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Examen de l’Espagne au Comité contre la torture : des experts s’inquiètent de la détention au secret ainsi que d’allégations de mauvais traitements et d’usage excessif de la force lors d’arrestations
21 juillet 2023
Le Comité contre la torture (CAT) a examiné, hier matin et cet après-midi, le rapport périodique soumis par l’Espagne au titre de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Pendant cet examen, une experte membre du Comité a estimé que la définition du crime de torture dans le Code pénal espagnol ne reflétait pas pleinement la définition donnée par l’article premier de la Convention, en particulier parce que ce crime ne semble pas être puni de peines qui tiennent compte de sa gravité. Par ailleurs, a ajouté l’experte, il apparaît qu’en dépit des amendements apportés au cadre juridique du régime de détention au secret, il persiste potentiellement des limitations considérables aux garanties fondamentales qui devraient être offertes à toutes les personnes détenues : cela justifie, a affirmé l’experte, que le régime de détention au secret soit supprimé de la législation espagnole.
D’autre part, selon les informations reçues par le Comité, l’Espagne ne disposerait pas d’organe indépendant habilité à enquêter sur les allégations d’actes de torture et de mauvais traitements commis par des agents des forces de l’ordre. Le Comité, a-t-il été signalé à ce propos, a reçu un nombre important d’allégations de mauvais traitements et d’usage excessif de la force lors d’arrestations, y compris contre des manifestants lors des événements survenus en Catalogne en octobre 2017.
La délégation venue présenter le rapport sous la conduite de la Représentante permanente de l’Espagne auprès des Nations Unies à Genève, Mme Aurora Díaz-Rato Revuelta, a été priée de décrire le mandat du Défenseur du peuple en tant que Mécanisme national de prévention de la torture et, compte tenu des « nombreuses allégations » sur la situation des migrants dans les centres de détention pour migrants et réfugiés, à quelle fréquence le Mécanisme effectuait des visites dans ces lieux.
D’autres préoccupations ont été exprimées s’agissant de la détention des femmes dans des prisons à prédominance masculine, sans prise en compte de leurs besoins spécifiques ; de l’accès aux soins médicaux dans les centres de détention ; de l’utilisation de tasers par la police ; ou encore de cas de retours sommaires, qui ne donnent pas aux personnes la possibilité de solliciter une protection internationale à Ceuta et Melilla, notamment.
Présentant le rapport, Mme Díaz-Rato Revuelta, a assuré que l’incrimination de la torture était pleinement conforme à la Convention et que les garanties procédurales les plus élevées s’appliquaient en Espagne. La torture constitue un crime imprescriptible lorsqu’il s’inscrit dans une attaque généralisée ou systématique contre la population civile, a-t-elle précisé, et le système judiciaire espagnol est doté des moyens nécessaires pour traiter les allégations de mauvais traitements, y compris dans les prisons.
D’autre part, a fait savoir Mme Díaz-Rato Revuelta en réponse à des recommandations antérieures du Comité, l’Espagne réglemente désormais le traitement des données des détenus et a considérablement réduit le recours aux moyens de contrainte mécanique. Elle améliore également les conditions de vie des femmes détenues et de leur famille, en plus d’avoir élargi le concept de « violence de genre » à toutes les formes de violence envisagées dans la Convention d’Istanbul.
Outre Mme Díaz-Rato Revuelta, la délégation était composée de plusieurs représentants des Ministères espagnols des affaires étrangères, de la justice, de l’intérieur, de l’égalité ainsi que de l’inclusion, de la sécurité sociale et des migrations.
Pendant le débat avec les membres du Comité, la délégation a précisé que le Mécanisme national de prévention avait pour mandat de réaliser des visites inopinées dans tous les centres de détention. S’agissant de l’isolement cellulaire, la délégation a relevé que des modifications apportées à la loi avaient modifié les règles très strictes de l’isolement, qui est de plus soumis à l’autorité judiciaire, a précisé la délégation. Elle a enfin assuré que l'Espagne ne pratiquait aucune expulsion sommaire : tout retour ou expulsion vers l’Algérie ou le Maroc se fait avec toutes les garanties de droit, dont ceux contenus dans l’accord de 1992 entre l’Espagne et le Maroc.
Lors de sa prochaine réunion publique, lundi 24 juillet à 11 heures, le Comité se penchera sur le suivi de ses observations finales et des plaintes ainsi que sur la question des représailles.
Examen du rapport de l’Espagne
Le Comité contre la torture est saisi du septième rapport périodique de l’Espagne(CAT/C/ESP/7), qui contient les réponses de l'État partie à une liste de points à traiter établie par le Comité.
Présentation du rapport
Le rapport a été présenté par MME AURORA DÍAZ-RATO REVUELTA, Représentante permanente de l’Espagne auprès des Nations Unies à Genève. Évoquant d’abord plusieurs recommandations faites par le Comité lors du précédent examen de son pays, en 2015, Mme Díaz-Rato Revuelta a souligné que l’incrimination de la torture actuellement en vigueur en Espagne était pleinement conforme aux exigences de la Convention et que les garanties procédurales les plus élevées s’appliquaient. Le délai de prescription pour crime de torture est de 15 ans, ce crime étant imprescriptible s’il s’inscrit dans une attaque généralisée ou systématique contre la population civile. Par ailleurs, l’isolement cellulaire est réglementé et ne peut pas concerner les mineurs de moins de 16 ans, a précisé Mme Díaz-Rato Revuelta.
La cheffe de la délégation a ensuite assuré que le système judiciaire espagnol était doté des moyens nécessaires pour traiter de manière efficace les dénonciations de mauvais traitements. Ainsi, les membres du corps judiciaire et du ministère public reçoivent des formations spécifiques, et disposent de ressources adéquates, pour mener à bien les enquêtes nécessaires afin d'apporter la meilleure réponse pénale possible.
La loi de 2015 sur les victimes d’actes criminels introduit des régimes de protection qui tiennent compte de la situation et des particularités de certaines catégories de victimes, a en outre relevé Mme Díaz-Rato Revuelta.
Depuis la mise en place en 2016 du premier système d’enregistrement des plaintes pour mauvais traitements dans les prisons, le Secrétariat général des établissements pénitentiaires a lancé des initiatives pour améliorer les enquêtes et leur suivi, de même que pour faciliter leur traitement statistique, a indiqué la cheffe de la délégation.
En réponse à d’autres recommandations du Comité, l’instruction 4/2022 réglemente désormais le traitement des données des personnes privées de liberté obtenues par la vidéosurveillance dans les prisons, a également indiqué la Représentante permanente. Par ailleurs, le recours aux moyens de contrainte mécanique a été considérablement réduit depuis la fin de 2018.
En réponse à une observation du Comité sur le problème de la surpopulation dans les centres de séjour temporaire pour immigrants (CETI), l’Espagne a amélioré les conditions de vie des femmes et de leur famille dans ces centres, et il n’y a plus de problèmes de surpeuplement, a déclaré Mme Díaz-Rato Revuelta.
Après avoir présenté les mesures prises pour mieux identifier les victimes de la traite des personnes, la cheffe de la délégation a précisé qu’en ce qui concerne la traite à des fins d’exploitation sexuelle, un décret-loi royalprévoit l’approbation d’un nouveau modèle d’accréditation du statut de victime de la traite des êtres humains ou de l’exploitation sexuelle. Par ailleurs, une attention particulière est accordée aux risques d’exploitation sexuelle et de traite des mineurs faisant l’objet de mesures de protection.
De plus, avec l’entrée en vigueur de la loi organique 10/2022 sur la garantie globale de la liberté sexuelle, le concept de « violence de genre » a été élargi à toutes les formes de violence envisagées dans la Convention d’Istanbul, comblant ainsi la lacune existante dans la protection complète contre toutes les formes de violence à l’égard des femmes, a dit Mme Díaz-Rato Revuelta. La même loi sanctionne les mutilations génitales féminines, les mariages forcés, le harcèlement à connotation sexuelle et la traite à des fins d’exploitation sexuelle en tant que violences sexuelles. Le champ d’application de la loi inclut le féminicide sexuel, entendu comme l’homicide ou le meurtre de femmes et de filles lié à des comportements définis comme des violences sexuelles.
Questions et observations des membres du Comité
MME ANA RACU, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de l’Espagne, a relevé que, selon certains observateurs, la définition du crime de torture dans le Code pénal espagnol ne reflète toujours pas pleinement la définition de l’article premier de la Convention. Ainsi, l’imprescriptibilité ne concerne que les cas où les actes de torture constituent des crimes contre l’humanité ; de plus, le crime de torture ne semble pas être puni de peines adéquates qui tiennent compte de sa gravité et de son statut de crime au regard du droit international, a relevé Mme Racu.
L’experte a par ailleurs souhaité avoir davantage d’information sur le mandat du Défenseur du peuple en tant que Mécanisme national de prévention (MNP) de la torture. Compte tenu des « nombreuses allégations » sur la situation des migrants dans les centres de détention pour migrants et réfugiés, elle a souhaité savoir à quelle fréquence le MNP effectue des visites dans ces lieux.
Malgré les amendements apportés au cadre juridique du régime de détention au secret pour limiter son champ d’application, Mme Racu a indiqué que le Comité tenait à réaffirmer que le régime de détention au secret continue de limiter potentiellement considérablement les garanties fondamentales qui devraient être offertes à toutes les personnes détenues. Si le Comité connaît les raisons historiques de l’introduction du régime de détention au secret dans la législation espagnole, le Comité estime que, par principe, la possibilité d’imposer le régime de détention au secret devrait être purement et simplement supprimée de la législation espagnole, a dit Mme Racu.
Mme Racu a poursuivi en indiquant que le Comité avait reçu un nombre important d’allégations de mauvais traitements et d’usage excessif de la force lors d’arrestations, y compris s’agissant de mineurs. Les mauvais traitements allégués consistaient principalement en gifles, coups de poing et de pied au corps et/ou à la tête ainsi que, parfois, l’utilisation de matraques ou d’autres objets. L’experte a souhaité savoir quelles mesures ont été prises pour prévenir et combattre les mauvais traitements dans l’activité de la police.
Mme Racu a relevé la création, en février 2022, du Bureau national de garantie des droits de l’homme (Oficina Nacional de Garantía de los Derechos Humanos) dont le mandat est de recueillir et d’enregistrer des données sur les faits et les actions susceptibles de révéler des violations présumées des droits de l’homme lors d’une opération de police : l’experte a demandé davantage d’informations sur son fonctionnement.
Mme Racu a également demandé à la délégation de fournir plus de détails sur le système de sanctions disciplinaires dans les centres de mineurs privés de liberté.
L’experte a ensuite relevé qu’en raison du petit nombre d’établissements – deux – réservés aux femmes détenues, celles-ci souvent emprisonnées loin de leur domicile. En outre, il semble que la grande majorité des femmes sont détenues dans un ou deux modules de prisons à prédominance masculine, sans prise en compte de leurs besoins en tant que femmes. Mme Racu a également exprimé des préoccupations s’agissant de l’accès aux soins médicaux dans les centres de détention.
L’experte a poursuivi en indiquant que, selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), les ressources limitées du Gouvernement pour évaluer les nouveaux arrivants continuaient de rendre difficile de détecter les migrants victimes de torture.
Elle a également relevé qu’une organisation non gouvernementale travaillant avec des réfugiés avait signalé que des groupes criminels accaparent les rendez-vous avec les autorités chargées d’examiner les demandes d’asile, puis vendent les rendez-vous aux requérants.
Par ailleurs, le HCR signale toujours des cas de retours sommaires, qui ne donnent pas aux personnes la possibilité de solliciter une protection internationale depuis Ceuta, Melilla, les îles Chafarinas et de petits avant-postes sous souveraineté espagnole, y compris Peñon de Velez de la Gomera, a relevé l’experte.
Le 24 juin de l’année dernière, au moins 23 migrants sont morts en tentant de traverser la frontière du Maroc vers l’enclave espagnole de Melilla en Afrique du Nord. Les décès sont survenus lorsque jusqu’à 2000 personnes, principalement originaires d’Afrique subsaharienne, ont tenté d’entrer en Espagne, a rappelé Mme Racu. Elle a demandé des informations sur les résultats des enquêtes sur ces événements.
Enfin, elle a indiqué que le rapport ne contient pas d’informations sur les institutions psychiatriques et sociales dans lesquelles l’État place des personnes vulnérables. L’experte a toutefois relevé que des rapports indiquent des cas de surutilisation de contentions et de psychotropes.
M. ERDOGAN ISCAN, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de l’Espagne, a déclaré que les organisations de la société civile ont signalé que 49 femmes ont été tuées en 2022 par des partenaires ou ex-partenaires et que 48 enfants ont été tués dans le contexte de violences basées sur le genre. Il a rappelé un récent communiqué de presse du 6 juin 2023 de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la violence contre les femmes et les filles, qui s’est déclarée préoccupée par le fait que l’adoption d’une nouvelle loi sur le consentement sexuel avait réduit la durée des peines prononcées contre les auteurs de violences à l’égard des femmes.
D’autre part, selon des informations communiquées au Comité, des amendements à la loi organique n° 6/1985 ont restreint l’application du principe de compétence universelle en ce qui concerne les crimes de torture, a regretté M. Iscan. Il a demandé quelle était la position de l’Espagne concernant l’incorporation des obligations internationales dans le droit interne et le statut des traités internationaux dans la hiérarchie de la législation espagnole.
L’expert a en outre mentionné des informations reçues de sources crédibles concernant l’absence d’un organe indépendant habilité à enquêter sur les allégations d’actes de torture et de mauvais traitements, y compris l’usage excessif de la force, commis par des agents des forces de l’ordre. Le Comité a, par ailleurs, reçu des informations sur des témoignages de 5379 personnes qui auraient été soumises à la torture et à des mauvais traitements, y compris des témoignages auto-incriminants obtenus sous la torture, au Pays basque au cours de la période 1960-2014 et l’absence d’enquêtes à cet égard.
En ce qui concerne les allégations de recours excessif à la force par des responsables de l’application des lois contre des manifestants lors des événements survenus en Catalogne en octobre 2017, l’expert a relevé que des plaintes et des procédures judiciaires étaient en cours devant des tribunaux régionaux de la Communauté autonome de Catalogne afin d’identifier toute responsabilité éventuelle en ce qui concerne les actions des forces de sécurité de l’État. Il a aussi relevé qu’aucun policier en activité n’avait été condamné et que, dans de nombreux cas, les tribunaux ont rejeté la procédure au motif que l’action de la police était proportionnée. L’expert a demandé à la délégation de communiquer des informations à jour sur les enquêtes en cours ou achevées depuis la présentation du rapport.
M. Iscan a par ailleurs demandé des informations sur les mesures prises pour veiller à ce que les armes à décharge électrique, y compris les pistolets Taser, ne fassent pas partie de l’équipement des agents des forces de l’ordre. Il a relevé, dans ce contexte, que le Comité a reçu des informations selon lesquelles le Ministère de l’intérieur a fait des armes à décharge électrique un équipement standard de la police nationale et la Garde civile ainsi que des forces de police régionales du Pays basque et de Catalogne. Il a prié la délégation de clarifier la situation.
Enfin, l’expert a mentionné l’exhumation des corps de 128 victimes de l’armée franquiste enterrées sans identification dans le mausolée de la vallée de Cuelgamuros. Il a estimé qu’il s’agissait là d’une évolution positive, qui aurait été prise à la suite du rejet par la Cour suprême d’un appel de la Fondation Franco. La Cour a ainsi donné son feu vert aux travaux d’exhumation. Les médias ont rapporté que les proches avaient enduré de de longues souffrances, assimilables selon eux à une torture psychologique. M. Iscan a demandé des informations sur ce processus d’exhumation.
D’autres experts membres du Comité ont insisté sur le fait que toute personne privée de liberté devait avoir accès à des soins médicaux ; se sont interrogés sur les raisons de l’augmentation signalée des décès en détention ; et ont recommandé que l’Espagne adopte une loi complète contre la traite des êtres humains.
Réponses de la délégation
S’agissant de la définition de la torture, la délégation a indiqué que le Code pénal reprenait de façon complète la notion de torture telle qu’elle est définie dans la Convention et que le droit espagnol permettait déjà d’incriminer des personnes privées qui participent à des actes de torture. La délégation a aussi précisé qu’en Espagne, les traités internationaux et conventions ratifiés étaient directement applicables, sauf exceptions précisées par la loi.
Le Mécanisme national de prévention, régi par une loi organique, a pour mandat de réaliser des visites inopinées dans tous les centres de détention, a aussi fait savoir la délégation.
S’agissant de l’isolement cellulaire, la délégation a relevé que des modifications apportées à la loi avaient modifié les règles très strictes de l’isolement, qui est limité à 48 heures sauf dans le cas de terrorisme. Durant la période d’isolement, il y a minimum deux visites médicales toutes les 24 heures et toute mesure d’isolement est soumise à l’autorité judiciaire, a précisé la délégation.
De nombreux règlements régissent le recours à la force par la police lors de manifestations. Les manifestations ne peuvent être dissoutes que lorsque les autorités les jugent nécessaires. Le recours au matériel anti-émeute est régi par un protocole et est toujours précédé de sommations, a aussi indiqué la délégation, précisant que, sur plus de 80 000 manifestations en Espagne depuis 2015, le matériel anti-émeute n’avait été utilisé que dans 0,14% des cas. La délégation a par ailleurs relevé que les unités d’intervention qui gèrent les manifestations suivent des formations spécifiques.
Les juges, avocats, et médecins légistes qui travaillent dans le domaine de la lutte contre la torture suivent des formations continues dans le domaine des droits de l’homme, y compris sur les dispositions de la Convention. La délégation a aussi indiqué que les personnes travaillant dans le secteur pénitentiaire étaient formées au Protocole d’Istanbul.
S’agissant de l’accès aux soins dans les centres pénitentiaires, la délégation a indiqué que dès qu’une personne arrive dans un établissement, elle passe un examen médical réalisé par un médecin généraliste. Les détenus ont aussi accès à un spécialiste en fonction de leurs pathologies. Une grande attention est accordée à l’accès à la santé mentale, deux centres de détention disposant d’un service spécialisé dans ce domaine. Actuellement, le système pénitentiaire compte environ 200 médecins, dont sept psychiatres. Le Gouvernement s’efforce recruter 80 médecins supplémentaires par an, mais cet objectif n'a pas été atteint et il s'agit d'une tendance générale dans toute l'Europe, dans un contexte de pénurie générale de médecins, a-t-il été précisé.
L'Espagne n'a pas ratifié la Convention sur les droits des travailleurs migrants, a déclaré la délégation en réponse à la question d’un expert du Comité. En Espagne, les lois sur le traitement des migrants ont été améliorées et les voies d'accès régulières pour l’immigration ont été renforcées, de même que la manière dont les demandes sont gérées.
S’agissant de la responsabilité pénale des mineurs, elle ne concerne que les mineurs âgés de 14 à 18 ans et est régie par la loi 5/2000, qui établit des responsabilités différentes de celles des majeurs, les moins de 14 ans étant considérés irresponsables pénalement. Le principe d’opportunité et l’intérêt supérieur du mineur sont pris en considération tout au long de la procédure judiciaire. L’intérêt supérieur peut, par exemple, exiger de ne pas ouvrir d’action pénale. On impose aux mineurs des « mesures » – et non des « peines » – qui visent toujours la réinsertion. Parmi les mesures, on compte l’enfermement (pour les cas les plus graves), des enfermements semi-ouverts, des tâches d’intérêt général, des placements ou accompagnements socio-éducatifs. Enfin, la loi 8/2021 sur la protection de l’enfance contre la violence interdit la contention mécanique des mineurs.
En ce qui concerne les femmes incarcérées, la législation pénitentiaire espagnole tient compte des Règles des Nations Unies concernant le traitement des détenues et l’imposition de mesures non privatives de liberté aux délinquantes (Règles de Bangkok). Il existe quatre centres de détention pour femmes répartis sur le territoire espagnol. Les femmes représentent environ 7% des détenus. Elles ne sont pas toutes en régime fermé : 30% d’entre elles sont en régime ouvert leur offrant, notamment, des formations et des espaces consacrés à la mère et à l’enfant.
En matière d’immigration, a poursuivi la délégation, le droit espagnol garantit aux étrangers les droits inscrits dans la Directive 32 de l’Union européenne, relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale, la justice étant seule compétente pour son interprétation. Les agents travaillant dans les centres d’asile reçoivent une formation technique et théorique de base sur les techniques d’interrogatoire, la valeur de la preuve ou les personnes vulnérables. Ces formations sont délivrées par le Ministère de l’intérieur et l’Agence de l'Union européenne pour l'asile (AUEA).
Parmi les priorités et mesures à moyen terme du Gouvernement, la délégation a cité la lutte contre les mafias qui profitent des migrants et le développement d’une plateforme permettant aux demandeurs d’asile de solliciter des rendez-vous avec l’administration, sans barrière de la langue. Enfin, a assuré la délégation, l'Espagne ne pratique aucune expulsion sommaire : tout retour ou expulsion vers l’Algérie ou le Maroc se fait avec toutes les garanties de droit, dont ceux contenus dans l’accord de 1992 entre l’Espagne et le Maroc. Enfin, tout rejet de migrants à la frontière espagnole (Ceuta et Melilla) est conforme à la doctrine de la Cour européenne des droits de l’homme, notamment ses arrêts de 2020 et 2022, a affirmé la délégation.
En matière d’hébergement de migrants, l’Espagne dispose d’une capacité d’accueil de plus de 11 000 places. Les services disponibles visent à accompagner les migrants dès leur arrivée sur le territoire espagnol. Un des éléments essentiel du dispositif sont les centres de Ceuta et Melilla, en raison de leur emplacement géographique. Ces centres sont des milieux ouverts où les migrants peuvent séjourner volontairement. Ils y disposent de services de formation et d’insertion.
S’agissant de l’extradition et de l’assistance mutuelle dans le cadre de l’exercice de la compétence universelle, la délégation a déclaré que le Code pénal espagnol a des dispositions conformes à l’article premier de la Convention, aux 31 traités d’assistance mutuelle et aux 40 traités d’extradition auxquels l’Espagne est partie. Le Gouvernement répond aux demandes d’extradition lorsque le délit incriminé est reconnu dans les deux pays signataires. L’Espagne a ainsi accepté des extraditions vers l’Argentine et répondu à plus de cent commissions rogatoires transmises par la justice argentine, a assuré la délégation.
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