Skip to main content

Haut-Commissaire : l’espace numérique doit connaître une révolution féministe

La Journée internationale des femmes est célébrée le 8 mars 2023. © HCDH

 

La Journée internationale des femmes du 8 mars 2023 visera à reconnaître le rôle essentiel des défenseuses des droits humains et des mouvements féministes, qui se servent du pouvoir transformateur des technologies numériques pour échanger, se mobiliser et promouvoir le changement social, tout en luttant contre le recul persistant des droits des femmes.

Ce pouvoir de transformation s’est manifesté grâce à la militante suédoise Greta Thunberg, à l’origine des grèves scolaires organisées tous les vendredis pour protester contre l’inaction du Gouvernement suédois en matière de changements climatiques. Des milliers d’autres étudiants ont suivi son exemple dans d’autres pays par grâce aux médias sociaux. Ce courage s’est également manifesté à travers les femmes et les jeunes filles qui ont fait campagne en ligne pour abroger les interdictions quasi totales de l’avortement en Colombie et en Irlande.

En Iran, les jeunes femmes ont utilisé les médias sociaux pour contester les normes patriarcales du régime et réclamer l’égalité. Au Soudan, ce sont les femmes qui ont organisé les manifestations contre le fondamentalisme religieux et le régime désormais autocratique, en se servant des outils en ligne pour mobiliser la population.

« Les droits des femmes sont au cœur de ce qui caractérise l’être humain : le respect de la liberté de choix de l’individu », a indiqué le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme Volker Türk.

Si le monde numérique offre d’immenses possibilités, il n’est pas à l’abri du recul persistant des droits des femmes et de l’égalité des genres, notamment de la violence fondée sur le genre et de l’exclusion numérique. Cet espace reflète et amplifie le monde hors ligne où les femmes et les filles, y compris celles lesbiennes, bisexuelles, transgenres ou intersexes, sont exposées à une myriade d’attaques misogynes utilisées par des groupes pour désinformer les sociétés et entraver la promotion des droits des femmes et de l’égalité entre les genres.

« La Journée internationale des femmes nous rappelle les dynamiques de pouvoir patriarcales, anciennes et nouvelles, qui empêchent notre monde de réaliser les droits de toutes les femmes et les filles, et de réaliser le plein potentiel de l’humanité », a déclaré M. Türk. « Nous devons mettre fin au patriarcat et à la masculinité toxique au XXIe siècle. L’égalité des femmes est essentielle pour garantir la justice – et avant tout, la justice pour les millions de femmes concernées. »

Des progrès considérables ont été réalisés en matière de droits des femmes au cours des 75 dernières années qui ont suivi l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Les femmes ont influencé le texte de la Déclaration, qui a permis à ces dernières de bénéficier de changements sociaux essentiels, et continuent d’introduire des changements sociaux permettant à davantage de personnes de jouir de leurs droits humains.

Depuis l’adoption de la déclaration, les femmes et les filles ont connu des changements et des progrès significatifs. Plus de femmes occupent des postes de direction. Sur tous les continents, des femmes ont été élues à la tête de gouvernements. Dans de nombreuses professions qui leur étaient autrefois inaccessibles, les femmes occupent désormais des postes à responsabilité. Davantage de filles vont à l’école et y restent.

Les problèmes qui étaient autrefois considérés comme « privés », tels que la violence domestique, ceux qui étaient « normalisés », comme le harcèlement sexuel au travail, ou qui étaient perçus comme « triviaux », notamment les congés de maternité et de paternité, ont vu leur priorité publique s’accroître de manière spectaculaire.

« Nous assistons pourtant à des tentatives pour faire reculer les droits des femmes dans toutes les régions – appuyées par des discours autoritaires ou patriarcaux qui normalisent la misogynie et affirment que les femmes et les filles doivent être essentiellement cantonnées aux activités de soins, à la reproduction et à la famille, quelles que soient leurs propres aspirations », a énoncé M. Türk.

Selon le Haut-Commissaire, les technologies numériques sont devenues des vecteurs de violence et de haine à l’égard des femmes et des filles en ligne.

« C’est notamment le cas des femmes connues du grand public et celles qui exercent des fonctions publiques et politiques, ainsi que de celles qui défendent les droits humains », a-t-il expliqué.

L’espace numérique n’a pas encore connu la révolution féministe dont il a tant besoin, et cela est absolument nécessaire. 

Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme

Selon ONU-Femmes, 85 % des femmes ont été témoins de cyberviolence à l’égard d’autres femmes, tandis que 38 % des femmes ont personnellement subi des violences en ligne.

Les femmes ont 27 fois plus de chance d’être victimes de violence en ligne que les hommes.

La violence et la misogynie qui existent hors ligne débordent rapidement dans l’espace numérique, où les femmes et les filles qui s’expriment en font particulièrement les frais. Le recul des droits des femmes et des filles concerne en particulier la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, où des groupes hostiles aux droits utilisent des pétitions et des campagnes en ligne pour s’opposer à l’accès aux services de santé sexuelle et procréative.

« Nous assistons à un effort multiple pour contrôler la sexualité des femmes et les choix concernant leur propre corps en limitant, voire en criminalisant les droits en matière de sexualité et de procréation, notamment l’accès légal et sans risque à l’interruption de grossesse », a affirmé M. Türk.

« J’aimerais clarifier un autre point. L’égalité des sexes ne détruira pas l’institution du mariage, de la famille ou de la religion, comme certains le prétendent », a-t-il ajouté. « Elle enrichit tous les aspects de la culture et de la société. »

HC Volker Türk on International Women’s Day