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Déclarations

ASSEZ DE PROMESSES, LES 800 MILLIONS DE PERSONNES VICTIMES DE LA FAIM ONT BESOIN DE MESURES CONCRETES, SOMME LE SECRETAIRE GENERAL AU SOMMET DE ROME

10 Juin 2002


SG/SM/8265
10 juin 2002
 
 

Pour lui, il n’y a plus de temps à perdre si l’on veut réaliser l’Objectif de développement du Millénaire de réduire la pauvreté de moitié d’ici à 2015
 
 
      On trouvera ci-après le texte de l’allocution prononcée par le Secrétaire général, à l’occasion de l’ouverture du Sommet alimentaire mondial aujourd’hui à Rome :
 
      Lors du Sommet mondial de l’alimentation qui s’est tenu ici même, à Rome, en 1996, la communauté internationale a fixé l’objectif de réduire de moitié, d’ici à 2015, le nombre d’enfants, de femmes et d’hommes souffrant de la faim. Près d’un tiers de cette période s’est déjà écoulé, et les progrès ont été beaucoup trop lents.
 
      Il n’y a plus de temps à perdre si nous voulons parvenir à notre objectif – qui est également un des Objectifs de développement du Millénaire, adoptés par les dirigeants mondiaux en septembre 2000.
 
      Plus de 800 millions de personnes dans le monde – dont 300 millions d’enfants – sont tenaillées par la faim au quotidien, et souffrent de maladies ou d’invalidités causées par la malnutrition. Près de 24 000 personnes, selon certaines estimations, meurent chaque jour en conséquence.
 
      Il est donc inutile de faire aujourd’hui de nouvelles promesses. Les participants à ce Sommet doivent donner un nouvel espoir à ces 800 millions de personnes en adoptant des mesures concrètes.
 
      On ne manque pas de nourriture sur notre planète. La production céréalière mondiale est, à elle seule, largement suffisante pour satisfaire les besoins nutritionnels minimaux de chaque enfant, de chaque femme et de chaque homme. Toutefois, alors que certains pays produisent plus qu’il n’est nécessaire pour nourrir leur population, d’autres pays ne sont pas dans la même situation, et beaucoup d’entre eux n’ont pas les moyens d’importer suffisamment de denrées alimentaires pour combler le déficit. Et, ce qui est encore plus honteux, la même situation existe à l’intérieur de certains pays. Il y a des pays qui ont largement de quoi nourrir leurs habitants, et qui néanmoins laissent beaucoup d’entre eux souffrir de la faim.
 
      La faim et la pauvreté sont étroitement liées. La pauvreté est perpétuée par la faim, car celle-ci empêche les personnes de réaliser leur potentiel et de contribuer au progrès de leur société. La faim rend les êtres humains plus vulnérables aux maladies. Elle les affaiblit et les laisse dans un état léthargique, réduisant ainsi leur capacité de travailler et de subvenir aux besoins des personnes à leur charge. Le même cycle dévastateur se répète de génération en génération et continuera à se répéter jusqu’à ce que nous prenions des mesures effectives pour le rompre.
 
      Nous devons rompre ce cycle, et réduire la faim et la pauvreté à long terme. Environ 70 % de ceux qui souffrent de la faim et de la pauvreté dans le monde en développement vivent dans les zones rurales. Beaucoup d’entre eux pratiquent l’agriculture de subsistance ou sont des paysans sans terre qui offrent leurs services et qui dépendent directement ou indirectement de l’agriculture pour leurs moyens de subsistance.
 
      Nous devons améliorer la productivité agricole et le niveau de vie dans les campagnes en aidant les petits agriculteurs et les collectivités rurales à accroître leurs revenus, et à améliorer la quantité et la qualité des aliments disponibles localement. À cette fin, nous devons leur donner un plus grand accès à la terre, au crédit, et aux techniques et connaissances qui les aideraient à cultiver des plantes plus résistantes et à assurer la sécurité sanitaire des produits de l’agriculture et de l’élevage.
 
      Cependant, le succès dépendra également de progrès au-delà de la ferme, tels que des améliorations des services de santé et d’éducation et de l’infrastructure rurale, qui comprend les routes, l’approvisionnement en eau pour l’irrigation et la gestion de la sécurité alimentaire. De telles améliorations contribueraient aussi, dans une large mesure, à stimuler les investissements du secteur privé dans des activités en aval, telles que le traitement et la commercialisation des produits alimentaires.
 
      Nous devons également accorder une place centrale aux femmes, qui jouent un rôle crucial dans l’agriculture des pays en développement. Elles interviennent à chaque stade de la production alimentaire, travaillant de bien plus longues heures que les hommes, et leur rôle est essentiel pour assurer les vivres à leur famille.
 
      Des stratégies de développement agricole et rural durable sont particulièrement nécessaires en Afrique, où près de 200 millions de personnes – soit 28 % de la population – souffrent de faim chronique. En fait, à l’heure actuelle – pour la première fois depuis une décennie –, plusieurs pays d’Afrique australe sont menacés de famine pure et simple au cours des prochains mois.
 
      Nous devons donc utiliser toute notre énergie créative pour aider l’Afrique à lutter contre la faim. Le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique, lancé et dirigé par les pays africains, doit être appuyé en tant qu’outil potentiellement important dans cette lutte.
 
      Nous devons également remplir la promesse faite à la réunion de l’Organisation mondiale du commerce qui s’est tenue en novembre à Doha, et veiller à ce que la nouvelle série de négociations commerciales permette d’éliminer les obstacles aux importations de produits alimentaires des pays en développement. Par exemple, les droits de douane qui frappent les produits alimentaires transformés, comme le chocolat, ne permettent pas aux industries de transformation alimentaire des pays en développement d’être compétitives.
 
      Nous devons également évaluer attentivement l’impact des subventions qui sont actuellement octroyées aux producteurs dans les pays riches. En faisant baisser les prix des denrées alimentaires dans les pays les plus pauvres, elles peuvent contribuer à atténuer la faim dans certains cas et à court terme, mais l’écoulement à bas prix des excédents peut également avoir des effets dévastateurs à long terme – qui vont du manque d’incitations à la production nationale jusqu’au chômage – tout en empêchant les pays en développement d’être compétitifs sur les marchés mondiaux.
 
      Toutefois, même si les marchés des pays développés étaient plus ouverts, les pays en développement auraient toujours besoin d’aide pour tirer parti de ces nouvelles opportunités, surtout dans le secteur agricole. L’application de certaines normes internationales ne peut pas se faire sans une assistance technique et des investissements supplémentaires.
 
      La lutte contre la faim dépend également de la gestion durable des ressources naturelles et des écosystèmes, qui contribuent à la production alimentaire. Avec l’augmentation de la population mondiale, qui devrait dépasser les 7 milliards d’ici à 2015, les pressions exercées sur l’environnement continueront à augmenter. Le défi de ces prochaines années consiste à produire en suffisance pour satisfaire les besoins alimentaires d’un milliard de personnes supplémentaires, tout en préservant la base de ressources naturelles dont dépend le bien-être des générations présentes et à venir.
 
      Cependant, les pauvres qui souffrent de la faim ont aussi besoin immédiatement d’une assistance directe. L’aide alimentaire peut faire une grande différence – aussi bien dans les situations d’urgence que dans les situations de faim chronique. Un appui nutritionnel direct aux femmes enceintes et allaitant permet à leurs bébés de devenir des adultes en bonne santé. Les programmes d’alimentation scolaire permettent non seulement de nourrir des enfants qui ont faim, mais également de faire augmenter la fréquentation scolaire – et les études montrent que des personnes éduquées sont mieux en mesure de sortir du cycle de la pauvreté et de la faim.
 
      Si nous voulons inverser la tendance actuelle et réduire de moitié, d’ici à 2015, le nombre de personnes qui souffrent de la faim, nous devons appliquer une approche globale et cohérente qui traite des aspects multiples de la faim, en ayant comme objectifs simultanés un accès plus large à l’alimentation et le développement agricole et rural. Nous avons besoin d’un programme de lutte contre la faim qui pourrait devenir un cadre commun pour la mobilisation des capacités mondiales et nationales dans ce domaine.
 
      Nous savons que la lutte contre la faim s’inscrit dans une logique économique et sociale. C’est une étape essentielle pour parvenir à tous les Objectifs de développement du Millénaire. Il est donc approprié que le présent Sommet se tienne au milieu d’un cycle crucial de conférences qui visent à nous aider à améliorer la vie des populations dans le monde entier – depuis le commerce à Doha, en passant par le financement du développement à Monterrey, jusqu’au développement durable à Johannesburg.
 
      La faim est une des pires violations de la dignité humaine. Dans un monde d’abondance, il est à notre portée d’éliminer la faim. Un échec dans ce domaine devrait nous remplir de honte. Nous ne sommes plus à l’heure de faire des promesses. Nous sommes à l’heure d’agir. Le moment est venu de faire ce que nous avons promis de faire depuis longtemps – éliminer la faim de la face de la terre.
 
 
  
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