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Déclarations Procédures spéciales

Déclaration de fin de mission Des Experts de l'ONU appellent des garanties pour la non-régression et l'avancement des droits des femmes en Tunisie

11 Janvier 2013

La Tunisie, en ce moment historique, est engagée dans la négociation des nouveaux fondements de son État-nation. Le Groupe de Travail des Nations Unies sur la discrimination contre les femmes dans la législation et dans la pratique est impressionné par l'engagement à grande échelle des citoyens, hommes et femmes, à travers des mécanismes officiels ainsi que dans les rues, dans le cadre de ce processus de débat national. Il note, cependant, que cette participation importante à la vie publique et politique se déroule dans un climat d'insécurité, vu les attaques contre la liberté de parole et  d’expression publiques, y compris la stigmatisation des femmes qui lèvent leur voix.

Il demande à l'État de s'acquitter de ses obligations en matière de droits de l'homme en protégeant efficacement les droits et libertés individuelles, notamment en s'assurant que tout le monde dispose d’un espace pour pouvoir participer librement et en toute sécurité dans tous les aspects de la vie politique et publique. Il reconnaît que, même s'il existe un consensus sur un certain nombre de questions, des divergences dans les points de vue persistent qui, dans l’absence d’un espace de dialogue respectable et démocratique, peuvent polariser la société et potentiellement entraver le progrès dans le domaine des droits humains des femmes.

Le Groupe de Travail des Nations unies sur la discrimination contre les femmes dans la législation et dans la pratique,  représenté par Kamala Chandrakirana et Eleonora Zielinska, s’est intéressé à la participation des femmes à la vie publique et politique, avec un intérêt particulier à la rédaction de la Constitution. Au cours de sa mission de cinq jours, la délégation a eu des discussions constructives avec les autorités gouvernementales et locales à Tunis et à Jendouba, avec des membres de l'Assemblée Nationale Constituante, l’Institution Nationale des Droits de l'Homme, les organisations nationales et locales de la société civile, les institutions religieuses, des experts constitutionnels, des universitaires et des représentants des agences des Nations Unies.

Le Groupe de travail reconnait que la nouvelle Constitution est considérée comme un moyen de remédier à des injustices et des inégalités dans le passé, garantir  les gains existants et faire progresser la justice, la démocratie et les droits de l'homme, y compris les droits des femmes en Tunisie.

Tout en notant que certaines améliorations ont été apportées au projet actuel de la Constitution, tel que notamment l'abrogation du rôle des femmes en tant que «complémentaire à celui des hommes dans la famille » et l'introduction d'un article sur l'élimination de la violence contre les femmes, le Groupe de travail insiste sur la nécessité de renforcer les dispositions constitutionnelles relatives à l'égalité des sexes et la non-discrimination qui ouvriront la voie à des futures réformes législatives. Il reste préoccupé par la persistance de lacunes et d'ambiguïtés qui, si elles ne sont  pas retirées,  pourraient compromettre la protection des droits des femmes et le principe de l'égalité des sexes.

Le projet actuel de la Constitution ne parvient pas à se référer aux obligations internationales relatives aux droits de l'homme que la Tunisie s’est engagé à respecter. En outre, ce projet omet de mentionner l'universalité, l'indivisibilité et l'interdépendance des droits de l'homme, qui sont cruciaux pour s’assurer que les futures réformes ne menaceront pas les gains législatifs, en particulier ceux des droits des femmes.

Bien que l'égalité entre les hommes et les femmes est reconnue, l'interdiction de la discrimination, y compris sur la base du sexe, n'est pas articulé dans le deuxième projet de la nouvelle Constitution, ainsi on trouve également un manque de dispositions sur le droit à un recours.

Le Groupe de Travail s'inquiète du fait que ce projet ne précise pas les sphères de la vie dans les quelles le droit à l'égalité est garanti, c'est à dire, publique et privée. En ce qui concerne les droits des femmes, en particulier, il n y a aucune précision concernant les différents droits, à savoir les droits civils et politiques ainsi que les droits économiques, sociaux et culturels. Reconnaissant les efforts nécessaires pour atteindre la parité entre les hommes et les femmes pendant les élections de 2011, le Groupe de Travail recommande que la Constitution prévoit l'adoption de mesures temporaires spéciales visant à accélérer la participation accrue des femmes dans toutes les sphères de la vie.

Une telle inclusion aurait aussi l'avantage de clarifier la nouvelle disposition sur l'égalité des chances entre les hommes et les femmes.

Au niveau de la conception des institutions, et tout en notant la mise en place d'un certain nombre de pouvoirs constitutionnels, le Groupe de Travail note qu’aucun mécanisme n'est prévu pour assurer le suivi du respect de l'égalité des femmes et l'élimination de la discrimination à leur égard en Tunisie. A cet égard, il souligne l'importance d'établir l'exigence explicite de la parité hommes-femmes et l’égalité  entre les sexes au niveau de chaque autorité constitutionnelle et propose de considérer la mise en place d'une autorité constitutionnelle spécialisée dans les questions de l'égalité entre les sexes.

Tout en étant assuré par le gouvernement qu'il est à l'étape finale de retirer toutes les réserves à la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, y compris la déclaration générale, le Groupe de Travail a appris que cette question a été portée à l'Assemblée Nationale Constituante (ANC) pour discussion. Elle appelle l’ANC à achever rapidement le processus au niveau national et international.

Les femmes rurales doivent faire partie intégrante des réformes historiques que connaît le pays. Quotidiennement, les femmes rurales travaillent à l’extérieur comme travailleurs occasionnels dans les domaines de l'agriculture ou comme domestiques dans des maisons privées, acceptant des conditions de travail déplorables et dégradantes, avec des salaires très bas ou sans rémunération aucune. Pour les jeunes, en particulier les femmes, l'avenir demeure incertain puisque le chômage les touche d’une manière disproportionnée indépendamment de leurs  niveau d’éducation  élevé. Les femmes victimes de violations des droits de l'homme dans le passé commencent à s'organiser et à faire entendre leurs voies et histoires. Sans mesures spéciales en réponse à la marginalisation de ces femmes en particulier, la Tunisie ne sera pas  capable de réaliser pleinement ses propres aspirations révolutionnaires de dignité, liberté et justice. Le Groupe de Travail encourage le gouvernement, au niveau central, régional et local, ainsi que les organisations de la société civile à atteindre ces femmes en ce moment critique pour améliorer leurs capacités comme citoyennes à part entière qui ont le droit de participer pleinement à la politique et à la vie publique de leur pays.

Enfin, le Groupe de Travail tient à remercier le Gouvernement pour sa coopération avant et pendant la visite et tous les interlocuteurs pour leur temps et leur ouverture pendant les discussions des questions liées à son mandat.

Le Groupe de Travail présentera ses conclusions et recommandations finales issues de sa visite dans son rapport au Conseil des Droits de l'Homme en Juin 2013.
FIN

Pour des renseignements supplémentaires sur le Groupe de travail, connectez-vous sur : http://www.ohchr.org/EN/Issues/Women/WGWomen/Pages/WGWomenIndex.aspx

Page du Haut Commissariat aux Droits de l’Homme sur la Tunisie:
http://www.ohchr.org/EN/Countries/MENARegion/Pages/TNIndex.aspx

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