Une militante écologiste sud-africaine exige des pratiques commerciales responsables durant la COVID-19
29 décembre 2020
Margaret Ghogha Molomo est une militante écologiste originaire du village de Masodi, à Mokopane, dans la province de Limpopo en Afrique du Sud. Elle est vice-présidente du réseau sud-africain Mining and Environmental Justice Community Network of South Africa (MEJCON-SA) et coordinatrice du Kopano Formation Committee, une organisation locale.
Elle se bat notamment contre les sociétés minières destructrices qui violent le droit constitutionnel à un environnement sain. Elle travaille également en étroite collaboration avec les femmes dans le cadre de la culture vivrière. En outre, sa communauté étant attachée à ses traditions, elle aide à mettre en œuvre plusieurs activités culturelles au cours de l’année, en particulier celles menées par des femmes.
La communauté de Mokopane se bat depuis très longtemps contre une grande exploitation minière de platine, qui fonctionne sans aucune consultation avec la communauté. Cette mine a également été implantée sur des terres sans qu’elles aient été converties de zones agricoles en zones minières. Les sociétés minières ont également voulu exhumer certaines tombes appartenant à la communauté sans consulter cette dernière.
« Nous nous sommes battus avec acharnement mais avec succès contre la mine sur ces points », a déclaré la militante. « La communauté continue de se battre contre la mine en lançant des appels et des procédures judiciaires pour s’assurer qu’elle respecte non seulement ses obligations environnementales mais aussi ses responsabilités sociales envers la communauté. »
La COVID-19 a considérablement affecté le travail de Mme Ghogha Molomo, qui nécessite en grande partie la liberté d’association et de circulation pour mobiliser et éduquer sa communauté. En raison de la pandémie, elle a eu du mal à mener ses activités de manière virtuelle. Par ailleurs, sa communauté vit dans des zones rurales profondes où la connectivité a toujours été un problème. La plupart de ses membres ne disposent pas des moyens de communication nécessaires pour assurer leur inclusion et leur participation aux processus et aux actions décisives avec les sociétés minières et le Ministère sud-africain des ressources minérales et de l’énergie.
« La participation des femmes, même dans des circonstances normales, a toujours été un défi dans les villages traditionnels où les systèmes culturels passent sous silence et ignorent la voix des femmes », souligne la militante. « Cette exclusion est désormais amplifiée par les nouvelles exigences en matière de communication imposées par la pandémie. »
En outre, en raison des restrictions liées aux déplacements, les femmes ne peuvent pas facilement poursuivre leurs activités quotidiennes de première nécessité, comme aller chercher du bois et de l’eau pour cuisiner et se chauffer pendant l’hiver. Elles ne peuvent pas non plus se rendre en ville pour vendre leurs récoltes afin d’obtenir un revenu pour leur famille.
« D’importants rituels culturels, comme le déplacement des femmes vers les montagnes pour leurs rites d’initiation annuels, la collecte d’herbes pour le rituel de la pluie et la visite des cimetières ont tous dû être suspendus à cause de la pandémie », explique Margaret Ghogha Molomo. « Ces rituels sont importants pour le bien-être psychologique et spirituel de toute la communauté, mais surtout pour le bien-être des femmes. »
Sa communauté s’est battue pour la protection des principaux sites patrimoniaux contre les exploitations minières et la pandémie est un nouvel obstacle qui les empêche d’exercer leurs droits culturels.
Elle craint également que la mine contre laquelle elle et son organisation se battent ne profite des restrictions pour passer outre les autorisations et les lois environnementales. Son organisation prévoyait d’organiser une manifestation pour dénoncer les manquements de la société minière, mais elle a dû être reportée en raison des mesures de confinement.
Margaret Ghogha Molomo a souligné que les femmes ont un certain nombre de responsabilités immédiates envers leur famille et leur communauté. Selon elle, la pandémie a encore alourdi le fardeau porté par les femmes, en particulier celles qui vivent dans les zones minières.
« Les femmes sont généralement les plus touchées par les impacts environnementaux négatifs des exploitations minières qui ne respectent pas les lois : elles doivent s’occuper des membres de leur famille qui tombent malades à cause de la contamination de l’air et de l’eau, elles doivent parcourir de longues distances à pied pour aller chercher de l’eau car les mines ont asséché les trous de forage voisins, et elles doivent nettoyer sans cesse la poussière provenant des mines dans leur maison », dit-elle.
« Tout ce que veut la communauté, c’est que la mine se contente de respecter la loi. L’existence d’une mine au sein d’une communauté menace inévitablement la vie de ses membres. Toute non-conformité est simplement une violation directe du droit constitutionnel à la vie de la population. »
Le témoignage de Margaret Ghogha Molomo fait partie d’un recueil relatant l’histoire de plusieurs défenseuses africaines des droits humains intitulé On the frontlines: Defending rights in the time of COVID-19*. Cette publication, conçue par les bureaux régionaux du HCDH pour l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe, met en lumière le travail de ces défenseuses pendant la pandémie et fournit des informations sur le programme de relèvement à la suite de la COVID-19 et l’élaboration de politiques pour les défenseuses des droits humains.
Avertissement : les idées, informations et opinions exprimées dans le présent article sont celles des personnes y figurant ; elles ne reflètent pas nécessairement la politique ou la position officielle du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.
29 décembre 2020