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Déclarations Haut-Commissariat aux droits de l’homme

Déclaration de la Haute Commissaire aux droits de l'homme sur la situation au Kosovo

09 Juin 1998



HR/98/36
9 juin 1998


Ci-après le texte d’une déclaration que la Haute Commissaire aux droits de l’homme, Mme Mary Robinson, a publiée aujourd’hui sur la situation au Kosovo:

“Je suis profondément consternée par la persistance de la violence dans la province du Kosovo en République fédérative de Yougoslavie. Au cours de ce dernier mois, plus de 130 personnes ont été tuées lors d’incidents violents, principalement dans la région autour de Decani et de Djakovica. Pour les quatre derniers jours du mois de mai seulement, il est fait état de 37 personnes tuées. D’intenses affrontements armés ont forcé des dizaines de milliers de personnes à quitter leurs foyers. La plupart d’entre elles ont cherché refuge dans les régions voisines en Yougoslavie où elles sont secourues par des proches, des organisations internationales ou des organisations nationales pour réfugiés dont les ressources ont déjà été utilisées au maximum. D’autres ont fui vers l’Albanie.

Le Bureau du Haut Commissariat aux droits de l’homme en République fédérative de Yougoslavie indique que la situation humanitaire et des droits de l’homme est grave et en continuelle détérioration. Bien que mon personnel sur le terrain ait été en mesure de recueillir des informations de première main émanant de personnes qui ont fui les violences, le Bureau du Haut Commissariat aux droits de l’homme constate que les zones les plus sévèrement affectées par les affrontements armés restent inaccessibles, depuis des semaines, aux institutions internationales. Le week-end dernier, des responsables yougoslaves ont assuré que les organisations humanitaires seraient autorisées à pénétrer dans les zones affectées. Pour autant, ces organisations affirment qu’elles continuent d’être refoulées par la police.

Le Bureau du Haut Commissariat aux droits de l’homme a reçu des informations faisant état d’exécutions arbitraires, de bombardements de villages par les forces de police, ainsi que d’attaques menées par des groupes albanais armés contre la police et l’armée. Le conflit s’est étendu à la frontière serbo-albanaise et, cette semaine, des sources gouvernementales yougoslaves ont, pour la première fois, fait état d’affrontements avec des groupes armés dont le Gouvernement assure qu’ils ont pénétré le territoire de la République fédérative de Yougoslavie à partir de l’ex-République yougoslave de Macédoine. Je suis préoccupée par le fait que cette violence se déchaîne dans une région où près de 47% de la population a moins de 18 ans.

Les informations faisant état de violations des droits de l’homme incluant des arrestations arbitraires, des enlèvements et des disparitions, sont chaque jour plus nombreuses. Après l’enlèvement par des groupes d’Albanais armés, il y a trois semaines, de plusieurs officiers de police serbes, le Bureau du Haut Commissariat aux droits de l’homme apprenait que la police serbe aurait persuadé les dirigeants de la communauté albanaise du Kosovo de faire office de médiateur pour obtenir la libération de ces personnes. Lorsqu’il s’est avéré que la médiation n’était pas probante, la police serbe a attendu deux semaines avant d’arrêter les civils albanais qu’elle a détenus sans charge pour les accuser ensuite d’activité contre l’Etat. Je suis préoccupée par le fait que les autorités serbes n’aient pas répondu aux demandes de renseignements qui leur ont été adressées par mon bureau en ce qui concerne le sort les personnes qui seraient détenues par la police serbe pas plus qu’elles n’ont répondu aux demandes de clarification sur les informations qui ont circulé s’agissant du sort des officiers de police serbes qui auraient été enlevés.

Je me réjouis du nouveau cadre de dialogue pour traiter des problèmes au Kosovo mais,
malheureusement, il n’y a pas encore eu de résultats positifs à ce jour. Je demande instamment aux autorités de la République fédérative de Yougoslavie et de la République de Serbie, ainsi qu’aux dirigeants de la communauté albanaise du Kosovo, de briser la spirale de la violence et d’épargner de nouvelles souffrances à la population. La crise des droits de l’homme au Kosovo, même si elle fait aujourd’hui les gros titres, était en gestation depuis plusieurs années. Ses causes et ses conséquences doivent être traitées simultanément et, pour les résoudre, l’accès à une information libre et sans entrave est essentiel.

Pour servir cet objectif, j’en appelle une fois de plus au Gouvernement de la République fédérative de Yougoslavie pour qu’il autorise le Bureau du Haut Commissariat aux droits de l’homme à établir une présence permanente à Pristina.”

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