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Déclarations Procédures spéciales

Observations et recommandations préliminaires pour M Michel Forst, Rapporteur Spécial des Nations unies sur la situation des défenseurs, visite au Burundi 14-25 novembre 2014

24 novembre 2014

Bujumbura, 25 novembre 2014 

Mesdames et messieurs, chers amis des média,

Je voudrais commencer par remercier le gouvernement du Burundi pour son invitation à visiter le pays et observer la situation des défenseurs des droits de l’homme et dire toute ma gratitude pour la liberté qui m’a été donnée de pouvoir facilement organiser mes rencontres à Bujumbura, Ngozi et Rumonge. Je vois cela comme un témoignage de sa volonté d’avoir un dialogue franc, constructif et ouvert sur la situation des défenseurs.

Je voudrais aussi remercier les membres des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire que j’ai rencontrés et avec qui j’ai pu librement et en toute franchise échanger sur la situation des défenseurs des droits de l’homme au Burundi.

Je voudrais également remercier les membres du personnel du bureau des Nations unies au Burundi pour toute l’aide logistique et le soutien qu’ils m’ont constamment apporté dans la préparation et la conduite de cette mission.

Le Burundi est le premier pays que je visite officiellement depuis que j’ai été nommé Rapporteur Spécial des Nations unies sur la situation des défenseurs des droits de l’homme en juin de cette année.

J’ai été profondément touché par l’hospitalité, la gentillesse et la générosité des burundaises et burundais que j’ai pu rencontrer et notamment les dirigeants des institutions de la république et les membres des organisations de la société civile qui m’ont beaucoup parlé, fourni des documents et informations utiles pour l’accomplissement de cette mission dont je viens  de rendre compte aujourd’hui au ministre des relations extérieures.

Ce que j’ai voulu partager avec le gouvernement aujourd’hui, c’est une série d’observations et recommandations préliminaires qui seront développées dans le rapport que je présenterai plus tard au Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies. Le but principal de cette visite était de comprendre la situation des défenseurs dans le pays et de faire une évaluation dans un esprit de coopération et de dialogue.

Je sais d’où vient le pays et les drames successifs que le pays a connus. Et le récit des atrocités dont ont été victimes et témoins les femmes et les hommes du Burundi m’a constamment accompagné lors de mes rencontres.

Je suis très admiratif des réalisations positives que le pays a connu depuis plusieurs années et des progrès sensibles qui ont été réalisés dans beaucoup de domaines, souvent dans des conditions difficiles liées à l’histoire politique, à la démographie, à la pauvreté extrême, au manque de terres.

L’exclusion a été un thème qui est beaucoup revenu dans mes discussions avec les autorités du pays, mais aussi avec les défenseurs des droits de l’homme et les représentants des institutions avec qui j’ai pu échanger en toute liberté. Exclusion ethnique, exclusion politique, exclusion sociale, j’y reviendrai.

La constitution du pays rappelle que « les droits et devoirs proclamés et garantis, entre autres par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, les Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme…font partie intégrante de la Constitution de la République du Burundi. Ces droits ne font l’objet d’aucune restriction ou dérogation, sauf dans certaines circonstances justifiables par l’intérêt général ou la protection d’un droit fondamental ». Et je reviendrai sur ce dernier point lorsque je parlerai de la liberté de manifestation et de réunion.

J’ai été frappé lors de mes contacts avec les autorités du pays et avec certaines institutions de la république, du fait que les défenseurs des droits de l’homme sont assimilés à des opposants politiques, à tel point que l’on a pu créer des organisations non gouvernementales proches du pouvoir pour tenter de conforter cet amalgame entre défenseurs et opposants politiques et tenter de faire croire qu’il existerait des défenseurs opposés au pouvoir en place et des défenseurs proches du pouvoir en place.

La déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme est très claire à ce sujet, elle définit les défenseurs par leur action en faveur des droits de l’homme. Les défenseurs sont des individus, des femmes et des hommes qui travaillent sans violence à promouvoir et protéger les droits de l'homme et les libertés fondamentales.

J’ai rencontré un grand nombre de défenseurs durant ces jours passés ici. Ceux qui travaillent sur les droits civils et politiques, ceux qui défendent les droits des détenus, ceux qui travaillent sur la lutte contre la corruption, et ceux qui luttent contre les violences faites aux femmes et plaident pour une loi sur la succession, ceux qui luttent pour les droits des enfants et contre le travail clandestin ou le trafic des enfants, ceux qui travaillent en faveur des personnes qui vivent avec un handicap, ceux qui luttent pour l’identité de genre et contre les discriminations dont sont victimes les homosexuels, des journalistes qui informent la population, les défenseurs des droits des peuples autochtones, les défenseurs des albinos.

J’ai aussi pris le temps de rencontrer des représentants d’organisations de la société civile qui se sont présentés comme des défenseurs proches du pouvoir en place qui m’ont promis de m’envoyer de la documentation sur leurs actions.

J’ai été très impressionné par l’extrême vitalité et la compétence de la société civile au Burundi bien que leurs membres vivent dans un environnement souvent difficile où ils font face à des graves obstacles qui peuvent s’apparenter à des violations de leurs droits et libertés ainsi qu’à leur droit légitime de promouvoir et protéger les droits de l’homme tels qu’ils sont énoncés dans la déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme.

Dans beaucoup de pays, lorsque l’opposition ne joue pas son rôle ou n’occupe pas la place qui lui est dévolue sur le plan politique, alors cela créée un vide dans le domaine de la défense des libertés publiques et ce vide est souvent naturellement occupé par les organisations non gouvernementales qui travaillent en faveur des droits civils et politiques, comme des droits économiques et sociaux. J’ai bon espoir que les élections à venir seront l’occasion de construire une organisation du système politique dans lequel le gouvernement et l’opposition s’affronteront au Parlement sur le terrain politique, laissant les organisations de la société civile librement travailler à la promotion et à la protection des droits garantis par la Constitution du pays.

Dans mes rencontres avec les défenseurs des droits de l’homme à Bujumbura, à Ngozi et à Rumonge, j’ai été frappé par le sérieux des menaces qui pèsent sur les défenseurs des droits de l’homme, dont les journalistes ainsi que par les campagnes de diffamation dans certains média. De très nombreux cas de menaces physiques, appels téléphoniques anonymes, agressions, arrestations arbitraires, harcèlement judiciaire m’ont été signalés qui seront documentés dans mon rapport. Je pense à Gabriel Rufyiri, Bob Rugurika, Faustin Ndikumana pour n’en citer que quelques uns. Depuis plusieurs années, dans le cadre de mon mandat, nous avons envoyé des lettres d’allégations au gouvernement du Burundi sur plusieurs dossiers et j’espère pouvoir poursuivre le dialogue constructif engagé cette semaine avec le gouvernement sur ces dossiers.

Plusieurs défenseurs ont également fait état de menaces sur les membres de leur famille, certains ont même été contraints de mettre à l’abri à l’étranger leur famille pour ne pas les exposer à des menaces pour une cause qu’ils n’ont pas choisie. Beaucoup ont parlé de l’impunité généralisée qui règne, certains défenseurs étant même arrêtés alors que les auteurs des menaces restent en liberté grâce à leurs connivences politiques ou la corruption.

L’impunité n’est pas acceptable, elle est une négation même de la justice et une offense faite aux victimes, une invitation à aller plus loin dans les menaces et attaques. Chaque cas de menace ou d’attaque contre les défenseurs devrait faire l’objet d’une enquête impartiale et indépendante et les responsables devraient être systématiquement traduits en justice et sanctionnés conformément à la loi.

Permettez-moi dans ce cadre de rappeler au gouvernement la nécessité d’aller plus loin et de mener à leur terme les enquêtes sur la mort de Ernest Maniruvma, le vice-président de l’Observatoire de Lutte contre la Corruption et les Malversations Economiques, assassiné à Bujumbura le 9 avril 2009. Tant que les circonstances de sa mort resteront obscures et les vraies responsabilités établies, cela restera comme un pôle de cristallisation de l’inquiétude de la société civile.

Je suis également inquiet de l’atmosphère qui règne parmi les défenseurs et souhaite ici publiquement dire solennellement que l’arrestation et la détention de Pierre Claver Mbonimpa, la radiation inique du barreau du bâtonnier Isidore Rufykiri ou les menaces proférées à l’encontre de Pacifique Nininahazwe constituent pour moi une escalade inacceptable dans le harcèlement des défenseurs par les autorités du pays. Lorsqu’on touche à des personnages emblématiques, il en résulte un climat de peur et chacun des défenseurs qui dénoncent des violations graves est susceptible à son tour de connaître un sort semblable. Je crois avoir compris que les autorités du pays ont entendu ce message et que des instructions claires seront données en ce sens.

Je voudrais, pour ne pas être trop long, partager avec vous mes constatations, observations et recommandations préliminaires dans 3 domaines principaux, la question de la liberté d’expression, la liberté de manifestation et de réunion, et la liberté d’association. Pour le reste, je vous renvoie au contenu de mon rapport qui sera publié et présenté devant le Conseil des Droits de l’Homme des Nations unies et que le gouvernement pourra naturellement commenter lors du dialogue interactif qui aura lieu à cette occasion.

Liberté d’expression:

Le Burundi a la chance d’avoir une société civile dynamique et une presse audacieuse et libre et je regrette de constater que les pouvoirs publics tentent de restreindre la liberté d’expression et la liberté des média en les accusant d’être des agents de l’opposition, dès lors qu’ils rapportent des faits ou des témoignages mettant en cause les institutions de l’état. Le gouvernement devrait au contraire se réjouir d’avoir une presse libre et utiliser les informations publiées dans des  reportages et émissions de radio pour corriger les dysfonctionnements constatés de l’administration ou des responsables politiques mis en cause.


 

Pourtant, la loi sur la presse au Burundi contient plusieurs dispositions contraires au pacte et aux autres instruments internationaux. Une demande relative à la loi sur la presse est actuellement examinée par la Cour de justice de l'Afrique de l’Est sur la base d'une plainte déposée par l'Union des journalistes burundais.


 

Cette mise en cause de la liberté de la presse, même si les principales dispositions ne sont pour le moment pas mises en œuvre, sont pourtant l’un des éléments de la mise en cause de la liberté d’expression dont plusieurs témoignages m’ont été rapportés.


 

Je pense aux attaques, allant parfois jusqu’à des arrestations ou des menaces répétées contre certains journalistes ou certaines stations de radio traitant de sujets politiquements sensibles comme les allégations de distribution d’armes ou les méthodes controversées de délivrance de cartes d’identité.


 

Ainsi, le 15 mars 2014 une déclaration publique du Conseil National de Sécurité menaçait de fermeture la Radio Publique Africaine. Le 9 mai dernier 2 journalistes de Radio France International et de Radio Publique Africaine ont été détenus pendant 4 heures à Marangana par un dirigeant local du CNDD-FDD accompagné d’un groupe d’Imbonerakure.


 

Je pense également aux nombreux cas qui m’ont été signalés de simples citoyens qui répondaient à des demandes d’interviews de la presse ou exprimaient des opinions personnelles et qui ont été menacées ou convoquées par la police. De nombreux cas ont été documentés et figureront dans mon rapport.


 

La protection du droit d’expression et de pensée est la pierre angulaire de toute société libre et démocratique. Les journalistes d’investigation et une presse un peu critique sont des acteurs essentiels pour la préservation de l’espace démocratique libre. Sans liberté d’investigation et de critique des pouvoirs en place, sans liberté de promouvoir des espaces de débats publics, le rôle des journalistes et des média est très largement compromis.


 

Une presse libre et indépendante, parfois impertinente, capable de dénoncer les abus de pouvoir et la corruption est essentielle pour la préservation des libertés publiques, la promotion de la transparence et la participation de la population à la vie publique.


 

Liberté de manifestation et de réunion:

La liberté de réunion et de manifestation est l’un des éléments fondamentaux de l’exercice de la démocratie et c’est pourquoi elle est garantie par la Constitution, mais je regrette d’avoir dû constater que, sur le fondement de la loi sur les manifestations publiques, les autorités publiques, et notamment le maire de Bujumbura, ont arbitrairement interdit la totalité des manifestations publiques régulièrement déclarées par les organisations de la société civile depuis 2009. Il m’a été rapporté que dans la pratique, seules les manifestations pacifiques favorables au gouvernement auraient été autorisées. En faisant une interprétation abusive de la notion d’ordre public, les autorités musellent dans les faits la liberté de manifestation sur la voie publique. Je souhaite ici rappeler qu’en droit administratif, l'ordre public étant caractérisé par le bon ordre, la sécurité, la salubrité et la tranquillité publique, le but de la police administrative devrait être simplement d'en prévenir les troubles et non pas de tenter d’étouffer toute velléité de manifester.

Plusieurs cas d’interdiction de réunion publique m’ont été signalés, des demandes auraient été faites aux directeurs d’hôtels pour les dissuader d’accepter de tenir des réunions dans leurs locaux. Je ne peux citer tous les nombreux cas qui m’ont été rapportés et qui figureront dans mon rapport, mais simplement signaler la plus emblématique, je pense à l’interdiction faite au Barreau de Bujumbura de tenir son assemblée générale, au mépris des dispositions de la loi sur les manifestations publiques, le barreau n’étant ni un parti politique, ni une organisation non gouvernementale, mais un ordre professionnel jouissant de la personnalité civile .

Permettez- moi de rappeler de manière plus positive qu’aucun gouvernement ne devrait craindre les manifestations et réunions pacifiques car il n'y a pas de meilleur indicateur de ce que pensent les citoyens. Et c’est toujours dans l'intérêt de l'Etat d’autoriser les manifestations et réunions pacifiques comme une « soupape de sécurité » pour éviter le recours à d'autres moyens de résistance et de désaccord qui ne sont pas souhaitables.


 

La liberté d’association:

La liberté d’association est garantie par l’article 32 de la Constitution et les associations sont régies par le décret-loi du 18 avril 1992 qui devrait être révisé car il contient un certain nombre de dispositions préjudiciables au développement du mouvement associatif. Il s’agit essentiellement de la procédure d’agrément qui entraîne parfois des abus, l’agrément d’une association restant conditionné au bon vouloir de l’autorité administrative. Certaines associations travaillant ainsi sur des sujets sensibles, telle l’identité de genre, se voient ainsi refuser un agrément sans raison officielle.

Un projet de loi est à l’étude au Parlement qui prévoit des dispositions qui, si elles étaient adoptées entraveraient la création et le développement des associations et mettraient en péril le principe même de la liberté associative.

Je pense à la question de l’agrément ou du renouvellement annuel de l’agrément qui fait peser des menaces sur la pérennité de certaines associations.

Je pense à la disposition qui laisserait au ministre de l’intérieur la possibilité de désigner lui même les dirigeants, de l’article 30 du projet de loi qui prévoit aussi des limites à la formation des coalitions des organisations, ce qui irait à l’encontre de la liberté des associations de choisir leurs causes et leur mode de fonctionnement et casserait la dynamique interassociative si bénéfique à la vitalité des défenseurs des droits de l’homme.

L’article 59 laisse un large pouvoir discrétionnaire au ministère de l’intérieur de suspendre les activités d’une association. C’est la raison pour laquelle je fais confiance au gouvernement pour que les associations soient bientôt consultées et écoutées sur ce projet.

Je voudrais ici rappeler que les procédures d’enregistrement des associations devraient être simples et gratuites et que la liberté d’association devrait s’étendre aux organisations non déclarées car, en fait cela devrait simplement relever de la liberté de chacune des associations de décider ou non de se déclarer.

Conclusion:

Je quitte le pays dans quelques heures, j’ai été heureux de partager avec le gouvernement, la presse et la société civile ces quelques observations préliminaires et ces recommandations encore partielles. D’autres recommandations plus détaillées suivront qu’il conviendra de lire en parallèle avec celles des recommandations issues de l’Examen Périodique Universel ou des rapports des organes des traités qui parlent des défenseurs des droits de l’homme. Le fait que toutes ces recommandations disent la même chose sans pour autant se répéter devrait être un indicateur de la situation des défenseurs des droits de l’homme dans le pays et un appel aux autorités de l’état pour leur assurer une plus grande protection. Et je me tiens à la disposition des autorités du pays pour poursuivre le dialogue sur ces sujets dans un esprit de coopération et de soutien aux initiatives positives qui pourraient être prises.

Dans cet esprit de concertation permanente avec le gouvernement, j’ai lu avec intérêt le projet de loi sur la protection des défenseurs des droits de l’homme, il peut sans doute encore être amélioré et rendu plus protecteur et je félicite les autorités du pays pour cette initiative tout à fait bienvenue. Si ce projet se concrétisait par une grande loi protectrice, cela placerait le pays dans le peloton de tête des pays qui, après la Côte d’Ivoire, le Mexique, la Colombie ou le Honduras, visant à protéger les défenseurs par des dispositions législatives pertinentes. Et je renouvelle l’offre de service que j’ai faite au gouvernement, puisque la coopération technique est aussi l’un des axes de mon mandat, de revenir au Burundi pour travailler avec les autorités sur le développement de ce projet de loi.

Pour le suivi de mon rapport, je compte bien entendu sur les autorités du pays, à qui incombe la responsabilité première de protéger les défenseurs. Vous trouverez plus tard dans mon rapport de mission une série de recommandations adressées au gouvernement, à la communauté internationale, à la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme ainsi qu’aux organisations de la société civile. Mes recommandations seront faites dans un esprit de responsabilité et de coopération avec les autorités du pays, je sais qu’elles seront étudiées avec sérieux et je me tiens à la disposition du gouvernement pour en parler avec lui plus avant si il en sent le besoin.

Il incombe également à l’Institution Nationale des Droits de l’Homme, la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme, de suivre la mise en œuvre de ces recommandations et de travailler de concert avec le gouvernement sur la mise en place d’un plan de mise en œuvre. La CNIDH est un outil important de la consolidation de la démocratie et de la paix, elle est issue de la volonté des Burundais eux-même et il importe maintenant de la conforter et de la renforcer pour lui donner les moyens d’être au plus près des besoins des défenseurs à Bujumbura et dans les régions. Je regrette pourtant que la nomination des deux nouveaux membres n’ait pas été faite dans le respect des dispositions de la loi issue de la volonté du Parlement, puisque les deux commissaires devaient émaner des organisations des droits de l’homme et des organisations de femmes, mais je fais confiance au Président de l’institution pour accompagner les deux nouveaux commissaires et leur donner la formation dont ils ont besoin pour assumer pleinement leurs missions.

Au moment où se termine la mission des Nations unies au Burundi, laissez-moi vous dire à quel point je me réjouis du maintien du bureau du Haut-commissariat aux droits de l’homme des Nations unies, dont je souhaite qu’il soit doté de moyens conséquents à Bujumbura et j’insiste sur le maintien des bureaux régionaux, pour être l’autre outil de protection des défenseurs des droits de l’homme du pays.

Permettez-moi également de dire que je regrette que sur certaines situations individuelles que traversent les défenseurs, les représentations diplomatiques ne s’expriment pas assez clairement. Je sais que la diplomatie c’est d’abord la défense des intérêts de son pays, et souvent des intérêts économiques. Mais il me semble que, face à certaines situations une parole commune des représentations diplomatiques aurait un poids certain dans le dialogue avec le gouvernement et ne mettrait aucune d’entre elle en péril.

A la veille des importantes échéances électorales que le pays va connaître prochainement, il me semble indispensable, pour garantir tous les droits des défenseurs des droits de l’homme, de poursuivre le renforcement des institutions de l’état pour avancer vers la consolidation de l’état de droit.

Les accords d’Arusha constituaient le socle d’un ensemble de principes et de mesures très importantes dont les burundais et la communauté attendaient beaucoup et, dans le domaine de la protection des droits de l’homme, ici comme ailleurs dans le monde, l’instauration de l’état de droit constitue toujours un préalable indispensable à l’exercice des libertés publiques. Mais ici comme ailleurs, la question de l’état de droit ne saurait se résoudre aux seules indispensables réformes des institutions judiciaires et de la chaîne pénale, de la police ou du système pénitentiaire permettant la jouissance et l’exercice des droits civils et politiques.

Instaurer l’Etat de droit c’est enfin aussi garantir un fonctionnement des institutions et des services publics qui, au-delà de la sécurité des personnes et des biens, doivent veiller à assurer à tous les citoyens, de manière équitable, l’exercice de l’ensemble des droits civils et politiques, comme les droits économiques, sociaux et culturels tels qu’énoncés par les deux Pactes auxquels le Burundi est partie.

Cette approche holistique devrait guider les choix du gouvernement du Burundi dans les réformes à conduire, de telle sorte que progressivement l’accès à l’éducation pour tous, l’accès à un système de santé, l’accès à l’eau potable et aux services d’assainissement, un logement salubre et décent, un accès aux revenus du travail et à la formation soient garantis pour tous.

Et c’est précisément parce qu’ils travaillent dans ce sens que les défenseurs des droits de l’homme sont indispensables à l’exercice de la démocratie et devraient être mieux protégés.


  LOI  N° 1/014 du 29 novembre 2002 PORTANT REFORME DU STATUT DE LA PROFESSION D’AVOCAT
 
 

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