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Femmes

Les changements climatiques exacerbent la violence à l’égard des femmes et des filles

12 juillet 2022

Plusieurs Kényanes de la communauté masaï participent à la grève mondiale pour le climat à Magadi, Kajiado, Kenya, le 25 mars 2022. © EPA-EFE/Daniel Irungu

Selon le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), 80 % des personnes déplacées en raison des changements climatiques sont des femmes.

Lorsque les femmes sont déplacées, elles sont davantage exposées à la violence, y compris la violence sexuelle, a déclaré Michelle Bachelet, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH).

« Lorsqu’elles dorment, se lavent ou s’habillent dans des hébergements d’urgence, des tentes ou des camps, le risque de violence sexuelle est une triste réalité pour ces migrantes et réfugiées », a déclaré Mme Bachelet. « À cela s’ajoute le risque accru de traite et de mariage d’enfants, de mariage précoce ou de mariage forcé encouru par les femmes et les filles déplacées. »

Michelle Bachelet a participé à une réunion-débat consacrée au lien entre les changements climatiques et la violence à l’égard des femmes et des filles à l’occasion de la 50e session du Conseil des droits de l’homme à Genève, en Suisse. Reem Alsalem, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, était chargée d’animer le débat.

Selon Astrid Puentes Riaño, consultante indépendante sur les droits de l’homme et les changements climatiques, les migrations et les déplacements forcés font partie des conséquences les plus graves de la crise climatique qui touche déjà des millions de personnes dans le monde.

« Par exemple, selon certaines informations, des femmes migrantes ont subi des violences sexuelles alors qu’elles étaient sous la protection des autorités et, lorsqu’elles les ont signalées, elles ont été emprisonnées au lieu d’être protégées », a-t-elle expliqué.

Les nombreux risques encourus par les femmes et les filles du secteur agricole

Esmeralda*, âgée de 15 ans, est originaire du Pérou et déléguée nationale du Mouvement national des enfants et adolescents travailleurs organisés du Pérou. Elle vient d’une famille d’agriculteurs qui a appris à vivre jour après jour avec les effets des changements climatiques.

« Notre exploitation familiale n’est plus ce qu’elle était. Notre production a diminué et a été affectée par les grandes entreprises qui utilisent des engrais toxiques », a-t-elle expliqué. « Les changements climatiques entraînent des gelées et d’autres changements radicaux de température, qui obligent les femmes et les filles à travailler plus dur pour obtenir un revenu et des ressources pour leur famille. »

Selon Esmeralda, la pénurie d’eau potable pousse les femmes et les filles à chercher de l’eau dans les rivières ou au cœur de la jungle, ce qui augmente le risque de violence sexuelle. Elle a ajouté que dans les zones d’exploitation forestière illégale, les femmes et les filles sont la principale cible des groupes criminels et de nombreuses femmes et filles ont disparu.

« Les femmes et les filles subissent les effets disproportionnés des changements climatiques dans le monde. Les femmes et les filles ne peuvent souvent pas aller à l’école ni obtenir un travail », a-t-elle déclaré. « De nombreuses femmes et filles dépendent de leur partenaire, ce qui augmente le risque de violence économique, physique et psychologique. »

Son cas n’est pas isolé. Selon Save the Children, les femmes et les filles représentent plus de 40 % de la main-d’œuvre agricole et sont responsables de 60 à 80 % de la production alimentaire.

« Malgré leur rôle vital dans les économies rurales, les femmes et les filles qui vivent dans les zones rurales sont souvent doublement touchées par la discrimination, l’exploitation et la violence fondée sur le genre », a déclaré Rajib Ghosal, conseiller technique principal et coordonnateur sur les changements climatiques et la pauvreté des enfants pour la région Asie-Pacifique de l’organisation Save the Children. « La crise environnementale exacerbe les formes préexistantes de discrimination et de violence fondée sur le genre à l’égard des femmes et des filles.

La protection de l’environnement : une activité dangereuse

Les femmes qui défendent les droits humains liés à l’environnement et qui travaillent pour protéger la terre, l’eau, la nature et les communautés mettent leur vie en danger, a déclaré Mme  Bachelet.

Elles sont incriminées et réduites au silence. Elles sont menacées et stigmatisées. Elles risquent davantage d’être victimes de violence fondée sur le genre. Beaucoup d’entre elles sont même tuées.

Michelle Bachelet, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme

Selon Mme Bachelet, entre 2016 et 2019, environ 1 698 actes de violence ont été enregistrés au Mexique et en Amérique centrale contre des défenseuses des droits humains.

Pour Melania Chiponda, conseillère en matière de justice climatique et sur les questions liées au genre du Réseau de développement et de communication des femmes africaines (FEMNET), un réseau panafricain féministe et basé sur l’adhésion, dont le siège est à Nairobi, les attaques contre les femmes défendant la terre et l’environnement ont augmenté en raison des changements climatiques et de la pandémie de COVID-19.

« Les cas passent inaperçus, ne sont pas signalés, et s’ils le sont, les auteurs ne sont pas poursuivis », a-t-elle déclaré. « Lorsque les femmes contestent la destruction de l’environnement, la pollution et la dépossession, elles sortent de leurs rôles traditionnels pour contester le pouvoir injuste qui est entre les mains d’institutions politiques, économiques, sociales et culturelles ; et la société riposte en commettant des violences contre les femmes. »

Comment protéger des femmes et des filles contre la violence

Michelle Bachelet a formulé des recommandations pour prévenir et éliminer la violence contre les femmes et les filles due aux changements climatiques, notamment en reconnaissant que les changements climatiques et la violence contre les femmes sont intrinsèquement liés.

« Nous ne pouvons laisser personne de côté, y compris les femmes autochtones, les femmes d’ascendance africaine, les femmes roms, les femmes issues de minorités religieuses, les femmes handicapées et les femmes LGBTIQ+ », a-t-elle déclaré.

Les États doivent donner aux femmes les moyens de se préparer aux catastrophes et de trouver d’autres moyens de subsistance si elles sont confrontées à une crise climatique, a-t-elle ajouté. En outre, les États doivent demander des comptes aux auteurs de violences fondées sur le genre, ne permettre aucune impunité et prendre des mesures urgentes pour respecter et protéger les femmes et les filles.

La Haute-Commissaire a également souligné qu’il est nécessaire de garantir aux femmes un rôle de premier plan et leur pleine participation sur un pied d’égalité aux débats sur les questions climatiques.

« Nous avons besoin de leur voix – et de leur direction – pour nous montrer le bon chemin », a-t-elle déclaré.

* Le nom de famille a été omis par mesure de protection.