experte. Elle a souhaité savoir comment les recommandations de la Commission nationale des droits de l'homme sont mises en œuvre.
Par ailleurs, l’experte a regretté que la République de Corée n’ait toujours pas ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention qui prévoit des inspections de sites et la mise en place de mécanismes nationaux de prévention.
Mme Racu a ensuite souhaité en savoir davantage sur les mesures prises afin de mettre en place un mécanisme de plainte efficace dans les lieux de détention, et sur l’information fournie aux détenus quant à la manière pour eux de déposer plainte d'une manière qui inspire confiance. Elle a également souhaité recevoir des informations sur le centre de signalement des violations des droits de l'homme.
En 2018, ont été signalés 2934 cas de violations des droits humains dans des bureaux d'enquête, des établissements correctionnels, des centres d'immigration et des centres de détention pour mineurs, mais seuls 71 cas, soit 2,4% du total, ont fait l’objet d’un suivi, s’est inquiétée Mme Racu.
S’agissant de la procédure de non-refoulement et de la protection des réfugiés et des migrants, l’experte s’est inquiétée que, selon certains rapports, le taux de reconnaissance des demandeurs d'asile [octroi du statut] soit faible (seulement 1,6% de janvier à juillet 2023). Elle a également relevé que de nombreux migrants originaires de la République populaire démocratique de Corée, de la Chine et d'autres pays ont dénoncé des discriminations sociétales et n'ont pas toujours accès aux services de base. Mme Racu a aussi relevé que les titulaires d'un permis de séjour humanitaire temporaire n'ont pas le même accès aux services de base que les réfugiés et dépendent fortement des organisations non gouvernementales pour se loger et obtenir un soutien.
L’experte a en outre rappelé que la situation des transfuges nord-coréens est une préoccupation particulière pour le Comité ainsi que pour d'autres organes de défense des droits de l'homme. Elle a ainsi demandé des informations sur le nombre de personnes originaires de République populaire démocratique de Corée détenues ou expulsées de la République de Corée.
Mme Racu a ensuite déploré les informations faisant état d’un grand nombre de personnes dans l’armée qui ont des problèmes mentaux liés aux pressions très importantes au cours de l’exécution de leurs fonctions. Elle s’est également inquiétée d’informations faisant état d’un grand nombre de violences sexuelles au sein de l’armée.
L’experte s’est par ailleurs enquise des mesures prises pour que les « femmes de réconfort » obtiennent réparation. Il s’agit toujours d’une blessure ouverte pour ces femmes, a-t-elle insisté.
M. PETER VEDEL KESSING, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de la République de Corée, a demandé des informations sur les formations des agents de l'État qui entrent en contact avec des personnes privées de liberté. Il a par ailleurs relevé que la surpopulation carcérale est un problème de longue date en République de Corée ; aussi, a-t-il souhaité savoir si l'État partie avait réussi à la réduire. L’expert s’est en outre inquiété du peu d’espace accordé par détenu dans les cellules à occupation multiple – une surface bien en deçà des normes internationales, a-t-il souligné.
M Kessing a ensuite voulu savoir si la République de Corée envisageait toujours d'abaisser l'âge de la responsabilité pénale à 13 ans.
L’expert s’est par ailleurs inquiété du recours à l'isolement cellulaire comme punition disciplinaire d’une durée de 30 jours pouvant être prolongée à 45 jours. Le Comité a été informé qu'il existe plusieurs cas où des détenus ont été placés à l'isolement à titre de mesure disciplinaire pendant plus de 100 jours, a-t-il indiqué.
L’expert a d’autre part indiqué que selon plusieurs sources, le nombre officiel de décès en prison (36) est sous-évalué. Aussi, a-t-il demandé des informations statistiques sur le nombre de détenus gravement malades qui décèdent peu de temps après avoir été libérés suite à une condamnation [finalement] avec sursis.
L’expert a aussi regretté le manque de soins médicaux appropriés dans les prisons, notamment pour les détenus atteints de maladie mentale.
M. Kessing a aussi souhaité obtenir des informations statistiques pour les années 2022 et 2023 concernant le nombre de détenus qui ont déposé plainte pour mauvais traitements en prison.
L’expert a ensuite indiqué que le Comité reconnaît et salue le moratoire de facto sur l'application de la peine de mort observé par l'État partie depuis 1997. Toutefois, les tribunaux continuent d'imposer la peine de mort et 59 personnes sont toujours condamnées à mort, a-t-il constaté. Il s’est ainsi étonné que le Gouvernement continue de soutenir le recours à la peine de mort tout en votant à l'Assemblée générale des Nations unies en faveur de résolutions appelant tous les États à instaurer un moratoire sur les exécutions en vue d'abolir la peine de mort.
M. Kessing a par ailleurs déploré qu'un grand nombre de personnes souffrant de handicaps mentaux et psychosociaux − qui ne représentent pas une menace pour elles-mêmes ou pour autrui − soient placées contre leur gré dans des établissements psychiatriques. La Commission nationale des droits de l'homme a reçu entre 2010 et 2019 près de 23 000 plaintes dont la plupart concernaient des violations des droits de l'homme dans les hôpitaux psychiatriques, a-t-il observé.
Les patients qui séjournent dans les institutions résidentielles pour personnes handicapées vivent dans des conditions très dures et déplorables, et le personnel les expose à la violence, à la négligence et aux mauvais traitements, s’est en outre inquiété l’expert.
Enfin, M. Kessing s’est enquis du nombre de personnes ayant obtenu réparation en 2022 et 2023 après avoir été exposées à la torture ou à d'autres formes de mauvais traitements.
Réponses de la délégation
La délégation a indiqué que la République de Corée avait mené une étude approfondie s’agissant de l’éventuelle ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention, dont il est ressorti que certaines dispositions de ce Protocole pourraient entrer en contradiction avec la législation actuelle du pays. C’est pourquoi le Gouvernement estime que l’utilisation des mécanismes existants en vertu du droit interne est la solution qui convient actuellement [pour ce qui concerne la prévention de la torture]. Le Ministère de la justice et la Commission nationale des droits de l’homme effectuent des inspections et mènent des enquêtes dans les lieux de détention, a fait valoir la délégation, avant d’ajouter que le Code de procédure pénale et d’autres textes de loi garantissent le droit du détenu de contester sa détention.
La Commission nationale des droits de l’homme est autorisée par la loi à effectuer des visites et des enquêtes dans tous les lieux de détention ou dans les centres psychiatriques, que ce soit suite à une plainte ou de son propre chef, a par la suite précisé la délégation, avant de souligner qu’il n’y a eu aucune requête d’enquête dans les centres pour transfuges nord-coréens. Toutes les personnes privées de liberté peuvent porter plainte pour torture ou mauvais traitements auprès de la Commission, a ajouté la délégation.
S’agissant de la définition de la torture, la délégation a indiqué que dans la loi actuelle, toute forme de torture est passible de sanction. Les dispositions de la loi pénale prévoient l’application de l’interdiction constitutionnelle de la torture, a-t-elle insisté.
La délégation a d’autre part souligné que les crimes les plus graves, notamment la violence d’État, les crimes contre l’humanité ou le génocide, sont imprescriptibles.
En République de Corée, l’assistance d’un avocat est garantie à toutes les étapes de la procédure d’enquête, que le suspect soit détenu ou non. Toutefois, conformément au Code de procédure pénale, si l’avocat a entravé l’enquête ou qu’il y a un risque de destruction de preuves, sa présence peut être restreinte dans des circonstances exceptionnelles, a indiqué la délégation.
La délégation a ajouté qu’en 2022, l’Assemblée nationale avait voulu intégrer le droit à un conseil dans la procédure prévue dans le cas des transfuges nord-coréens ; mais la proposition a été rejetée.
Lorsqu’il y a une enquête sur un transfuge nord-coréen, l’enquêteur explique le contenu de l’enquête à la personne qui en fait l’objet, a par la suite indiqué la délégation. Les transfuges mineurs peuvent être accompagnés d’une personne de confiance, a-t-elle précisé. Les salles d’interrogatoire ont été améliorées, a-t-elle ajouté. Les demandeurs ont accès aux services de santé et de santé mentale durant la période d’adaptation, a d’autre part fait valoir la délégation, avant d’expliquer que la Constitution prévoit que lorsqu’un transfuge demande une protection au Gouvernement, il doit passer par un centre d’éducation et à la fin de ce processus, la protection lui est accordée, après quoi le transfuge est reconnu comme citoyen de la République de Corée.
En novembre 2019, il y a eu un incident avec deux transfuges qui se sont rendu coupables d’homicide et ont alors été renvoyés en « Corée du Nord », a indiqué la délégation. Le Gouvernement est d’avis que tous les transfuges nord-coréens doivent être acceptés sur le sol de la République de Corée et les délits dont ils sont coupables doivent être jugés par la justice nationale. Les autorités souhaitent qu’il n’y ait plus de renvoi [de transfuge] à l’avenir pour quelque motif que ce soit, a insisté la délégation. La loi sur les transfuges a été amendée récemment pour renforcer les droits de ces personnes, a ajouté la délégation.
S’agissant de l’aide juridictionnelle gratuite, la délégation a indiqué que le Code de procédure pénale prévoit un système de nomination d’avocat pour la défense. Lorsque des suspects sont détenus, ils peuvent, en fonction de leur revenu, recevoir une aide juridictionnelle ; et les personnes vulnérables peuvent obtenir une aide juridictionnelle gratuite sans condition, a expliqué la délégation.
S’agissant des services médicaux dans les lieux de détention, la délégation a indiqué que le Code de procédure pénale prévoit que si un détenu demande à voir un médecin (ou si sa famille demande à ce qu’il soit vu par un médecin), cette demande « dans la mesure du possible » doit lui être accordée. Les détenus participent au moins une fois par année à un examen médical, a également souligné la délégation, assurant que le droit à la santé est respecté dans les centres de détention du pays. Des examens médicaux sont effectués sur tous les nouveaux détenus et des tests sanguins sont réalisés afin de déceler certaines maladies, a par la suite insisté la délégation.
Le Code de conduite de la police est axé sur les droits de l’homme, a en outre souligné la délégation. Il prévoit que la police ne peut tolérer ou pratiquer des actes de torture et de mauvais traitements. Les policiers sont formés sur le principe de prohibition de la torture, a insisté la délégation.
Tous les agents qui travaillent dans les centres de privation de liberté sont par ailleurs formés aux Règles Mandela, a ajouté la délégation.
S’agissant des mécanismes de plainte dans les lieux de privation de liberté, la délégation a indiqué que tout détenu peut s’adresser à la Commission nationale des droits de l’homme, qui peut effectuer une enquête sur place et tenir des entretiens confidentiels avec les détenus. Si la Commission reconnaît qu’il y a eu des faits illicites, le Bureau du Procureur général reçoit le dossier. La Commission peut aussi recommander, aux autorités concernées, des mesures pour améliorer la situation des détenus. Par ailleurs, certaines organisations non gouvernementales sont autorisées à effectuer des visites dans les prisons, a précisé la délégation.
Toute victime de torture peut déposer une plainte auprès du Centre de plaintes du Ministère de la justice, qui gère une ligne d’urgence disponible 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24, a par la suite ajouté la délégation. Elle a reconnu que ce Centre ne recevait pas beaucoup de plaintes il y a quelques années, mais a indiqué qu’actuellement, il était mieux connu et en recevait davantage.
S’agissant de la surpopulation carcérale, la délégation a indiqué que le pays avait procédé à la construction de nouveaux centres de détention et à la rénovation de bâtiments déjà existants. Depuis 2016, la capacité carcérale du pays a été augmentée de 3000 unités, a-t-elle précisé. Les projets de construction de nouveaux centres de détention sont retardés en raison de conflits avec les populations locales, a fait savoir la délégation, avant d’ajouter que des référendums sont organisés par certaines localités afin de permettre l’implantation de nouveaux centres.
La délégation a par ailleurs indiqué que les directives en vigueur spécifient que la surface par détenu doit être de 2,58 mètres carrés. Toutefois, au sein des nouveaux centres construits, cette surface est étendue à 3,04 mètres carrés.
La Cour suprême a reconnu que les détenus peuvent obtenir réparation en raison de la surpopulation carcérale, a ajouté la délégation.
S’agissant de l’isolement comme sanction disciplinaire, la délégation a souligné que le Gouvernement avait revu en 2024 la loi relative à l’exécution des peines et au traitement des détenus. Auparavant, il n’y avait pas de restriction à la durée de l’isolement, mais maintenant, la période d’isolement ne peut pas dépasser 45 jours, a-t-elle précisé. Le Gouvernement s’est basé sur différents exemples à l’étranger pour modifier cette loi afin qu’elle soit en accord avec les normes internationales, a expliqué la délégation, avant d’indiquer qu’en 2022, le nombre de détenus placés à l’isolement comme sanction disciplinaire a été de 19 000.
La délégation a déclaré qu’il n’y avait aucune raison d’amender la Loi relative à la sécurité nationale. Les définitions figurant dans cette Loi ne sont ni trop vagues ni trop larges, a-t-elle affirmé. Par ailleurs, la Cour suprême et la Cour constitutionnelle ont reconnu la constitutionnalité de cette Loi, a-t-elle fait valoir, avant de rappeler qu’il existe une jurisprudence sur l’application de l’article 7 de cette Loi. Cette Loi ne saurait être mal utilisée pour mettre à mal les libertés démocratiques ou pour museler les partis d’opposition, a assuré la délégation. Elle a par la suite fait savoir qu’il n’y a pour l’heure aucune personne détenue en vertu de cette Loi.
En ce qui concerne l’âge de la responsabilité pénale, la délégation a indiqué que les autorités envisagent de modifier le Code pénal et d’abaisser cet âge de 14 à 13 ans. Les personnes âgées de 13 ans représentent une part importante des auteurs de crimes commis par les mineurs, a fait observer la délégation. Toutefois, cette réforme ne prévoit pas une privation systématique de liberté pour les mineurs en conflit avec la loi, a-t-elle précisé.
La délégation a d’autre part indiqué que toutes les personnes hospitalisées qui estiment avoir subi des violations peuvent porter plainte et demander réparation. Des brochures adaptées sont distribuées, entre autres, à tous les patients des hôpitaux psychiatriques concernant ces droits.
S’agissant de la peine de mort, la délégation a fait observer que le pays participait à la campagne internationale en faveur d’un moratoire mondial sur la peine de mort. L’abolition de la peine de mort en République de Corée est une question très sérieuse qui est évaluée par les plus hautes personnalités du pays et qui doit [pour se faire] être acceptée socialement par la population, a déclaré la délégation.
La délégation a d’autre part reconnu que le taux d’acceptation des demandes de statut de réfugié peut être considéré comme relativement faible. Elle a néanmoins tenu à préciser que pour les ressortissants de certains pays, il n’est pas nécessaire de passer par cette procédure pour être accepté dans le pays. Elle a également présenté les différents services offerts aux requérants étrangers en attente du traitement de leur dossier.
Le Gouvernement œuvre à améliorer l’équité dans le traitement des dossiers des demandes de statut de réfugié, notamment avec le soutien du Haut-Commissariat pour les réfugiés, a par ailleurs indiqué la délégation.
La délégation a souligné que l’armée faisait tout son possible pour prévenir les mauvais traitements et les suicides [en son sein] et avait mis en place un système complet de prévention du suicide. Pour protéger la vie des militaires, deux fois par an sont organisées à leur attention des formations concernant la prévention du suicide. Des centaines de conseillers et de spécialistes ont aussi été formés pour conseiller et assurer le suivi psychologique des victimes de violence, notamment de violences sexuelles au sein de l’armée. Toutes les plaintes pour torture, mauvais traitements ou abus provenant de militaires sont confidentielles, a ajouté la délégation.
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Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel.
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